Déclaration de M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense, sur les efforts en faveur de l'industrie de défense, à Bourges le 10 juin 2013.

Monsieur le Président,
Monsieur le Délégué,
Mesdames et Messieurs,
Lors de mon déplacement à Avord, je m’étais engagé à revenir vous voir bientôt. Je suis heureux de pouvoir le faire aujourd’hui, à l’occasion de cette journée que je passe à Bourges auprès de nos industries. Je tiens à dire, d’ailleurs, que la géographie a une histoire, et que les industries de défense sont ici chez elles de longue date. C’est en effet Napoléon III qui décida de localiser dans le Cher, département le plus éloigné des frontières nationales des ateliers d’études, d’essais et de fabrication d’armement terrestre.
Mais revenons au présent. Vous le savez, le maintien d’une industrie de défense en pointe est l’une des ambitions fortes du Livre blanc que le Président de la République vient d’approuver et de la Loi de programmation militaire que nous sommes en train de préparer. L’industrie française de défense doit demeurer l’une des deux premières en Europe, car c’est l’une des clés de notre autonomie stratégique. Nous devons ainsi continuer à investir à son profit.
Derrière l’investissement de défense, il y a un enjeu militaire. Mais il est aussi économique, car ma conviction est profonde : l’investissement public dans la défense est un investissement qui crée des emplois, de la compétitivité et de la croissance. Le ministère de la défense occupe en effet le rang de premier investisseur public de l’Etat : 4000 entreprises et près de 165 000 emplois sont liés à l’industrie de la défense. En région Centre, ce sont 5800 emplois concernés.
De cette conviction, il n’est pas de meilleure illustration que la visite que je viens d’effectuer. J’ai constaté un très haut niveau d’excellence, qui explique d’ailleurs les succès remarquables que MBDA rencontre à l’export. J’ai aussi rencontré des personnels motivés, passionnés, et qui savent en quelques échanges communiquer leur engagement, transmettre leur passion. Je veux vous en féliciter. Les hommes et les femmes que j’ai rencontrés, les process que j’ai pu me faire expliquer, sont les meilleures preuves que l’investissement dans la défense est un investissement au service de l’industrie française.
Je voudrais profiter de l’occasion qui m’est donnée pour vous dire quelques mots des enjeux qui se présentent à MBDA dans le contexte de la préparation de la LPM.
Il y a d’abord un constat : les compétences de la filière missilière européenne, structurée autour de MBDA, sont critiques pour l’autonomie d’armement de nos plates-formes. Ces compétences, qui permettent la maîtrise de technologies et la réalisation d’équipements particulièrement complexes, sont le fruit d’un investissement de l’Etat sur de nombreuses années.
Le modèle économique développé par MBDA, largement fondé sur les bénéfices de l’exportation, est par ailleurs un gage de compétitivité et de résilience pour la filière. Il doit le demeurer.
Le ministère de la défense sera très attentif au maintien de ce modèle dans la durée, qui permet de combiner la satisfaction des besoins militaires et le maintien d’une filière industrielle compétitive au niveau mondial. Les programmes identifiés dans le Livre Blanc de 2013 permettent de maintenir cet équilibre. La LPM précisera l’équilibre entre le financement de nouveaux développements (dont vous prenez parfois une part à votre charge, et je ne peux que vous y encourager) et la commande nationale de vos productions, qui tiendra compte de votre capacité à exporter.
Par ailleurs, vous l’aurez noté, le Livre Blanc salue l’intégration franco-britannique dans le domaine des missiles. Et en effet, la démarche One Complex Weapons, est particulièrement bienvenue. Elle vise à améliorer la performance et la compétitivité à l’échelle européenne, tout en préservant les intérêts nationaux de la France et du Royaume-Uni, qui sont bien évidemment essentiels. Elle permettra ainsi à la filière de maintenir sa compétitivité dans le contexte de contraintes budgétaires que nous ne pouvons ignorer. Vous pouvez compter sur mon soutien pour ce projet.
Je crois que l’Europe de la Défense se mettra en place par des projets concrets, et cette démarche franco-britannique dans le domaine missilier en est un très bel exemple. C’est pourquoi j’ai personnellement marqué mon soutien au lancement du projet ANL. C’est la meilleure preuve de mon engagement à vos côtés. Il faut poursuivre, la filière franco-britannique doit encore évoluer vers une intégration plus poussée. Les centres d’excellence en sont un jalon important. Première étape de l’initiative One Complex Weapons, ils sont la suite logique de l’intégration de l’industrie missilière européenne initiée par la création de MBDA il y a maintenant dix ans.
En ce qui me concerne, je veillerai à l’équilibre global de la filière missile franco-britannique que nous désirons forger ensemble. A cet égard, je serai également vigilant sur la valorisation des atouts français, chez MBDA France comme chez les autres industriels français de la filière.
Je veux enfin souligner le rôle essentiel de MBDA dans le tissu économique de la région Centre, avec plus de 1500 emplois au sein du groupe mais aussi, plus largement, l’irrigation d’un grand nombre de PME et ETI locales. Cette base de fournisseurs est un atout majeur qui garantit à ce champion européen une réactivité que n’offrirait pas un marché plus global. Là encore, je crois qu’il faut s’en féliciter.
Je souhaiterais conclure en revenant un instant sur les PME. Une partie importante des financements du ministère vont aux PME au travers de contrats de sous-traitance. Les grands groupes industriels de défense sont donc des partenaires essentiels pour le soutien aux PME.
Le ministère de la défense soutient les initiatives engagées par les organisations professionnelles pour améliorer les relations entre grands groupes et PME. Mais j’ai souhaité aller plus loin en engageant une démarche complémentaire, compte tenu des responsabilités particulières du ministère en tant qu’acheteur et en tant que soutien de la BITD, et j’ai traduit cela dans le pacte défense PME annoncé en novembre dernier.
Le ministère de la défense et les maîtres d’œuvre industriels de l’armement ont un intérêt commun pour la vitalité et la pérennité d’un tissu de PME performantes et innovantes. Partant de ce constat, j’ai proposé aux maîtres d’œuvre industriels de signer avec eux des conventions bilatérales entre le ministère et les maîtres d’œuvre industriels de l’armement qui comporteront des engagements réciproques pour favoriser la croissance des PME.
L’objectif est d’abord de faciliter l’intégration des innovations des PME soutenues par le ministère de la défense dans les programmes et les systèmes d’armes des maîtres d’œuvre. Il est ensuite de favoriser les bonnes pratiques contractuelles et financières entre PME et maîtres d’œuvre. Je pense en particulier à la question sensible de la propriété intellectuelle et des pénalités. Il est aussi d’identifier et soutenir les PME possédant des compétences critiques ou présentant un fort potentiel d’innovation pour la défense et d’anticiper plus en amont leurs difficultés éventuelles Il est enfin de faciliter l’accès des PME innovantes à de nouveaux relais commerciaux à l’international.
En parallèle, le ministère de la défense renforcera l’information des PME sous-traitantes sur le marché principal pour rééquilibre leur relations avec les maîtres d’œuvre. Il contrôlera et valorisera les bonnes pratiques par la notation et le classement des maîtres d’œuvre, ainsi que par l’attribution d’un label « fournisseur responsable ».
C’est tout le sens de la convention que je vais signer dans un instant. Je suis heureux que les grands groupes, comme MBDA et NEXTER, nous rejoignent dans cette démarche.
Au cours de mon propos, j’ai évoqué plusieurs défis qui se présentent aujourd’hui à MBDA. Ces défis mobiliseront chacun d’entre vous. Ministre de la défense, c’est-à-dire aussi des industries de défense, je serai toujours à vos côtés pour les mener.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 13 juin 2013