Déclaration de M. Gérard Longuet, ministre de la défense et des anciens combattants, sur le rôle de la Marine nationale dans la défense de la France, à bord du porte-avions Charles de Gaulle le 29 mars 2011.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Rencontre avec l'équipage du porte-avions Charle de Gaulle, le 29 mars 2011

Texte intégral

Je suis particulièrement heureux que ma première visite dans la marine nationale soit à bord du symbole de notre puissance maritime : le Charles de Gaulle.
J'ai tenu à venir aujourd'hui à la rencontre de l'équipage du bâtiment, du groupe aérien et de l'état-major de la conduite des forces, totalement mobilisés depuis plus d'une semaine et en ce moment même encore pour remporter l'opération Harmattan face aux troupes khadafistes.
La France a aujourd'hui l'une des marines les plus puissantes du monde, qui contribue à donner à notre pays son juste rang de puissance militaire.
Ce sont plus d'une trentaine de bâtiments et d'aéronefs qui sont, à ce jour, déployés par la marine nationale sur toutes les mers du globe.
Je crois à l'avenir de la marine, à la fois marine de guerre et marine d'Etat. L'océan et les rivages sont au premier plan de la mondialisation et de la globalisation et font de ces espaces des enjeux considérables.
La Méditerranée, au premier chef, ne doit pas redevenir la mer incertaine qu'elle a pu être jusqu'à la fin du XIXème siècle. C'est votre rôle d'en faire un espace de paix pérenne.
Cette reconnaissance se fonde sur des équipements et des technologies de premier plan dont le Charles de Gaulle avec ses aéronefs dont le redoutable RAFALE est la proue.
En activité 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, et bénéficiant de la liberté juridique des espaces maritimes dans le cadre de la convention de Montego Bay, le Charles de Gaulle peut aujourd'hui se déplacer sur tous les océans. En 10 ans, il a déjà parcouru l'équivalent de 15 tours du monde.
Instrument politique, diplomatique et militaire, il confère à notre pays un statut de puissance et une place privilégiée au sein de l'Union européenne et de l'OTAN. C'est aujourd'hui, et pour au moins les dix prochaines années, un outil unique et presque inégalé puisque seuls les Etats-Unis disposent aujourd'hui d'un tel outil [10 porte-avions].
Au côté de l'armée de l'air, il contribue, en ce moment même, et depuis plus d'une semaine, à ce que la France, en qualité de membre permanent du conseil de sécurité des Nations Unies, assume ses responsabilités et fait valoir ses positions en Libye.
Mais les bâtiments de guerre, aussi extraordinairement modernes soit-ils, ne sont rien sans les hommes et les femmes qui les conçoivent, les dirigent, et les entretiennent quotidiennement.
Fort de plus de 45 500 militaires et civils, la marine nationale est projetée en mission au cœur d'opérations extérieures aux quatre coins du monde : en Haïti, à Djibouti, dans le Golfe de Guinée.
Sur le Charles-de-Gaulle, vous êtes près de 2 000 militaires - 1 900 marins et 50 aviateurs de l'OVIA [organisme à vocation interarmées] Resco [recherche secours au combat] pour mener l'opération, avec toute la logistique et le soutien qu'elle induit, ici-même.
Tout particulièrement, je veux saluer votre engagement sur le théâtre libyen.
C'est une bataille contre le temps que vous avez su remporter.
En 3 jours, vous avez relevé le défi de la mobilisation, de la disponibilité opérationnelle, de l'armement et du positionnement. Trois jours : cette préparation exceptionnelle par sa rapidité et sa réactivité mérite d'être saluée.
Dans un monde incertain, en réponse à l'urgence de la survie d'une population prise pour cible par des chars, de l'artillerie ou des fantassins, je constate avec fierté la formidable préparation de nos armées, la réactivité de notre système et son haut niveau opérationnel.
C'est la parfaite complémentarité des hommes et des armes qui s'illustre à nouveau dans cette opération.
Complémentarité des hommes, d'abord.
44 des 50 métiers de la marine sont ici représentés. Chacun à votre place, chacun dans votre rôle, vous êtes ici indispensables à la mission : du pilote de chasse qui atteint les objectifs qui lui avaient été fixés, au boulanger qui donne du pain pour les marins, en passant par les « boums » [surnom donné aux techniciens chargés d'armer les avions], les mécaniciens, les électriciens, les pompiers, les postiers, les « chiens jaunes » [techniciens chargés d'orienter les avions sur le pont d'envol], les officiers d'appontage, les conducteurs et équipiers de pont d'envol ou encore les détecteurs, et la liste pourrait être encore longue. Dans cette véritable ville flottante, cette formidable communauté réglée est au cœur de notre efficacité, de notre réactivité et de notre performance. Cette chaîne est la marque de l'esprit de défense qui est au cœur de la culture et de l'éthique qui anime nos armées, au service de la Nation.
Complémentarité des armes, aussi.
Vous êtes une même famille : celle de l'armée française. Vous êtes une même communauté : celle des militaires de la France.
Ce sujet est pour moi d'importance. A l'heure où se joue, sur le terrain, l'histoire autant que l'avenir d'un pays et de sa population, c'est notre capacité d'intervention coordonnée air-mer qui fait toute la différence.
Cette parfaite complémentarité, c'est là notre atout. C'est à cette condition – et à cette condition seulement – que nous remporterons la victoire.
Vous avez choisi un métier noble, difficile et exigeant dans un monde où les menaces sont nombreuses, complexes et changeantes. Chaque armée, et c'est bien normal, a sa propre histoire, sa propre culture, mais vous partagez, tous, quels que soient votre corps d'appartenance, votre grade ou même votre âge, des valeurs communes. C'est là l'esprit de défense qui touche à la responsabilité et au devoir, à l'intégrité et au courage, à l'exigence de soi et à la solidarité absolue. Dans le succès comme dans le malheur, vous forgez une communauté de destins qu'il nous appartient de préserver.
C'est donc aujourd'hui un double message de fierté et de reconnaissance que je suis venu vous transmettre.
Fierté pour la grandeur de votre engagement. La parole de la France a de l'autorité parce que des hommes et des femmes comme vous savent s'engager personnellement.
Reconnaissance, aussi, car je connais la difficulté de vos missions. Je sais les exigences qu'elle requiert, le travail qu'elle réclame et les sacrifices qu'elle impose. Je sais que ce sont les mêmes tout juste revenus, en décembre, de la mission Agapanthe qui sont ici, aujourd'hui. J'ai une pensée toute particulière pour vos familles, souvent éprouvées par votre absence, tout comme vous pouvez l'être, aussi, avec l'éloignement. C'est une difficulté psychologique de plus dans un métier déjà très exigeant. Accepter les contraintes familiales qu'implique la fonction militaire ne va pas toujours de soi et vos familles ont, dans votre engagement au quotidien, un rôle capital de soutien, à vos côtés.
Sachez que je viendrai, inlassablement, à votre rencontre, sur le terrain. D'abord, parce que c'est mon rôle auprès du chef des armées, notre Président, de vérifier l'état des forces engagées, mais aussi parce que c'est comme cela que je mesure toute la difficulté de votre mission, et que je vois combien vous la remplissez toujours avec force, honneur, responsabilité, et sang-froid et, j'ose le dire, avec passion.
Malgré les dangers du métier des armes, la servitude qu'il implique, et la gravité de vos missions, vous gardez foi dans la cause que vous défendez, au service de la France.
Les semaines qui viennent seront décisives en Lybie. Vous êtes parvenus à briser l'assaut militaire de Kadhafi, éviter l'irréversible et insuffler l'espoir. L'opération militaire est à son tournant. J'attends que vous soyez au rendez-vous et je ne doute pas que vous serez à la hauteur de la mission que vous confie la nation. Le gouvernement sait qu'il peut compter sur vous, à tout moment. Ma considération vous est totale, ma confiance vous est entière.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 4 avril 2011