Interview de M. Hervé de Charette, ministre des affaires étrangères, accordée à Radio France internationale le 24 janvier 1996, sur la présence militaire française à Djibouti et la proposition d'une "Conférence des Grands Lacs".

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Intervenant(s) : 

Circonstance : Rencontre de M. de Charette avec le Premier ministre éthiopien, M. Zenawi, janvier 1996

Média : Radio France Internationale

Texte intégral

RFI : L’Ethiopie compte énormément sur la France pour la stabilité dans la région. Concrètement, comment cela va-t-il se traduire ?

Hervé de Charrette : La France a un rôle important dans la région qui lui vient à la fois de l’histoire et en effet de sa présence militaire dans cette partie du monde, c’est-à-dire les bases que nous avons à Djibouti. Mais, il faut bien le comprendre, cette présence militaire n’est pas destinée à intervenir ici, là ou ailleurs. Nous sommes là depuis longtemps. Je crois que c’est utile pour la stabilité régionale mais la solution des problèmes, là comme ailleurs, quand il y en a, c’est une solution politique. Ainsi en est-il en Somalie. Nous assistons en effet à une situation de crise très préoccupante. Je crois qu’il faut tout faire, avec l’ensemble des partenaires qui y sont disposés pour rechercher des solutions de dialogue et trouver des solutions politiques.

RFI : Avec le Premier ministre éthiopien, qui est en même temps le Président de Organisation de l’unité africaine, vous avez évoqué la tenue d’une Conférence internationale sur les pays des Grands Lacs. Aujourd’hui, avez-vous avancé sur cette conférence ?

Hervé de Charrette : C’est un projet qui nous tient à cœur. Nous pensions que la situation au Rwanda et celle du Burundi ont besoin de stabilité et d’acceptation mutuelle, les uns par les autres, et réciproquement.

Telle n’est pas aujourd’hui, il faut bien le dire, la situation, qui n’est pas tout à fait satisfaisante. Nous faisons ce que nous pouvons pour encourager la tenue d’une conférence, que nous appelons la Conférence des Grands Lacs, qui réunirait l’ensemble des pays concernés, non seulement les pays de la zone, mais les pays voisins qui pourraient ensemble essayer de rechercher les meilleurs arrangements possibles et les éléments de stabilisation. C’est, je le crois, absolument nécessaire. Pour l’instant, l’idée fait son chemin.

RFI : Aujourd’hui à Londres, il y a 17 000 Rwandais qui sont partis des camps de réfugiés Burundais et qui ne peuvent pas pénétrer dans le pays. C’est une situation dramatique. Le Haut-Commissariat des Nation unies pour les réfugiés s’y intéresse mais n’arrive pas à trouver une solution. Est-ce que concrètement la France peut prendre une initiative ?

Hervé de Charrette : La France n’a pas de réponse à toutes les questions, malheureusement. Cela ne fait que confirmer l’importance de notre projet de Conférence des Grands Lacs. Nous ne sommes pas les seuls. Le secrétaire général de l’ONU y tient aussi. L’OUA, sans doute, y tiendra. Ce sont des réponses qui seront positives. En attendant, je sais qu’il y a des difficultés, malheureusement.

Nous avons parlé de toutes ces questions avec le Premier ministre – il est très avisé, très expérimenté, de très grande qualité – comme nous avons d’ailleurs décidé ensemble de renforcer les relations franco-éthiopiennes. En particulier, nous avons convenu qu’au cours du prochain semestre, probablement vers septembre ou octobre, se tiendra la Commission économique annuelle, de façon à faire le point sur les questions d’intérêt commun, à la fois culturelles, économiques, et naturellement aussi les questions politiques.