Interview de M. Bruno Mégret, président du Mouvement national républicain, à RMC le 12 février 2001, sur les listes de candidats de son parti pour les élections municipales, sa candidature à Marseille, ses rapports avec le Front national et la droite.

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Texte intégral

B. Mégret (MNR)
RMC - 7h50
Le 12 février 2001
P. Lapousterle Vous aviez assigné des perspectives ambitieuses à votre mouvement, à sa fondation ; vous aviez annoncé la chute rapide du Front National en même temps. Le bilan n'est pas à la hauteur de ce que vous aviez dit à l'époque, les électeurs ne vous ont pas suivi, et le Front national est toujours largement devant vous dans la plupart des municipalités. Considérez-vous que vous avez eu du retard sur le programme ou bien vous êtes-vous trompé ?
- "On ne peut rien dire cela. Après la crise qu'a connue l'ancien Front national, il y a eu en effet les élections européennes qui participaient de cette crise. Ensuite nous avons fondé un nouveau mouvement, le MNR - Mouvement national républicain - qui a à peine un peu plus d'un an et demi d'existence. Et nous affrontons les premières élections pour ce mouvement."
Vous avez les européennes déjà ...
- "Non, les européennes c'était la crise, le MNR n'existait pas. On peut dire que le MNR a été créé il y a un an et demi et que maintenant nous allons à la bataille pour les premières élections. Nous avons près de 400 listes en ordre de bataille pour les municipales, 1500 candidats aux élections cantonales. Nous serons présents dans 80 % des villes de plus de 100 000 habitants par exemple, dans ..."
Oui mais les électeurs ?
- " ... dans 60 % des villes de 30 000 habitants. Et nous avons des scores tout à fait honorables en perspective, d'après les sondages qu'il faut prendre avec beaucoup de pincettes, dans de nombreuses villes. A Mulhouse, par exemple, j'espère bien qu'on va gagner la ville. Ce n'est pas impossible en tout cas. Et dans de nombreuses autres villes. Lorsqu'il y a concurrence avec le Front national, en général ça se partage."
Dans aucune ville le Front national et le MNR ne pourront avoir des accords ?
- "Il y a un certain nombre de villes où nous avons monté des listes communes avec le Front national sans l'accord de monsieur Le Pen, car il est dans une démarche de division, dans une démarche crépusculaire. Il a d'ailleurs nommé son successeur. Donc, de toute façon, dans un horizon proche, il y aura possibilité de réaliser enfin ce grand rassemblement auquel nous travaillons, de la droite nationale et républicaine, c'est-à-dire le rassemblement de tous les anciens électeurs de Pasqua, Le Pen ou Villiers. Et nous avons commencé à mettre cela en oeuvre dans certaines villes avec une trentaine de listes d'union à travers le pays."
Monsieur Le Pen dit ce matin dans Le Parisien que votre mouvement est "en pleine décomposition."
- "Oui, mais cela ne m'étonne pas. Je pense qu'il n'est pas le mieux placé pour en juger. On verra au soir du dépôt des listes combien les uns et les autres auront mis de listes en ordre de bataille. Je suis persuadé que nous avons d'ores et déjà une implantation supérieure à celle du MPF de Villiers, supérieure à celle du RPF de Pasqua, supérieure à celle du Front national."
Vous avez d'ailleurs proposé à monsieur de Villiers de vous rejoindre, il n'a pas estimé devoir répondre.
- "Non, on verra plus tard. Supérieure même aux écologistes qui présentent moins de candidats que nous à travers le pays."
Vous êtes candidat à la mairie de Marseille. Pourquoi avez-vous quitté Vitrolles ?
- "Je n'ai pas quitté Vitrolles. Ce sont les aléas que vous connaissez, qui ont fait que, c'est mon épouse qui est le maire de la ville. Je pense qu'il est logique, naturel, légitime que ce soit le maire de la ville qui se représente. C'est ce qu'elle fait avec, je crois, de fortes chances de réélection. En tout cas si j'en juge d'après le taux de satisfaction des Vitrollais, qui considèrent à 48 % que la sécurité s'est améliorée, à 54 % que les impôts ont diminué, à 58 % que la propreté s'est améliorée, et à 73 % ...
Mais tous les sondages la donnent battue.
- "... et à 73 % que l'embellissement de la ville est tout à fait remarquable. Les sondages ne sont pas en accord avec ces chiffres qui pourtant ont été faits en même temps. Ce qui prouverait que soit les sondages sont bidons, soit les Vitrollais sont stupides - ce qu'ils ne sont pas du tout. Donc, tirez-en les conclusions."
Vous êtes candidat à Marseille. J'ai lu votre programme et j'ai vu "Pour remettre de l'ordre à Marseille." Ca commence bien ! Vous ne voulez voir qu'une tête à Marseille ?
- "Je crois que c'est ce que souhaitent les Marseillais : qu'on remette un peu d'ordre dans cette ville, notamment au plan de l'insécurité. Parce qu'à Marseille, les sondages montrent également que les Français considèrent que la sécurité s'est dégradée - pour 54 % -, que les impôts ont augmenté - pour 46 % -, que la propreté s'est également dégradée - pour 50 %. Il faut donc remettre de l'ordre. Mon programme, c'est la sécurité priorité numéro 1. Si je suis élu maire de Marseille, je recrute 1 500 policiers municipaux, armés, motivés, équipés pour faire la chasse aux voyous. J'ouvre des postes de police dans chaque quartier et je mets en place des brigades d'intervention rapide pour répondre aux appels ..."
Vous avez le droit de le faire, la loi vous l'autorise ?
- "La loi l'autorise, tout à fait. Et cela ne coûtera pas un sou de plus aux Marseillais car on prendra l'argent nécessaire, pour partie, sur les subventions versées aux associations bidons et pour autre partie en supprimant les postes d'animateurs d'ambiance, d'éducateurs d'atmosphère, et autres agents de prévention qui ont montré leur inefficacité totale."
Les policiers aussi, parce qu'il y a pas mal de policiers et l'insécurité continue, vous le savez bien...
- "Je crois qu'on ne peut pas dire cela des policiers qui font bien leur travail !"
Je ne dis pas cela des policiers, je dis que les policiers augmentent et l'insécurité aussi.
- "Non, le nombre de policiers n'augmente pas du tout en France, il est en régression. Et quand je vois monsieur Jospin annoncer 1 000 policiers supplémentaires sur la France entière, quand je dis qu'on peut en recruter 1 500 pour Marseille, cela montre l'ampleur de la différence d'appréciation entre eux et nous s'agissant du problème de l'insécurité."
Monsieur Le Pen dit ce matin dans Le Parisien, rapportant une conversation que vous auriez eue ...
- "Je me moque de M. Le Pen, ne me parlez pas de monsieur Le Pen toutes les deux minutes !"
Il dit : "En tête-à-tête il m'a dit - alors que vous étiez encore ensemble - : "Battu pour battu, je préfère Marseille que Vitrolles"." C'est vrai ou non ?
- "Mais pas du tout ! Je vous ai dit pourquoi je suis candidat à Marseille : parce que Marseille a besoin d'un vrai changement, les Marseillais sont mécontents de l'insécurité, des impôts, de la saleté de la ville, des problèmes de circulation. Et comme le vrai candidat des socialistes, c'est Gaudin - ce n'est évidemment pas Olmeta qui ne fait pas le poids face à Gaudin - il n'y a en réalité qu'une alternative : celle que j'incarne. Et pour le deuxième tour, en rassemblant tous les électeurs qui veulent remettre de l'ordre dans la ville, il y a la possibilité d'un vrai changement. De toute façon, ce n'est pas compliqué : ou ça continuera, comme avant, à se dégrader avec Gaudin ou ça commencera à s'améliorer sur ces questions-là avec nous."
Vous pensez que les Parisiens ont décidé de voter à gauche ? Pensez-vous que c'est un changement très important pour le pays ?
- "Oui, si la droite RPR perd Paris, c'est un événement majeur, c'est l'effondrement de tout un système politique fondé autour de monsieur Chirac, qui montre que la droite RPR-UDF est en pleine décapilotade. Ce qui me frappe aujourd'hui, c'est une sorte de dérive générale vers la gauche. Vous avez la gauche socialiste qui court derrière l'extrême-gauche - le PC, les écolos-gauchistes, voire les organisations d'extrême-gauche de la société civile qui font la loi, les idées de Mai 68 sont transformées en lois de la République ! Et dans le même temps, chose encore plus ahurissante, la droite ou la pseudo-droite court derrière la gauche : monsieur Madelin, qui veut la dépénalisation du cannabis ..."
Et vous vous courez derrière les électeurs.
- "Et nous nous restons à droite."
Vous courez derrière les électeurs.
- "Non - ne plaisantez pas - nous restons à droite, tranquillement. Nous incarnons la relève à droite. Un formidable espace s'est dégagé car il y a de très nombreux Français qui se trouvent orphelins, sans représentation, sans force politique qui correspond à leurs aspirations. Notre volonté, c'est de les rassembler pour constituer cette grande force qui peut représenter 30 %. Nous incarnons l'avenir et l'espoir. Il faut un peu de temps mais nous y parviendrons car les Français aspirent à quelque chose de profondément nouveau. Nous sommes un mouvement nouveau à droite."
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 12 février 2001)