Message de M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, sur le développement de la coopération politique, économique et culturelle entre l'Europe et l'Amérique latine, Bordeaux le 20 octobre 1997.

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Circonstance : Convention euro-amérique latine à Bordeaux le 20 octobre 1997

Texte intégral

Etant malheureusement empêché d'être aujourd'hui présent parmi vous, j'ai néanmoins tenu à vous adresser, par l'intermédiaire de M. Claude Martin, Secrétaire général adjoint du ministère des Affaires étrangères, un témoignage de sympathie.

Dès ma nomination, j'ai été informé du projet de Convention Euro-Amérique latine organisée par la Chambre de commerce et d'industrie de Bordeaux, et j'ai naturellement souhaité que se poursuive la coopération engagée par mes prédécesseurs avec votre assemblée consulaire pour la préparation de cette manifestation. Je connais l'intérêt que M. Juppé a porté, lors qu'il était ministre des Affaires étrangères, au développement de nos liens avec l'Amérique latine, et je suis heureux de constater que, maire de Bordeaux, il poursuit dans cette voie.
Le président de la République et le gouvernement considèrent, en effet, qu'intensifier les relations entre la France et l'Amérique latine doit être un des objectifs de notre poltique étrangère à l'époque globale.

Votre Convention s'inscrit de plus dans un cadre plus général : celui de la volonté française de favoriser l'émergence d'un nouvel ordre multipolaire à l'échelle de la planète. Ce nouvel équilibre en gestation a pour composantes, non pas seulement les 185 pays membres de l'ONU, mais aussi les grandes régions du monde qui ont, chacune, vocation à s'organiser économiquement et politiquement ; à la marche vers l'unité européenne correspond le mouvement vers l'intégration latino-américaine qui, au plan économique et commercial, est largement engagée. Et il y a bien sûr la Russie, la Chine, le Japon, l'Inde, les Etats-Unis.
La France n'a cessé de vouer depuis trois siècles à l'Amérique latine un intérêt passionné. Plus récemment l'évolution remarquable de l'Amérique latine au cours des quinze dernières années permet, aujourd'hui bien plus qu'hier, un dialogue réel, concret et riche de perspectives. Notre action peut s'organiser autour de trois grands objectifs :
- Accroître la présence des entreprises françaises dans une région émergente. Bien que celle-ci connaisse parmi les plus forts taux de croissance au monde, nos échanges avec elle ne représentent que moins de 2 % de nos échanges totaux. Nos parts de marché sont très loin d'être à la hauteur de la part de notre pays, quatrième exportateur et importateur mondial, dans le commerce international.

L'amélioration de nos positions résultera d'une action patiente et tenace : par exemple, en Argentine, au Brésil, les entreprises françaises sont parvenues au premier rang des investisseurs étrangers ; je le dis aux entreprises : qu'elles n'hésitent jamais à s'appuyer sur nos ambassades.

- Ensuite, poursuivre avec les principaux pays d'Amérique latine un vrai dialogue sur les questions régionales mais aussi sur l'ensemble des grands dossiers de l'actualité internationale.

- Enfin, faire accompagner par l'Union européenne la dynamique latino-américaine de l'intégration régionale, et appuyer pour cela la politique de coopération déjà largement engagée à travers les nombreux accords de coopération politique, économique et commerciale passés entre l'Union et les principaux pays et entités d'Amérique latine. Je n'en citerai que deux : l'accord UE/Mercosur signé en marge du Sommet de Madrid à la fin 1995 et l'accord UE/Mexique qui sera signé à la fin de l'année en cours.

L'Europe qui est déjà le principal partenaire commercial de la région - le Mercosur effectue le quart de ses échanges avec l'Union européenne - entend développer cette coopération qui, vous le savez, doit déboucher par étapes vers la libéralisation des échanges.

Le nouveau gouvernement a apporté son entier soutien au projet de Sommet des chefs d'Etat et de gouvernement d'Amérique latine et d'Europe lancé par le président Jacques Chirac lors de son déplacement en Amérique du Sud en mars 1997. Depuis lors, le projet a été entériné par le Sommet européen d'Amsterdam de juin dernier. Les consultations se poursuivent pour préparer ce grand rendez-vous.

Ce Sommet qui regrouperait la majeure partie des pays d'Amérique latine et des Caraïbes pourrait se tenir au printemps 1999 en Amérique latine. Notre but est qu'il débouche sur un véritable partenariat global entre les deux régions, fondé sur le dialogue politique, les relations économiques et commerciales, la coopération culturelle et éducative.

J'ai déjà évoqué les deux premiers points. Quant au troisième, il a pour but de contribuer à préserver la diversité et la vitalité des cultures et des langues en s'appuyant sur les nouvelles technologies de l'information. La France estime aussi que l'Europe est à même de proposer à l'Amérique latine, si elle le souhaite, des cursus de formation qui lui permettront de parfaire son insertion dans les échanges mondialisés tout en sauvegardant son modèle de civilisation. Je citerai pour exemple la coopération franco-mexicaine pour la mise en place d'universités technologiques sur le modèle des IUT français, ou encore les nombreux accords inter-universitaires conclus entre les universités françaises et latino-américaines.

Vous voyez que nous avons du pain sur la planche. C'est donc sur une vision optimiste et volontaire de l'avenir des relations entre l'Europe et l'Amérique latine que je souhaite conclure ce propos et formuler tous mes voeux pour vos travaux./.

http://www.diplomatie.gouv.fr, le 09 octobre 2001)