Texte intégral
Mes chers Compagnons,
C'est pour moi un très grand plaisir que de vous retrouver à l’occasion de cette nouvelle réunion des cadres de notre Mouvement.
Dans la mesure où notre instance délibérative majeure, le comité politique, a vu ses effectifs restreints par rapport à nos pratiques antérieures et se retrouve intégralement soumis à l’élection, il m'a semblé qu'il devenait nécessaire de rassembler régulièrement autour de la direction nationale les cadres de notre Mouvement.
J'entends en effet que vous soyez étroitement associés à la définition des orientations du Mouvement ainsi, mais cela va de soi, qu'à leur mise en œuvre quotidienne.
C'est votre première réunion depuis les élections internes.
Ainsi, beaucoup parmi vous viennent d'accéder à leurs fonctions et assistent donc pour la première fois à ce genre de rencontre.
J'ai vu ainsi un certain nombre de nouveaux visages dans vos rangs et nous pouvons que nous en féliciter.
Je souhaite à chacun la bienvenue et je le remercie de son engagement.
Nos élections internes ont très concrètement permis un renouvellement en profondeur de notre encadrement.
Les résultats en sont très parlants.
Près de la moitié des présidents de comités départementaux a changé. De nombreux jeunes, de nombreuses femmes ont accédé aux secrétariats de circonscription.
C'est une très bonne chose.
On parle beaucoup - et on a raison - de relève et d'accès aux responsabilités de nouvelles générations. Chacun constatera que nous ne nous contentons pas d’y rêver. Nous le faisons. Je vous demande de ne pas en rester là, de ne pas hésiter à aller chercher des personnalités extérieures pour renforcer vos équipes.
Je vous incite, par votre comportement, à prouver à tous ceux qui vous entourent, que la vie politique que nous voulons mener sera digne de ce pays.
Montrez que « oui, la politique est propre », montrez que « oui, décidément, il est possible, il est beau de s'engager pour son pays ».
Votre objectif doit être plus que jamais de convaincre et de rassembler.
Mes chers Compagnons,
Au-delà de la conjoncture politique, qui constitue un vaste champ de méditation pour nous tous et sur laquelle je reviendrai dans quelques instants, je voudrais insister une nouvelle fois devant vous sur le sens de la rénovation de notre rassemblement.
Un mouvement politique ne peut rester immuable dans une société qui a tant changé depuis 20 ans.
Les partis concourent à l'exercice de la démocratie. À ce titre, ils ont le devoir de comprendre l'évolution de la société au sein de laquelle ils s’inscrivent.
La fin de la guerre froide, la révolution technologique, l'ouverture des marchés, la modification des rapports de l'homme au travail, la construction européenne, tous ces changements de fond son porteurs de telles réflexions, de tels débats qu'ils obligent les partis politiques quel que soit le jugement que l'on peut d'ailleurs émettre sur l'évolution du monde, à accompagner ce vaste mouvement.
Le tout est de savoir le faire au bon moment et dans le bon sens en restant fidèle à ses convictions.
Cette évolution est vraie pour tout parti.
Mais elle est a fortiori pour nous Gaullistes. Le général De Gaulle n’a-t-il pas à plusieurs reprises, entre les deux guerres, en 1940, en 1962, en 1969, su anticiper l'évolution de la société ?
A nous, aujourd’hui, d'accompagner ces changements, de les maîtriser, en nous inlassablement cette question qui est la raison d'être de notre engagement : est-ce bon pour les Français ? Est-ce l’intérêt de la France ?
Oui, le sens de la rénovation de notre mouvement répond à cette aspiration au dialogue, au souci naturel, instinctif, j'allais dire épidermique, qu'à notre mouvement de l'intérêt national.
Ce dialogue, je veux le construire avec chacun d'entre vous, avec nos militants, tous nos militants.
Nos militants que nous devrions, je crois, considérer bien davantage que nous ne l'avons fait parfois. Ils sont le visage et la parole de notre Mouvement au quotidien, dans leur quartier, leur immeuble, au bureau.
Ils sont le relais permanent, le pont entre le citoyen et notre mouvement.
Que ferions-nous sans eux ? Que serions-nous sans eux ?
Je ne veux pas que nos militants soient le trésor de notre parti uniquement Durant les campagnes électorales.
Je tiens à être très clair, ils sont notre richesse de tous les jours. Ils sont les porteurs de la flamme du gaullisme.
Cette flamme qui s'est allumée à Londres un 18 juin 1940 et qui voit des négociations se succéder pour la porter.
Plus ou moins forte selon les vents, elle n’en demeure pas moins vivante parce que des hommes et des femmes qui étaient des militants n’ont jamais cessé de l’entretenir.
A nous, donc, d'être dignes de tous ceux qui nous ont précédés.
Mais j'ai confiance. Le travail que vous avez accompli va porter ses fruits.
Nous allons bientôt commencer à lever les bâches qui recouvrent les murs en chantier, nous allons retirer les échafaudages, et nous allons en surprendre plus d’un.
Mes chers Compagnons,
J'ai eu l’occasion, hier, de m’exprimer devant le Comité de politique. J'ai eu l'occasion en particulier d’exprimer, au nom du Mouvement, notre solidarité, notre soutien et notre sympathie, dans l'épreuve qu'il traverse, à Alain Juppé. Nous nous sommes retrouvés unis, dans l’adversité, autour de lui. Et nous avons demandé que soient prises les initiatives nécessaires pour apprécier sereinement et équitablement la période transitoire de mise en place de la législation sur le financement politique et pour que soit clarifiée la notion de mise à disposition des organismes d'intérêt public.
C'est au gouvernement qu'il appartiendrait normalement de prendre ses responsabilités, pour éviter que pèse indéfiniment sur le débat public en France un injustifiable soupçon. Notre démocratie ne serait en effet être durablement minée par la suspicion, sans graves conséquences pour le pays.
Pourtant le gouvernement et sa majorité ont choisi de ne pas bouger. Ils semblent surtout vouloir prolonger un climat à la fois émollient et trompeur.
Peu leur importe, après tout, la contestation de notre système politique, la crise financière internationale, l'extrême difficulté de la Russie, le ralentissement prévisible de la croissance mondiale…
On fait comme si de rien n’était. On fait comme si de rien n'était puisque les sondages sont porteurs
Au faîte d'une popularité inattendue - qui doit bien plus à l’embellie économique qu'au talent de leurs ministres - les socialistes et leurs alliés profitent du présent. Ils prennent - politiquement - du bon temps. Ils ne se soucient guère de préparer l’avenir, en entreprenant les réformes qui nous permettraient de maîtriser la mondialisation et d'en tirer le meilleur parti possible.
Sans doute rêvent-ils la France sous les traits d'un village paisible et immobile, un village retranché, à l'abri des nuages, à l’écart de tout.
Cette incapacité à voir le monde tel qu'il est, nous savons et depuis longtemps, qu’elle est une des marques de fabrique du socialisme français.
Il est d'autant plus urgent de continuer à travailler au renforcement de l’opposition…
Il ne peut s'agir que de limiter les dégâts, trop souvent provoqués par les déclarations intempestives des uns et les initiatives isolées ou erratiques des autres. Même si cela prend, forcément, une part non négligeable de notre temps.
Aussi nous sommes-nous efforcés, pour ce qui nous concerne, de respecter quelques principes de base de la vie politique, aux premiers rangs desquels figure la clarté du comportement. Les français sont lassés du cynisme, des promesses non tenues, des engagements oubliés sitôt les élections achevées, des intrigues de couloir…
Ils attendent que l'on s'en tiennent à ce que l'on a dit, que l'on ne fasse pas le lundi le contraire de ce que l'on a annoncé le vendredi.
Le mensonge et l'illusion ne font plus recette. Ils éloignent encore un peu plus nos compatriotes d'une vie publique au crédit déjà entamé. Ils discréditent leurs responsables plus qu’ils ne témoignent de leur habileté.
C’est, au-delà des raisons morales et électorales qui ont dicté notre refus de toute alliance avec les extrémistes, un des motifs essentiels de l'attitude intransigeante que nous avons adoptée. Et je demeure convaincu que cette fermeté sera payante à l’avenir, à condition qu'on n'en explique bien les fondements.
Ne nous trompons pas, en effet, de combat : nous mesurons chaque jour, dans nos circonscriptions, combien l’anathème et l’invective sont des armes inutiles à qui veut endiguer l’extrémisme. Nous savons aussi que nous sommes bien mal placés pour donner des leçons de morale ou pour nous glorifier de la situation du pays. Si la France souffre aujourd'hui de la montée d'un vote protestataire qui s'incarne dans l’extrême-droite, ce n'est le fruit ni du hasard ni de la conversion subite des Français au fascisme.
C'est parce que le politique a trop souvent renoncé, que l'autorité de l'État s'est progressivement affaiblie, que les valeurs républicaines ce sont estompées, que le sentiment national a été négligé.
Nous ne réduirons l’extrémisme qu’en renouant avec notre identité, en martelant nos convictions, en nous affranchissant des préjugés et non en jouant les porte-serviettes de la gauche plurielle.
Alors, de grâce, ne tombons pas dans le piège qui nous est aujourd'hui tendu et qui consiste à hurler avec les loups, à dresser des bûchers, à créer des tribunaux dignes de la sainte Inquisition.
Nous ne ferons reculer l’extrémisme ni par des actes honteux, ni par des procédés staliniens. Nous laissons ces méthodes à nos adversaires de tous bords, qui les connaissent et les manient mieux que nous.
Parce que nous avons été, depuis 15 ans, sans ambiguïté dans nos discours et dans nos actes, nous sommes parfaitement fondés à dénoncer aujourd'hui la scandaleuse opération de manipulation politique qui vise, en toutes circonstances et à tout propos, à mettre le Front national au cœur du débat politique.
Sous couvert de morale, certains se livrent à une grossière tentative de déstabilisation de l'opposition républicaine.
Son but est clair : neutraliser l'opposition et assurer le pouvoir de la gauche pour 20 ans.
Ses moyens sont simples : l’instrumentalisation du Front national et l'exploitation sans vergogne du phénomène de l’extrémisme.
Aussi sommes-nous, jour après jour, sommés de nous justifier devant des intellectuels en chaise longue qui, eux, se sont trompés sur tout, de Staline à Mao et de Mao à Pol Pot, qui n'ont jamais craint de justifier l’injustifiable, mais qui continuent à tenir le haut du pavé dans un petit monde qui s’agite en vase clos, tant il est déconnecté de la réalité du pays.
Je vous demande donc de n’y prêter aucune attention.
Nous pouvons être fiers de ce que nous sommes : nous n'avons pas besoin, nous, de droit d'inventaire ou de repentance, pour retrouver un semblant de virginité. Nous refusons de participer un mauvais feuilleton pour y jouer le mauvais rôle. Nous n'avons pas à nous défendre car nous ne sommes pas en position d’accusé. En vérité, ce psychodrame, fait d’injonctions, de sommations, d’intimidations verbales, voire physiques, est indigne de notre démocratie.
Et il est temps de le faire savoir à ceux qui l’entretiennent.
Soyons combatifs.
C'est ainsi que l'opposition retrouvera ses marques et reconstituera ses forces. Vous savez qu’on dit parfois qu'on ne s'oppose pas assez.
À entendre certains, l'opposition parlementaire serait mollassonne, confuse et bonasse et s’accommoderait fort bien de la politique actuelle, à quelques inflexions près. Nous serions, en quelque sorte, devenus des socio-démocrates honteux.
Mais, par ailleurs, le reproche nous est fait - souvent par les mêmes - de nous opposer systématiquement. De critiquer à tort et à travers.
Je crains que nos compatriotes n’y comprennent pas grand-chose et vous non plus… Je vais donc être tout à fait clair, en espérant trancher un débat artificiellement entretenu.
L'opposition a vocation à préparer un programme de gouvernement alternatif à la politique actuellement mise en œuvre, dont nous contestons les orientations générales, qu'il s'agisse de l’économie, de l’emploi, de la famille, mais aussi de la sécurité, de la justice ou de l’immigration.
Sept sur la base de ce projet alternatif que nous entrerons, le moment venu, en campagne pour les élections législatives, afin de rendre au Président de la République la majorité dont il a besoin.
Dès lors, il faut bien comprendre que nous ne réprouvons pas tel ou tel aspect de l'action gouvernementale, parce qu'il heurterait telle ou telle clientèle présumée amie, mais que nous combattons ses fondements idéologiques parce qu'ils nous paraissent contraires à l’intérêt du pays.
Notre opposition n’est ni systématique, ni pointilliste. Elle est globale. Nous ne faisons pas de clientélisme. Nous voulons faire de la vraie politique.
Nous ne pratiquons pas une obstruction systématique. Nous préparons l’alternance. Et comment le faire sinon en défendant un autre choix, une autre vision pour la France ?
Notre projet, qui est naturellement perfectible, repose sur cette exigence.
Il est conforme à notre vocation qui est d’occuper le terrain de la rigueur républicaine et de la souveraineté nationale.
Qu'il faille en préciser le contenu et en redessiner les contours avec plus de profondeur encore, je n'en disconviens pas. L'heure est venue, à partir de ce projet, de préparer avec nos partenaires de l'opposition un programme de gouvernement qui soit crédible, c'est-à-dire réaliste et attrayant. À quoi d'ailleurs nous servirait-il au pouvoir si cela consistait à faire la politique de nos adversaires ?
Oui, je vous le redis sans ambiguïté aucune, il n’y aura pas de reconstruction durable de l'opposition si nous ne mettons pas les idées au premier rang, si nous ne nous efforçons pas de faire en sorte que ces propositions communes reposent, pour l’essentiel, sur ces valeurs qui sont la substance même de notre mouvement. Nous n'avons pas attendu le PACS pour nous démarquer de ce gouvernement et affirmer notre attachement à la famille.
La famille, pour nous, demeure, au-delà même de sa recomposition, le lien privilégié de la solidarité et de l'épanouissement personnel de nos enfants.
Elle est la clé de voûte de notre société.
À ce titre, elle doit être une des priorités d'action de la puissance publique.
Je crois, plus que jamais, qu'il est nécessaire de le rappeler.
De même, nous n'avons pas attendu l'accord signé dans la métallurgie, véritable camouflet pour Madame Aubry, pour dénoncer le mythe des 35 heures et redire notre fois dans les valeurs du travail.
Oui, nous croyons dans la vertu de l'effort et dans la nécessité de la récompense.
Oui, nous croyons que c'est par le travail que l’homme trouve sa dignité et les moyens de sa liberté. Personne ne pourra nous faire croire que c'est une valeur dépassée.
Faces à la politique menée par les socialistes, nous avions raison, dès les assises de janvier dernier, de redire que la République repose sur l'égalité des chances et que cette égalité est faussée, quand elle n'est pas bafouée.
C'est à l'école qu'il appartient de promouvoir ce principe.
Aussi, faudrait-il que l'actuel ministre de l'éducation nationale comprenne qu'il ne suffit pas de parler haut et fort ou de vitupérer pour faire vivre ce principe.
Notre conception de l'égalité des chances n’est pas celle de la gauche, victime de l'utopie égalitariste. L'égalitarisme aboutit au nivellement par le bas. Ce qui revient à faire croire au plus faible qu'il est sur la bonne voie, alors qu'il reste sur le bord de la route.
C'est de cette manière, mes chers Compagnons, que les socialistes sont parvenus à briser l'attachement affectif de tout un pays pour son école.
Celle en qui, hier, les parents voyaient l’outil achevé de promotion sociale de leurs enfants. Enfin, nous n'avons pas attendu l'annonce des débats sur le traité d'Amsterdam pour redire avec le Président de la République qu'il est possible de construire l'Europe sans affaiblir la Nation.
À une condition cependant, ne jamais perdre de vue que la Nation, les belles journées de juillet l'ont prouvé, reste une valeur porteuse d’avenir.
Je tiens à ce que nous nous attachions à le dire à ces jeunes à qui nous n'avons pas su donner les repères nécessaires depuis tant d’années.
Nous devons leur dire que la Nation ce n'est pas le nationalisme exacerbé de quelques-uns, ce n'est pas non plus une simple juxtaposition de communautés.
Plus qu'une langue, plus qu'un territoire, plus qu'un destin commun, la Nation française est le lieu privilégié de l'exercice de la démocratie, le plus bel espace de solidarité et d'application de l’intérêt général, le plus beau et le plus sûr fondement de l'Europe à construire.
Encore faut-il, évidemment, que l’opposition soit à même de s’organiser, de gérer sa diversité, d’en faire un atout, au lieu de la traîner comme un boulet.
C'est le pari de l'Alliance pour la France que d'y parvenir. L'opposition est riche de plusieurs sensibilités, gaulliste, libérale, centriste, d'autres encore. Il est vain de vouloir les ignorer ou les confondre.
Il est inopérant de souhaiter leur fusion. Mais il reste, en revanche, à faire coexister harmonieusement ces différents courants de pensée dans un ensemble commun, respectant l'autonomie de chacun et répondant à l'aspiration à l’union des électeurs de l’opposition.
L'Alliance constitue une réponse à ce défi.
Notre électorat ne s’y est pas trompé, qui y a vu une première bonne nouvelle pour l'opposition depuis la dissolution.
C'est bien, d’ailleurs, la raison pour laquelle on s’ingénie, de toutes parts, à en réduire la portée, à la brocarder, à souhaiter son échec.
Comme si l’on avait senti le danger et qu'on voulait l'étouffer dans l’œuf.
Certes, l’Alliance n’en est qu’à ses débuts et doit être encore consolidée.
Elle n'est pas réductible à un accord d’États-Majors. Elle est un processus de rapprochement propose à tous les élus et les adhérents des formations de l’opposition, ainsi qu'à ses sympathisants.
L'Alliance n'est ni un parti unique à la pensée unique, ni le slogan d'un cartel électoral conjoncturel.
Il y a une troisième voie entre ces deux impasses : ils nous font montrer aux Français, très précisément, que nous sommes capables d'organiser nos différences.
C'est tout l'objet des forums qui seront organisés dans les prochains mois qui relèveront le défi de l'élaboration du programme, un programme dont je répète qu'il devra être respectueux de nos identités respectives mais fidèle à nos ambitions communes pour la France. L'édification de l'Alliance est donc devant nous et chacun est appelé à y prendre une part active. C'est au pied du mur que l'on voit le maçon.
Mais les tout premiers actifs méritent d'être soulignés : lancée dans une atmosphère d’atomisation de l'opposition et de recomposition de la formation partenaire, elle a permis d'éviter la contagion de la crise.
Ceux qui, bien imprudemment, s'étaient lancés dans des démarches fractionnistes, n’ont ainsi pas tardé à venir frapper à sa porte, directement ou par des voies détournées.
Quant à nos partenaires centristes et libéraux, ils peuvent trouver, dans cette confédération, un espace où dialoguer librement et sereinement, dans un esprit constructif.
En quatre mois, cela n'est déjà pas si mal… d'autant que nous sommes parvenus, parallèlement, à nous mettre d'accord sur des investitures communes aux sénatoriales et aux législatives partielles de septembre.
Et que nous avons su éviter, sans transiger sur l’essentiel, que l'instrumentalisation du FN que j'évoquais ne conduit à des ruptures qui auraient seulement servi les intérêts de l’extrême-droite et de la gauche. Je vous laisse imaginer la situation où nous serions aujourd'hui sans l’Alliance… Qu'il soit bien clair, en tout cas, que le Rassemblement n'a aucune intention hégémonique.
Il n'utilise et n’utilisera son poids de principale force de l'opposition que pour appeler chacun à faire preuve d’esprit de responsabilité.
Cet esprit de responsabilité, nous nous sommes efforcés, depuis un peu plus d'un an de ne jamais nous en départir. Notre démarche basée sur la réconciliation, la rénovation et l’ouverture, sans faire de miracle, a permis au mouvement de surmonter le choc des élections législatives et de poursuivre sa route en évitant la fragmentation en chapelles concurrentes ou, pire encore, la dislocation.
Et il suffit de regarder autour de soi pour constater que cette partie n'était pas jouée d’avance…
Le scrutin régional qui - faut-il le rappeler ? - constituait une échéance aussi difficile que précoce, nous a donné l'occasion de procéder à un large renouvellement de nos listes et de démontrer que notre capacité de résistance à la gauche plurielle était nettement moins affaiblie que les prévisions ou les oracles de sondages ne l’indiquaient.
Je rappellerai simplement à cet égard, que le Mouvement a quasiment préservé ses positions en sièges par rapport à 1992.
Cette consultation a enfin constitué un bon test de la solidité de nos convictions et de la valeur de nos engagements.
La situation du RPR est donc aujourd'hui stabilisée. Le RPR est, de l'avis général, le pôle de stabilité au sein de l’opposition.
Ce qui m’apparaît, dans le contexte général où nous évoluons, un bon résultat.
Je me garderais, naturellement, d'un triomphalisme hors de raison.
Nous avons nos problèmes, nos incertitudes, nos différences…
Elles se sont exprimées, dans un passé récent, de manière parfois inattendue, passionnée, voir violente. Ce fut le cas au lendemain des élections régionales, lors des débats parlementaires sur l’euro, la réforme du Conseil supérieur de la magistrature, ou encore au cours de la trop longue crise qui a secoué la majorité municipale à Paris.
Du moins sommes parvenus à régler nos difficultés entre nous.
Mes chers Compagnons,
Nous avons subi des secousses, parfois très fortes, mais nous sommes toujours là. Parce que nous avons mené une action tenace, peut-être parfois trop discrète, qui consiste à sauvegarder l'essentiel et à préparer les armes de demain. Il nous faut de la patience. Le temps nous est donné. De ce côté-là, nous n'avons pas à nous plaindre.
Sachons donc utiliser les circonstances pour bâtir une véritable stratégie de reconquête, au lieu de raisonner à la petite semaine… Nous savons pertinemment que l’opinion n'est pas encore totalement réceptive à nos critiques et à nos idées. J'y vois trois raisons essentielles, qui ne sont pas à traiter à la légère :
Il y a d'abord la rancune persistante de nombre d’électeurs à notre égard, née de notre défaite de 1997. On nous a moins reproché un bilan, d'ailleurs plus qu’honorable, que notre incapacité collective à l’inscrire dans une perspective. On nous reproche-moins une gestion, qu'une absence de politique, qui soit claire et lisible. Dès lors, il était impératif comme nous l'avons fait, de recommencer par le commencement : réexposer nos valeurs et notre vision de la France, avant de nous atteler à la définition d'un programme de gouvernement.
Il y a ensuite la pratique obligée de la cohabitation qui paraît estomper provisoirement certaines lignes de fracture de la vie politique et laisse planer une atmosphère factice d'unité nationale.
Le temps dissipera cette illusion, tant il apparaîtra de plus en plus clairement, aux yeux des Français, que les conceptions de la gauche plurielle sont diamétralement opposées aux orientations sur lesquelles le Président de la République a été élu en 1995. Les fortes réserves exprimées par Jacques Chirac, à l’occasion du vote du budget, viennent de le rappeler, à point nommé.
Il y a, enfin, le soi-disant succès du gouvernement dont on nous rabat les oreilles à longueur de journée. Quel succès, au juste ? La reprise de la croissance et la stabilisation de l’emploi… C'est bien le moins quand on pense aux conditions très favorables offertes, provisoirement, par l’économie mondiale : le gouvernement n'a même pas besoin de bouger pour en profiter un peu !
Comment, du reste, profiter vraiment d’un tel contexte quand, au même moment, on charge la barque des dépenses publiques, on multiplie les mesures démagogiques, des 35 heures aux 350 000 vrais-faux emplois public, au lieu de procéder à une sérieuse baisse des impôts ou à une réelle réduction des déficits publics ? Le gouvernement en est réduit à parier sur la croissance, parce qu'il sait qu'il ne peut plus parier sur sa politique, qui l’entrave et la limite. Mais est-il seulement informé que la conjoncture internationale se dégrade et que la croissance mondiale se ralentit ? S'imagine-t-il que la prospérité va nous tomber du ciel quand tout indique qu'elle reposera, demain plus que jamais, sur nos propres efforts ? Ou croit-il que l'Union économique et monétaire jouera un rôle de bouclier infranchissable, alors que tout laisse à penser qu’elle exacerbera la concurrence fiscale entre les États qui la composent ?
En vérité et malgré la présence de quelques gadgets destinés à leurrer le public, le budget de ce gouvernement sacrifie l'avenir à l’immédiat, parce qu’il sacrifie la bonne santé de notre économie aux intérêts politiques.
Cela, alors que nous aurions besoin de mobiliser les forces vives de la Nation dans un contexte incertain et troublé.
Le moins que l'on puisse dire est que le gouvernement a d'autres préoccupations : non content de porter des coups à la politique familiale, le voilà qui nous propose, maintenant, toutes affaires cessantes, le PACS, promu au rang de priorité n° 1, au nom d'un invraisemblable renversement des objectifs et des principes. Et c’est le même confusionnisme qui inspire la politique du gouvernement en matière d’immigration. Après avoir démantelé la législation qui permettait à l'État de maîtriser les flux migratoires, après avoir inutilement réformé le code de la nationalité, voilà qu'on régularise, lentement mais sûrement, les sans-papiers.
En vérité, tiraillé entre les revendications jusqu’au-bouddhistes de ses alliés et les exigences du réalisme, le gouvernement se retrouve aujourd'hui dans une impasse : il renonce à un contrôle des frontières efficace, sans proposer une politique d'intégration crédible.
Aussi, sous couvert d'équilibre et de rigueur, prépare-t-il une situation inextricable et dangereuse pour les équilibres du pays.
Nous ne saurions, en effet, rester durablement dans un no man’s land juridique et politique, sur un sujet aussi essentiel pour la Nation.
Économie, société, immigration… Malgré leurs dénégations, les socialistes et leurs alliés ont depuis longtemps renoncé à rétablir le « Pacte républicain ».
Leur politique ne vise pas à libérer les forces vives, à assurer une vraie solidarité, à défendre l'identité nationale, à jouer les cartes de la Nation.
Non, elle s’attache à mettre en place un « État sociétal », fondé sur la juxtaposition des communautés et des groupes sociaux et la satisfaction, partielle ou totale, de leurs revendications.
C'est un projet différent du nôtre, parce qu'il repose sur une culture différente de la nôtre. Cela, nous devons le faire savoir. Même si l'opinion ne le perçoit pas encore. Car c'est le rôle d'un mouvement politique moderne d'exercer une action pédagogique, d'expliquer les enjeux. C'est donc notre rôle.
Et nous en aurons une première et forte illustration à l’occasion de notre prochaine Convention nationale sur l’Europe. Alors où d'autres en sont À constituer leurs listes, ou du moins à choisir (ou à exclure) des têtes de liste, nous devons, pour notre part, privilégier le fond. C'est pourquoi, j'ai souhaité qu’à titre préalable nous invitions tous ceux qui, à un titre ou à un autre, et sans participer à notre mouvement, se réclament du Gaullisme, à se joindre à nous pour une réflexion commune et un échange d’arguments. J'ai entendu beaucoup d'inexactitudes proférées au sujet de cette démarche.
Certaines, si je n'avais pas un caractère égal, auraient fini par m'échauffer la bile… Elle est pourtant simple et sans arrière-pensée… Mais la seule perspective de débattre, de mettre les choses à plat, de rechercher les raisons de nos différences, alors que nous nous référons aux mêmes principes, de le faire dans la sérénité semble glacer d'effroi nombre de gens.
Et pourtant, j'ai la conviction que si nous en avions débattu plus souvent, franchement et sereinement, l'Europe ne serait pas la ligne de fracture qu'elle constitue trop souvent.
Alors, entendons-nous.
Il ne s'agit aucunement de prendre quiconque en otage, de manipuler qui que ce soit.
De même, à l’inverse, il ne s'agira pas, à l'occasion de ces deux journées, de déterminer la position du RPR. Le RPR, et ses groupes parlementaires, prendront position le moment venu selon les procédures habituelles… Mais il le fera, n'en doutons pas, à la lumière des débats qui auront lieu et qui devront avoir un prolongement dans les circonscriptions.
Et quand, ultérieurement, la position aura été définie, elle sera tenue.
Et il en sera ainsi pour chacun des trois rendez-vous européens qui nous attendent : la réforme constitutionnelle, le débat de ratification et les élections au Parlement européen. Le corollaire de la démocratie interne, c'est en effet l'acceptation de la ligne collectivement débattue puis définie.
Je ne connais pas d'autre voie pour bâtir une formation politique moderne.
Et c'est bien là notre ambition : forts de notre identité, précisée par nos discussions, nous pourrons ré-intéresser les Français au vrai débat politique, attirer vers notre Rassemblement de nouveaux adhérents.
Nous pourrons accroître la formation des cadres, des jeunes, de tous les militants, comme nous avons commencé à le faire.
J'ai la conviction que nous tenons là un chantier décisif pour notre avenir.
On ne saurait faire de la politique en l'an 2000 comme dans les années 70. Le temps des godillots est révolu.
La généralisation de la formation donnera sa pleine efficacité à la présence militante sur le terrain.
Celle-ci doit être, en effet, l'occasion d'engager avec tous nos compatriotes un vrai dialogue sur leurs préoccupations quotidiennes, l’emploi, la sécurité, l’environnement, préoccupations qui impliquent des choix politiques. Aussi recevrez-vous, dans cette perspective, une version simplifiée de notre projet, encore trop souvent méconnu ou caricaturé, quand son existence n'est pas tout simplement ignorée… Je sais que ce projet pour la France et les Français a déjà été présenté par la moitié de nos fédérations départementales à leurs militants.
Beaucoup d'entre vous, toutefois, m'ont fait savoir que les élections internes de notre mouvement les avaient empêchés de débattre suffisamment de son contenu.
J'ai donc demandé à Nicolas Sarkozy, secrétaire général, à Nicolas Dupont-Aignan, responsable des fédérations et à tous les membres de la commission exécutive d'aller à votre rencontre pour commenter ce projet.
Je vous demande donc, mes chers Compagnons, que, dans chacune de vos circonscriptions, vous consultiez à nouveau vos militants sur ce document afin qu'ils vous fassent part de leurs observations, leurs remarques et leurs souhaits complémentaires.
Vous serez également destinataires de matériel de propagande et d’affichage, ainsi que d'argumentaires fréquents, mêlant critique de la politique gouvernementale et exposé de nos propositions alternatives. Roger Karoutchi vous présentera tout à l'heure cette nouvelle campagne d’animation.
Je vous confirme, enfin, que le mouvement patronne désormais une revue trimestrielle, exigeante et tout à fait passionnante, intitulée « Une certaine idée », dont la direction éditoriale a été confiée à Jean de Boishue.
Les deux premiers numéros ont pour thème : « Où va la France ? Et « La culture en jeu ». D'autres suivront, consacrés, notamment, à la politique étrangère et à l’éducation.
Il vous appartient de la faire connaître autour de vous et de la diffuser. C’est, en effet, un instrument de réflexion et de confrontation des idées dont nous avons tout lieu d'être fiers.
Débattre, former, argumenter, occuper le terrain, telles sont les bases, mes chers Compagnons, sur lesquelles nous allons préparer les élections législatives.
Cela là notre objectif majeur.
Faisons donc humblement et méthodiquement notre travail, en nous attelant, dès maintenant aborder les élections législatives de 2002, pour les gagner.
Pour redonner au Président de la République, Jacques Chirac, la majorité dont il a besoin.
Pour permettre à notre pays de tourner la page de l'archaïsme socialiste.
Dans chaque circonscription, nous désignerons dès à présent un candidat à la candidature - titulaire ou suppléant, je le précise pour rassurer nos partenaires - qui auront pour mission d’incarner notre opposition au gouvernement et notre projet pour la France.
Et nous en profiterons pour poursuivre l'effort de renouvellement, de rajeunissement et de féminisation, entame au lendemain des législatives de 1997.
Ce dynamisme retrouvé s’inscrira, bien sûr, dans le cadre d'un renforcement de l’Union de l’opposition. Aucune réflexion autonome, aucune initiative séparée, aussi intelligente soit-elle, ne peut aboutir si, parallèlement, n’est pas satisfaite la demande d'union qui émane de nos sympathisants.
Mes chers Compagnons,
Mais où est donc passé l’opposition ? S'interrogeait, il y a peu, un quotidien du matin. Notre réponse est simple : l'opposition est ici, prête à se battre, à relever la tête, à retrouver la confiance. Et le RPR doit en être le fer de lance, par sa pugnacité dans la critique, mais aussi et surtout par sa patience dans l'action et sa crédibilité dans les propositions.
Qu'on en finisse avec les querelles inutiles qui n'intéressent personne et qui ne concerneront plus bientôt que quelques généraux sans troupes.
Il n'est plus temps de geindre, de gémir, ni d’accuser. Il suffit d'une chose pour revivre et pour gagner : que l'opposition prenne conscience qu'elle a vocation à gouverner la France ; mais pas de la gouverner à la manière des socialistes, pour les sondages et la galerie. De la gouverner vraiment. Cessons donc de nous positionner uniquement vis-à-vis des autres.
Soyons nous-mêmes.
Ne nous laissons pas de dénoncer les faux choix qui laissent doucement décliner la France.
Relevons le défi de l’explication, de la fidélité à nos valeurs originelles. Relevons le défi d'un idéal pour la France.
Dans cette perspective, je compte sur chacune et sur chacun d'entre vous.