Extraits d'une déclaration à la presse de M. Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères et du développement international, sur les relations franco-chinoises et sur le conflit syrien, à Pékin le 14 avril 2017.

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Circonstance : Déplacement en Chine les 13 et 14 avril-conférence de presse conjointe avec M. Wang Yi, son homologue chinois, à Pékin le 14 avril 2017

Texte intégral

* Chine - Relations bilatérales
Je vous remercie Cher Collègue et Cher Ami, Monsieur le Ministre Wang Yi, de votre accueil toujours aussi chaleureux et constructif, qui marque à quel point depuis plus d'un an que j'exerce mes fonctions de ministre des affaires étrangères notre relation très forte contribue aussi à renforcer les relations franco-chinoises et l'attachement que nous avons au partenariat stratégique global entre nos deux pays.
Nous avons eu l'occasion de nous voir souvent, soit à Paris, soit ici à Pékin, en Chine, à New York ou dans beaucoup d'autres rencontres internationales. En tout cas c'est ma troisième visite ici en tant que ministre des affaires étrangères.
Je me suis entretenu dès hier soir avec le conseiller des affaires d'État, M. Yang Jiechi, et ce matin avec la vice-Première ministre, Mme Liu Yandong.
Avec mes interlocuteurs, et encore ce midi, nous avons évoqué notre souhait partagé de renforcer la concertation étroite entre la France et la Chine sur toutes les affaires du monde. Un dialogue confiant entre deux membres permanents du conseil de sécurité. D'ailleurs, après la sortie de la Grande Bretagne de l'Union européenne, la France sera le seul membre permanent européen au conseil de sécurité. Nous sommes membres du G20 et nous avons en mémoire la qualité de la présidence chinoise au dernier G20, et nous savons que dans ce contexte international marqué par une incertitude inédite il est encore plus important que jamais de renforcer nos liens, nos échanges et notre coopération.
Cette rencontre est aussi l'occasion d'évoquer la menace croissante du programme nucléaire militaire de la Corée du Nord. Nous sommes, la Chine comme la France, déterminés à parvenir à la dénucléarisation de la péninsule coréenne. La communauté internationale est unanime. Le moment est venu pour Pyongyang de respecter ses propres engagements.
Sur la Syrie, nous partageons également une priorité, celle de la lutte contre le terrorisme, et une volonté, celle de voir un processus politique favoriser le retour à la paix et à la sécurité en Syrie, dans le cadre de la résolution 2254 du conseil de sécurité.
Sur les enjeux globaux, nous avons réaffirmé notre engagement commun à soutenir la mise en oeuvre de l'accord de Paris sur le climat, qui est essentiel pour notre avenir à tous.
Sur le plan économique, nos échanges commerciaux se sont élevés en 2016 à près de 70Mds EUR, soit le double de 2005. Nous avons évoqué l'importance de promouvoir des relations commerciales plus équilibrées afin de mettre nos économies à l'abri de futures crises et des tentations protectionnistes. Mais nous devons progresser encore s'agissant du niveau d'ouverture de nos marchés respectifs, garantie d?une prospérité partagée.
De ce point de vue, la levée de l'embargo chinois sur la viande bovine française, début mars, est une excellente nouvelle, qu'il faut désormais traduire concrètement.
Les succès récents du partenariat franco-chinois dans le nucléaire civil sont vraiment très encourageants, mais aussi du partenariat en marchés tiers - avec de nombreux projets, donc une relation franco-chinoise sur le plan économique qui marche bien, qui avance bien, et avec de nombreuses perspectives dans le domaine des investissements chinois en Europe, et aussi Paris, place financière du continent européen, première place de la zone euro pour le yuan qui peut être aussi une perspective d'avenir pour les investissements chinois en Europe.
Je me félicite aussi de la forte activité du tourisme, avec 1,6 millions de visiteurs chinois l'année dernière. Et nous avons ouvert neuf nouveaux centres pour délivrer des visas en 48h à travers la Chine. Et puis la France veille attentivement à améliorer encore la sécurité des ressortissants chinois sur notre territoire, qu'ils soient de passage ou résidents. C'est pour nous une priorité. Je tenais à le répéter ici avec force.
L'accord signé entre nos deux pays fin mars, pour porter le nombre maximal de liaisons hebdomadaires aériennes sous chaque pavillon de 50 à 126 de façon progressive d'ici 2020, va contribuer fortement à l'amélioration de ces échanges, pas seulement touristiques, mais aussi les échanges économiques, les échanges culturels, les échanges scientifiques. Et tout cela renforce encore notre relation. Donc je me félicite vraiment de cet accord, qui est un accord récent, et que je voulais saluer ici devant vous.
Voilà quelques illustrations qui montrent que notre partenariat stratégique global se décline aussi sur le plan bilatéral et est au beau fixe ; et je suis convaincu que quel que soient les résultats de la prochaine élection présidentielle, la force de ce que nous avons entrepris ensemble sera préservée dans l'intérêt mutuel de nos deux pays, mais aussi de l'équilibre à l'échelle de la planète. (...)./.
* Syrie
Q - Bonjour M. le Ministre, bienvenue en Chine. Bachar al-Assad a mis en cause les Occidentaux mercredi, il a déclaré que les Occidentaux avaient fabriqué à 100% avec les rebelles l'attaque chimique présumée en Syrie. Une attaque qui aurait servi de prétexte, dit-il, aux frappes américaines. Est-ce que cette attaque était une fabrication selon vous ?
R - J'ai pris connaissance de cette interview avec une profonde tristesse et une grande consternation parce que la réalité, c'est plus de 300.000 morts, c'est 11 millions de personnes déplacées ou réfugiées, ce sont des dizaines de milliers de prisonniers dans des prisons syriennes, c'est un pays détruit. C'est cela la réalité. Ce n'est pas un fantasme. Et donc ce que j'ai entendu, c'est 100% de mensonges, et de propagande. C'est 100% de cruauté, et de cynisme. Et donc il faut y mettre fin. Et pour y mettre fin, il faut un cessez-le-feu réel qui cantonne les forces aériennes et militaires syriennes, garanti par la communauté internationale, et c'est la reprise d'un processus politique, d'une négociation politique pour une transition dans le cadre de la résolution 2254 des Nations unies. Il n'y a pas d'autres voies possibles si nous voulons lutter à la fois contre le terrorisme, et c'est l'une de nos priorités, contre Daech, contre al-Nosra ; mais aussi contribuer à la paix, à la stabilité, à la sécurité, à la réconciliation en Syrie. C'est notre priorité, c'est notre ligne de conduite. Et je remercie la Chine pour sa position indépendante et sage, et notamment le rôle qu'elle joue dans ce sens au conseil de sécurité comme elle a pu nous le montrer il y a quelques heures.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 24 avril 2017