Texte intégral
C'est un grand plaisir et un grand honneur pour moi d'être là d'autant plus que je suis bien entourée. Je voudrais donc commencer par remercier les personnalités choisies :
- en fonction de leur notoriété, mais aussi ;
- parce qu'elles ont toutes été distinguées dans ce concours général.
Je tiens à saluer chacune d'entre elles.
Tout d'abord, les représentants éminents du monde scientifique et de la recherche : M. Henri CABANNES, président du comité national de mécanique, membre de l’institut ; M. Gérard DEBREU, prix Nobel d'économie et M. Laurent SCHWARTZ, mathématicien, médaille Fields, membre de l'Académie des sciences.
Les représentants de l'université : Mme Jacqueline de ROMILLY, membre de l'Académie française, professeur honoraire au Collège de France, une de nos plus célèbres hellénistes ; M. Jean FAVIER, historien, membre de l'Institut, ancien Président de la Bibliothèque nationale de France.
Les artistes et les écrivains dont M. Claude SANTELLI, producteur, réalisateur, homme de lettres et de théâtre ; M. Régis DEBRA Y, écrivain, philosophe et essayiste ; M. Jean-Pierre ANGREMY, diplomate, membre de l'Académie française, président de la Bibliothèque nationale de France qui est davantage connu, comme romancier, sous son nom de plume de Pierre-Jean REMY. Je ferai également rentrer dans cette rubrique un autre académicien qui fut par ailleurs plusieurs fois ministre, M. Jean-François DENIAU.
Enfin les représentants du monde économique dont. M. Charles de CROISSET, président du Crédit Commercial de France ; M. Pierre FAURRE, président-directeur général de la SAGEM et M. Raymond LEVY, président honoraire de Renault.
Je tiens bien évidemment à saluer également l'ensemble des représentants de l'Education nationale : Mesdames et Messieurs les inspecteurs généraux qui sont les garants de l'exigence disciplinaire du concours et dont leur doyen, M. Xavier DARCOS, fera tout à l'heure partie des personnalités remettantes : Mesdames et Messieurs les proviseurs et les professeurs sans lesquels les lauréats que vous êtes n'auraient pu être détectés, encouragés et distingués.
Merci donc à vous tous. Vous confirmez là qu'il existe un attachement national à cette cérémonie, caractéristique de notre pays et de son école.
De plus, cette année est historique :
- puisque, c'est le 250e anniversaire du concours général ;
- et elle est très symbolique de l'histoire d'un concours dont les évolutions sont significatives des progrès de la république et de la démocratie ;
- je pense qu'il faudra aller encore plus loin.
Dans notre pays, l'élitisme a marqué l'école. Mais ça n'est pas toujours un élitisme au-dessus de tout soupçon.
Élitisme de la ségrégation parfois dont le concours général lui-même témoigne :
On a attendu :
- 1923 pour l'ouvrir aux élèves de province ;
- 1924 pour qu'une jeune fille puisse devenir lauréate ;
- 1961 pour que les lycéens de l'enseignement technique puissent concourir ;
- 1995 pour que les terminales de lycées professionnels ou de centre d'apprentis puissent être distingués dans un concours général des métiers.
Je salue donc tout particulièrement les lauréats de ces filières qui font enfin leur apparition au concours général.
Cet anniversaire doit donc jouer un double rôle :
- exalter les talents reconnus par les prix et les accessits dans une épreuve où il y a des gagnants et pas de perdants ;
- nous contraindre à aller toujours de l'avant dans la voie de la démocratisation de notre enseignement dans lequel il y a encore trop de perdants ;
- quand je vois que sur 49 épreuves les lycées de Paris et de Versailles sont cités 91 fois, je me dis qu'il faut réduire les inégalités entre les régions ;
- quand je sais les inégalités qui demeurent entre les écoles, les collèges et les lycées de notre pays, tant dans leur architecture que dans leurs conditions de vie et de travail ;
- quand je regarde les investissements de certains conseils régionaux au bénéfice d'établissements déjà privilégiés (380 millions de francs pour le seul lycée Louis le Grand !), je me dis qu'il faut une démarche volontariste et un effort de tous pour penser d'abord à ceux qui ont le plus besoin de locaux où il fait bon vivre et travailler.
L'élitisme n'est donc républicain que s'il est fondé sur l'égalité des chances.
Mais il nous faut aussi associer à la production des élites un authentique sens de la responsabilité.
Je suis convaincue que nous savons faire lorsqu'il s'agit de promouvoir les meilleurs, mais je pense que l'élitisme républicain n'est pas seulement la consécration des plus intelligents selon les mécanismes de la concurrence ou de la compétition.
Quand on entend ici et là critiquer nos élites, ce n'est pas leurs qualités intellectuelles qui sont mises en cause, mais plutôt leur sens de la responsabilité.
L'appartenance aux élites donne du pouvoir, elle vous donnera certainement du pouvoir : dans une démocratie, il ne saurait exister de pouvoir sans responsabilité, vis-à-vis de soi-même, et vis-à-vis des autres.
Platon le soulignait déjà, dans sa République : les meilleurs doivent quelque chose à la société qui les a conduits jusque-là, dans les deux sens du mot « devoir » : leur devoir est une dette.
C'est certainement là que nous avons de nouveaux efforts à faire dans l'école : tout doit y être fait pour que la responsabilité individuelle et son lien essentiel avec la responsabilité collective soient développés en même temps que les facultés intellectuelles. C'est un des sens que Claude Allègre et moi-même voulons donner en réhabilitant l’éducation civique. L'école doit former des femmes et des hommes responsables et les devoirs de chacun d'entre eux sont à la mesure de leurs pouvoirs présents et à venir.
Conclusion :
Nous consacrons aujourd'hui vos performances, vous pouvez en être fières et fiers comme je le suis au nom du ministère de l'Education nationale. Je vous en félicite tous, comme j'en félicite vos professeurs ainsi que vos familles. Mais pensez toujours aux responsabilités qu'elles vous donnent à l'égard des autres, au service que vous devez rendre à ce que vous pouvez apporter au progrès de tous, aux avancées de l'Humanité.