Texte intégral
La semaine dernière, j'ai passé trente heures en immersion, à bord du Téméraire, l'un des quatre sous-marins nucléaires lanceurs d'engins de la Marine nationale. Dans le submersible, cent dix sous-mariniers veillent en permanence sur notre pays. Coupés du monde extérieur, ils partent pour des missions pouvant atteindre 90 jours.
Sous l'eau, 365 jours par an, 24 heures sur 24, nos sous-marins sont prêts à lancer la riposte nucléaire depuis n'importe quel océan, si notre territoire était menacé. Cette menace terrible permet de décourager ceux qui voudraient remettre en cause la survie de notre pays. La force océanique stratégique est le maillon central de notre stratégie de dissuasion, qui assure la sécurité et l'indépendance de la France.
J'ai tenu à vivre cette expérience peu courante. Pour mieux connaître ce qui est en jeu lorsque les parlementaires votent le budget de la Défense. Et, surtout, pour témoigner à nos soldats le soutien et la reconnaissance de la nation. À l'issue de cette visite, je voudrais livrer trois réflexions.
D'abord, en partageant la vie de ces hommes, j'ai éprouvé une grande fierté d'être français, d'appartenir à une communauté nationale dont certains membres ont choisi de consacrer une partie de leur vie pour garantir notre sécurité. Dans cette période de crise, alors que notre pays est en proie au doute, à la colère, voire à la violence, alors que la tentation de l'autodénigrement est courante, nous avons des motifs de fierté et de reconnaissance. J'aimerais que les Français le sachent davantage. La professionnalisation de notre armée a permis des avancées qu'il est hors de question de remettre en cause. Mais la fin u service national a eu un inconvénient : le lien indispensable entre la nation et son armée s'est distendu. Il est dans la mission des responsables politiques de rappeler son importance. Quand nos soldats sont à l'honneur, comme lorsqu'ils sont à la peine.
Ma deuxième réflexion est l'expression d'une autre reconnaissance. On l'a souvent dit, le propre d'un grand chef d'État, c'est d'être visionnaire. Au risque d'être banal, je veux redire combien Charles de Gaulle a eu l'audace de voir loin, notamment pour ce qui concerne la défense nationale. Celui qui avait écrit, dès 1934, sur l'armée de métier et le rôle décisif des blindés a compris très tôt que l'indépendance de notre pays passait par la maîtrise du nucléaire.
Juste après Hiroshima, en 1945, il crée le Commissariat pour l'énergie atomique. Dès son retour au pouvoir, en 1958, la constitution d'une force de frappe nucléaire devient une priorité absolue. Grâce à cet effort continu, le président de la République peut aujourd'hui mobiliser à tout instant le feu nucléaire pour la défense de notre pays. Cette indépendance est une immense chance. C'est aussi une responsabilité considérable. Nous ne pouvons pas la gâcher. Comme tous les Français, j'y suis extrêmement attaché. Après mûre réflexion, j'ai soutenu avec détermination la décision du président de la République sur la participation de la France au commandement intégré de l'Otan. Parce que je considère qu'elle répond à l'intérêt supérieur de notre pays. En aucun cas, elle ne remet en cause notre indépendance.
Au XX siècle, le général de Gaulle a su voir loin. Et nous, comment voulons-nous aborder l'avenir de notre défense et de notre sécurité pour ce XXI siècle ? C'est la troisième réflexion que je voudrais partager. Comment faire face aux risques nouveaux qui peuvent frapper notre pays et n'ont plus rien à voir avec les menaces de la guerre froide : terrorisme, attaques informatiques, prolifération d'armes de destruction massive, déstabilisation de régions clés en ressources énergétiques ?
Après l'élaboration du livre blanc sur la sécurité et la défense nationale, la réflexion se poursuit sur ces questions avec le débat sur la loi de programmation militaire pour 2009-2014. Alors que le « domaine réservé » n'existe plus depuis la réforme constitutionnelle, il faut que chaque parlementaire s'empare de ce sujet et qu'à travers eux tous les Français aient conscience des choix que nous devons faire cette année pour assurer l'indépendance de notre pays, la sécurité de l'Europe et contribuer à la paix dans le monde.
La décision française de rejoindre la cabine de pilotage de l'Otan ne peut pas être une fin en soi. Elle doit s'accompagner d'un effort redoublé pour faire valoir les vues françaises sur ce que doit devenir l'Otan demain et pour passer à la vitesse supérieure sur la défense européenne. Je souhaite ainsi la constitution d'un commandement militaire au niveau européen. Tout en laissant leur liberté aux États membres, il permettrait aux armées de l'Union européenne de travailler davantage ensemble au quotidien. Il donnerait corps à la politique de défense européenne et aiderait le Vieux Continent à peser efficacement au sein de l'Alliance atlantique.
Je considère par ailleurs que l'Otan ne doit pas se disperser, ni par un élargissement désordonné qui provoquerait une dilution du principe de solidarité entre ses membres ni par la tentation d'interventions à tous les niveaux : opérations militaires, lutte contre le terrorisme, maintien de la paix, reconstruction... Le coeur de l'Alliance, c'est le principe de l'assistance mutuelle en cas d'agression d'un des membres. Plus on s'élargit, plus on le fragilise. Mieux vaut des partenariats, notamment à l'est de l'Europe, que des adhésions maladroites. Ne laissons pas l'Otan redevenir un instrument contre la Russie. Au XXI siècle, les principales menaces ne sont plus là.
Enfin, la France doit rester fidèle à son attachement au multilatéralisme et veiller à ce que l'Otan ne vienne pas concurrencer l'ONU. Lorsqu'elle s'éloigne de sa vocation initiale de défense directe des membres de l'Alliance, l'Otan doit surtout agir comme un appui opérationnel pour l'ONU dans les phases de combat.
C'est l'ONU qui reste garante de la légitimité d'une intervention. Et qui, dans la mesure du possible, doit prendre en charge la phase de stabilisation et de reconstruction qui suit une opération militaire.
2009 est une année décisive pour la défense nationale. Les turbulences de la crise ne doivent pas nous faire perdre de vue ces enjeux à long terme. Elles ne doivent pas nous conduire à baisser la garde. La sécurité de demain se décide aujourd'hui.
Source http://www.ump.assemblee-nationale.fr, le 5 mai 2009
Sous l'eau, 365 jours par an, 24 heures sur 24, nos sous-marins sont prêts à lancer la riposte nucléaire depuis n'importe quel océan, si notre territoire était menacé. Cette menace terrible permet de décourager ceux qui voudraient remettre en cause la survie de notre pays. La force océanique stratégique est le maillon central de notre stratégie de dissuasion, qui assure la sécurité et l'indépendance de la France.
J'ai tenu à vivre cette expérience peu courante. Pour mieux connaître ce qui est en jeu lorsque les parlementaires votent le budget de la Défense. Et, surtout, pour témoigner à nos soldats le soutien et la reconnaissance de la nation. À l'issue de cette visite, je voudrais livrer trois réflexions.
D'abord, en partageant la vie de ces hommes, j'ai éprouvé une grande fierté d'être français, d'appartenir à une communauté nationale dont certains membres ont choisi de consacrer une partie de leur vie pour garantir notre sécurité. Dans cette période de crise, alors que notre pays est en proie au doute, à la colère, voire à la violence, alors que la tentation de l'autodénigrement est courante, nous avons des motifs de fierté et de reconnaissance. J'aimerais que les Français le sachent davantage. La professionnalisation de notre armée a permis des avancées qu'il est hors de question de remettre en cause. Mais la fin u service national a eu un inconvénient : le lien indispensable entre la nation et son armée s'est distendu. Il est dans la mission des responsables politiques de rappeler son importance. Quand nos soldats sont à l'honneur, comme lorsqu'ils sont à la peine.
Ma deuxième réflexion est l'expression d'une autre reconnaissance. On l'a souvent dit, le propre d'un grand chef d'État, c'est d'être visionnaire. Au risque d'être banal, je veux redire combien Charles de Gaulle a eu l'audace de voir loin, notamment pour ce qui concerne la défense nationale. Celui qui avait écrit, dès 1934, sur l'armée de métier et le rôle décisif des blindés a compris très tôt que l'indépendance de notre pays passait par la maîtrise du nucléaire.
Juste après Hiroshima, en 1945, il crée le Commissariat pour l'énergie atomique. Dès son retour au pouvoir, en 1958, la constitution d'une force de frappe nucléaire devient une priorité absolue. Grâce à cet effort continu, le président de la République peut aujourd'hui mobiliser à tout instant le feu nucléaire pour la défense de notre pays. Cette indépendance est une immense chance. C'est aussi une responsabilité considérable. Nous ne pouvons pas la gâcher. Comme tous les Français, j'y suis extrêmement attaché. Après mûre réflexion, j'ai soutenu avec détermination la décision du président de la République sur la participation de la France au commandement intégré de l'Otan. Parce que je considère qu'elle répond à l'intérêt supérieur de notre pays. En aucun cas, elle ne remet en cause notre indépendance.
Au XX siècle, le général de Gaulle a su voir loin. Et nous, comment voulons-nous aborder l'avenir de notre défense et de notre sécurité pour ce XXI siècle ? C'est la troisième réflexion que je voudrais partager. Comment faire face aux risques nouveaux qui peuvent frapper notre pays et n'ont plus rien à voir avec les menaces de la guerre froide : terrorisme, attaques informatiques, prolifération d'armes de destruction massive, déstabilisation de régions clés en ressources énergétiques ?
Après l'élaboration du livre blanc sur la sécurité et la défense nationale, la réflexion se poursuit sur ces questions avec le débat sur la loi de programmation militaire pour 2009-2014. Alors que le « domaine réservé » n'existe plus depuis la réforme constitutionnelle, il faut que chaque parlementaire s'empare de ce sujet et qu'à travers eux tous les Français aient conscience des choix que nous devons faire cette année pour assurer l'indépendance de notre pays, la sécurité de l'Europe et contribuer à la paix dans le monde.
La décision française de rejoindre la cabine de pilotage de l'Otan ne peut pas être une fin en soi. Elle doit s'accompagner d'un effort redoublé pour faire valoir les vues françaises sur ce que doit devenir l'Otan demain et pour passer à la vitesse supérieure sur la défense européenne. Je souhaite ainsi la constitution d'un commandement militaire au niveau européen. Tout en laissant leur liberté aux États membres, il permettrait aux armées de l'Union européenne de travailler davantage ensemble au quotidien. Il donnerait corps à la politique de défense européenne et aiderait le Vieux Continent à peser efficacement au sein de l'Alliance atlantique.
Je considère par ailleurs que l'Otan ne doit pas se disperser, ni par un élargissement désordonné qui provoquerait une dilution du principe de solidarité entre ses membres ni par la tentation d'interventions à tous les niveaux : opérations militaires, lutte contre le terrorisme, maintien de la paix, reconstruction... Le coeur de l'Alliance, c'est le principe de l'assistance mutuelle en cas d'agression d'un des membres. Plus on s'élargit, plus on le fragilise. Mieux vaut des partenariats, notamment à l'est de l'Europe, que des adhésions maladroites. Ne laissons pas l'Otan redevenir un instrument contre la Russie. Au XXI siècle, les principales menaces ne sont plus là.
Enfin, la France doit rester fidèle à son attachement au multilatéralisme et veiller à ce que l'Otan ne vienne pas concurrencer l'ONU. Lorsqu'elle s'éloigne de sa vocation initiale de défense directe des membres de l'Alliance, l'Otan doit surtout agir comme un appui opérationnel pour l'ONU dans les phases de combat.
C'est l'ONU qui reste garante de la légitimité d'une intervention. Et qui, dans la mesure du possible, doit prendre en charge la phase de stabilisation et de reconstruction qui suit une opération militaire.
2009 est une année décisive pour la défense nationale. Les turbulences de la crise ne doivent pas nous faire perdre de vue ces enjeux à long terme. Elles ne doivent pas nous conduire à baisser la garde. La sécurité de demain se décide aujourd'hui.
Source http://www.ump.assemblee-nationale.fr, le 5 mai 2009