Déclaration de M. Pierre Bérégovoy, Premier ministre, en réponse à une question sur les perspectives pour le budget 1993, en matière de dépenses et de déficit, à l'Assemblée nationale le 6 mai 1992.

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Texte intégral

M. Pierre Bérégovoy. Premier ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, lorsque j'étais
ministre des finances…
M. Robert-André Vivien. C'était le bon temps !
M. le Premier ministre. ... j'entretenais avec M. Gantier des rapports de qualité. (Murmures sur les bancs du
groupe Union pour la démocratie française.)
Mme Yvette Roudy. Ah bon ? (Sourires.)
M. le Premier ministre. J'espère que ces relations continueront à être marquées par l'esprit de dialogue, le refus
de la démagogie (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste) et de la facilité,…
M. Jean-Louis Debré. Verbiage !
M. le Premier ministre. ... y compris lorsque l'on pose une question que l'on vaudrait gênante, mais qui ne l'est
pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Charles Ehrmann. C'est pour vous mettre en valeur !
M. le Premier ministre. Je vous en remercie ! J'ai d'ailleurs noté l'hommage involontaire que M. Gantier a rendu à
la politique économique et financière…
M. Jean-Louis Debré. C'était de l'humour !
M. le Premier ministre. ... menée depuis 1988. Je pourrais remonter plus loin.
M. Charles Ehrmann. Non ! Pas jusqu'en 1981 !
M. le Premier ministre. Dès lors ne m'en veuillez pas, je ne ferai aucun compliment à ceux qui ont géré la France
entre 1986 et 1988…
M. Philippe Vasseur. Vous avez tort !
M. Arthur Dehaine. Et ça, ce n'est pas de la polémique ?
M. le Premier ministre.... parce que vous le refusez. Je rappelle à la représentation nationale que la victoire sur
l'inflation remportée par la France…
M. Jacques Godfrain. Grâce à Balladur !
M. le Premier ministre.... n'est pas la victoire de ce gouvernement ni de celui ou de ceux qui l'ont précédé.
M. Christian Bergelin. C'est vrai !
M. le Premier ministre. Cette victoire est celle de tous les Français et tous ceux qui y ont pris une part : les
responsables politiques, les chefs d'entreprise et les salariés…
M. Jean-Michel Ferrand. Démago !
M. le Premier ministre. ... méritent aujourd'hui que l'on salue un effort qui permet à la France d'entrer dans
l’Europe avec un bon visage. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Robert-André Vivien. Ce n'est pas démagogique ?
M. Gilbert Millet. Et les chômeurs ?
M. Georges Hage. Ils dansent devant le buffet !
M. le Premier ministre. Vous avez, monsieur le député, comparé la situation de 1988 à celle de 1991 et de 1992.
Il y a assez de responsables politiques de tous bords dans cette assemblée pour savoir qu'en 1988. comme en 1989 et
1990, la conjoncture mondiale n'était pas ce qu'elle est aujourd'hui.
C'est parce que - et sur ce point vous avez raison - les Etats-Unis d'Amérique, enfoncés dans le déficit et
l'endettement de l'Etat, mais aussi des entreprises et des particuliers, en font en effet payer le poids au monde,
que nous avons connu un ralentissement de l'activité économique.
Face à cette situation, que fallait-il faire ? S'en tenir à la loi de finances votée en 1990 pour 1991, autrement
dit comprimer encore plus les dépenses ? ou bien augmenter les impôts J'ai choisi, avec les Premiers ministres de
cette période-là, de maîtriser les dépenses et de ne pas prélever d'impôts nouveaux de telle sorte qu'il n'y ait
pas un ralentissement plus prononcé de l'activité économique. Il en sera de même en 1992. C'est pourquoi j'ai
annoncé, avec le ministre de l'économie et des finances et le ministre du budget, que le déficit budgétaire, tel
que l'on peut le prévoir aujourd'hui à cause des recettes fiscales insuffisantes, serait de l'ordre de 135
milliards de francs. En agissant ainsi, nous servons l'intérêt du pays, parce que nous parlons le langage de la
vérité, et l'intérêt de l'activité économique. Et nous continuerons. Je ne céderai, ni aujourd'hui ni demain, à la
démagogie.
Mme Yvette Roudy. Très bien !
M. le Premier ministre. Hier, j'ai suivi le débat sur la révision constitutionnelle et entendu des orateurs de très
grande qualité. Seuls les événements de la nuit m'ont empêché d'entendre certaines interventions. J'ai encore en
mémoire, monsieur Gantier, le rapport, excellent, présenté par M. Alphandéry : que l'on considère l'inflation,
l'endettement public ou le déficit budgétaire, la France, notait-il, est avec le Luxembourg et le Danemark, en état
aujourd'hui de participer à la monnaie unique. C'est le meilleur hommage que l'on pouvait rendre à la politique du
Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs des groupes du
Rassemblement pour la République et Union pour la démocratie française.)
M. Louis de Broissia,. Et Magny-Cours !
M. le président. Mes chers collègues, certains d'entre vous se plaignent de ce que la sonorisation marche mal.
M. Pierre Mazeaud. On cherche des voix !
M. le président. Si le niveau sonore baissait un peu, peut-être entendrions-nous mieux !
Nous en arrivons aux questions du groupe socialiste.