Texte intégral
J.-J. Bourdin.- N. Kosciusko-Morizet, bonjour. Ce bébé, c'est pour bientôt, là ?
Oui.
Dans quelques jours ?
Quelques jours.
Quelques jours ; bon. Parlons de la taxe carbone, cette fameuse taxe carbone. Savez-vous ce que j'entends chez les auditeurs de RMC ?
Dites.
"On va nous pomper 100 et on va nous rendre 100" ! Alors à quoi ça sert ?
Ca sert à rééquilibrer notre fiscalité en prenant en compte les enjeux environnementaux. Je vous explique : dans notre pays comme dans la plupart des pays développés, la fiscalité s'est construite sans tenir compte de l'environnement, et c'est très bizarre. C'est-à-dire que, on taxe le travail à travers l'impôt sur le revenu, à travers la taxe professionnelle, donc, de fait on taxe le travail, donc on taxe ce qu'on voudrait plus parce qu'on a besoin de plus d'emplois, et on ne taxe pas ou peu ce qu'on voudrait moins, qui est la pollution. Donc il s'agit juste de transférer la fiscalité ; il n'y aura pas un sou de plus pour l'Etat, ce n'est pas cela le sujet, il s'agit juste de transférer la fiscalité pour envoyer les bons signaux, pour dire à l'économie : on ne veut plus de travail, on veut moins de pollution.
On va entrer dans les détails, mais c'est une taxe, un impôt ou pas ? !
C'est un transfert. Moi je préfère le mot "contribution climat énergie", parce que taxe on a l'impression qu'on vous prend de l'argent et qu'on ne vous le rend pas. Non. C'est un transfert, vraiment, à l'intérieur du système, pour envoyer le signal qu'on veut plus de travail et moins de pollution.
X. Bertrand, mercredi dernier, à votre place, disait : "la taxe carbone ne sera pas un impôt de plus, je ne joue pas sur les mots". Deux jours après, je lis Le Figaro, toujours le même X. Bertrand, qui déclare, je cite : "nous serons dans le sens de l'histoire, je ne jouerai pas sur les mots - décidément, il ne joue vraiment pas sur les mots -, la contribution énergie est une taxe et je l'assume" !
Depuis le début, et ça date de 2007, il y a une confusion entre des mots taxe / carbone, parce qu'en fait, on a mis deux choses sous le mot. On a mis, à la fois, cette idée de transférer à l'intérieur du périmètre national de la fiscalité, depuis le travail vers la pollution qui, vous en conviendrez, une idée intelligente, et puis cette idée qu'aux frontières de l'Europe, un jour il faudrait taxer les produits qui viennent de pays qui n'appliquent pas le protocole de Kyoto. Et ça, évidemment, on ne leur rendrait pas l'argent.
Donc, vous êtes favorable à cette taxation des produits qui viennent de pays qui ne signent pas le protocole de Kyoto ?
Je pense que c'est indispensable.
C'est indispensable ?
C'est indispensable, soit on réussit à Copenhague, au mois de décembre, à mettre tout le monde dans le mouvement, et en particulier les pays émergents, soit, il y en a qui choisissent de rester en dehors du mouvement, et on ne peut pas poursuivre éternellement, nous, un système dans lequel on fait beaucoup d'efforts en faveur de l'environnement, et il y a des pays qui ne jouent pas le jeu. Le président de la République s'est engagé très fortement sur ce sujet.
Alors, pour compenser cette contribution, les idées, ça y est, petit à petit, le président de la République nous dira tout demain, mais petit à petit on commence à savoir ce qui va se passer. Donc, baisse de l'impôt sur le revenu, pour certains ; pour ceux qui ne paient pas d'impôts sur le revenu, c'est crédit d'impôts ; pour ceux qui habitent en zone rurale, la baisse de l'impôt sur le revenu sera un peu plus importante ; un peu plus importante aussi pour les agriculteurs, les pêcheurs. Enfin...c'est assez compliqué votre affaire, pardonnez-moi ? !
Comme vous l'avez dit, le président de la République dira tout demain.
Alors, qu'en savez-vous ?
Et ce sera d'un coup plus simple.
Que savez-vous, confiez-nous, confiez-nous ce que vous savez.
Non, ce que je sais, et c'est, me semble-t-il, de bon sens, c'est qu'il y a des personnes, il y a des catégories qui vont être plus touchées, et il s'agit de prendre cela en compte, et prendre en compte sur des critères qui sont transparents et qui sont légitimes. On peut penser à plein de critères, et ils ont été évoqués ici ou là. Il y a la question de la famille, par exemple, c'est vrai que quand on a une famille plus nombreuse, forcément, on consomme plus d'énergie. Et la question de la proximité avec les transports en commun, qui est vraiment une question importante, parce que ce transfert de fiscalité, il sert à faire évoluer nos comportements, il sert à nous intéresser à tout ce qui est transport alternatif, si vous voulez.
Donc, il faut que ce soit associé à une offre supérieure et meilleure de transport en commun ?
Pour qu'il y ait une incitation, il faut qu'il y ait une alternative.
Oui, et ce n'est pas toujours le cas.
Ce n'est pas toujours le cas, mais les alternatives par ailleurs sont en train d'être construites dans le cadre du Grenelle, c'est un ensemble.
J'habite Longjumeau, vous connaissez Longjumeau...
Vous habitez Longjumeau, vous avez la chance de bénéficier du RER C, pour lequel par ailleurs, il faudrait faire quelques investissements.
Ah ! Donc, ça, c'est le maire de Longjumeau qui parle...
Oui, là, on est très mobilisés sur le RER C.
...et qui dit au Gouvernement : il faut faire des investissements. Pas qu'au Gouvernement...
Je dis au Gouvernement, je dis au STIF et à la région, en l'occurrence. Parce que je ne trouve pas que la région mette toujours l'argent où il faut, notamment en faveur des habitants de la Grande couronne.
Mais à Longjumeau, vous n'êtes pas en zone rurale ?
Non.
Mais à côté de Longjumeau, peut-être à 10 km, on est en zone rurale ?
A 10 km de Longjumeau, vous pouvez être...
Alors, celui qui habite à 10 km de Longjumeau, il paiera moins d'impôts, enfin, il y aura une baisse d'impôts supérieure à celui qui habite à Longjumeau ?
Il faut que ça reste simple, selon un zonage, et puis par ailleurs, il nous revient, et c'est l'objet du Grenelle de l'environnement, d'accélérer tous les investissements sur les transports alternatifs dans les transports propres. Je vous donne un exemple dans ma circonscription : sur l'autoroute A 10, si vous habitez du côté de Brice ou Forges, dans le canton de Limours, vous pouvez laisser votre voiture ou votre vélo, monter par un ascenseur sécurisé sur l'autoroute, et là, vous avez un bus qui vient vous chercher, qui utilise l'autoroute pour vous emmener directement au RER à Massy.
Ca c'est très bien, c'est formidable.
C'est très bien, c'est l'utilisation des voies traditionnelles, normalement sur une autoroute vous roulez avec des voitures, pour des transports en commun.
Savez-vous qu'il y a une association, en parlant de vélo, qui demande la création d'une indemnité vélo qui serait versée par l'employeur à tous ceux, ou tous les salariés qui choisissent la bicyclette pour venir travailler, c'est une bonne idée ou pas ?
Je préfèrerais qu'on développe déjà toutes les possibilités vélo et la sécurité vélo, je trouve que ce serait...
Casque obligatoire ?
Le problème du casque obligatoire c'est que, vous savez, ça va... il y a un tas de gens qui du coup ne voudront plus. Je préfère la sécurité des voies elles-mêmes que le casque obligatoire, qui risque de détourner du vélo de fait, un certain public.
On va parler du grand emprunt, et surtout de ce que vous demandez, ce que vous voulez développer autour du grand emprunt, avec l'argent du grand emprunt.
Je ne demande pas, je propose. Vous me mettez dans une posture...
Oui, que vous proposez. Vous le demandez en même temps. Vous proposez mais en même temps vous proposez, vous dites : attendez, je lève le doigt, je suis là ! L'économie numérique, le développement du high-tech, c'est primordial pour l'avenir du pays.
Je le propose et même, nous proposons, puisque j'organise demain, à la demande du Premier ministre, un séminaire, mais interministériel, avec plusieurs nombreux collègues du Gouvernement seront là autour de la table, pour débattre de ce qui, dans le grand emprunt, sera légitime en matière de numérique. Avec deux objectifs : le premier, c'est de faire en sorte que le numérique ce soit vraiment pour tout le monde, pas de fracture numérique, ni fracture territoriale - on pense toujours fracture territoriale - ni fracture sociale, ni fracture générationnelle, tout le monde doit pouvoir bénéficier du numérique. Et un deuxième objectif qui est que, ça serve l'emploi et l'activité en France. Parce qu'il ne s'agit pas seulement de construire des autoroutes du numérique pour que tout le monde puisse avoir accès à Internet dans les meilleures conditions, mais que dessus il y circule des contenus qui sont créés ailleurs, avec des start-up qui se font ailleurs, avec des emplois de l'activité économique qui se développent ailleurs. Donc, il s'agit aussi qu'ils se développent chez nous.
Vous encouragez l'entreprise française, l'entreprise numérique française ?
Oui, l'entreprise, la création, l'innovation, l'entrée de plain pied dans le XXIème siècle.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 10 septembre 2009