Texte intégral
M. le président. Pour le groupe socialiste, la première question est posée par M . le président Louis Mermaz, qui a la parole.
M. Louis Mermaz. Ma question s'adresse au Premier ministre.
Monsieur le Premier ministre, lors d'une récente émission télévisée, les Français ont pu entendre un échange aussi dense que passionné entre MM . Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou . L'un comme l'autre ont rappelé la fermeté des engagements qu'ils ont conclus en juin et en août 1988 sous votre égide, mais ils ont aussi déclaré qu'il s'agissait d'un accord à trois, impliquant la parole de la France.
Oui, le référendum, partie intégrante des accords de Matignon, est là pour assurer nos partenaires de Nouvelle-Calédonie que la parole de la France sera respectée dans dix ans.
Voilà pourquoi ce que nous déciderons, les uns et les autres, le 6 novembre est essentiel pour la paix en Nouvelle-Calédonie et pour notre avenir commun.
M. Gérard Chesseguet. La question !
M. Louis Mermaz. D'où le caractère solennel de la décision que le peuple français est appelé à prendre par la voie référendaire.
Mais pour que la paix soit maintenue et pour que l'espoir renaisse, les mesures d'accompagnement décidées par le Gouvernement seront également déterminantes.
Pouvez-vous nous préciser, monsieur le Premier ministre, la manière dont la France entend promouvoir la véritable égalité économique, sociale, culturelle et politique de l'ensemble des Calédoniens ? Cette égalité est nécessaire pour réussir la décolonisation dans le cadre de la République française et pour ouvrir à chacun des perspectives nouvelles. Cela est nécessaire aussi pour assurer la pérennité de la présence française dans le Pacifique Sud. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Michel Rocard, Premier ministre. Monsieur le député, ...
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Du calme !
M. le Premier ministre. ... je suis en effet certain, tout comme vous, que ceux qui ont assisté à l'échange télévisé auquel vous avez fait référence ne se posent plus beaucoup de questions.
M. Jacques Godfrain. Si ! Pas mal !
M. le Premier ministre. Ils ont compris et le sens du référendum, et la nécessité d'y prendre part. Ils ont aussi mesuré ce qui est en jeu : la confiance que l'on peut avoir, en Nouvelle-Calédonie, en la parole de la France.
Le F.L.N.K.S. s'est engagé. Le R.P.C.R. s'est engagé. Le Gouvernement s'est engagé. Mais, naturellement, aucun gouvernement ne peut être assuré de durer dix ans. (Rires sur les bancs des groupes du Rassemblement pour la République et Union pour la démocratie française.)
M. Jacques Blanc et M. Jean-Claude Gaudin. Eh non !
M. le Premier ministre. Dès lors, après certaine déclaration récente, on comprendra que les partenaires de l'accord s'inquiètent de ce qui adviendra durant cette période.
A cette inquiétude, je veux apporter quatre réponses.
Premièrement, les accords conclus ont fait une large part au développement économique, social et culturel de la Nouvelle-Calédonie. C'est dans ces domaines surtout que se mesurera la volonté réelle de la France de mener à bien ce que nous avons appelé une décolonisation réussie dans le cadre des institutions de la République.
Ces mesures de formation, de prévention sanitaire, d'adaptation des conditions de l'enseignement, de chantiers de développement sont déjà à l'oeuvre sur le terrain, vous le savez sûrement. Il ne se passe pas de semaine sans que je ne m' assure du suivi détaillé des engagements pris.
Deuxièmement, le référendum est l'expression directe de la souveraineté nationale. Il est vrai qu'en droit ce qu'un référendum a fait, une loi ordinaire peut théoriquement le défaire. C'est vrai. Mais il est vrai aussi, et nul ne l'ignore, que même les plus inconscients des dirigeants politiques y réfléchiront à deux fois avant de remettre en cause ce que le peuple aura ratifié. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Murmures sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
Troisièmement, il faut toujours faire la part des choses. Annoncer aujourd'hui qu'on ne s'estime pas lié relève avant tout de préoccupations purement politiciennes et circonstancielles.
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Ça commence !
M. le Premier ministre. Mais, monsieur le député, le temps fera son oeuvre. Quoi que dise tel ou tel en 1988, j'espère qu'aucun d'entre eux ne serait assez irresponsable (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République)...
M. Robert-André Vivien. Ça recommence, monsieur le président !
M. le Premier ministre. ... pour refaire de la Nouvelle-Calédonie, à un moment ou à un autre, un enjeu de politique métropolitaine. Bon gré, mal gré, ils seront liés par ces accords, et c'est justement ce à quoi ils ne parviennent pas à se résigner.
Quatrièmement, enfin, certains ont déjà parfaitement compris où réside l'intérêt national. Après bien d'autres, M. Michel Noir a eu le courage de dire tout haut (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République) ce que beaucoup de gaullistes authentiques pensent tout bas. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Claude Labbé. Ah non ! Pas ça !
M. le Premier ministre. Comme je me réjouis de pouvoir saluer à la fois le sens de l'Etat et celui de l'honneur !
M. Robert-André Vivien. Vous n'avez pas honte ! Il n'est pas en séance !
M. le Premier ministre. Je sais bien que la Nouvelle-Calédonie, pour beaucoup de nos concitoyens, c'est bien loin, bien loin de leur propre région, et surtout bien loin de leurs soucis quotidiens.
M. Arthur Dehaine. Mais pas de notre coeur !
M. le Premier ministre. Je sais également que beaucoup ont le sentiment, puisque l'accord est fait, qu'on les dérange pour rien.
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. C'est vrai !
M. le Premier ministre. Mais à ceux-là, je veux dire avec gravité que, dans la longue histoire de la décolonisation, si souvent dramatique, les problèmes n'ont paru très proches que lorsqu'il était trop tard pour les régler convenablement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Puisse la Nouvelle-Calédonie ne pas envahir à nouveau les préoccupations quotidiennes de nos compatriotes métropolitains comme il y a six mois ! Qu'elle reste proche par la pensée et par le coeur suffira bien assez à réussir l'entreprise de réconciliation !
M. Jean Kiffer. Et les gendarmes assassinés ?
M. le Premier ministre. Il y a à cela une condition : que l'oeuvre de décolonisation dans le cadre de nos institutions soit couronnée de succès. La première étape en est le geste de fraternité que les Français auront à faire dimanche. Dix minutes pour voter, pour dix ans et plus de stabilité, de justice et de paix civile...
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Propagande !
M. le Premier ministre. ... c'est un beau geste, porteur d'avenir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Louis Mermaz. Ma question s'adresse au Premier ministre.
Monsieur le Premier ministre, lors d'une récente émission télévisée, les Français ont pu entendre un échange aussi dense que passionné entre MM . Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou . L'un comme l'autre ont rappelé la fermeté des engagements qu'ils ont conclus en juin et en août 1988 sous votre égide, mais ils ont aussi déclaré qu'il s'agissait d'un accord à trois, impliquant la parole de la France.
Oui, le référendum, partie intégrante des accords de Matignon, est là pour assurer nos partenaires de Nouvelle-Calédonie que la parole de la France sera respectée dans dix ans.
Voilà pourquoi ce que nous déciderons, les uns et les autres, le 6 novembre est essentiel pour la paix en Nouvelle-Calédonie et pour notre avenir commun.
M. Gérard Chesseguet. La question !
M. Louis Mermaz. D'où le caractère solennel de la décision que le peuple français est appelé à prendre par la voie référendaire.
Mais pour que la paix soit maintenue et pour que l'espoir renaisse, les mesures d'accompagnement décidées par le Gouvernement seront également déterminantes.
Pouvez-vous nous préciser, monsieur le Premier ministre, la manière dont la France entend promouvoir la véritable égalité économique, sociale, culturelle et politique de l'ensemble des Calédoniens ? Cette égalité est nécessaire pour réussir la décolonisation dans le cadre de la République française et pour ouvrir à chacun des perspectives nouvelles. Cela est nécessaire aussi pour assurer la pérennité de la présence française dans le Pacifique Sud. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Michel Rocard, Premier ministre. Monsieur le député, ...
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Du calme !
M. le Premier ministre. ... je suis en effet certain, tout comme vous, que ceux qui ont assisté à l'échange télévisé auquel vous avez fait référence ne se posent plus beaucoup de questions.
M. Jacques Godfrain. Si ! Pas mal !
M. le Premier ministre. Ils ont compris et le sens du référendum, et la nécessité d'y prendre part. Ils ont aussi mesuré ce qui est en jeu : la confiance que l'on peut avoir, en Nouvelle-Calédonie, en la parole de la France.
Le F.L.N.K.S. s'est engagé. Le R.P.C.R. s'est engagé. Le Gouvernement s'est engagé. Mais, naturellement, aucun gouvernement ne peut être assuré de durer dix ans. (Rires sur les bancs des groupes du Rassemblement pour la République et Union pour la démocratie française.)
M. Jacques Blanc et M. Jean-Claude Gaudin. Eh non !
M. le Premier ministre. Dès lors, après certaine déclaration récente, on comprendra que les partenaires de l'accord s'inquiètent de ce qui adviendra durant cette période.
A cette inquiétude, je veux apporter quatre réponses.
Premièrement, les accords conclus ont fait une large part au développement économique, social et culturel de la Nouvelle-Calédonie. C'est dans ces domaines surtout que se mesurera la volonté réelle de la France de mener à bien ce que nous avons appelé une décolonisation réussie dans le cadre des institutions de la République.
Ces mesures de formation, de prévention sanitaire, d'adaptation des conditions de l'enseignement, de chantiers de développement sont déjà à l'oeuvre sur le terrain, vous le savez sûrement. Il ne se passe pas de semaine sans que je ne m' assure du suivi détaillé des engagements pris.
Deuxièmement, le référendum est l'expression directe de la souveraineté nationale. Il est vrai qu'en droit ce qu'un référendum a fait, une loi ordinaire peut théoriquement le défaire. C'est vrai. Mais il est vrai aussi, et nul ne l'ignore, que même les plus inconscients des dirigeants politiques y réfléchiront à deux fois avant de remettre en cause ce que le peuple aura ratifié. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Murmures sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
Troisièmement, il faut toujours faire la part des choses. Annoncer aujourd'hui qu'on ne s'estime pas lié relève avant tout de préoccupations purement politiciennes et circonstancielles.
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Ça commence !
M. le Premier ministre. Mais, monsieur le député, le temps fera son oeuvre. Quoi que dise tel ou tel en 1988, j'espère qu'aucun d'entre eux ne serait assez irresponsable (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République)...
M. Robert-André Vivien. Ça recommence, monsieur le président !
M. le Premier ministre. ... pour refaire de la Nouvelle-Calédonie, à un moment ou à un autre, un enjeu de politique métropolitaine. Bon gré, mal gré, ils seront liés par ces accords, et c'est justement ce à quoi ils ne parviennent pas à se résigner.
Quatrièmement, enfin, certains ont déjà parfaitement compris où réside l'intérêt national. Après bien d'autres, M. Michel Noir a eu le courage de dire tout haut (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République) ce que beaucoup de gaullistes authentiques pensent tout bas. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Claude Labbé. Ah non ! Pas ça !
M. le Premier ministre. Comme je me réjouis de pouvoir saluer à la fois le sens de l'Etat et celui de l'honneur !
M. Robert-André Vivien. Vous n'avez pas honte ! Il n'est pas en séance !
M. le Premier ministre. Je sais bien que la Nouvelle-Calédonie, pour beaucoup de nos concitoyens, c'est bien loin, bien loin de leur propre région, et surtout bien loin de leurs soucis quotidiens.
M. Arthur Dehaine. Mais pas de notre coeur !
M. le Premier ministre. Je sais également que beaucoup ont le sentiment, puisque l'accord est fait, qu'on les dérange pour rien.
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. C'est vrai !
M. le Premier ministre. Mais à ceux-là, je veux dire avec gravité que, dans la longue histoire de la décolonisation, si souvent dramatique, les problèmes n'ont paru très proches que lorsqu'il était trop tard pour les régler convenablement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Puisse la Nouvelle-Calédonie ne pas envahir à nouveau les préoccupations quotidiennes de nos compatriotes métropolitains comme il y a six mois ! Qu'elle reste proche par la pensée et par le coeur suffira bien assez à réussir l'entreprise de réconciliation !
M. Jean Kiffer. Et les gendarmes assassinés ?
M. le Premier ministre. Il y a à cela une condition : que l'oeuvre de décolonisation dans le cadre de nos institutions soit couronnée de succès. La première étape en est le geste de fraternité que les Français auront à faire dimanche. Dix minutes pour voter, pour dix ans et plus de stabilité, de justice et de paix civile...
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Propagande !
M. le Premier ministre. ... c'est un beau geste, porteur d'avenir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)