Interview de M. Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du gouvernement, à "France Info" le 5 décembre 2016, sur la déclaration annoncée de Manuel Valls à la primaire de la gauche pour l'élection présidentielle de 2017, sur la nécessité d'un rassemblement à gauche,

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Texte intégral

FABIENNE SINTES
L'émission politique de Franceinfo, c'est tout de suite avec Jean-Michel APHATIE. Bonjour.
JEAN-MICHEL APHATIE
Bonjour Fabienne.
FABIENNE SINTES
Gilles BORNSTEIN est là aussi et Guy BIRENBAUM. Notre invité ce matin est le porte-parole du gouvernement.
JEAN-MICHEL APHATIE
Bonjour Stéphane LE FOLL.
STÉPHANE LE FOLL
Bonjour.
JEAN-MICHEL APHATIE
Manuel VALLS va déclarer sa candidature à la primaire des socialistes, de la gauche, de la Belle alliance – je ne sais pas comment il faut l'appeler – à dix-huit heures trente à Évry ce soir. Comment réagissez-vous ? Ce n'est pas une surprise mais ce sera fait.
STÉPHANE LE FOLL
Ce n'est pas une surprise. J'ai appris ça quand j'étais dans la voiture ce matin. Voilà, il annoncera donc sa candidature ce soir à dix-huit heures trente. Je ne peux pas vous dire autre chose.
JEAN-MICHEL APHATIE
Il ne téléphone pas à son porte-parole pour lui dire : Tiens !.
STÉPHANE LE FOLL
Non, je ne crois pas. Non, non, non.
JEAN-MICHEL APHATIE
Pourquoi ? Les ponts sont coupés ?
STÉPHANE LE FOLL
Les ponts ne sont pas coupés.
FABIENNE SINTES
Vous êtes fâché ? Fâché-fâché ?
STÉPHANE LE FOLL
Non, je ne suis pas fâché du tout. Les ponts ne sont pas coupés mais il n'appelle pas son porte-parole pour annoncer sa candidature à la présidentielle. Le porte-parole s'est exprimé d'ailleurs assez clairement pas en tant que porte-parole, parce qu'il y a un moment où tout cela doit s'arrêter. Le porte-parole du gouvernement Stéphane LE FOLL qui a répondu à toutes les questions, qui a été pendant près de trois ans et demi un porte-parole qui a porté la parole, il va devenir aussi ou redevenir un homme politique. À partir de là, j'ai dit ce que j'avais à dire sur le fait que François HOLLANDE ne soit pas candidat et j'avais dit d'ailleurs aussi sur le Premier ministre que s'il voulait être candidat, il fallait qu'il démissionne. Voilà, il souhaite être candidat et il sera candidat ce soir à dix-huit heures trente.
JEAN-MICHEL APHATIE
Avant de parler des conséquences effectivement sur le gouvernement, restons un instant sur la primaire. Manuel VALLS sera votre candidat à la primaire ?
STÉPHANE LE FOLL
J'ai dit que je prendrai du temps et un peu de recul. Le temps et le recul.
JEAN-MICHEL APHATIE
On vous a invité un peu tôt, je trouve. On n'aurait pas dû vous inviter ce matin ; on aurait dû vous inviter dans quelques jours.
STÉPHANE LE FOLL
Non, non, non, pas du tout ! Pas du tout, au contraire ; c'est un grand plaisir. Je suis parti ce matin à six heures cinquante dans le train, c'était parfait. J'ai rencontré des Sarthois. Je voyage en seconde, donc des Sarthois qui partent au travail tous les matins aussi du Mans. Non, c'est bien.
GILLES BORNSTEIN
Tous les Hollandais historiques avaient, avant même le retrait de François HOLLANDE, adoubé Manuel VALLS. Michel SAPIN à votre place, Jean-Yves LE DRIAN aussi. Vous, on vous sent un peu plus hésitant. Pourquoi ?
STÉPHANE LE FOLL
Je ne sais pas si je suis plus historique ou moins historique.
GILLES BORNSTEIN
Non, mais vous êtes plus hésitant. Ça, c'est certain en tout cas.
STÉPHANE LE FOLL
J'ai dit ce que j'avais à dire.
GILLES BORNSTEIN
Mais pourquoi autant de tiédeur vis-à-vis de l'encore actuel Premier ministre ?
STÉPHANE LE FOLL
Ce n'est pas de la tiédeur.
GILLES BORNSTEIN
Si, c'est de la tiédeur. Les autres le soutiennent et pas vous.
STÉPHANE LE FOLL
Vous arrêtez de me dire que les autres le soutiennent et pas moi et donc pourquoi je ne serais pas comme les autres. Je ne suis pas comme les autres.
GILLES BORNSTEIN
Pourquoi ?
STÉPHANE LE FOLL
Pourquoi ? Pour les raisons que je vous ai dites. Je prendrai du temps et je ferai mon choix avec le recul nécessaire. Je ne suis pas comme les autres si vous voulez me poser la question. Ni comme Jean-Yves LE DRIAN, ni comme Michel SAPIN. La preuve d'ailleurs, je n'ai jamais dit ce qu'ont dit Jean-Yves LE DRIAN et Michel SAPIN, donc je ne suis pas comme les autres.
GILLES BORNSTEIN
Mais qu'est-ce qui vous ennuie dans cette candidature de Manuel VALLS ?
STÉPHANE LE FOLL
Je pense que la gauche a besoin de se rassembler. Je pense qu'une candidature, je veux aussi voir les enjeux, les lignes directrices. Je ne suis pas là pour annoncer quelque soutien que ce soit. Je suis là pour regarder politiquement ce qui nous permettra de gagner.
GUY BIRENBAUM
Vous dites : J'ai du temps.. Vous n'avez pas tant de temps que ça parce que le processus d'inscription à la primaire de la Belle alliance populaire c'est jusqu'au 15 décembre. Est-ce que, par exemple, vous pourriez être candidat, vous – pourquoi pas – pour représenter ce courant Hollandais ?
STÉPHANE LE FOLL
Non, je ne crois pas.
GUY BIRENBAUM
Je ne crois pas. ?
STÉPHANE LE FOLL
Je ne crois pas, oui. J'ai un peu de sens des responsabilités. Je ne suis pas là pour aller rajouter des divisions.
GUY BIRENBAUM
Mais faut-il un candidat qui représente votre courant ?
STÉPHANE LE FOLL
La question est posée à ceux qui pensent qu'ils peuvent être candidats. Moi, je ne me pose pas cette question. Je vous ai dit que je prendrai le temps nécessaire pour regarder tout cela avec beaucoup de recul et voir ce qui est pour moi l'essentiel. C'est comment, avec qui et pourquoi on peut gagner cette présidentielle.
FABIENNE SINTES
Quand vous aurez pris votre décision et que vous serez sûr, est-ce que vous êtes sûr d'aller voter à cette primaire au final, sincèrement ?
STÉPHANE LE FOLL
Je suis membre du Parti socialiste depuis suffisamment longtemps pour avoir quand même le sens là aussi du devoir et j'ai toujours fait mon devoir. Je suis un homme de devoir, un homme qui a montré sa loyauté et en même temps sa sincérité, donc je ferai mon devoir. Il n'y a aucun souci là-dessus. Comme vous le savez, je n'ai pas beaucoup de goût pour ce que peut proposer par exemple Arnaud MONTEBOURG, qui a dit beaucoup de choses. En particulier qu'il fallait appeler à faire venir des gens de droite pour battre François HOLLANDE. A l'époque, j'ai été le seul à dire que ce n'était pas comme ça qu'on devait faire une primaire. Je l'ai dit à plusieurs reprises. Je pense que sur ces sujets-là, il aurait dû y avoir un peu plus de ligne directrice.
GUY BIRENBAUM
De la part de qui ?
STÉPHANE LE FOLL
Mais de la part du Premier secrétaire du Parti socialiste, organisateur de la BAP. Au moment où Arnaud MONTEBOURG a dit ce qu'il a dit, j'ai été le seul à dire : « Non, on ne peut pas faire ça. »
GILLES BORNSTEIN
Donc s'il gagne la primaire, vous ne voterez pas pour Arnaud MONTEBOURG ?
STÉPHANE LE FOLL
Je voterai d'abord et après on verra s'il gagne la primaire.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous avez parlé de rassemblement tout à l'heure.
STÉPHANE LE FOLL
Oui.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous pensez que comme ça, un peu spontanément, peut-être que Manuel VALLS n'a pas ce profil de rassembleur ?
STÉPHANE LE FOLL
On verra. J'ai vu aussi que le Premier secrétaire avait appelé à ce que Manuel VALLS ait un discours rassembleur. On verra.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous allez juger sur pièce. Ce soir on verra, ce sera la première étape. Manuel VALLS fait figure de favori pour vous ? Ou ce n'est pas aussi évident que ça dans la primaire ?
STÉPHANE LE FOLL
Je pense qu'il fait figure de celui qui va incarner cette gauche de gouvernement. Celle qui a gouverné pendant quatre ans et demi, cinq ans bientôt.
JEAN-MICHEL APHATIE
C'est important mais ce n'est pas suffisant.
STÉPHANE LE FOLL
Je pense que c'est important mais au-delà de ce qu'il incarne, il y aura aussi les pistes et les projets à mettre sur la table. Donc j'attendrai.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous attendrez de voir. Gilles l'a évoqué tout à l'heure : la primaire, c'est une règle. Il y a plusieurs candidats, à la fin il y a bien sûr, il y a un vainqueur, puis tous ceux qui participent à la primaire s'engagent à soutenir le vainqueur. Vous pourriez le faire quel que soit le vainqueur de la primaire de la Belle alliance populaire ? Il aura votre vote à l'élection présidentielle ?
STÉPHANE LE FOLL
J'irai voter à la primaire de la Belle alliance populaire.
GUY BIRENBAUM
Mais ce n'est pas la question.
STÉPHANE LE FOLL
Mais j'ai bien compris ! Vous me prenez vraiment pour…
GUY BIRENBAUM
Non, non, non, non.
STÉPHANE LE FOLL
Il ne faut pas croire, j'ai bien compris. Donc je réponds ce que je réponds.
JEAN-MICHEL APHATIE
C'est-à-dire que vous n'avez pas envie de répondre à la question que je vous pose aujourd'hui.
STÉPHANE LE FOLL
Je n'ai pas envie du tout de répondre à votre question.
JEAN-MICHEL APHATIE
Il y a donc un doute sur le choix que vous pourriez faire pour le candidat à la présidentielle lui-même.
STÉPHANE LE FOLL
Il y a un doute. Je ne réponds pas à votre question, contrairement à ce qu'ont fait d'autres qui ont revendiqué la primaire. Moi ce qui m'a insupporté, c'est de voir que certains s'engagent dans cette primaire au nom d'un débat et qu'ils en avaient déjà clos l'issue. Je rappelle encore qu'Arnaud MONTEBOURG, à peine il annonce sa candidature que lorsqu'on lui pose la même question, il dit : « J'irai en Saône-et-Loire m'occuper de mon jardin si c'était François HOLLANDE. » Voilà où moi j'en suis. Je suis un homme qui, depuis le début, a été d'une correction et d'une fidélité et d'une loyauté à tout le monde. Aujourd'hui, je vous l'ai dit, je prendrai mes décisions en conscience et je le ferai sur la base de ce qui sera proposé, et avec l'idée de savoir comment on peut le mieux gagner et être rassemblés. […]
FABIENNE SINTES
Stéphane LE FOLL est l'invité politique de Franceinfo ce matin. Question, Gilles BORNSTEIN.
GILLES BORNSTEIN
La candidature de Manuel VALLS parait acquise et donc son départ du gouvernement vous l'avez dit, il va donc falloir un Premier ministre, votre nom est parfois cité, qu'est-ce que vous en pensez ?
STÉPHANE LE FOLL
Vous avez indiqué parfois...
GILLES BORNSTEIN
Oui.
STÉPHANE LE FOLL
Donc, ça veut dire que c'est possible mais ça ne l'est pas non plus.
GILLES BORNSTEIN
Mais c'est possible ?
STÉPHANE LE FOLL
Et donc, à partir de là, c'est le président de la République qui décidera et je n'ai pas d'information sur ce sujet.
GILLES BORNSTEIN
Mais vous ne dites pas non ?
STÉPHANE LE FOLL
Je ne dis pas non, parce que j'ai toujours assumé mes responsabilités, mais ce n'est pas moi qui déciderais...
GILLES BORNSTEIN
Mais vous en aviez envie ?
JEAN-MICHEL APHATIE
On n'est pas candidat à Matignon, parfois on se sent prêt, on a envie, on se dit que c'est possible ?
STÉPHANE LE FOLL
Oui on se dit que c'est possible, qu'on se sent prêt...
JEAN-MICHEL APHATIE
Parce qu'on a envie, vous avez envie ?
STÉPHANE LE FOLL
Je ne crois pas que depuis, je vous l'ai dit, depuis le début d'ailleurs, je vais faire partie des trois ministres qui sont restés – en plus le porte-parole là – mais qui sont restés en responsabilité, voilà, je crois que j'ai acquis une expérience et une vision des choses qui peut tout à fait justifier le fait qu'on cite mon nom. Après, une fois que j'ai dit ça, ce n'est pas moi qui déciderai.
JEAN-MICHEL APHATIE
Mais vous en avez envie ?
STÉPHANE LE FOLL
Mais je ne veux pas répondre, je ne suis pas là pour parler de moi, moi c'est ça qui me gêne. J'en ai envie, j'ai bien compris que les seules questions qui sont posées ce sont celles-là, ce n'est pas comme ça que je me les pose. Est-ce que je peux faire des choses ? Est-ce que je peux être à la hauteur ? Je dis oui ! Voilà, c'est tout. Mais après ce n'est pas moi qui déciderai.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous avez envie de retrouver votre liberté ?
STÉPHANE LE FOLL
Ah ! Oui, j'ai une envie de retrouver un peu de liberté, oui vous avez compris ça Jean-Michel APHATIE.
JEAN-MICHEL APHATIE
De donner quelques baffes un peu, c'est ça ?
STÉPHANE LE FOLL
On verra ça plus tard.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous avez un peu envie de ça ?
STÉPHANE LE FOLL
Non, non, je ne veux pas en rajouter, moi je suis quelqu'un qui est tout à fait responsable et depuis longtemps.
JEAN-MICHEL APHATIE
On s'est dit en préparant cette émission, depuis la semaine dernière et depuis le renoncement de François HOLLANDE, vous rappelez souvent que ça fait 26 ans que vous travaillez avec lui...
STÉPHANE LE FOLL
Pas souvent, je l'ai dit une fois.
JEAN-MICHEL APHATIE
D'accord, d'accord, eh bien vous voyez ça m'a marqué.
STÉPHANE LE FOLL
Oui, j'ai compris.
JEAN-MICHEL APHATIE
Donc vous êtes parmi les fidèles vous êtes un fidèle et on se demandait en préparant cette émission quel sens ça a de continuer l'action politique quand celui avec lequel vous avez travaillé autant de temps il va partir ?
STÉPHANE LE FOLL
Oui, c'est une bonne question. D'abord, si j'ai fait ce parcours, c'est parce que je partageais un certain nombre de choses avec François HOLLANDE, il y a eu des moments où j'étais en désaccord, mais j'ai toujours eu une relation qui permettait de dire ce qui me semblait être juste, aller dans le bon sens et ce qui ne l'était pas, et ça été le cas d'ailleurs pendant ce quinquennat ; après j'ai aussi - et je l'ai montré dans l'agriculture – des idées sur les grandes questions de l'agro-écologie, sur la question de la COP21, du stockage de carbone, sur les grands enjeux, la gestion des crises et d'autres sujets, j'ai aussi ma propre vision des choses. Donc jusqu'ici et jusqu'à encore longtemps, puisqu'il nous reste six mois, c'est dans un esprit collectif qu'il faut travailler et je le ferai jusqu'au bout.
GILLES BORNSTEIN
Mais vous nous dites quand même que Stéphane LE FOLL se met à son compte ce matin ?
STÉPHANE LE FOLL
Pas ce matin à son compte, je vous dis simplement qu'effectivement j'ai été avec Jean-Marc AYRAULT, puis avec Manuel VALLS un porte-parole de gouvernement et je continuerai à travailler pour le collectif et le gouvernement jusqu'au bout – et il reste six mois – et il y a encore beaucoup de choses à faire, mais je vous ai dit aussi que voilà il y a un moment où les choses, au-delà de cette fidélité du travail que j'ai toujours conduit avec François HOLLANDE, il y a un moment c'est vrai ce que j'ai fait je l'ai fait aussi parce que je pensais que ce que proposait François HOLLANDE correspondait aussi à ce je pensais et, quand ce n'était pas tout à fait ce que je pensais - et je lui ai dit - mais je me suis bien gardé de faire quelques polémiques que ce soient et ça continuera comme ça jusqu'au bout du quinquennat.
JEAN-MICHEL APHATIE
Donc, dans quel esprit est François HOLLANDE aujourd'hui ?
STÉPHANE LE FOLL
Ecoutez, je pense qu'il a pris une décision qui était sûrement très difficile, très difficile, mais je pense qu'une fois qu'elle a été prise il y a une étape qui est franchie...
JEAN-MICHEL APHATIE
Libéré ou déprimé ?
STÉPHANE LE FOLL
Oh ! J'ai l'impression plutôt, ce que j'ai vu dans son déplacement à Abu Dhabi, plutôt un peu quand même...
JEAN-MICHEL APHATIE
Il vous l'a dit ?
STÉPHANE LE FOLL
Je dis libéré, je n'en sais rien, pas ça, ce n'est pas libéré, mais en tout cas il y a eu quelque chose qui pesait sur lui qui a été levé.
JEAN-MICHEL APHATIE
Il en veut à Manuel VALLS ?
STÉPHANE LE FOLL
Non, je ne crois pas, d'ailleurs vous voyez qu'il...
JEAN-MICHEL APHATIE
Qui l'a poussé vers la sortie quand même ?
STÉPHANE LE FOLL
Vous voyez que tout se passe bien et ce midi il y aura un déjeuner, donc je ne crois pas du tout...
JEAN-MICHEL APHATIE
Ce n'est pas parce qu'il déjeune que ça se passe bien, ils déjeunent parce qu'ils sont obligés ?
STÉPHANE LE FOLL
D'abord François HOLLANDE n'est pas quelqu'un qui est rancunier, vous le savez, il y a eu suffisamment... pendant toute cette histoire de 26 ans, s'il avait fallu être rancunier avec tout ce qui s'est passé, tout ce qui a été dit sur lui et même ceux qui ont été les plus durs n'ont pas eu à subir quelques représailles que ce soient, ça sera comme ça jusqu'au bout, c'est sa marque.
JEAN-MICHEL APHATIE
Mais on peut dire que Manuel VALLS l'a poussé vers la sortie, on peut le dire ?
STÉPHANE LE FOLL
Je pense que Manuel VALLS a envie d'être candidat, voilà.
JEAN-MICHEL APHATIE
Et donc il a empêché François HOLLANDE de l'être ?
STÉPHANE LE FOLL
Non, je n'ai pas dit ça, je n'ai pas dit ça, mais en tout cas je...
FABIENNE SINTES
On va reformuler ! Il s'est donné les moyens d'être candidat, vous diriez ?
STÉPHANE LE FOLL
Il avait envie d'être candidat pour parler des envies.
GILLES BORNSTEIN
Qu'est-ce que vous regrettez de plus dans...
STÉPHANE LE FOLL
Moi je regrette, je l'ai... Le plus ? Je pense que le débat sur ce qu'on a fait et ce qui a été décidé par le président de la République pendant cinq ans – enfin quatre ans et demi maintenant et cinq ans jusqu'au bout – c'est un sujet qui méritait que celui qui s'est engagé et qui a pris des décisions puisse le défendre, ça ne sera pas le cas, donc maintenant il faut aussi qu'on soit capables sur ce qui a été fait et contrairement à ce qui dit – et c'est ça qui là aussi me gêne – alors quand c'est la droite qui le dit que ce bilan la France a décroché. Elle a décroché, mais, quand on est arrivés, déficit commercial déficit budgétaire, endettement, c'était la fuite en avant...
JEAN-MICHEL APHATIE
Non, mais quand c'est la droite qui le dit c'est de bonne guerre. Mais qu'est-ce qui...
STÉPHANE LE FOLL
C'est la logique ! Ce qui est quand même terrible c'est que depuis quatre ans et demi au sein même du Parti socialiste et au sein de la gauche que les critiques n'ont cessé d'être aussi dures et donc...
JEAN-MICHEL APHATIE
Et, donc, ça vous a fait du mal ?
STÉPHANE LE FOLL
Oui, parce qu'il y a un moment où on ne peut plus porter et on ne peut plus regarder ce qui est fait avec un peu d'objectivité. Si on penche sur la question uniquement de la Sécurité sociale, en tout cas des retraites, je vois beaucoup de gens qui partent chez moi à 60 ans avec les carrières longues, ce qui est proposé par la droite aujourd'hui c'est de reporter l'âge légal de la retraite alors que nous on a fait le choix – et c'était François HOLLANDE je m'en rappelle durant la primaire- sur la durée de cotisations, ce qui est beaucoup plus juste puisque ceux qui ont commencé tôt, qu'ont une durée de cotisations....
JEAN-MICHEL APHATIE
Peuvent partir avant.
STÉPHANE LE FOLL
Peuvent partir plus tôt, mais ça c'est une question de justice. Bon, eh bien ça, on a l'impression que ce n'est pas fondamental, c'est essentiel.
INTERVENANT
Mais c'est un problème de communication, c'est un problème de personnalité, c'est un problème politique, qu'est-ce qui s'est passé ?
STÉPHANE LE FOLL
Il s'est passé, oui, un peu tout ça sûrement.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous pourriez soutenir au bout de tout Emmanuel MACRON, vous pourriez le soutenir finalement ?
STÉPHANE LE FOLL
Non, parce que là aussi...
JEAN-MICHEL APHATIE
Il représente mieux ce que vous pensez aujourd'hui peut-être ?
STÉPHANE LE FOLL
Non, non, non. Moi je reste, je vous l'ai dit, quelqu'un qui fait partie du Parti socialiste et j'en respecte les règles, et je vous ai dit je serai et je ferai mon devoir. […]
FABIENNE SINTES
Dernière partie de l'émission politique de Franceinfo, avec Stéphane LE FOLL, ce matin. Question, Jean-Michel APHATIE.
JEAN-MICHEL APHATIE
Ségolène ROYAL représente officiellement la France aux obsèques de Fidel CASTRO à Cuba. Elle a eu hier une déclaration qui a suscité beaucoup de réactions. On écoute Ségolène ROYAL.
SÉGOLÈNE ROYAL – LE 3 DÉCEMBRE À CUBA
Il y a toujours du positif et du négatif dans les histoires, mais certains ne vont pas se rhabiller à bon compte au nom des droits de l'homme, alors qu'on sait que, ici, quand on demande des listes de prisonniers politiques, on n'en a pas. Eh bien fournissez-moi des listes de prisonniers politiques et à ce moment-là on pourra faire quelque chose. Ce n'est pas le cas, et moi je considère qu'il y a beaucoup de désinformation, parce que ça ne correspond pas effectivement au modèle que les Etats-Unis d'Amérique à l'époque ont voulu imposer à Cuba.
JEAN-MICHEL APHATIE
Il y a de la désinformation sur Cuba, dit Ségolène ROYAL, qu'en dit le porte-parole du gouvernement ?
STÉPHANE LE FOLL
Le porte-parole du gouvernement, il va essayer de faire son travail. D'abord il y avait un deuil, donc je pense que les commentaires sur Cuba, en soi, au moment où le peuple cubain, quand même, s'est largement rassemblé après le...
JEAN-MICHEL APHATIE
Il était un peu obligé, c'est un pays quadrillé, Cuba, pour être très honnête, on sait comment ça marche.
STÉPHANE LE FOLL
Oui, on sait comment ça marche, bon, très bien. Ensuite les problèmes de droits de l'homme, ils existent. Troisième point, Cuba a engagé une transition fragile et encore timide, il y a eu un accord avec les États-Unis d'OBAMA. L'Europe et la France en particulier, la présence du président de la République c'était d'accompagner et de soutenir ce processus. Il y a un accord européen qui est en discussion, avec l'Europe et Cuba, dans cet accord, la question des droits de l'homme, bien sûr, sera clairement évoquée, et pas...
JEAN-MICHEL APHATIE
Et qu'est-ce que vous pensez de...
STÉPHANE LE FOLL
Même si l'histoire on la connait, on n'est pas dans une démocratie à Cuba. Ça n'a jamais été le cas, il faut le rappeler, tout simplement.
JEAN-MICHEL APHATIE
Mais cette déclaration, là, elle vous a choqué ?
STÉPHANE LE FOLL
Écoutez, je pense que, alors que c'était, je vous l'ai dit, un deuil national à Cuba, tous ces commentaires qui étaient faits sur la question posée par Cuba, aurait pu attendre après ce deuil, ces obsèques.
GUY BIRENBAUM
Elle peut rester ministre, madame ROYAL, en disant des choses ?
STÉPHANE LE FOLL
Écoutez, là encore, ce n'est pas moi qui décide, je ne vais pas...
GILLES BORNSTEIN
Mais si vous êtes Premier ministre, c'est vous qui déciderez.
STÉPHANE LE FOLL
Eh bien, on verra, mais là, pour l'instant...
FABIENNE SINTES
Ce soir alors peut-être.
STÉPHANE LE FOLL
Pour l'instant, il n'y a pas de commentaire à faire au-delà. Voilà, je ne peux pas vous dire autre chose, je fais là encore à la fois, je rappelle la position de la France, et le président de la République y est allé, il y a un processus qui est en cours, on a un rôle, une place, pour encourager ce processus, et puis Cuba n'est pas une démocratie....
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous faites votre travail.
STÉPHANE LE FOLL
... et il y a des problèmes de liberté, et depuis longtemps. Alors, après, le contexte historique on le connait, la pression... mais on arrête là.
JEAN-MICHEL APHATIE
Cuba n'est pas une démocratie...
STÉPHANE LE FOLL
Bien sûr.
JEAN-MICHEL APHATIE
Et Stéphane LE FOLL fait son travail de porte-parole, encore une fois, ce matin.
STÉPHANE LE FOLL
Voilà.
JEAN-MICHEL APHATIE
Mais il en a quand même un peu gros sur la patate, il est temps que ça se termine. Matteo RENZI a perdu son référendum en Italie...
STÉPHANE LE FOLL
Et le Sénat restera.
JEAN-MICHEL APHATIE
On écoute aussi le président du Conseil italien.
MATTEO RENZ, PREMIER MINISTRE ITALIEN – HIER SOIR À ROME
Je réunirai cet après-midi le Conseil des ministres et remettrai au président de la République ma démission.
GILLES BORNSTEIN
Il y a beaucoup de démissions ... jour.
JEAN-MICHEL APHATIE
Traduit par Mathilde IMBERTY, je le dis, qui est correspondante de Radio France à Rome. Oui, on l'appelait le Manuel VALLS italien. Ou on disait de Manuel VALLS qu'il était le Matteo RENZI français.
STÉPHANE LE FOLL
Oui, bon, en tout cas, cette défaite elle est forte. Deuxièmement, on voit qu'à chaque fois qu'un référendum, qui est porté quand même sur un peu, comment dirais-je, d'ouverture et de remise, de modernité dans la démocratie italienne, avec le Sénat à réformer.
JEAN-MICHEL APHATIE
Vous auriez voté oui.
STÉPHANE LE FOLL
Je n'ai pas bien regardé ce qui était en jeu, mais enfin, a priori comme ça, je pensais qu'il y avait des sujets en termes de modernité, qui étaient importants. Et puis un référendum, la question qui était posée, c'était celle de la démocratie du Sénat, je crains que la réponse qui soit apportée, elle était ailleurs, ailleurs, comme souvent, enfin, comment souvent, oui, comme souvent.
JEAN-MICHEL APHATIE
Comme tout le temps.
STÉPHANE LE FOLL
Alors, sur le Brexit, on a regardé, le vote des Britanniques c'était quand même une question liée à l'immigration.
JEAN-MICHEL APHATIE
Mais donc là, vous en tirez quelles leçons ? Ça veut dire que l'on craint qu'il y ait des répercussions sur les marchés financiers, c'est une fragilisation de l'Europe, c'est un signal inquiétant ce qui s'est passé à Rome, d'après vous ?
STÉPHANE LE FOLL
Oui, c'est possiblement quelque chose qui peut avoir des conséquences, d'abord en Italie, sur une économie qui est assez fragile, je me souviens d'ailleurs les commentaires qu'il y avait, à l'époque où l'Italie, avec RENZI, allait dépasser la France, le sérieux de François HOLLANDE et des gouvernements Jean-Marc AYRAULT et Manuel VALLS, met la France en position bien meilleure que l'Italie. Bon, j'ai entendu beaucoup de choses, mais aujourd'hui, oui, ça fragilise, et ça a un côté qui...
GILLES BORNSTEIN
La social-démocratie, ça ne marche plus nulle part en Europe ? Les uns après les autres, tous les gouvernements se plantent souvent aux urnes.
STÉPHANE LE FOLL
Oui. A part quelques pays. Si je regarde par exemple ce qu'est l'Allemagne, ç'a été une grande victoire politique de la social-démocratie fut un temps. L'Allemagne, c'est un modèle rhénan, dialogue social.
GILLES BORNSTEIN
Elle n'est plus dirigée par un social-démocrate depuis quelques années.
STÉPHANE LE FOLL
Elle n'est plus dirigée par un social-démocrate, ça c'est vrai. Mais globalement, ce qu'est la social-démocratie c'est-à-dire un dialogue social poussé, un modèle social et une économie qui fonctionne et une démocratie qui est pleinement assumée. Mais c'est vrai qu'aujourd'hui, le projet politique et les partis politiques de la social-démocratie ont du mal. D'ailleurs au fond, si on y réfléchit, François HOLLANDE, sa social-démocratie ou son côté social-démocrate, c'est-à-dire dialogue et compromis, est peut-être un des éléments aussi qui a pu susciter une incompréhension en France. Il faut qu'on soit capable de réfléchir à tout cela si on veut dépasser ce qui s'est passé et ce qu'on doit faire pour aller vers cette élection présidentielle de 2017 et pour la gagner.
JEAN-MICHEL APHATIE
On a compris en vous entendant, Stéphane LE FOLL, que vous avez vécu des jours plus sympathiques.
STÉPHANE LE FOLL
Je veux juste ajouter un point sur la situation aviaire. On n'est pas du tout dans la même situation que la dernière fois. Le foie gras cette année sera d'excellente qualité. Il n'y a aucun problème en termes de consommation et je voudrais simplement passer ce message.
JEAN-MICHEL APHATIE
Il aurait été dommage de terminer cette émission sans cette information. Cette année, le foie gras est de qualité.
STÉPHANE LE FOLL
Excellent !
JEAN-MICHEL APHATIE
Merci Stéphane LE FOLL.
STÉPHANE LE FOLL
Chouette ! Chouette.
JEAN-MICHEL APHATIE
Merci.
FABIENNE SINTES
Et merci à tous. À demain.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 7 décembre 2016