Texte intégral
Réponse du ministre de la défense à une question orale de M. Gilbert Meyer, député du Haut-Rhin
152e régiment d'infanterie de Colmar
Q. : Monsieur le ministre de la défense, dans le cadre de la professionnalisation de nos forces armées, certaines unités, jusqu’à présent, composées principalement d'appelés du contingent, ont commencé les recrutements. Un calendrier a été arrêté. Tenant compte des incorporations déjà effectuées, ce calendrier fixe, pour chaque unité concernée, un quota correspondant à l'année 1997. Le 152e régiment d'infanterie de Colmar, sera ainsi autorisé à recruter trente-trois engagés d'ici au 31 décembre prochain. Ce nombre est très modeste, d'autant que tout est prêt, localement, pour accélérer le processus.
Le 152 est établi à Colmar depuis fort longtemps. Les relations entre le régiment et la population sont excellentes. Dans tous les esprits, l'unité colmarienne jouit d'un prestige incomparable. L'incidence directe de l'image forte que le 152 a su entretenir par ses actions est qu'une proportion importante de la jeune population souhaite servir la France dans ses rangs. Il serait par conséquent dommage de décevoir les volontaires que les chiffres actuellement fixés ne permettent pas d'accepter. Le régiment serait prêt à un accueil accéléré, je le répète.
Enfin, la professionnalisation tend à disposer de forces rapidement opérationnelles. Elles doivent pouvoir assurer la défense et l'intégrité de notre territoire contre les éventuelles agressions et être prêtes pour intervenir à travers le monde dans le cadre des accords que la France a passés avec ses différents partenaires. Plus d'une fois, le 152e régiment d'infanterie a déjà prouvé sa capacité dans ce domaine. Cette unité a toujours développé dans la formation des jeunes une pédagogie afin que le régiment soit toujours prêt à intervenir quelle que soit la mission. Elle a aussi fait la preuve de sa grande flexibilité dans de nombreuses missions intérieures.
Pour toutes ces raisons, il me paraît indispensable d'accélérer les recrutements. L'accélération de la professionnalisation est également rendue nécessaire par la crise de confiance que traversent les militaires de carrière. Les choix opérés depuis le 22 février 1996 en matière de défense nationale inquiètent plus d'un cadre. Beaucoup parmi eux voient en effet l'avenir de façon incertaine. Les départs en retraite non remplacés, les réorientations de carrière, certes accompagnées de mesures compensatoires, n'apaisent pas leurs interrogations.
Par conséquent, nous devons leur adresser un message de confiance, un message rassurant. L'accélération de la professionnalisation au 152e régiment d'infanterie, qui s'est inscrit dans l'histoire, pourrait être une réponse à ces questions. Je souhaite vivement qu'il vous soit possible d'aller dans ce sens.
R. : En application des décisions prises par le Président de la République, la professionnalisation de l'armée, et en particulier de l'armée de terre, a été engagée, et bien engagée. En 1997, ce sont 5 875 nouveaux postes d'engagés volontaires qui seront ouverts dans l'ensemble des formations et organismes de l'armée de terre, en métropole, outre-mer et au sein de la brigade franco-allemande. La première campagne de recrutement, lancée en janvier, a été un succès : les objectifs fixés pour trente jours ont été atteints en huit seulement.
Recrutement d'engagés
Il importe, comme vous venez de le souligner, d'impliquer tous les corps de troupe dans cette transformation fondamentale. C'est pourquoi le 152e régiment d'infanterie, auquel vous venez de rendre hommage, dispose, dès 1997, d'une ouverture de postes au même titre que les autres régiments. Elle sera renouvelée en 1998 et 1999 en fonction des postes budgétaires disponibles qui seront dégagés à cet effet. Fidèles à une tradition de service de la patrie, dont ils ont souvent témoigné, les jeunes Alsaciens sont nombreux à se porter volontaires. Du reste, ils ont la possibilité, s'ils le souhaitent, de contracter un engagement au titre des autres corps de la région dans lesquels des postes sont également ouverts. Il s'agit du 1er régiment du génie à Illkirch, du 35e régiment d'infanterie et du 74e régiment d'artillerie à Belfort, du 1er régiment de tirailleurs à Epinal, ainsi que du bataillon de commandement et de soutien de la brigade franco-allemande à Müllheim.
Je crois avoir répondu à vos préoccupations. Croyez bien que je suivrai avec vous cette procédure, car il est évident que la réussite de la professionnalisation est un des points fondamentaux de la réussite de la réforme de la défense lancée par le Président de la République.
Gendarmerie nationale (brigade de Firminy)
Q. : À l'occasion d'une inspection annuelle de gendarmerie à Firminy, dans notre département, se répand la nouvelle de la fermeture de cette gendarmerie, en application du Plan national de la gendarmerie 2002. Les élus l'apprendront d'ailleurs par la presse le lendemain. Ce fut un coup de tonnerre dans un ciel menaçant car, dans un contexte difficile où s'alimentent les attitudes les plus sécuritaires, nous n'avions absolument pas besoin de ce genre de nouvelle. En effet, sa charge symbolique et son impact psychologique ne pouvaient être plus forts ! Heureusement, Monsieur le ministre, alerté par les élus vous avez, pour ainsi dire, éteint le feu avant qu'il ne devienne incendie ! L’application de ce plan d'action doit en effet, tenir compte du contexte local et pas seulement départemental, bien qu'à ce niveau, ce plan présente de l'intérêt du fait de l'augmentation des effectifs.
Si l'on veut éviter que les réformes soient perçues comme purement négatives et rejetées par la population, il faut éviter d'y procéder dans des périodes de crispation. Sinon, l'ordre des priorités l'emporte sur celui des primordialités. Sans sacrifier le moyen terme, mieux vaut alors répondre à l'urgence. Or, les difficultés dans lesquelles nous nous débattons aujourd'hui dans la Loire, et plus particulièrement dans la vallée de l'Ondaine, appellent manifestement d'autres réponses.
Les PSIG (pelotons de surveillance et d'intervention de la gendarmerie) n'auront-ils pas plus d'efficacité s'ils s'appuient sur des brigades de gendarmerie dont la proximité avec la population reste un élément décisif ? Pendant quatre ans, je n'ai eu de cesse d'intervenir pour que les forces de sécurité soient renforcées. J'ai obtenu quelques satisfactions auprès du ministre de l'intérieur, par exemple la création de deux brigades anti-criminalité, avec augmentation d'effectifs. Mais la situation est telle que tout ce qui a trait, de près ou de loin, à la sécurité suscite souvent de grandes inquiétudes. Aussi comprenez bien, Monsieur le ministre, la réaction légitime d'une population qui ne percevait dans ce projet qu'un aspect négatif : le désengagement de l'État de l'une de ses fonctions régaliennes. Encore une fois, heureusement qu'aucune décision n'a été prise en ce sens !
Ce qui est en jeu ici, c'est avant tout la présence physique des gendarmes au cœur de la cité. Même « en zone de police », cette présence est irremplaçable et l'émotion ressentie est à la mesure de cette estime. C'est à l'honneur de notre gendarmerie, dont nous apprécions toujours l'efficacité et le dévouement. Dans notre système républicain, le gendarme n'est-il pas l'ultime agent du pouvoir exécutif ? La gendarmerie nous apparaît encore aujourd'hui comme ce « corps d'élite, providence de l'administration et du citoyen ». Son histoire se confond avec celle de l'État et sa mission noble et délicate reste indispensable à la vie collective de la nation.
Voici, Monsieur le ministre, la question que m'inspire ce regrettable incident : quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour concilier les impératifs du plan d'action « Gendarmerie 2002 » et les intérêts et besoins locaux en matière de sécurité ? Certes, cette question dépasse les compétences de votre seul ministère mais, comme vous l'avez si bien écrit dans la conclusion de votre dernier ouvrage : « Faut-il se satisfaire d'une action publique réduite à l'économie et à l'administration ? »
Plan d'action « Gendarmerie 2002 » (répartition des compétences gendarmerie - police)
R. : Monsieur le député, le plan d'action « Gendarmerie 2002 » a notamment pour objectif de parvenir à une meilleure sécurité de la population, en renforçant l'action de proximité et le professionnalisme des personnels. Cet objectif pourra être atteint dans la mesure où la gendarmerie nationale sera à même de renforcer et d'adapter son dispositif dans les zones sensibles où elle se trouve seule en charge des missions de sécurité publique et de maintenir le maillage territorial dans les zones rurales, auxquelles vous êtes particulièrement attaché. Cet objectif ne pourra être satisfait que par le prélèvement d'une partie de ses effectifs dans les zones où la police nationale a la charge exclusive des missions de sécurité publique.
C'est dans cette seule logique que s'inscrivait le projet de suppression de la brigade de Firminy, suppression qui devait entraîner, à partir des effectifs dégagés, la création d'un peloton de surveillance et d'intervention de la gendarmerie, soit sept sous-officiers et neuf gendarmes auxiliaires, ainsi que le renforcement de la brigade territoriale de Chambon-Feugerolles : plus deux sous-officiers. Ces mesures se seraient traduites par une amélioration très sensible de la sécurité dans les zones périphériques de Saint-Etienne, placées sous la surveillance de la gendarmerie nationale.
Cependant, j'entends tenir le plus grand compte des avis des élus locaux et des réactions de la population. Face à l'émotion dont vous m'avez personnellement fait part, Monsieur Mandon, j'ai donc décidé de ne pas faire appliquer ces dispositions. Connaissant votre volonté déterminée de renforcer la sécurité dans votre circonscription, je suis sûr que, dans les semaines ou les mois à venir, nous pourrons trouver, ensemble, une solution comprise par tous.
Réorganisation territoriale des armées (Lyon et Marseille)
Q. : Monsieur le ministre de la défense, dans le cadre de la restructuration de notre système de défense, vous avez décidé d'engager une réorganisation territoriale de nos armées. Ainsi, dans les deux à trois années qui viennent, le nombre des régions militaires sera non plus de cinq, mais de quatre et la région Sud-Est comprendra les actuelles circonscriptions militaires de défense de Lyon et de Marseille. Inévitablement, les élus de la région du Midi se demandent donc qui, de Marseille ou de Lyon, accueillera l'état-major de région.
Vous comprendrez que je sois tout naturellement porté à défendre la candidature de Marseille, pour des raisons d'ailleurs plus tactiques que d'aménagement de territoire. Je le fais certes parce que Marseille est ma terre d'élection, mais surtout parce que je suis intimement convaincu que la deuxième ville de France dispose des meilleurs atouts pour accueillir l'état-major de région. Cela tient en premier lieu à sa situation géographique : ouverte sur la Méditerranée, plus apte à la projection, Marseille me semble mieux adaptée pour concentrer le pouvoir décisionnel et les choix opérationnels d'une armée de projection. En second lieu # et ce n'est pas le moindre argument # Marseille a la capacité immédiate d'accueil des effectifs, et, j'y insiste, sans surcoût. En effet, avec Maronnas, qui peut accueillir des milliers d'hommes, avec la base aérienne stratégique d'Istres, l'embranchement ferré du 11e cuirassiers de Carpiagne et la proximité de Toulon pour l'embarquement des forces, elle dispose des infrastructures indispensables.
Je crois savoir que des avis techniques vous ont été rendus et qu'ils rejoignent tous, ou à peu près tous, ma position. Quel est votre état d'esprit sur ce dossier ? Peut-on envisager que l'état-major de région s'installe à Marseille, et que Lyon, ville de prestige, accueille le non moins prestigieux commandement de l'état-major de l'OTAN ? Sachez que les élus de notre région, de tous bords, toutes tendances confondues, attendent beaucoup de votre décision. Elle est d'importance pour notre région.
R. : La région Sud-Est doit accueillir deux grands états-majors de l'armée de terre : un état-major de région terre à Lyon et un état-major de force à Marseille. Actuellement siège de l'état-major de la région militaire de défense Méditerranée, la ville de Lyon le restera. Elle dispose, avec le quartier général Frère, d'une infrastructure tout à fait adaptée et dotée de bonnes capacités d'évolution. Le maintien à Lyon de l'état-major régional terre s'inscrit dans la continuité de la réforme « Armées 2000 » et évitera toute rupture dans le fonctionnement présent de cet état-major dont le rôle régional est déjà bien maîtrisé.
L'installation à Marseille d'un état-major de force répond à la nouvelle priorité accordée aux opérations de projection des forces. La métropole marseillaise dispose, en effet, dans son environnement proche, de l'ensemble des infrastructures nécessaires à la mise en œuvre de ce nouveau concept d'emploi : la zone de regroupement et d'attente de Carpiagne, la base aérienne d'Istres, le port militaire de Toulon, le complexe portuaire de Marseille et l'aéroport de Marignane. La présence à Marseille d'un état-major à vocation opérationnelle est donc cohérente avec les orientations fixées par le Président de la République pour la profonde transformation de notre outil de défense.