Interview de M. Charles Millon, président de La Droite et président du Conseil de la Région Rhône-Alpes, dans "Le Figaro" du 13 octobre 1998, sur les manifestations suscitées à l'occasion de ses déplacements et sur son action au Conseil régional de Rhône-Alpes.

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Le Figaro. – À Lyon, une grande manifestation a mobilisé contre vous des gens venus de toute la France. À Cluses (Haute-Savoie), une cinquantaine de professeurs s'insurgent contre le service d'ordre qui aurait agressé des élèves lors de votre récente visite. À Aix-les-Bains, le conseil d'administration d'un lycée décide de fermer l'établissement le jour où vous devez inaugurer un nouveau bâtiment. Si cela continue, vous ne pourrez plus aller nulle part dans votre région !

Charles Millon : «  Au contraire, je continue. Hier (jeudi 8 octobre, NDLR), j'ai participé à cinq cérémonies ou réunions. Quatre d'entre elles se sont passées parfaitement avec des maires, des responsables d'association, des paysans. La cinquième a donné lieu à une manifestation. Mais vous savez, cela ne concerne qu'un nombre limité de gens - quelques dizaines, toujours les mêmes. Ce sont pour la plupart des responsables de l'association Ras l'Front qui me précède de ville en ville et embrigade les jeunes du coin. Leur visage commence à m'être familier. Ça ne m'émeut pas. »

Le Figaro. – Au conseil régional, ça n'a pas l'air d'aller mieux. Vous venez de perdre deux conseillers, qui ont rallié le groupe des indépendants. Comment espérez-vous encore pouvoir faire voter vos projets ?

- « Ces deux élus indépendants continuent à voter pour moi. J'ai même gagné une voix de plus, celle d'une élue UDF. Elle n'a pas accepté l'amorce d'un rapprochement de son groupe avec le groupe socialiste. Elle a rejoint elle aussi les indépendants… »

Le Figaro. – Le RPR, de son côté, semble déterminé à vous faire céder.

- « Il s'est plutôt calmé quand il a constaté que la constitution d'un arc républicain provoquerait une véritable révolte de son électorat. D'ailleurs, Philippe Langenieux-Villars, le président du groupe RPR au conseil régional, a rappelé qu'il n'était pas question pour lui de faire alliance avec les socialistes. »

Le Figaro. – Néanmoins, la plupart de vos projets sont bloqués.

- « Pas du tout. La politique d'insertion sociale est passée, la politique de la ville aussi, ainsi qu'une partie de la politique culturelle et universitaire. Je lance maintenant un nouveau projet pour favoriser l'accès à la première expérience professionnelle. N'oubliez pas que j'ai eu la majorité à la fois en voix et en sièges. Je mène ma politique, conformément à mon projet. Le FN, lui, mène la sienne, qui l'amène souvent à voter contre moi avec les socialistes. Ces derniers font une obstruction systématique. Cette collusion FN-PS n'apporte-t-elle pas la preuve a contrario qu'il n'y a pas eu d'alliance entre le Front national et moi ? »

Le Figaro. – Le Pen ayant vu son immunité parlementaire levée par le Parlement de Strasbourg, espérez-vous que le FN amorce sans lui une évolution à l'italienne ?

- « Je n'en sais rien, et ce n'est pas mon problème. Je constate seulement que le FN mène sa politique, moi la mienne. »

Le Figaro. – Revenons à Le Pen. Le fait qu'il soit mis à l'écart de la vie parlementaire, est-ce une satisfaction pour vous ?

- « Faut-il le répéter ? Personnellement, j'avais trouvé ses déclarations sur le « détail de l'Histoire » scandaleuses. Je l'ai toujours dit et écrit. »

Le Figaro. – Quand vous venez à l'Assemblée nationale, comment êtes-vous accueilli ?

- « Très bien. Je vois beaucoup de monde. Mes collègues députés me saluent dans les couloirs, viennent me voir dans mon bureau. Les socialistes eux-mêmes sont moins agressifs à Paris que dans la région, bien que je sois persuadé que c'est le premier secrétaire du PS, François Hollande, qui orchestre les manifestations. Ce n'est pas hasard si Jack Lang est descendu se montrer dans les rues de Lyon. »