Déclaration de M. Alain Richard, ministre de la défense, sur le déficit de la partie "poudres et explosifs militaires" de la SNPE, l'accord signé avec la compagnie britannique Royal Ordnance et l'avenir du site d'Angoulême, Paris le 1er avril 1998.

Prononcé le 1er avril 1998

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Texte intégral

* SNPE (perte de 100 millions de francs de la partie « poudres et explosifs militaires » –restructuration)

La Société nationale des poudres et produits explosifs est une société d’État à 100 % qui a fortement diversifié ses activités au cours des dernières années – depuis que le service des poudres est devenu une société. La société a atteint globalement l’équilibre après diverses opérations de modernisation. Elle réalise à peu près 5 milliards de chiffre d’affaires qui permettent de dégager un léger excédent, d’une cinquantaine de millions de francs. Toutefois la partie munitions, en réalité « poudres et explosifs militaires », qui représente 300 millions de francs de chiffre d’affaires annuel environ, provoque une perte annuelle de plus de 100 millions de francs soit d’un tiers de son chiffre d’affaires.

Ce n’est pas lié à une mauvaise organisation ou à une inefficacité de la SNPE, mais à une énorme surcapacité du marché. Sur l’ensemble de l’Europe, globalement, on estime que les capacités de la SNPE et de ses concurrents européens représentent cinq fois le volume des acquisitions des États puisque naturellement, sauf grave anomalie, les seuls clients sont les États du continent.

* Société franco-britannique (constitution)

Après diverses explorations d’alliances, à la demande de la SNPE, nous avons donné un avis favorable à un accord avec son concurrent britannique, Royal Ordnance, établissement qui a d’ailleurs suivi la même évolution historique, puisqu’il est devenu une société après avoir été un service arsenal de la couronne britannique. Cette alliance suppose simplement une légère modification du texte organisant la SNPE, qui est une entreprise détenue à 100 % par l’État. Aujourd’hui elle ne peut pas entrer dans une filiale commune avec un autre groupe. Le projet lancé avec Royal Ordnance est une filiale à 50-50, ce qui permet à la SNPE de garder un contrôle réel sur l’activité. Les activités poudres et explosifs de Royal Ordnance et de la SNPE seraient mises dans une société commune au sein de laquelle chacun détiendrait 50 % et conserverait un contrôle réel.

On entend parfois dire, et cet après-midi encore, lors des questions, que les activités économiques se développeraient mieux en Grande-Bretagne parce que le système social ou le système fiscal attirerait les activités. En fait, à lire les balances industrielles de la Grande-Bretagne et de la France, il n’en va pas tout à fait ainsi. Selon l’accord dont nous parlons, une majorité des activités de production serait maintenue en France et, au contraire, Royal Ordnance réduirait la part d’activité de ses propres installations, en Grande-Bretagne même ou aux Pays-Bas, où elle possède également une usine. Le solde d’activité pour les établissements de la SNPE en France serait donc positif. Nous sommes dans la logique des alliances européennes. Nous ne nous trouverons pas « comprimés », entraînés dans une concurrence acharnée. Du coup, nous maintenons une part significative de note potentiel industriel et technologique sur le sol français.

* SNPE (avenir du site d’Angoulême)

Mais il y aura des répercussions, en matière de répartition de l’activité entre les sites, et il faut que je m’en explique clairement devant l’Assemblée. Le site d’Angoulême se trouve privé d’une partie de son activité : de par sa spécialisation, il est le plus dépendant des marchés d’armement, notamment de blindés. C’est en effet à Angoulême que sont réalisées les munitions des chars de combat. L’activité y est donc très dépendante des prochains contrats qu’obtiendra ou non le GIAT s’agissant des blindés. De toute manière, à Angoulême, la SNPE a une autre activité, l’activité CELERG, qui maintiendra une partie du volume d’affaires. En revanche, dans les deux autres établissements de Bergerac et de Sorgues, en Vaucluse, il y aura création nette d’une centaine d’emplois.

En fait, il s’agit d’un réaménagement des activités de participation de la SNPE. Il n’en résultera aucun transfert d’actions au secteur privé. L’État conserve toutes ses actions et la SNPE devient actionnaire à 50 % d’une société franco-britannique commune. Nous franchissons en somme une étape, certes très modeste, dans l’effort de rassemblement des moyens européens et de consolidation des acquis technologiques et industriels sur le sol français et cette étape correspond, me semble-t-il, à la volonté de la représentation nationale.

L’effectif total en salariés de la branche poudres et explosifs est de 350 personnes. Je confirme que le déficit réalisé sur cette activité au cours des deux années 1996 et 1997 a été supérieur à 100 millions de francs, pour 1 300 millions de francs de chiffre d’affaires. Le déficit apparu dans les comptes 1997 n’est que de 60 millions de francs et quelque, parce que, sur les comptes du ministère de la défense, a été payée une subvention particulière de 50 millions de francs directement prélevée sur le budget de l’État.

L’objectif n’est pas de parvenir à une rentabilité fulgurante de la SNPE, mais simplement de permettre à cette entreprise de faire de nouveaux investissements, pour rester dans la course technologique sur les branches les plus avancées de son métier. Et, pour cela, il faut bien que l’ensemble de ses activités au moins s’équilibre !