Déclaration de M. Alain Richard, ministre de la défense, sur l'histoire du 3ème régiment du Génie de Mézières et sur l'augmentation de la participation française en moyens aériens dans le conflit du Kosovo, Charleville-Mézières le 7 mai 1999.

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Circonstance : 250ème anniversaire de la création de l'Ecole royale du Génie de Mézières à Charleville-Mézières le 7 mai 1999

Texte intégral

Messieurs les officiers généraux,
Mesdames, messieurs,
Je tiens d'abord à remercier les sapeurs du 3ème Régiment du Génie pour les présentations auxquelles je viens d'assister. Elles témoignent de votre état de préparation à l'heure où l'état-major, prenant en compte les besoins de nos forces et ceux des forces alliées, vous demande d'être prêts à partir là où votre savoir-faire est requis aujourd'hui, en ex-Yougoslavie.
Ce que j'ai vu, je dois le dire, me laisse serein quant à votre capacité de mener à bien les missions qui vous seront assignées. Efficacité, rapidité, maîtrise et coordination des techniques et des savoirs : toutes ces qualités qui sont à porter à votre crédit, il vous faudra les reproduire dans un environnement opérationnel et vous montrer à la hauteur de votre réputation et de votre histoire.
Le Génie, particulièrement à Charleville-Mézières, peut en effet légitimement se prévaloir d'une longue histoire. Vous avez fêté aujourd'hui les 250 ans de l'école royale du Génie de Mézières, d'où sont sortis de très nombreux ingénieurs qui ont fait honneur à notre pays et rappellent la longue tradition de cette arme ; votre implantation actuelle, ici à Charleville, est elle-même déjà ancienne puisque le 3ème Régiment de Génie a partie liée avec la ville depuis 1947.
Je profite de cette évocation pour saluer l'osmose qui s'est faite entre vous et votre environnement local, et remercier très chaleureusement les élus qui ont facilité la visite d'aujourd'hui et vous soutiennent au jour le jour ; ce bon voisinage est un maillon important dans les liens nouveaux et plus étroits qui doivent s'instaurer entre la Nation, la société et la nouvelle armée professionnalisée. Je ne doute pas que l'assistance que vous avez apportée à la région lors des inondations de ces dernières années, a contribué à cette bonne insertion.
Je sais par ailleurs que le 3ème Régiment du Génie a eu, au cours des dernières années, la chance de recevoir de nouveaux matériels très sophistiqués qu'il a testés et mis en condition opérationnelle, et qu'il s'est acquitté de cette mission avec professionnalisme.
C'est pour renforcer ce professionnalisme, cette expertise, et parce que cela correspond à l'intérêt de notre pays, que nous sommes en train de passer à un format d'armée entièrement composée de volontaires. Je sais que votre régiment est arrivé à mi-parcours de sa professionnalisation : tout comme j'ai pu l'observer ailleurs dans les armées, cette mutation de grande ampleur se passe chez vous dans l'ordre et le souci de rester disponible en permanence : cette disponibilité est attestée par l'état de préparation de la compagnie d'appui - mobilité, et cela est à mettre à votre crédit. J'en profite pour adresser un message de sympathie aux appelés du contingent qui servent encore ici à Charleville : leur contribution reste absolument indispensable en ces temps de transition, et je salue leur civisme.
Comme l'ensemble des armées, mais avec des attributions particulièrement importantes à cet égard, le 3ème Régiment du Génie s'est adapté très tôt aux nouvelles normes de droit international, codifiées dans la Convention d'Ottawa sur les mines antipersonnel. Ces normes que notre pays a adoptées, constituent un progrès indiscutable - progrès qui sera mis en relief a contrario lorsque nous aurons à sécuriser le territoire kosovar après les opérations militaires et qu'il s'agira de le débarrasser de ces mines ; ce serait d'ailleurs, vraisemblablement, l'une de vos missions en cas d'engagement.
Je n'ai pas besoin de revenir sur les raisons qui ont amené les pays de l'Alliance à recourir à la force dans cette crise du Kosovo, vous les connaissez. Quand toutes les options diplomatiques sont épuisées, quand le droit international est bafoué de façon répétée, quand les droits fondamentaux sont violés et que l'on assiste à des scènes que l'on voudrait ne jamais voir se produire à la fin du XXème siècle, on ne peut se permettre d'hésiter longtemps.
L'action que nous menons peut sembler bien longue ; mais vous savez mieux que quiconque quelles contraintes pèsent sur cette opération, comme sur toute intervention menée dans un cadre démocratique. Les principes qui nous guident - la concertation entre alliés, la maîtrise permanente de la violence, le ciblage aussi précis qu'il est aujourd'hui possible des frappes, la chance toujours donnée à la diplomatie - contredisent un autre objectif souhaitable : celui de la maîtrise du temps.
S'il faut poursuivre et intensifier pendant encore plusieurs semaines cette opération pour éviter les victimes civiles qu'entraînerait une action plus massive, nous le ferons, car notre détermination est totale.
C'est d'ailleurs la raison pour laquelle la France, en coordination avec ses alliés, a pris la décision d'accroître de façon substantielle sa participation aux moyens militaires de l'Alliance au cours de la semaine prochaine.
Dans le cadre d'un renforcement global du dispositif aérien de l'Alliance de 200 avions, la France affectera aux opérations 22 avions de combat supplémentaires.
C'est ainsi que nous allons ajouter un ensemble de 16 Jaguar et Mirage F1 CT aux 6 Jaguar actuellement déployés.
De même, nous allons renforcer de 2 Super Etendard modernisés les 14 actuellement embarqués sur le porte-avions Foch, tandis que 4 Mirage 2000 D viendront s'ajouter aux 10 déjà déployés.
Ces 22 avions s'ajouteront aux 80 appareils français déjà en activité sur ce théâtre, dont 64 sont des avions de combat.
Au total, notre participation atteindra donc 102 appareils, dont 86 avions de combat. Ils sont le signe de notre détermination, et des responsabilités que la France entend assumer dans la stabilité du continent européen et le respect des droits de l'homme.
Messieurs,
Vos nouvelles missions vous ont été précisées ; au vu de vos expériences récentes, par exemple lors de la guerre du Golfe, je suis tout à fait confiant dans votre capacité à les réussir ; d'autant que les Balkans, pour certains d'entre vous, ne sont pas un terrain inconnu. En effet, le 3ème Régiment du Génie y a servi régulièrement depuis 1992. Une nouvelle fois, il vous faudra vous intégrer dans un cadre « interarmées » et international pour assurer aux forces alliées un environnement sécurisé.
Je vous remercie pour votre accueil et vous redis ma satisfaction et ma confiance devant les efforts réalisés pour être en mesure de répondre au plus vite et au mieux à l'appel de votre pays.
(Source http://www.defense.gouv.fr, le 12 mai 1999)