Texte intégral
* Danemark - Fusillade à Copenhague
Q - À un mois d'intervalle, le Danemark vient de connaître un scénario très proche de celui qu'a vécu la France. Est-ce que vous diriez que le terrorisme djihadiste a déclaré la guerre à l'Europe ?
R - Oui et aujourd'hui nous avons le coeur à Copenhague. Les faits, vous les connaissez. Hier, dans l'après-midi, l'attaque d'un centre culturel qui, malheureusement, a fait un mort et plusieurs blessés. Puis dans la nuit, l'attaque d'une synagogue, avec un mort de confession juive. Et ce matin, vers 5 heures du matin, les policiers ont tué quelqu'un qu'ils identifient comme étant l'auteur de ces tueries. J'ai eu mon collègue danois hier au téléphone puis notre ambassadeur - qui l'a échappé belle -, à plusieurs reprises. Que peut-on dire ? Nous sommes aux côtés de nos amis Danois, qui sont évidemment très secoués par tout cela...
Q - Mais ils s'y attendaient. Ce n'est pas une surprise pour eux, parce qu'ils savent depuis longtemps qu'ils sont visés.
R - ...Oui, mais la société n'est pas organisée par rapport à cela. Ensuite, comme vous, je suis frappé par le mimétisme de la séquence. Tout d'abord, c'est une attaque contre le symbole de la liberté d'expression, ensuite, une attaque contre des juifs et puis l'affrontement avec des policiers. Quelle leçon faut-il en tirer ? Une leçon que nous avons tous à l'esprit : c'est que le terrorisme est international et la réponse est internationale, et d'abord elle doit être européenne.
D'où les initiatives que nous prenons pour renforcer la dimension sécuritaire, pour avoir une politique extérieure qui permette de lutter contre le terrorisme, et pour lutter contre la radicalisation, au plan interne.
(...)
Q - Il n'y a pas une signature ? Parce que c'est vrai que vous avez dit, et vous l'avez souligné, que les cibles ont été les mêmes qu'à Paris, en tout cas en termes de symboles effectivement, la stratégie est quasiment la même. Est-ce qu'il y a, derrière, une organisation, une signature ?
R - Il y a ce que l'on appelle dans un tout autre domaine un «franchising», c'est-à-dire qu'il y a toute une série de gens qui malheureusement sont prêts à aller faire, comme ils disent, le djihad. Ce sont des djihado-terroristes qui s'inspirent de modèles existants, soit parce que cela s'est déjà passé, à Paris, soit parce que sur le Net, on leur donne des conseils et des manières de procéder. Et c'est la raison pour laquelle il faut être précis dans l'analyse et implacable dans le déroulement.
Q - Ce qui est frappant, c'est que l'agresseur rentre chez lui, ou chez un complice, hier, à Copenhague. Peut-être habite-t-il Copenhague. Et de toute évidence, c'est un citoyen danois, c'est-à-dire, c'est un fils du pays. Cela veut dire que l'ennemi, il est à l'intérieur ?
R - Cela veut dire que les ravages de ce terrorisme sont extrêmement larges, et c'est pourquoi il faut se prémunir. Le président français a eu au téléphone la Première ministre danoise et j'ai eu mon homologue danois. Nous avons demandé à Bernard Cazeneuve, le ministre de l'intérieur, qui était au Maroc, d'aller au Danemark. Il y a eu un conseil de crise du gouvernement danois. Nous suivrons tout cela évidemment en étroite relation avec le gouvernement. Mais au-delà de ces faits tragiques, c'est toute une organisation qui doit être mise en place, qui est mise en place, pour lutter contre ce mal. Et cela prendra du temps, il faut dire la réalité telle qu'elle est. (...).
* Lutte contre le terrorisme - Boko Haram - Islam
Q - (...) Le terrorisme inquiète, on ne cesse de le dire, avec raison, et il se déploie partout sur notre territoire, en Europe, au Proche-Orient, en Afrique, avec le sentiment que rien ne peut l'arrêter - et pourtant il faudra l'arrêter. (...)
Vous avez dit oui, il y a la guerre. C'est ce que vous dites ? C'est une guerre qui est faite contre l'Occident ? Comment vous la définissez, vous-même ?
R - Ce sont des faux religieux et de vrais criminels. Ils s'appuient sur la religion, mais ils l'usurpent. Et il faut que les religieux musulmans nous aident, il faut qu'ils les dénoncent eux-mêmes, comme l'a fait très bien le grand imam de la mosquée Al- Azhar, au Caire.
Q - C'est un appel que vous leur lancez aujourd'hui ?
R - Oui, mais pour beaucoup ils sont conscients de cela. Parce que si des non musulmans disent «les musulmans devraient faire ceci ou cela», cela a moins de force que si les autorités religieuses elles-mêmes disent : «c'est une escroquerie !»
Q - Est-ce qu'elles n'ont pas peur d'être des cibles, d'être visées à leur tour ?
R - Je ne pense pas, non.
Q - Il faut du courage, quoi ?
R - Oui, mais ils en ont ! Il faut cette dénonciation d'escroquerie. Il faut en même temps évidemment que nous, dans nos pays, nous prenions les dispositions nécessaires, en termes sécuritaires, et notamment sur le plan d'internet et dans nos prisons. Et puis, il faut que l'Europe s'organise, encore plus fortement qu'elle ne le fait, et ce sont les décisions qui sont en train d'être prises pour qu'il y ait une coordination très efficace.
Q - C'est quoi, la coordination ? Et est-ce que cela suffit ? N'est-on pas trop défensifs ? N'y a-t-il pas autre chose à faire ?
R - Il faut prendre toutes les mesures qui sont indispensables. Parce que nos sociétés sont fragiles. Il faut maintenir nos principes, nos valeurs, le droit à la liberté, et en même temps, s'organiser pour venir à bout de ces éléments, qui sont disparates. Je ne crois pas qu'il y ait un chef unique qui dise « voilà ce qu'il faut faire...»
(...)
Q - En France, la menace reste extrêmement présente ? Le plan Vigipirate est toujours maintenu, d'ailleurs ?
R - La menace est très présente, oui. Il faut être implacable dans l'action qu'il faut mener, et en même temps, ne pas faire ce cadeau aux terroristes de rentrer dans l'opposition qu'ils souhaiteraient entre les communautés. Il faut faire bien attention à cela. C'est pourquoi tout ce qui est antisémitisme, anti-islam doit être dénoncé. Il faut à la fois que nous soyons implacables et que nous restions fermes sur nos valeurs.
(...)
Nous sommes dans un monde chaotique, c'est la réalité. Pendant très longtemps, on a eu un monde bipolaire, ça avait beaucoup d'inconvénients mais c'était la Russie, enfin l'URSS à l'époque et les États-Unis qui donnaient le «la». Quand il y avait une crise, s'ils se mettaient d'accord, cela s'arrêtait. Cette situation a duré depuis la fin de la guerre jusqu'aux années 90. Ensuite, on a eu une période où on a eu un monde unipolaire dominé par les Américains qui avaient le leadership en matière technologique, culturelle, économique ... Maintenant, nous sommes dans un monde où il n'y a plus un seul patron et donc et c'est un monde chaotique.
Q - Et ça, vous le sentez depuis que vous êtes arrivé au Quai d'Orsay ?
R - Tout le temps, même avant ...
Q - Depuis deux ans et demi, trois ans, oui bien sûr avant mais est-ce que vous sentez que les choses se transforment presque sous nos yeux ?
R - Évidemment qu'elles se transforment. Les États ont souvent moins de pouvoir qu'avant alors qu'apparaissent des groupes - je pense à Daech, à Al-Qaïda et d'autres - qui ont quasiment des ressources d'État. Et puis, vous avez ce bouleversement technologique qui fait que maintenant, tout est mondial.
Quand vous additionnez le fait que le monde est chaotique - parce qu'il n'y a plus un seul patron ou deux -, le fait que les États peut-être malheureusement ont moins de pouvoir qu'avant, que les frontières sont un peu diffuses et qu'il y a une diffusion de technologies, la France du coup qui est une puissance globale - ce n'est pas la plus grande puissance du monde mais nous avons une diplomatie globale parce que nous avons à la fois notre siège au conseil permanent de sécurité, nos militaires, notre puissance économique, notre puissance culturelle, nos principes - a un rôle qu'elle a rarement eu et parfois, je dis, on nous en demande trop.
Q - Pourquoi dites-vous cela ? C'est que l'on n'a pas les moyens financiers pour tenir tout cela ?
R - C'est parce que je suis tous les jours sur le front et, qu'en même temps, on nous fait d'immenses compliments en nous disant : «votre politique internationale, bravo...»
Q - Il y a des critiques, on dit qu'il n'y a pas de diplomatie, on dit qu'il n'y a pas de politique économique ...
R - En général, ce n'est pas ce que j'entends. Mais du coup, on nous demande en Afrique, en Europe, et au Moyen-Orient, etc.
Nous faisons le maximum, nous faisons même parfois plus que notre part mais nous avons besoin de l'Europe avec nous, nous avons besoin de la communauté internationale, par exemple en Afrique où la bonne séquence, c'est l'initiative africaine et le soutien international. La France est intervenue au Mali parce que personne ne pouvait le faire contre le terrorisme. Elle est intervenue en RCA, mais nous ne pouvons pas tout faire tout seul.
Q - Absolument, effectivement, la France ne peut pas faire tout toute seule mais les crises s'accroissent, on le voit avec Boko Haram qui jusqu'à présent sévissait dramatiquement au Nigéria et qui maintenant vient de faire des attaques au Niger, pays dont on est proche, vient de faire une attaque au Tchad et une au Cameroun. Qu'est-ce que l'on fait ? Qu'est-ce que la France va faire par rapport à cela ? On vous sollicite, qu'est-ce que vous faites contre les Boko Haram qui a piqué, qui a kidnappé tant de femmes et tué tant d'êtres ?
R - Vous vous rappelez peut-être qu'il y a quelques mois maintenant, c'est en France à Paris et à l'initiative du président, qu'a eu lieu la première réunion pour résister, lutter, contre-attaquer par rapport à Boko Haram, qui est un mal terrible. Ensuite, concrètement, nous apportons un certain nombre de soutiens, nous essayons de mobiliser les Africains. Vous avez vu que les Africains ont pris une décision très positive et je les en félicite de mettre sur pied une force de plus de 8.000 hommes et que l'affaire doit passer maintenant devant le conseil de l'Union africaine, puis devant le conseil de sécurité ; nous soutiendrons cela, cette initiative africaine associée au soutien international. En ce qui me concerne, je serai dans les tout prochains jours à la fois au Tchad, au Cameroun et au Niger.
Q - Donc vous y allez mais cela veut dire que cela annonce l'arrivée de militaires, avec Jean-Yves Le Drian...
R - Non. Nous aidons notamment sur le plan des images et d'une certaine coordination. Nous aidons ces pays qui sont nos amis mais nous n'avons pas l'intention de nous investir directement dans le conflit. Encore une fois, initiative africaine, soutien international, et la France doit favoriser tout cela. C'est ce qu'elle fait.
(...)
Q - Tout autre sujet, le Premier ministre a lancé jeudi devant le Sénat la réorganisation du conseil français du culte musulman, autrement dit la représentation des musulmans créée en 2003 qui semble avoir failli dans sa mission. Le Premier ministre veut un islam de France. Est-ce que ce n'est pas un petit peu illusoire ?
R - Je ne crois pas. Les premières victimes de ce qui se passe, ce sont les musulmans. D'abord des victimes physiques car Daech qui prétend agir au nom de l'islam fait un maximum de victimes et les musulmans sont aussi des victimes psycho-politiques parce que se développent des amalgames qui sont extrêmement injurieux pour les musulmans. Donc le fait qu'on puisse redéfinir la façon dont fonctionnent les représentations ici me paraît une bonne chose. Ce n'est pas facile, cela a déjà été tenté dans le passé, je ne crois pas que cela ait très bien fonctionné mais c'est nécessaire.
Mais, au-delà, je voudrais faire une remarque, vous la partagerez certainement, c'est qu'on ne doit pas définir les Français en termes d'appartenance à telle ou telle communauté. Chacun a une religion, vous avez une religion ou vous n'avez pas de religion mais nous sommes avant tout des Français et la laïcité, cela veut dire quoi ? Cela veut dire qu'on peut avoir une religion ou pas de religion du tout mais que ça ne doit pas interférer sur les autres plans, notamment sur le plan civique et je pense qu'il ne faut jamais perdre de vue ce trésor qui est la laïcité !
Q - Malheureusement, il y a du mal à avoir une bonne relation saine entre la République et les religions.
R - Alors, si on peut l'améliorer c'est très bien.
Q - Est-ce que vous dites que la question musulmane devient, et pas seulement en France, une question politique ?
R - Non, je ne présenterai pas les choses ainsi parce que si vous dites «la question musulmane», alors il y a «la question juive» et «la question catholique». Je dis qu'il y a des attaques extrêmement dures. Par rapport à ces attaques, il faut refuser les amalgames, il faut que chacun se sente à l'aise, il faut que les règles soient définies et il faut que la laïcité en France soit respectée.
Q - ...et ne pas laisser - Manuel Valls a commencé, quelques autres aussi - à ne pas laisser un certain terrain au Front national...
R - Oui, bien sûr !
Q - ...les mots au Front national ?
R - Oui, bien sûr ! Mais vous savez, j'avais dit il y a longtemps un certain nombre de choses ...une phrase, les questions, les réponses, on m'avait un peu brocardé pour cela et on s'aperçoit que c'est vrai dans les deux sens et notamment sur le fait que les réponses qu'apporte le Front national sont plus mauvaises que jamais.
Vous parlez de la Grèce, l'une des thèses que développe le Front national, c'est : il faut sortir de l'euro, etc., mécaniquement mais il faut expliquer cela et certains responsables de gauche et de droite le font très bien. Il faut qu'ils continuent à le faire.
À partir du moment où on sortirait de l'euro, ce qui est un objectif parait-il du Front national, non seulement pour les agriculteurs et d'autres catégories, ce serait absolument dramatique, mais cela veut dire pour tous les Français puisqu'on reviendrait au franc, le franc décrocherait de sa valeur de 20 ou 25 %, cela veut dire que tout le monde deviendrait immédiatement plus pauvre de 25 % !
Q - Il y a un mois, on parlait énormément de l'esprit du 11 janvier. Qu'est-ce qu'est devenu cet esprit ? Est-ce que ce n'est pas un peu retombé, et est-ce qu'il ne faut pas le relancer, au niveau gouvernemental ?
R - Qu'est-ce qu'on voulait dire par cette formule ? On voulait dire que la France avait été très durement touchée au coeur, et qu'elle avait répondu avec dignité, en se rassemblant, et avec le soutien de la communauté internationale. Je crois que c'est ça, l'esprit du 11 janvier.
Moi, ce que j'en retiens, et j'essaie d'appliquer cela dans le secteur dont je m'occupe, c'est qu'il faut rechercher à chaque fois le rassemblement. Il y a tellement de problèmes difficiles à résoudre, vous ne pouvez pas passer votre temps dans des «chicayas» de troisième ordre, sur le plan politicien, j'allais dire politicard.
Bien sûr il y a des diversités d'opinions, mais il faut - et c'est la tâche du gouvernement, et pour le moment il est à sa tâche - rechercher à chaque fois le rassemblement maximum, et non pas s'égarer dans des chemins de traverse. Allons à l'essentiel !
L'essentiel, c'est quoi ? On le sait : la situation économique, pour faire repartir la France, l'entente sociale - c'est ce que vous venez de dire -, et puis avoir une indépendance, et préparer l'avenir.
Q - Mais est-ce qu'on peut faire un bout de chemin avec l'opposition ? Comme l'a dit le président de la République dans sa conférence de presse, et qu'a répété Manuel Valls sur Europe 1 lundi dernier.
R - Mais bien sûr, il y a beaucoup de points sur lesquels on peut être d'accord. Par exemple, dans le secteur dont je m'occupe, il y a telles ou telles critiques qui sont légitimes. Mais enfin, en général...
Q - Oui, le terrorisme ! La laïcité... ?
R - ...sur la politique extérieure, les gens disent : la France, c'est bien. Voilà.(...).
* Égypte - Vente d'avions de combat Rafale
(...)
Q - Demain au Caire, votre collègue et ami Jean-Yves Le Drian va signer l'accord sur le Rafale avec le président Sissi, avec son collègue égyptien et des industriels. La France a sans doute bien négocié. Est-ce que cela veut dire que cela ouvre un partenariat stratégique avec l'Égypte ? On va faire beaucoup avec l'Égypte ? Pourquoi on lui fait confiance ?
R - Je pense qu'il y a trois gagnants dans cet accord : la France, l'Égypte et la stabilité dans la région. La France, c'est évident puisque s'agissant du Rafale, on n'en a jamais vendu à l'étranger. Il y a donc eu beaucoup de promesses, beaucoup de discussions mais enfin, pour le moment, le solde, c'était zéro.
Q - Comment expliquez-vous qu'un miracle se soit produit ?
R - Vous savez, je suis laïc, donc dans ce domaine aussi, celui des ventes d'avions, le côté miraculeux est assez faible. Il s'agit de la rencontre entre un désir fort de la part de l'acheteur et un esprit de compromis de la part du vendeur.
C'est une très bonne chose pour l'acheteur, l'Égypte, qui en est bénéficiaire, et pour la France, évidemment, pour des raisons d'emploi et des raisons de commerce extérieur.
De plus, il est probable - je suis prudent parce que je suis cela avec Jean-Yves Le Drian depuis le début - que ceci va être positif pour d'autres prospects, comme on dit. Mais il faut rester prudent.
Q - Vous pensez à quels prospects, à quels pays ?
R - Il y en a plusieurs. Parmi ce qui est connu, on cite souvent l'Inde où j'étais il y a encore quinze jours, et le Qatar. En Inde, on a toujours des problèmes à régler, notamment des problèmes de prix.
Tout cela est positif pour la France, pour l'Égypte - qui se dote ainsi d'un matériel qui est extrêmement performant - et, ce qui est très important dans notre démarche, pour la stabilité régionale. Il faut en effet bien comprendre que l'Égypte est le grand pays de l'ensemble de la zone arabe avec, évidemment, selon que les choses fonctionnement ou pas des conséquences sur la stabilité de la région, dans l'affaire israélo-palestinienne, dans la question syrienne, dans la question libyenne, etc. Il faut donc que l'Égypte ait les moyens de permettre cette stabilité et cette sécurité et c'est pour cela que cette affaire a été négociée.
Q - Vous avez dit qu'il y a trois points, il n'en manque pas un ?
R - France, Égypte et la stabilité régionale.
Q - Le quatrième, ce n'est pas la démocratie ?
R - C'est souvent une question qui est posée et il est tout à fait légitime qu'elle le soit. Cela ne veut pas dire, parce que nous vendons ces Rafale à l'Égypte, que nous approuvons point par point tout ce qui est fait en politique intérieure. Là-dessus, nous avons toujours été très clairs, mais sans poser la question d'une façon polémique et publique. À chaque fois que nous discutons avec le président Sissi, moi avec mon homologue Shoukri ou d'autres, nous abordons ces questions de politique intérieure mais en essayant de les faire progresser.
Nous sommes dans la ligne de ce qui s'est appelé l'accord, la feuille de route de juillet 2013. Quand des excès sont commis, nous disons notre point de vue aux autorités égyptiennes et nous souhaitons, peu à peu, que l'on aille vers plus de démocratie. Mais la stabilité de l'Égypte est un point très important.
Q - On vient de parler des gagnants. Est-ce que cela n'est pas une claque pour les États-Unis ? Est-ce que les États-Unis qui accompagnent l'Égypte depuis Camp David ne sont pas les grands perdants ...
R - La question ne se pose pas en ces termes. Nos relations avec l'Égypte sont très anciennes. En regardant le dossier de manière très attentive, nous avons été ceux qui ont vendu des Mirage en 81 à l'Égypte. Donc il y a une tradition très, très proche de relations entre nos deux pays...
Q - Depuis Napoléon, Champollion...
R - Voilà. Les Américains vendent leur matériel à beaucoup de pays et continueront de le faire, mais il faut dire que l'avion Rafale est d'une capacité exceptionnelle ; je crois que tout le monde le reconnait. Ce qui est souvent un handicap par rapport à lui, c'est qu'il est cher parce que justement il peut remplacer plusieurs types d'avions différents.
Q - Mais est-ce que de la part du président Sissi, c'est un choix stratégique et politique parce que...
R - Oui, j'ai cru comprendre...
Q - ...les Américains ont eu un comportement au moment de M. Moubarak...
R - La France n'a pas que des qualités mais elle a dans ce domaine deux qualités essentielles : d'une part, une technologie qui est incomparable ; d'autre part, c'est un pays indépendant. Je tiens beaucoup, avec le président de la République, à cette indépendance de notre politique étrangère (...).
* Ukraine - Russie
(...)
Q - Là, nous vivons les 12 premières heures du cessez-le-feu qui a été décidé lors de l'accord de Minsk auquel vous avez participé. Il y a déjà quelques accrocs. Mais est-ce que vous, vous faites partie des gens pessimistes ? Et on sait très bien qu'un cessez-le-feu c'est fragile, précaire. Est-ce que vous pensez que cette fois-ci il sera respecté ?
R - J'ai fait le point avec nos correspondants, à minuit, puisque c'était à minuit heure locale que le cessez-le-feu devait entrer en application. On peut dire que le cessez-le-feu est globalement respecté, même s'il y a eu ici ou là un certain nombre d'atteintes.
Q - Il y a eu deux civils tués.
R - Oui. Vous savez, quand vous passez d'un conflit ouvert à un cessez-le-feu, cela ne se fait pas simplement.
Q - Et quand on pense à ce qu'ont été les dernières heures, avec les bombardements...
R - En plus, il faut avoir à l'esprit que les combats sont très durs juste avant le cessez-le-feu, puisqu'il faut que chaque partie prenne son avantage. On peut dire, aujourd'hui à 10h20, que pour le moment les choses vont dans le bon sens. Je dois souligner qu'un certain nombre d'éléments ont beaucoup pesé en ce sens. D'abord, le président ukrainien, qui a fait un discours à la Nation hier, juste avant le cessez-le-feu, pour dire qu'à telle heure il faut cesser de se battre. Ensuite, les Russes ont pris l'initiative, à New York, d'une résolution - j'espère qu'elle va pouvoir être votée rapidement - rassemblant tout le monde pour dire : «l'accord que vous avez conclu, que nous avons conclu à Minsk, doit être appliqué». Et évidemment, nous sommes extrêmement vigilants. Il y a eu des contacts téléphoniques entre les uns et les autres. Cet après-midi il y a une conférence téléphonique en «format Normandie» avec le président français et puis ses homologues. Nous sommes très vigilants.
Q - Donc vous croyez à la sincérité de Vladimir Poutine ?
R - Nous avons négocié durement pour arriver notamment à ce cessez-le-feu. La France doit tout faire, avec l'Allemagne notamment, pour qu'il soit respecté. Mais là, comme dans l'affaire du terrorisme, tout est une affaire d'application, de mise en oeuvre. Et nous avons signé en particulier le fait qu'à J+2 les armes lourdes doivent être retirées. Ce sera essentiel, parce que l'un des apports de cet accord Minsk 2, c'est que les armes les plus puissantes doivent être retirées géographiquement, entre 50 kilomètres et 140 kilomètres de la ligne de front.
Q - Et qui va désarmer ? Qui va désarmer les miliciens et les civils ?
R - C'est surveillé par l'OSCE et nous renforçons les moyens de l'OSCE. Alors on dit parfois : «mais pourquoi est-ce que Minsk 2 marcherait alors que Minsk 1 n'a pas marché» ? Il y a plusieurs différences. Cette fois-ci, il y a les Allemands et les Français au soutien. Deuxièmement, la situation de la Russie s'est quand même beaucoup affaiblie depuis. Et puis troisièmement, cet accord est beaucoup plus précis avec notamment des dates. Mais tout est une affaire de mise en oeuvre, j'insiste là-dessus. Et les choses restent encore fragiles.
Q - Alors il y a eu seize heures de négociations âpres, tendues, chaque fois vous étiez au bord de la rupture. Les citoyens français ne savent rien. Qu'est-ce qui s'est passé ? Est-ce que vous pouvez nous aider à comprendre ce qui s'est passé pendant ces seize heures ? Comment vous négociez ? Est-ce que Poutine sortait pour téléphoner aux séparatistes ? Est-ce que M. Porochenko appelait Obama ? Ou qui ? Voilà !
R - Non, d'abord on prépare la négociation. L'idée selon laquelle on arrive les mains dans les poches et que l'on va régler ce problème est fausse. Cela a été préparé, d'une façon très précise, à la fois très politique et très professionnelle. La situation était tellement mauvaise que, du côté allemand et du côté français, nous nous sommes dits : il faut prendre une initiative. Alors l'initiative, il faut la préparer techniquement, et puis il faut qu'elle intervienne au bon moment. Et c'est François Hollande et Angela Merkel qui, ensemble, ont proposé à M. Porochenko et à M. Poutine un plan de paix. C'était la semaine précédant Minsk et, ensuite, il y a tout un travail à faire par nous les ministres et par nos collaborateurs, pour petit à petit éliminer un certain nombre de difficultés. Ensuite, on décide finalement d'aller à Minsk.
Q - Et quand on est à Minsk, toute une nuit, enfermés dans ce palais immense, de marbre, fait par le dictateur du coin !
R - On était enfermés dans une grande pièce ronde et il n'y avait pas de journalistes, je vous le précise, ce qui facilite la conversation... Nous étions une vingtaine, Russes, Allemands, Ukrainiens et Français autour de la table. Et on est resté dix-sept heures ensemble, avec au départ un texte qui traduisait les points d'accord et de désaccord mais avec une question de savoir si nous voulions aller vers la paix. Alors évidemment il y a des phases, dans cette négociation. Il y a des petits groupes qui se forment, de temps en temps à deux, à quatre, à huit, à dix. Il y a, comme dans une tragédie, des moments de tension.
Q - Est-ce qu'il y a eu des moments de colère ? Par exemple, à un moment, quelqu'un tape sur la table et dit «ça suffit ! On claque la porte, on met la pression...» ?
R - Non, il n'y a pas eu de moments de colère. Je dois dire que les différents intervenants maîtrisent leurs nerfs. Mais il y a des moments surprenants. Par exemple, pendant dix-sept heures, il faut quand même manger. Et il y a eu ce contraste extraordinaire : on était en train de négocier la guerre ou la paix, et des petites jeunes filles qui passaient avec des biscuits. En même temps, c'est très intéressant, la psychologie des uns et des autres, et puis les méthodes de négociation...
Q - Qu'avez-vous appris ? Peut-être pas de Mme Merkel ou de François Hollande, mais de M. Poutine... ?
R - Appris, je ne sais pas... En tout cas, ce qui m'a frappé, c'est la complicité, dans le sens positif de ce terme, entre le président français et la chancelière allemande. On peut dire que si la paix advient en Ukraine, on le doit à ces deux personnalités.
Q - Et cela veut dire que le couple franco-allemand a franchi une étape aussi dans leurs relations ?
R - Oui, parce que quand vous vivez des choses comme ça, c'est quelque chose qui reste toute la vie. Et puis une chose m'a frappée, c'est qu'après une très longue discussion, il fallait que le groupe de contact, qui comporte l'OSCE, les séparatistes surtout et les Ukrainiens, accepte ça. Et eux étaient installés dans un autre endroit de la ville. Donc une fois que nous avons trouvé un accord, il a fallu d'abord le traduire en russe. Et là les Russes ont toujours une méthode, que je connais, pour avoir souvent négocié avec eux, c'est qu'on se met d'accord si possible sur un texte, et puis alors quand on le traduit en russe, ils essayent de regagner dans la traduction ce qu'ils ont perdu ou ce qu'ils ont concédé. Donc cela prend encore une heure. Ensuite, une fois que l'accord a été trouvé, il faut qu'il soit accepté par les combattants, donc les séparatistes...
Q - Mais à un moment, Poutine est sorti ? Il est allé s'enfermer dans une pièce ?
R - Oui, mais il avait une pièce au-dessus, où il avait sans doute plus d'aise que nous.
Q - Oui, mais il a fallu aller le chercher. Pourquoi il a fallu le chercher ? Il boudait, ou il était en colère... ?
R - Non.
Q - ...ou il était en train de se faire dominer par les séparatistes qui ne voulaient pas arrêter... ?
R - Je ne suis pas sûr que cette présentation corresponde à la réalité ! Mais en tout cas, nous, nous avions conclu un accord, et il fallait qu'il soit endossé, accepté par les séparatistes sur le terrain. Et là il y a eu un moment un peu difficile, où nous avons dit au président Poutine : «écoutez, nous comprenons bien que ce n'est pas vous qui dirigez les séparatistes, comme chacun le sait, mais enfin, vous avez probablement une certaine influence sur eux et il faut en user». Il en a usé, et donc nous nous sommes mis d'accord.
Q - Donc il est leur chef ou il les suit ?
R - Vous savez, il y a un proverbe qui lie ces deux éléments ! Mais non, je crois qu'ils ne sont pas totalement étrangers les uns aux autres. En tout cas, l'accord a été conclu. Alors c'est un accord très difficile, délicat, où tout est pesé au trébuchet. Il y a deux problèmes très compliqués : un, comment faire en sorte que la frontière entre l'Ukraine et la Russie redevienne une frontière normale...
Q - Qui la contrôle ? Qui va la contrôler ?
R - ...Et cela a donné lieu à de très longues négociations et ce sera d'abord le travail de l'OSCE, et ensuite, normalement, celui des Ukrainiens du côté ukrainien, et des Russes. Mais cela ne se fera uniquement qu'après avoir trouvé la solution au deuxième problème qui concerne le futur statut de la région du Donbass.
Q - Alors justement, vous avez dit : décentralisation. Est-ce que ce n'est pas une sorte de pudeur pour ne pas dire «fédération», «fédéralisation», qui ne plaît pas à Kiev ?
R - Il y a toute une discussion. Les mots sont toujours très importants, mais les mots fâchent. Du côté ukrainien, on dit : «décentralisation» et du côté russe, on dit : «autonomie». Et comme il était très difficile de se mettre d'accord sur les mots, on s'est mis d'accord sur les compétences. Vous voyez, il y a en bas de page un renvoi sur les compétences de la future région du Donbass, de Lougansk et de Donetsk. C'est un des points les plus difficiles. Nous, ce que nous souhaitons - parce que dans une négociation, il ne faut pas simplement entendre le point de vue de l'autre, il faut dire vers où nous voulons aller, nous les Français, nous les Allemands - nous voulons, enfin pour l'instant c'est très difficile à envisager mais c'est notre objectif, que l'Ukraine, géographiquement et historiquement, ait à la fois une bonne relation avec la Russie, elle en est voisine, et en même temps de bonnes relations avec l'Union européenne. Cela nécessite une très large décentralisation pour les régions de l'est. Et c'est vers cela que nous travaillons.
Q - C'est-à-dire que l'Ukraine peut être comme un pont entre les deux, mais elle ne sera pas absorbée par l'un des pays ?
R - C'est l'objectif, à la fois un pont, et un État indépendant.
Q - Vous avez discuté, vous avez vu M. Poutine, comme ça, pendant seize heures, dix-sept heures...
R - Mais il n'y a pas seulement M. Poutine, il y a aussi M. Porochenko, Mme Merkel, M. Hollande...
Q - ...Il y a tous les autres - d'accord. On dit que M. Poutine veut annexer l'Ukraine, qu'il veut éviter l'isolement de la Russie, qu'il veut reconquérir progressivement les États de l'ex-URSS. Que veut M. Poutine ?
R - Mon sentiment, c'est qu'il souhaiterait que la Russie ait une pesée particulière sur les États voisins. Non pas les annexer - internationalement ce serait impossible, et puis ce serait une charge tellement lourde pour lui, parce que l'Ukraine, notamment les provinces de l'Est, sont dans une situation épouvantable - mais peser sur ces États. Et nous, toute notre tâche est de lui faire comprendre que chaque pays est indépendant, que nous respectons la Russie, que nous souhaitons avoir de bonnes relations avec elle, mais que nous ne voulons pas passer sous les fourches caudines de la Russie.
Q - Est-ce que la paix progresse, Laurent Fabius ?
R - Si le cessez-le-feu est respecté et qu'on arrive à retirer les armes lourdes, à faire ce qui est dans l'accord de Minsk 2, oui, ce sera un immense pas vers la paix, et toute notre diplomatie tend vers cela.
Q - Et on se donne combien de temps pour savoir si c'est vrai ou pas ? Parce qu'après il y a les sanctions, ou bien on les accentue, on les amplifie, ou bien on les lève.
R - Bien sûr. Dès le début, rappelez-vous, je l'ai dit à ce micro, notre attitude c'est : dialogue et fermeté. Dialogue, parce qu'on ne va pas faire la guerre à la Russie. Fermeté, parce qu'on a eu besoin de sanctions pour la faire bouger. Si les choses s'améliorent, il y aura une diminution des sanctions. Si le cessez-le-feu, du fait des Russes ou des séparatistes, n'est pas respecté, ou les étapes suivantes, il y aura un renforcement des sanctions.
Q - Dans quels délais, là ? On se donne deux, trois mois, un mois, deux mois... ?
R - C'est entre maintenant et la fin de l'année.
(...)
Q - On disait tout à l'heure que les Américains peut-être faisaient la moue. Est-ce qu'ils ne sont pas un peu dépités que pour les problèmes liés à l'Ukraine, ce soit les Européens qui traitent un problème qui est européen, eux qui sont présents à Kiev ...
R - Non.
Q - ...qui considéraient peut-être que l'OTAN pouvait avoir un rôle important, que l'Ukraine appartiendrait plutôt d'un côté plutôt que d'un autre ...
R - Nous avons des contacts très fréquents avec les Américains. J'ai des contacts chaque semaine avec John Kerry. Le président de la République a des contacts avec le président Obama mais votre question, si vous permettez, est très bonne puisqu'elle va me permettre de faire une réponse qui, je l'espère, ne sera pas moins bonne. (...).
* Syrie
(...)
Q - Une question sur la Syrie. Il y a des députés du groupe d'amitié France/Syrie avec des élus socialistes, M. Gérard Bapt est je pense le président de ce groupe qui envisage d'aller à Damas. Est-ce qu'ils sont en mission de votre part ou de la France ?
R - Non, clairement non. Mais plus largement, je pense qu'on ne peut jamais faire d'un pyromane un pompier et je vais m'expliquer. M. Bachar Al-Assad n'a rien à envier à Daech et réciproquement en matière de barbarie. L'idée est développée par certains, donc il faut toujours écouter mais l'idée qu'on pourrait trouver la paix en Syrie en faisant confiance à M. Bachar Al-Assad et en pensant qu'il est l'avenir de son pays est une idée que je crois fausse. Pourquoi ? Parce que si par malheur, M. Bachar Al-Assad était appelé à être celui qui doit faire l'avenir de la Syrie, tous ceux qui sont contre M. Bachar Al-Assad - je rappelle qu'il y a eu 220.000 morts quand même et des millions de réfugiés -, du coup n'auraient comme alternative que d'aller au soutien des terroristes de Daech et il faut donc trouver une solution.
La solution n'est pas l'écroulement de ce qu'il reste de la Syrie ; ce serait absurde. La solution à laquelle les Russes travaillent, l'Égypte travaille, nous-mêmes travaillons, c'est de trouver un accord entre, d'une part, certains éléments du régime -mais pas avec M. Bachar Al-Assad compte tenu de la situation et du passé- et d'autre part, l'opposition. Nous travaillons en ce sens. Ce n'est pas par rapport à une personne en particulier mais il faut bien comprendre que dans l'état dramatique qui est celui de la Syrie, ce n'est pas sur cette personne que peut reposer l'avenir. En revanche, il faut qu'il y ait des discussions, je le dis, avec certains éléments du régime.
Q - D'accord, vous avez des discussions mais les députés, ils ne peuvent pas être des médiateurs... Vous leur demandez de ne pas y aller ? Vous condamnez enfin, Gérard Bapt est un honorable parlementaire ...
R - En tout cas, ils ne sont porteurs d'aucun message officiel de la diplomatie et quand le président de la République ou moi-même, nous avons un choix diplomatique à faire nous le faisons, nous l'assumons.
Q - Donc vous préféreriez qu'ils n'y aillent pas ?
R - Je ne vais pas me lancer là-dedans, ce sont de grands garçons et voilà, c'est tout mais je définis quelle est la politique de la France. (...).
* Union européenne - Grèce
(...)
Q - Sur la Grèce. Demain, c'est une réunion de l'Eurogroupe. Le temps presse, est-ce qu'on va vers un rééchelonnement de la dette grecque ?
R - La difficulté dans l'affaire grecque, c'est qu'il faut concilier deux respects, le respect du vote par les électeurs, ils ont voté contre ce que j'appellerais «l'austérité perpétuelle» et le respect des engagements de la Grèce : la Grèce a pris des engagements en matière de réforme. Il y a déjà eu des discussions et au départ, cela ne donnait pas de résultats. Maintenant, cela avance un petit peu puisque le Premier ministre Tsipras a dit que 70 % du plan de réforme qui avait été prévu précédemment pouvait être conservé, il reste les 30 % à discuter.
Je pense que, j'espère en tout cas et la France y travaille, que l'on va arriver à une solution. Il faut que le gouvernement grec nous dise quel est son plan de réforme pour assurer la croissance. Déjà, des résultats ont été obtenus puisque ce qu'on appelle l'équilibre primaire du budget est respecté, et pour le reste, oui, on va discuter bien sûr de l'endettement. Alors, il n'est pas question d'annuler les dettes mais les techniciens peuvent discuter de ce qu'on appelle la maturité. C'est donc M. Sapin pour le gouvernement français qui va discuter de cela, et il faut aller assez vite parce qu'il y a des échéances à la fin février.
Q - Ils n'ont plus de sous, il faut être clair !
R - Oui, vous résumez bien le problème.
Q - Et en même temps, ils sont en train, apparemment M. Tsipras et son ministre Varoufakis, de passer de l'arrogance et de la provocation à la découverte des réalités et il faut...
R - De l'arrogance non...
Q - Un petit peu il faut reconnaître ça !
R - Vous connaissez la situation de la Grèce, il y a beaucoup de citoyens grecs qui ont perdu entre 25 et 50 % de leurs revenus, c'est énorme !
Q - C'est à eux qu'on pense oui !
(...).
* Tourisme
(...)
Q - On peut vous poser une question : Vous êtes le ministre chargé de la promotion du tourisme. La loi Macron, en tout cas ce qui concerne le travail du dimanche, a été votée la nuit dernière à l'Assemblée, ça viendra au Sénat au mois d'avril. Ce sont donc les maires qui décideront, mais l'idée c'est, pour certaines villes, 12 dimanches par an. Est-ce que vous êtes satisfait ? Parce que vous avez été un des promoteurs, à l'époque. Et est-ce que vous avez des arguments pour convaincre la maire de Paris, Mme Anne Hidalgo et d'autres maires.
R - Comme vous l'avez souligné, je suis chargé aussi de la promotion du tourisme, national et international, qui est un secteur qui en termes d'emplois, et de commerce extérieur, est déjà extrêmement important, et qui peut devenir encore plus important. La France a des atouts naturels extraordinaires en matière de tourisme, mais on peut encore développer cela, et j'essaie de le faire. Et dans ce cadre, j'ai dit, j'étais un des premiers à le dire, que par exemple le fait que nos très grands magasins à Paris n'étaient pas ouverts le dimanche, c'était absurde !
Q - Non mais, maintenant ? Comment on fait... Et puis il y a les zones internationales, de tourisme international... ?
R - Il y en a un certain nombre qui ont été définies, l'Assemblée a voté cela. Je pense que c'est une très bonne chose. Et donc il va falloir l'appliquer, tout en sachant que là où ça va s'appliquer, pour les salariés, ce sera sur une base de volontariat, et ils seront payés beaucoup plus. Donc cela va à la fois créer des emplois, apporter un supplément de pouvoir d'achat aux salariés, et permettre aux touristes, qu'ils soient français ou étrangers, d'être beaucoup plus nombreux. Donc je pense que c'est bénéfique.
Q - Merci d'être venu.
R - Merci à vous.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 février 2015