Texte intégral
Les drones défraient la chronique depuis plusieurs années. Malgré des préconisations répétées depuis 1999, leur poids dans les investissements du ministère de la Défense est resté limité. Aujourdhui, les décisions prises par le Président Hollande à loccasion de la publication du Livre blanc permettent de préciser notre stratégie : sortir dune impasse opérationnelle et industrielle pour enfin doter la France de drones, pièces maîtresses du renseignement et de la guerre de demain.
Depuis un an, sur tous les théâtres dopération majeurs, les situations concrètes ont confirmé le sentiment que nous avions : la France doit disposer de drones de surveillance pour conduire ses opérations, protéger ses militaires, les aider à contrôler de vastes espaces et parer déventuelles attaques ennemies.
Le désengagement dAfghanistan, que jai conduit à la demande du Président de la République,a largement reposé sur des drones dits « tactiques ». Ils nous avaient manqué à Uzbeen en 2008. Mis en oeuvre par larmée de terre lan dernier, ils ont permis de sécuriser les convois tout au long de leur déplacement vers Kaboul. Mais ces équipements, provisoires et insuffisants, doivent être remplacés par des systèmes plus modernes.
Même constat au Mali où, le 11 janvier dernier, le Président de la République a pris la décision dengager nos forces. Ce territoire, grand comme 2,5 fois la France, rend indispensable le déploiement de drones de moyenne altitude longue endurance (MALE) qui, avec la discrétion qui simpose, sont en mesure de parcourir de longues distances et dobserver de larges espaces pendant plus de vingt heures.
Or, nous constatons que lensemble de la communauté de défense, le ministère autant que lindustrie, a manqué le virage de ce type déquipement. Et ce qui est vrai en France lest aussi en Europe. Aujourdhui, la France continue à utiliser deux systèmes que lon disait intérimaires au moment de leur lancement, en 2003. Le provisoire est devenu permanent. Dix ans ont passé ; nous navons pas progressé. Nous en sommes à espérer que nos deux systèmes encore opérationnels ne subissent pas dincident majeur, et à compter sur la solidarité de nos alliés dans un domaine majeur pour notre souveraineté, celui du renseignement, sans lequel il nest pas daction libre ni sûre.
Le temps presse. Notre besoin en drones nous impose dêtre pragmatiques, et cest bien ma démarche. Ministre de la Défense, cest ma responsabilité et jentends lassumer.
Dès le mois de juillet 2012, jai signé avec mon homologue britannique, Philip Hammond, un partenariat autour du drone Watchkeeper de Thales.
Pour les mêmes raisons, la situation immédiate au Sahel me conduit à lancer lacquisition dun équipement existant, parce que nous ne pouvons plus attendre. Devant nous, deux possibilités : le Héron-TP réalisé en Israël et le Reaper produit aux Etats-Unis. De nombreuses actions ont été initiées avec ces deux pays. A très court terme, la piste américaine est la plus prometteuse, avec la perspective dune première livraison de deux drones dici la fin de cette année. Quelle autre option nous donnerait davantage satisfaction ? Comment, après tant de tergiversations, ne pas saisir loccasion qui se présente la première ?
Pour autant, lurgence ne doit pas faire obstacle à lavenir. Cest pourquoi jai proposé à nos partenaires européens, toujours dans le domaine des drones MALE, de nous regrouper, pour partager nos expériences et nos capacités, et impliquer nos industries dans la mise au point de ces équipements pour nos propres besoins. Cette ambition est dores et déjà en chantier.
Enfin il y a le plus long terme, avec le champ des drones de combat qui, à lhorizon 2030, viendront compléter voire remplacer nos flottes davions de chasse. Ce rendez-vous, nous ne le manquerons pas. Lindustrie française et européenne est à la pointe de cette technologie, comme la démontré le premier vol du drone NEURON au début de cette année. Elle doit le demeurer, et nous lui consacrerons à cette fin les moyens nécessaires.
Il y a un an, les drones étaient pour nos armées une question sans réponse. Aujourdhui, nous avons une stratégie densemble, une première réponse forte, et jentends my tenir.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 31 mai 2013