Texte intégral
Q - Cette visite était intéressante ?
R - Oui, très intéressante et vraiment très chaleureuse.
Il y a une soif de France ici et nous sommes complètement décidés de développer très fortement nos relations avec le Pérou. Nous avons passé en revue nos champs d'actions avec le Pérou : éducation, culture, recherche. Et puis, il y a beaucoup à faire sur le plan économique, sur le plan de la défense et de la sécurité. Nous en avons discuté avec le ministre compétent et le président, avec des choses intéressantes. Nous avons une tradition de travailler ensemble mais nos relations économiques, pour le moment, étaient en dessous de nos relations politiques. Il y a donc une volonté, des deux côtés, de porter nos relations économiques et de défense au même niveau que nos relations politiques. Je vais, dès que je serai rentré, activer, avec mes collègues, un certain nombre de dossiers.
Le président viendra ici, je ne sais pas encore exactement à quel moment, mais assez rapidement, et je pense que cela va déboucher sur beaucoup de bonnes choses.
Q - Au niveau de la défense, il y a un accord concernant le trafic de drogue ?
R - Oui, on a une approche commune mais on a surtout parlé des matériels dont les Péruviens ont besoin. Il y a eu une lettre commune qui a été signée entre M. Le Drian et son homologue péruvien et l'idée est de transformer cette lettre commune - ce MOU comme on dit - en accord gouvernemental qui encadrera nos actions communes, nos acquisitions et nos formations communes parce que beaucoup d'entre eux viennent se former à l'école militaire française.
Il y a plusieurs sujets : un satellite qui s'appelle Astrium, les hélicoptères et des projets concernant la remise à niveau des Mirages. Il y a beaucoup de choses sur le plan de la défense et de la sécurité, il y a également le projet de Thales, il y a aussi beaucoup de choses, c'est un autre chemin, sur le terrain des infrastructures.
Je pense que, sur le plan économique, vous devriez voir dans les temps qui viennent une augmentation assez impressionnante de nos échanges.
Q - Dans un cadre plus large de l'Amérique latine : pensez-vous que le fait que la majorité des pays d'Amérique latine soient des pays de gouvernement de gauche et que la France a maintenant un gouvernement de gauche, fasse qu'il y a des affinités qui font que la dynamique sera peut être plus importante qu'elle ne l'a été dans les années précédentes ?
R - Bien sûr, cela peut aider, vous avez tout à fait raison. Ce qui est important, d'abord, c'est le fait que ces pays soient devenus des démocraties stabilisées, partout ; c'est le premier point. Le deuxième point, c'est que, économiquement, non seulement se sont des démocraties mais du même coup des États de droit qui facilitent les investissements et les échanges. Et puis, bien évidemment, quand il y a une proximité idéologique supplémentaire, ça aide, par exemple l'attachement aux droits de l'homme, l'attachement au multilatéralisme, une certaine manière d'envisager le développement de la démocratie nous rapprochent du Pérou. C'est la même chose avec le Brésil. Maintenant l'affaire Cassez réglée par la décision indépendante de la cour suprême, nos relations avec le Mexique vont sûrement se développer. Mais nous avons aussi de bonnes relations avec des pays qui ont, pour le moment, des gouvernements de droite. Les relations sont bonnes. Il est vrai qu'on se sent en terrain d'amitié et de connaissance.
Q - Est-ce que vous pensez que dans ce contexte de crise européenne, alors que l'Amérique latine a vécu elle-même sa crise de dettes, d'ajustements structurels, l'Europe a des leçons à tirer de l'expérience latino-américaine ?
R - Oui, nous avons des leçons à tirer bien sûr. C'est un point d'ailleurs que nous avons abordé parce qu'eux même disent, «nous avons tiré beaucoup de leçons de l'expérience du rapprochement entre la France et l'Allemagne».
Par exemple, il y a en Amérique latine des pays qui traditionnellement étaient très hostiles les uns aux autres, et puis on s'aperçoit maintenant que des regroupements comme l'alliance du Pacifique, se font. Ils se sont donc inspirés de nous et maintenant, d'une certaine manière, nous avons à méditer leur expérience.
Q - Avec humilité ?
R - Avec humilité toujours, et notamment quand on voit leurs taux de croissance.
Q - Vous sentez que les mentalités changent en France par rapport à l'Amérique latine ?
R - Cela a du mal à percer. Il y a toujours eu une grande sympathie pour l'Amérique latine, mais en même temps, je ne veux pas être injuste, mais il y avait la vision selon laquelle «c'est très loin» et puis «c'est exotique», avec un côté sympathique.
Maintenant je crois que, de plus en plus, on se dit «oui c'est loin mais pas si loin que cela», parce que les transports font que c'est accessible, que c'est un continent d'avenir, proche de nous par ses valeurs et qui va avoir la puissance de l'Europe d'ici quinze ou vingt ans.
Je pense cependant qu'il y a quelque chose qui doit être amélioré du côté des medias, parce que, je ne sais pas ce qu'il en est pour vous dans votre métier, mais j'ai l'impression que lorsqu'on essaye de faire passer des informations sur l'Amérique latine, depuis l'Amérique latine, on dit «oui, bon, est-ce que c'est aussi intéressant que ce qu'il se passe en Amérique du nord ?»
Q - Nous les passons en force, on se bat !
R - Alors unissons nos forces, mais à mon avis cela peut quand même changer parce que s'ils ont, comme ici, la force économique plus la sympathie qu'ils inspirent spontanément, cela fait quand même deux grands atouts.
Q - J'ai une question sur le Movadef : est ce que vous avez abordé le sujet avec le gouvernement péruvien ?
R - Nous n'avons pas abordé le sujet, ce n'est pas venu dans la conversation.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 25 février 2013