Déclaration de M. Alain Juppé, ministre des affaires étrangères et européennes, en réponse à une question sur la brutalité de la répression en Libye et la perte de légitimité du colonel Kadhafi, Assemblée nationale, 2 mars 2011.

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Circonstance : Réponse d'Alain Juppé à une question d'actualité à l'Assemblée nationale, à Paris le 2 mars 2011

Texte intégral

Madame Hostalier, la crise que connaît aujourd'hui la Libye est d'une gravité exceptionnelle. Le colonel Kadhafi, en réprimant avec une extrême brutalité les mouvements populaires qui le mettent en cause, s'est disqualifié, si bien qu'il a perdu toute légitimité.
Je vous rappelle que les Nations unies ont adopté le principe de la responsabilité protégée selon lequel les gouvernements ont la responsabilité de protéger leur peuple. S'ils ne le font pas, la communauté internationale peut se substituer à eux.
C'est dans cet esprit que s'est développée une stratégie internationale pour faire pression sur le régime de Kadhafi avec l'adoption d'une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies sur la base d'une proposition de la France et du Royaume-Uni. Cette résolution prévoit non seulement des sanctions mais aussi la saisine du procureur de la Cour pénale internationale, ce qui constitue une première. L'Union européenne s'est jointe à cette démarche et va prendre elle-même des sanctions autonomes.
Faut-il aller plus loin et préparer une intervention militaire ? Nous ne le pensons pas dans le contexte actuel. Je vous demande d'ailleurs de réfléchir aux conséquences d'une éventuelle intervention de l'OTAN en Libye : elle pourrait ressouder contre le nord de la Méditerranée les opinions publiques et les peuples arabes. C'est la raison pour laquelle, ce matin, au conseil de l'Atlantique nord, nous avons fait part de notre réticence.
En revanche, il est possible de continuer à planifier une zone d'exclusion aérienne à condition qu'elle ne soit activée, cela va de soi - c'est le principe que suit toujours notre diplomatie - que sur une décision du Conseil de sécurité des Nations unies.
Enfin, et peut-être surtout dans l'immédiat, comme vous l'avez souligné, Madame la Députée, il y a la dimension humanitaire. Nous avons déjà prévu deux avions chargés de matériels médicaux et emmenant du personnel médical. Les convois sont en route vers Benghazi et nous sommes disponibles pour contribuer à l'évacuation des réfugiés égyptiens vers l'Égypte par la voie aérienne ou la voie maritime.
Je serai au Caire dimanche prochain pour manifester notre solidarité avec tous les peuples de la région.

Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 3 mars 2011