Texte intégral
Assises extraordinaires - Dimanche 6 juillet 1997
Mes chers Compagnons,
Ainsi, vous venez, par votre vote, de me porter à la présidence de notre mouvement.
C'est un acte de confiance dont je vous remercie, mais que je reçois, surtout, avec gravité. Une gravité que nous avons tous ressentie, ce matin, en entendant Alain Juppé.
Je sais, comme vous tous, que la tâche qui m'attend, qui nous attend, est une tâche immense. Et c'est bien pourquoi je compte sincèrement sur chacune et chacun d'entre vous pour m'aider à l'accomplir.
Ensemble, donc, nous ouvrons ce soir une page nouvelle de l'histoire de notre mouvement.
Une page décisive. Et ce n'est pas, loin de là, une formule de circonstance.
Nous sentons bien, en effet, que ce n'est pas le seul avenir du Rassemblement pour la République qui est en cause, que ce n'est pas seulement l'avenir du mouvement gaulliste qu'il s'agit d'assurer et de construire.
C'est en vérité notre démocratie, aujourd'hui décrédibilisée, délaissée, contestée, qu'il nous faut contribuer à revivifier...
C'est le destin collectif de notre Nation, aujourd'hui plongée dans le doute, qu'il nous faut contribuer à éclairer.
Car elle est là, la principale leçon des dernières élections, et du lent processus qui les a précédées. Et ce ne sont pas, certes, les premiers balbutiements du nouveau pouvoir qui sont prometteurs de cette réconciliation des Français et de la chose publique, qui s'impose aujourd'hui comme la première des urgences.
Si nous non plus ne comprenions pas cette leçon, si nous n'en tirions pas, dès maintenant, toutes les conséquences, mieux vaudrait renoncer, plier bagage et donner ainsi raison à tous les augures qui nous serinent doucement, depuis des années, que la France, la République, bref, tout ce en quoi nous croyons, serait irrémédiablement dépassé…
Mais avant toute chose, et comme nous y a invités Alain Juppé, prenons nos marques et considérons nos repères.
En ces instants, nos pensées, notre affection, notre fidélité, doivent aller vers celui qui nous a rassemblés. Vers Jacques Chirac.
Le respect, le soutien que nous devons au Président de la République sont les premiers ferments de notre combat.
Je l'ai dit, je veux le redire : 1997 n'a pas effacé 1995.
Ce qui signifie deux choses.
La première, c'est que nous n'avons pas oublié le long, le difficile chemin sur lequel Jacques Chirac a su nous guider ; les idées sur lesquelles il a bâti sa campagne présidentielle victorieuse et qui en ont été l'aboutissement. Qu'on sache bien que ces idées, nous y sommes plus que jamais attachés.
Nous gardons en particulier en mémoire le message que le Président de la République avait renouvelé lors du G7 social de Lille : nous ne nous laisserons donc pas condamner à choisir entre le chômage et la précarité ; nous chercherons nos propres réponses aux déséquilibres économiques dans lesquels nous sommes projetés ; nous savons que nous aurons notre propre modèle à imaginer et à promouvoir, un modèle qui soit conforme à notre Histoire, à nos valeurs, à nos convictions.
C'est d'abord cela, 1995. Et c'est cela qu'incarne Jacques Chirac.
La seconde implication de la primauté de 1995 est d'ordre constitutionnel. Les institutions donnent au Président de la République un rôle que nous entendons voir respecter.
Bien sûr, il y a le gouvernement, assis sur une majorité parlementaire, fût-ce inconfortablement, doté de ses responsabilités propres, muni d'un programme à mettre en œuvre.
Mais une vérité, une vérité fondamentale demeure : le chef de l'État est le garant de l'intérêt du pays, le seul qui puisse véritablement rassembler - ce qui ne signifie pas gouverner à gauche, à droite ou au centre, mais imprimer une direction, incarner une vision de l’avenir, préserver et, le cas échéant, reconstituer le tissu politique et social de la Nation.
C'est pour cette raison que nous devons être vigilants, et non pas seulement parce que Jacques Chirac est l'un des nôtres. Notre pays a besoin, plus que jamais, d'une fonction présidentielle reconnue et respectée. C'est l'acquis majeur de plusieurs décennies d'efforts. Nous veillerons donc à ce que nul ne l’oublie.
Et c'est là une bonne occasion de redire solennellement que nous n'accepterons pas que le gouvernement, sous prétexte de donner quelques consolations idéologiques à ses partisans, continue de céder, comme il l'a fait après Denver ou sur l'Otan, à la tentation coupable de brouiller la voix de la France.
Il est un autre repère qui doit nous guider, c'est I'expérience acquise par notre mouvement au fil du temps, au fil de nos progrès, de nos succès, au fil, aussi, de nos échecs et de nos épreuves...
Nous avons ainsi appris qu'il faut savoir parfois payer le prix de choix courageux. Nous avons payé ce prix. Mais nous savons aussi que ces choix étaient souvent nécessaires. Et qu'Alain Juppé a ainsi beaucoup fait pour notre pays comme il a beaucoup fait pour notre mouvement. C'est lui qui animait le Rassemblement lors des succès de 1993 et 1995, et qui, à la suite d'Edouard Balladur, a su s'atteler à la remise à niveau de nos finances publiques, mises à mal par le laxisme socialiste.
Ainsi, ceux-là mêmes qui avaient pratiqué la politique du chien crevé au fil de l'eau ont-ils retrouvé une situation largement apurée. Et si avant de repartir pour de nouveaux exploits, la seule expression de leur gratitude prend la forme d’un audit aussi inutile que paradoxal, nous saurons, pour notre part, rendre à Alain Juppé l’hommage qui lui est dû.
Ayons donc à l'esprit ces deux repères majeurs : Jacques Chirac et tout ce qu’il incarne ; la force de notre mouvement, nourrit, par les succès du passé, par les enseignements retirés de nos erreurs et de nos échecs, nourrie aussi par tous les effort accomplis.
Ces repères, nous en avons grandement besoin. Nous en avons besoin au moment où nous tenons nos assises. Au moment où il nous faut réfléchir sur ce que nous sommes, et nous demander ce que nous voulons être.
Ce qui suppose de notre part un effort de franchise, de clarté et de lucidité.
Notre vie publique étouffe trop souvent sous les non-dits, les sujets tabous, les vérités esquivées. Et cet ensemble finit par former un véritable mensonge. C'est ce mensonge - un mensonge par omission, mais un mensonge tout de même - que les Français viennent de réprouver.
Nous devons donc clarifier les choses.
Au sein de notre camp, tout d'abord.
Nous formons, avec nos amis de l'UDF, l’opposition parlementaire. Nous sommes unis dans un même combat. Nous partageons les mêmes valeurs fondamentales.
On nous oppose souvent aux « libéraux », en vertu de cet incorrigible manichéisme qui oppose en tout la gauche à la droite, la justice sociale à l'efficacité économique, le libéralisme au gaullisme.
Or, pourtant, tant les libéraux que les gaullistes savent qu’il n'existe aucune contradiction entre le choix républicain et une économie compétitive. Ils savent qu'en luttant contre les privilèges et les féodalités, contre les rentes de situation, contre l'argent facile et contre la corruption, on est fidèle et à la République et aux préceptes fondamentaux du libéralisme.
Ils savent enfin qu'il ne s'agit pas de choisir entre la société ouverte et la société fermée, ni entre l'économie de marché et l’économie dirigée, car ils savent que, pour que la société reste ouverte et pour que l'économie de marché fonctionne, il faut qu'il y ait un État, un État ayant la volonté et les moyens de garantir la cohésion, la solidarité, l'égalité des chances.
Nous avons donc beaucoup en partage. Et l'union de l'opposition, l'union de la future majorité qui devra, à nouveau, gouverner la France, est une nécessité absolue.
L'union, mais pas l'uniformité, qui serait meurtrière pour tous, qui ne correspond pas à la réalité politique de notre pays, qui se révélerait vite un facteur d'affaiblissement et d'appauvrissement, et qui ouvrirait un boulevard au Front national…
Le Front national, précisément, le sujet n'a cessé de grossir, comme le rhinocéros chez Ionesco. Et l'on a vu ce que cela donnait : un résultat record aux dernières élections, qui l'a fait dépasser l'UDF et friser notre propre niveau de voix.
Il est inutile de se voiler la face. Nous savons pertinemment que nombre de nos électeurs, et nombre de nos militants, l'ont rejoint au fil des années.
Nous savons aussi que cette formation comporte un noyau dur, qui assure sa direction, et dont les idées sont celles de l'extrême-droite la plus classique : celle qui n’a cessé de combattre les valeurs fondamentales de la République, celle qui a toujours trouvé sur son chemin de Gaulle et les gaullistes.
Mais la majeure partie de ses électeurs ne sont pourtant ni fascistes, ni hostiles à la démocratie. Ils sont simplement déçus, inquiets, angoissés, et le sont d'autant plus que beaucoup d'entre eux figurent parmi les victimes les plus directes de la régression sociale que provoque le chômage. Le Pen a réussi à leur faire croire qu'il était le seul à les comprendre, le seul à savoir leur parler, le seul à savoir parler au peuple.
Du coup, ils ont exprimé, en votant pour lui, leur rejet d'un système dont ils avaient acquis la conviction qu'il les ignorerait toujours.
Bien des fins stratèges ont cru longtemps que ces électeurs-là, après avoir manifesté leur mécontentement au premier tour, rejoindraient sagement leur famille naturelle au second. Et c'est ainsi effectivement que les choses se sont longtemps passées.
Et puis, les avertissements ont succédé aux avertissements, jusqu'au jour où, à force de ne pas être entendus, ils se sont transformés en condamnation pure et simple... C'était il y a un mois.
REPRISE
Alors, que devons-nous faire ? Continuer d'ignorer le phénomène, au risque de voir s'implanter, toujours davantage, un parti dont les dirigeants, je le répète, sont nos adversaires de toujours ? Le diaboliser, à l'instar des socialistes, et ainsi le renforcer, puisque nous le désignerions nous-mêmes comme le meilleur vecteur des inquiétudes et des doutes ? Nous laisser aller, de manière plus ou moins voyante, à conclure des alliances tactiques, où nous perdrions, sinon notre âme, du moins notre crédibilité ?
Dans les trois cas, nous serions inéluctablement entraînés sur la pente du déclin. Pour nous, et plus encore pour notre démocratie, nous n'avons pas le droit de prendre un tel risque. Il est infiniment préférable de regarder les choses telles qu'elles sont. Et d'agir en conséquence. En démontrant que nous savons toujours parler au peuple.
La majeure partie de ceux qui se sont résignés au Front national attendent que nous leur parlions des sujets qui les angoissent : de la Nation et de son devenir, de l'Europe, du chômage qui ronge notre cohésion sociale, de l'avenir des banlieues et des zones de non-droit qui n'ont cessé de s'étendre, des institutions, qui leur paraissent en déshérence. Et de l'immigration, ce problème que nous avons abandonné aux slogans et aux fausses vérités qu'ils colportent.
J’ai pour ma part la conviction qu’en clamant haut et fort notre refus de l’abaissement de la France, notre refus de la voir se dissoudre dans on ne sait quoi, animé par on ne sait qui, notre refus de nous soumettre à tout modèle importé, notre refus de l’effacement du politique, notre refus du règne des coteries, des communicants et des technocrates, oui, j’ai la conviction qu’ainsi nous pourrons convaincre et entraîner nombre de ceux qui nous ont quittés, et au-delà, une majorité de Français.
Oh, je sais bien, les socialistes ne manqueront pas de dire que nous allons à la pêche, oubliant ainsi que ce sont eux qui ont alimenté le vivier.
À ces donneurs de leçons, à ces professeurs de morale politique, nous rappellerons donc une fois encore que la montée en puissance du Front national fut cyniquement programmée pour entraîner notre propre affaiblissement.
Je leur rappellerai que ce sont eux qui, des municipales aux régionales, en passant par les dernières législatives, n'ont cessé de recueillir sans vergogne les dividendes de leur misérable et dangereuse stratégie, en faisant des électeurs du Front national les supplétifs passifs de bon nombre de leurs élus.
Oui, décidément, si M. Jospin avait la reconnaissance du ventre, il pourrait faire figurer M. Le Pen en bonne place, rue de Solférino, dans la galerie des portraits des grands bienfaiteurs du parti socialiste.
En vérité, mes chers Compagnons, et nos débats à venir le démontreront, pour rénover notre mouvement, pour construire une opposition forte et résolue, pour pouvoir proposer aux Français, le moment venu, une véritable alternative politique, nous n'avons nul besoin de nous vendre à qui que ce soit, nous n'avons nulle obligation de céder au terrorisme intellectuel ou au chantage médiatique.
Notre seule exigence, c'est d'être nous-mêmes.
Nous-mêmes, plus que jamais.
À entendre beaucoup, cette entreprise serait sans espoir.
Il paraîtrait que le gaullisme est mort ! Ou qu'il serait devenu définitivement ringard... Et que nous n'aurions plus le choix qu'entre la banalisation et l'impasse.
Balivernes que tout cela !
La meilleure preuve que le gaullisme est bien vivant, c'est le pillage organisé dont il est l'objet, jusqu'à la caricature. Depuis M. Jospin et ses plagiats sur le pacte républicain, jusqu'à l'extrême-droite, qui ose, qui a le front de donner des leçons d’orthodoxie constitutionnelle au chef de l'État…
Et elle est bien là, la menace. À force d'être galvaudé et appliqué à tout et n'importe quoi, le gaullisme pourrait bien finir par perdre de sa force, de sa portée, de son originalité profonde. On espère bien ainsi le liquider, sous le poids d'un consensus meurtrier...
Alors, disons-le hautement : le gaullisme est plus que jamais une idée neuve et c'est bien pour cela qu’il gêne, toujours et encore, ceux que de Gaulle appelait « les neurasthéniques à vie, les trotte-menu de l'abandon, les fuyards professionnels.
Mais le gaullisme n'est ni une doctrine ni une idéologie...
Le gaullisme, c'est une conviction et une méthode.
La conviction que chacun doit avoir les moyens de maîtriser son destin. D'être acteur, et non objet. Et que c'est là l'honneur d'un homme, et le vrai sens de la démocratie : cette capacité d'engagement, de participation, qui doit être celle de tout homme libre et qui passe par la faculté de savoir, de pouvoir dire non, cette capacité d'engagement, qui se transcende dans l'aventure collective de la Nation.
Quant à la méthode, elle a toujours consisté à rassembler. Autrement dit, à représenter l'ensemble de la société française en dépassant les clivages - ce qui n'a jamais voulu dire les nier, mais regarder au-delà…
C'est pourquoi nous ne sommes pas, et nous ne serons jamais un parti.
Cette appellation, cette approche, nous devons les récuser.
Un parti, c'est forcément réducteur. Un parti, quelles que soient la qualité, l'intégrité de ceux qui le dirigent, tend toujours à représenter une fraction du pays, à s'identifier à une doctrine, à une phraséologie.
Il est porté naturellement vers la tactique, les dosages, les combinaisons et donc un jour ou l'autre, vers une certaine forme de reniement ou d'impuissance.
Alors que ce que nous recherchons, nous, gaullistes, c'est la définition et la promotion de l'intérêt général.
Et l'intérêt général, ce n'est pas si simple à comprendre, ni si facile à défendre. Une société comme la nôtre est pétrie de contradictions, de contradictions que les mutations en cours ne peuvent qu'exacerber. C'est Georges Pompidou qui disait que « gouverner, c'est faire prévaloir sans cesse l'intérêt général contre les intérêts particuliers, alors que l'intérêt général est toujours difficile à définir et prête à discussion, tandis que l'intérêt particulier est ressenti comme une évidence et s'impose à chacun sans qu'il y ait de place pour le doute ».
C'est pour cela qu'il nous faut dépasser le cadre partisan, et chercher, résolument, à rassembler les Françaises et les Français de toutes origines, de toutes générations, de toutes sensibilités. Aussi largement que possible...
C'est la condition même d'un bon gouvernement. Surtout dans les temps difficiles... Et cela va bien plus loin que la mythique « union nationale », qui n'est le plus souvent qu'un montage, opéré à la hâte par des partis aux abois.
L'idée de rassemblement, c'est donc notre substance même. À chaque fois que nous avons perdu de vue cette exigence, nous nous sommes affaiblis. À chaque fois que nous l'avons mise au premier rang, nous avons su ramasser nos forces et prendre l'élan.
À commencer par le moment où notre mouvement s'est formé, en 1947. Notre pays s'était alors engagé sur une voie institutionnelle qui était mauvaise. De Gaulle l'avait dit avec force à Bayeux, puis à Épinal.
Et l'enjeu était d'autant plus grave que la France était confrontée à la fois à une grave crise sociale et à d'immenses défis mondiaux. Ce fut alors l'expérience du premier rassemblement, celui du peuple français.
Il y eut ensuite 1958 et l'issue douloureuse, mais nécessaire, donnée à la crise algérienne, mais plus encore la réforme des institutions que les Français attendaient et qui aboutit, entre autres choses, à un spectaculaire redressement économique du pays, fondé sur la combinaison harmonieuse des principes fondamentaux d'un libéralisme éclairé, qu'avait su expliquer Jacques Rueff, et de la puissance d'action d'un État rénové, que portait Charles de Gaulle.
Combinaison débouchant sur un pacte implicite entre une Administration puissante, puissante sans être étouffante, la fraction la plus dynamique du patronat et un peuple convaincu qu'il recueillerait les efforts légitimes des efforts qui lui étaient demandés...
1968 aura été un choc, la prise de conscience par beaucoup que le gaullisme, usé par la pratique du pouvoir, s'était trop éloigné du peuple et avait quelque peu oublié, précisément, qu'il était un rassemblement.
Et c'est cette idée qui triomphera en 1976 avec la refondation de notre mouvement autour de Jacques Chirac.
Nous avons fêté, l'an dernier, le vingtième anniversaire de cet événement. Nous nous sommes souvenus, alors, des paroles que Jacques Chirac avait eues à Egletons. Sur l'attente des Français, telle qu'il la percevait, celle « d'un monde plus juste, d'une vie quotidienne qu’ils maîtrisent davantage et dont ils assument eux-mêmes plus directement la responsabilité ». Sur les menaces qui pesaient sur la liberté, cette liberté qui, disait-il, « peut être détruite aussi bien par une trop grande emprise de l'État que par la démission de l'autorité ».
Il avait encore évoqué cette solidarité qui « n'est pas l'assistance », mais qui doit, au contraire, concilier le goût de l'initiative personnelle et l'aspiration légitime à la sécurité. Il avait souligné la nécessité de transformer complètement notre société, et non de se limiter à des améliorations partielles, rappelant que nul, dans l'histoire de la République, n'avait plus profondément réformé que le général de Gaulle. Il avait enfin énoncé cette vérité, trop souvent oubliée, que la politique est un combat, et non la recherche perpétuelle et vaine d’un hypothétique consensus, et que ce combat ne peut être conduit que dans le cadre d’un vaste mouvement populaire.
Mes chers compagnons, cette volonté de rénovation et de clarté que notre mouvement a su manifester il y a plus de vingt ans, nous devons la retrouver aujourd’hui, mais avec bien plus de force encore.
Car le monde a changé.
Et c’est à une métamorphose plus ambitieuse encore que nous sommes appelés.
Ce n’est pas tant notre défaite – nous en avons connu d’autres – qui nous incite à cet immense effort sur nous-mêmes. Tout au plus est-elle un signal, un signal ultime…
Ce qui nous y incite vraiment, c’est l’état dans lequel se trouve la société française, qui est infiniment plus inquiétant qu’en 1976, époque où nous ne discernions que les prémices des mutations à venir.
Aujourd’hui, la France est désemparée. La France est désorientée.
Ce ne sont pas les objectifs qu'a fixés Jacques Chirac en 1995 qui sont en cause. Encore une fois, ces objectifs sont les bons. Encore une fois, ces objectifs sont les nôtres.
Ce qui est en cause, c'est l'étrange dérive dont les « politiques » ont été tout à la fois victimes et complices, dérive qui a vu le pouvoir leur échapper, quelque part entre Bruxelles et les marchés financiers, dans ce redoutable triangle des Bermudes occupé par des experts sûrs d'eux-mêmes, relayés par des communicants usurpant leur rôle de médiateurs. C'est cela qu'il faut changer en revenant à cet autre précepte fondamental du gaullisme : la volonté.
Car il ne s'agit plus de gouverner « autrement ». Il s'agit maintenant de gouverner tout court. Il ne s'agit plus de faire de la politique « autrement ». Il s'agit de refaire de la politique tout court.
Ce qui suppose que nous nous montrions capables de comprendre ce qui nous arrive. D'en donner une exacte définition. De l'expliquer aux Français. Et de les mobiliser en conséquence.
Elle est là, et non ailleurs, la responsabilité majeure de notre mouvement. C'est à cela que nous devons nous atteler, et vite.
Car le monde est ce qu'il est. Et il vit d'extraordinaires bouleversements...
Ce n'est certes pas la première fois qu'il subit des changements profonds. Mais sans doute n'ont-ils jamais été aussi immenses, aussi rapides, aussi radicaux.
Lionel Jospin a eu un petit oubli, dans sa bluette de l'autre jour à l'Assemblée nationale. Certes, entre quelques préceptes, il nous a parlé des allocations familiales, et de certaines urgences. Mais il n'a pas mentionné la « mondialisation ». Ce n'est pas que j'aie une affection particulière pour le mot, il est rebattu, utilisé à tort et à travers. Mais la réalité qu'il exprime est là, et bien là... Et il serait dramatique de l'éluder...
La mondialisation résulte de l'interaction de trois vastes mouvements - de trois révolutions.
Révolution des échanges, qui ont connu une libéralisation accélérée au cours des toutes dernières années, provoquant un processus massif de relocalisation des activités industrielles et pour nous, surtout, hélas, de délocalisations...
Révolution de la sphère financière. La libération et l'accélération des mouvements de capitaux, accompagnées de phénomènes spéculatifs assez largement décrochés de l'économie réelle, ont entraîné la montée en puissance des marchés financiers.
Enfin, et surtout, dans la mesure où elle a donné toute leur ampleur aux deux phénomènes précédents, révolution technologique, révolution des techniques de l'information et de la communication, qui annonce une nouvelle organisation du travail, une nouvelle civilisation du savoir, propre à engendrer de nouvelles élites techniciennes, et sans doute, si nous n'y prenions garde, de nouvelles sources d'inégalité...
Cette triple révolution, elle est déjà là. Il ne sert à rien de disserter sur les défis du troisième millénaire. Le troisième millénaire, nous y sommes.
La vraie question est ailleurs : notre système politique, au point où il en est arrivé, est totalement décalé par rapport à ces défis.
Allons-nous réagir, mais de la pire des manières, en jetant le bébé avec l'eau du bain ? C'est-à-dire renoncer à nos valeurs fondatrices de liberté, de solidarité, d'égalité des chances, et nous perdre dans une course sans fin au moins disant social - cette course qu'en vérité nous ne pourrons jamais gagner, sous peine d'implosion généralisée ?
Allons-nous, à l'inverse, nous replier sur nous-mêmes, en choisissant de tout ignorer, en faisant comme si de rien n'était, allons-nous en somme démissionner et nous résigner à devenir une puissance de troisième ou quatrième rang, un conglomérat de simples consommateurs, une assemblée de petits actionnaires se laissant porter par le flot des événements ?
Certains, par leurs excès, ont déjà disqualifié la première de ces « options ».
Quant à nos espoirs d'éviter la seconde, le gouvernement en sonnerait volontiers le glas. M. Jospin n'en finit pas de se préparer à devenir un jour Premier ministre. Son maître mot, il est vrai, est la durée. Ce qui prouve, certes, qu'il est d'un naturel optimiste, ce qui n'est pas nécessairement un travers, mais ce qui prouve aussi qu'il n'a guère conscience que cette durée qu'il revendique est mise à profit par d'autres, ailleurs, pour agir. En est-il conscient ? On peut légitimement s'interroger en constatant qu'il lui aura fallu trente-cinq minutes, toujours dans son discours de politique générale, pour aborder le problème de l'emploi, ce cancer du chômage qui est notre problème majeur... Étrange oubli, étrange retard, qui ne peut qu'amener à s'interroger sur l'idée que se fait le nouveau Premier ministre de l'état du monde, sur son devenir et plus encore sur celui de la France et de l'Europe.
Bossuet disait que le pire des dérèglements de l'esprit, c'est de voir le monde non point tel qu'il est, mais tel qu'on voudrait qu'il soit. Il aurait pu ajouter que c'est la pire des manières de faire en sorte que le monde ressemble à ce qu'on aimerait qu'il devienne...
C'est ainsi qu'on se condamne à être toujours à contretemps, à rester hors-jeu, à toujours arriver après la bataille.
Nous avons ainsi connu le temps des vœux pieux et des bonnes intentions...
Nous entrons dans l'ère des regrets perpétuels et de la contrition permanente...
« Ah ! si nous avions su ! »
« Ah ! si nous avions été là plus tôt… »
« Dieu sait que nous aurions souhaité que les choses se passent autrement ! »
Vilvorde en est un bon exemple. Il est vrai qu'on nous a rassurés : le dossier a bien été rouvert !
Avant d'être aussitôt refermé ! C'est dire que nul n'a de quoi être déçu !
Et pourtant, il existe bien, nous le savons, une autre manière d'aborder les choses.
Le Président de la République nous a dit comment il voyait la France. La France dans l'Europe. La France dans le monde. Une France qui renoue avec la croissance, mais qui soit en même temps plus solidaire. Une France capable de porter, pour elle-même et pour les autres, un véritable projet social.
C'est à nous qu'il revient de l'aider à donner corps aux perspectives qu'il a ouvertes.
Et c'est pour nous organiser en conséquence que nous sommes aujourd'hui rassemblés. Et non pour reprendre, comme si de rien n'était, nos vieilles habitudes...
Et c'est bien pourquoi il nous appartient de bâtir un mouvement réconcilié, rénové, ouvert.
Un mouvement réconcilié, d'abord.
Il faut le dire et le répéter : ces assises ne doivent être la revanche de personne. Comme elles ne sont la défaite de personne.
Elles ne sont ni le début, ni l'étape nouvelle d'une aventure personnelle.
Trêve, donc, de propos grinçants et de rancœurs mesquines. Nous devons être ensemble. Sinon, c'est ensemble que nous disparaîtrons...
La réconciliation est donc notre premier devoir. Et ce n'est pas qu'un mot… Nous l'avons bien mesuré ce matin. C'est tout un effort à consentir.
Aussi longtemps que nous ne l'aurons pas compris, notre mouvement n’aura aucune chance d'assumer son destin.
Oh, je le sais bien, je l'ai souvent observé, nous sommes nombreux à accepter surtout de nous réconcilier… avec ceux avec qui nous ne nous étions jamais brouillés...
Il va falloir pourtant aller au-delà, quoi qu'il puisse en coûter aux uns et aux autres. Nous avons trop souvent tendance à vivre notre diversité comme un handicap, comme une tare... Alors qu'elle est notre force. Notre vocation même.
Cette diversité, nous devons la reconnaître et l'assumer. Pratiquer la tolérance et le respect mutuel. Même si le temps est moins que jamais aux chapelles et aux clans.
Nos militants ne comprendraient pas qu'il en aille autrement. Les Français qui sont portés à nous faire confiance le comprendraient encore moins.
Une fois réconcilié, notre mouvement pourra se rénover.
Non - faut-il le redire ? - que nos anciennes structures, nos anciens responsables aient failli. Mais nous avons de nouveaux défis à relever. Et il faut que nos structures et nos méthodes leur soient adaptées.
Il y a, à tout cela, un préalable et ce n'est pas le plus simple.
Nous devons faire évoluer nos comportements.
Le temps des notables, il doit être clair que s’est fini. Nous ne sommes pas là pour défendre nos prés carrés.
Il n'est de place, parmi nous, que pour ceux et celles qui veulent faire bouger les choses, et placer la France au cœur de leur action.
Ne nous demandons pas ce que le Mouvement peut nous assurer, nous promettre, nous garantir. Aucun d'entre nous n'a de droit sur lui. Ni droit moral, ni droit de tirage...
Nous ne devons considérer qu'un objectif : l'ambition que nous lui fixons. Et la manière dont nous pourrons le servir...
Je veillerai à la stricte application de celle règle. Et bien entendu, je commencerai par me l'appliquer à moi-même.
Mais réconciliation et rénovation ne suffiront pas. Il nous faudra, de surcroît, ouvrir notre mouvement.
L'ouvrir partout et à tous, y compris, s'il le faut, à d'anciens adversaires. Sans complexe. Généreusement. Humblement.
Nous devons rester fidèles à nos principes. Mais cela ne signifie pas que nous devons nous replier sur nos nostalgies...
Nous devons accueillir tous ceux qui partagent notre conviction que la France doit s'adapter au monde nouveau, non pour s'y laisser dénaturer, mais pour, au contraire, maîtriser les choses, et faire en sorte de rester un exemple de solidarité et de cohésion. Bref : accueillir tous ceux qui ont fait d'une telle société le motif premier de leur engagement politique, mais qui ne sont pas assez aveugles pour ignorer le monde dans lequel nous sommes entrés.
Nous devons accueillir tous ceux qui sont prêts à réfléchir avec nous aux moyens de retrouver nos marges de manœuvre, aux moyens de retrouver une société de pleine activité, aux outils qui nous permettront de répondre à toutes les inquiétudes, à toutes les angoisses, quelles qu'elles soient, qui paralysent les Français.
Nous devons accueillir tous ceux qui croient que la Nation demeure le cadre privilégié, irremplaçable, de la solidarité entre les hommes, entre les régions, entre les générations. Que la nation française n'est ni une race, ni une ethnie ; ni un problème de droit du sang, ni un problème de droit du sol. Que la Nation, c'est une volonté. Qu'elle doit reposer sur l'adhésion de chacun à des valeurs communes, à un projet commun et ne saurait se réduire à un conglomérat de communautés et sous-communautés. Qu'elle doit être ouverte sur le monde, ouverte sur les autres - car telles ont toujours été sa force, son originalité, sa grandeur. Qu'elle est aussi un être vivant, avec ses faiblesses et ses fragilités - des faiblesses et des fragilités qui doivent être prises en compte avec réalisme et générosité.
Nous devons accueillir tous ceux qui croient que la France doit jouer un rôle moteur en Europe, mais une Europe démocratique, capable d'exprimer une volonté politique, d'incarner un véritable modèle de société, de peser sur les affaires du monde. Une Europe dont la force, soyons-en convaincus, repose sur une entente claire et franche entre la France et l'Allemagne. Une entente qui sera fondée sur nos efforts mutuels, et non sur des abandons.
De Gaulle l'avait dit dès 1969 : « Il n'y aura plus jamais pour la France de politique extérieure qui vaille si elle ne passe pas par l'irréversibilité de la réconciliation franco-allemande. »
C'est cela, l'essentiel, bien au-delà du débat désormais dépassé sur Maastricht. Car nous n'en sommes plus à faire l'inventaire des erreurs prétendues des uns, ou de la clairvoyance supposée des autres...
Nous devons accueillir enfin tous ceux qui sont prêts à réfléchir, avec nous, au devenir de nos institutions.
Le fait est que nos institutions ne marchent plus de manière satisfaisante. L'instabilité ministérielle, chassée en 1958, est revenue par la porte de service. La cohabitation est devenue le confort des juristes, mais on ne saurait dire qu'elle soit un modèle de gouvernement…
Le Parlement a réussi à dépasser le vieux débat dialectique de ses rapports avec l'exécutif. Mais il ne parvient pas encore à utiliser pleinement les moyens nouveaux dont il dispose pour exercer ses prérogatives. La décentralisation a manqué une partie de ses objectifs, et, avec l'effet conjugué du cumul des fonctions, elle a favorisé le retour tant redouté des féodalités.
Ne cédons pas au fétichisme. Les institutions sont un domaine où le gaullisme est, par essence, d'esprit pragmatique. Il n'existe pas de Constitution définitive qui convienne pour toute époque. La nôtre peut et doit évoluer. Elle a d'ailleurs beaucoup évolué déjà.
Nous avons des exigences qui ne varieront jamais : le rôle d'impulsion et de cohésion qui ne peut appartenir qu'au chef de l'État ; la stabilité d'un gouvernement qui gouverne, et qui ne se contente pas des apparences du gouvernement ; la présence d'un Parlement actif, qui débatte et qui contrôle au moins autant qu'il légifère ; la permanence d'un État fort et impartial, qui soit le garant de l'intérêt général ; l'existence d'une justice efficace, rendue au nom du peuple français, mais en même temps pleinement insérée dans nos institutions démocratiques.
Ces exigences demeurent. Mais leur réalité est largement battue en brèche. À nous de définir, comme en 1958, de nouveaux équilibres qui répondent à la singularité de notre histoire et de notre tradition républicaine.
Sur ce terrain, les gaullistes ont une légitimité particulière II faire valoir. Nous sommes les seuls, depuis bientôt quarante ans, à avoir effectivement réformé les institutions pour qu'elles répondent mieux aux besoins du temps.
Les autres se sont contentés du plus parfait immobilisme, quand ils ne travaillaient pas à leur affaiblissement…
Voilà !
Nos tâches à venir sont claires.
Elles sont, comme vous le voyez, immenses.
Dès lors que pour nous les maîtres mots vont être débat et démocratie, il est clair que nous allons débattre, et débattre en tout liberté. À tous les échelons. Et je me réjouis qu'aujourd'hui nous ayons, visiblement, largement anticipé...
Débattre, au fond, pour trouver la synthèse - ou l'engrenage - nécessaire entre l'exigence de la compétitivité, la nécessité de la solidarité et la préservation de l'identité de la France.
Débattre pour être prêts, dès la fin de l'année, à tenir de nouvelles assises, des assises ouvertes, des assises qui nous permettront d'arbitrer entre les diverses formes d'organisation que nous sommes susceptibles de retenir.
Et la décision finale, je vous le dis, elle vous appartiendra.
Hors tout centralisme démocratique, elle sera la traduction fidèle des souhaits, des messages, des témoignages que l'ensemble de nos adhérents adresseront à ceux qui dirigent le Mouvement.
Car les questions, comme les propositions, ne manquent pas.
Comment assurer l'organisation la plus efficace, la plus harmonieuse, la plus ouverte de notre mouvement ?
Comment améliorer la coexistence et la complémentarité de nos structures établies les unes sur des bases géographiques, les autres sur des bases professionnelles ?
Comment doivent être désignés ou élus nos responsables à tous les échelons, notamment départemental ?
Comment mieux associer nos instances locales au choix de nos candidats aux diverses élections ?
Comment faire toute leur place aux femmes, aux jeunes, pour leur permettre d'assumer des responsabilités et d'accéder à la candidature ?
Comment, au final, assurer de manière permanente l'écoute et la remontée des réactions, des opinions, des engagements de nos militants ?
Pour ma part, je n'entends pas préjuger de nos décisions ultérieures, et afin de laisser librement se développer le débat, je limiterai volontairement mes propres décisions initiales.
Au cours de la période transitoire qui s'ouvre jusqu'à nos prochaines assises, et conformément à la motion qui vient d'être votée, je m'entourerai d'une structure exécutive provisoire dont je livrerai la composition au cours des prochains jours.
Parallèlement, les secrétaires départementaux seront maintenus en fonction et collaboreront avec des chargés de mission régionaux que je désignerai pour assurer le bon déroulement des opérations jusqu'aux assises.
Sur tous ces sujets, nous en avons beaucoup lu et entendu ces derniers jours...
Il n'est pourtant qu'une réalité qui compte, et qui remet à leur juste place toute ces supputations et vaticinations. Le pouvoir, dans le Mouvement, c'est vous, désormais qui allez l'exercer.
Autre nouveauté, je serai un président à plein temps. Ce qui ne sera pas sans conséquence.
Je n'ai nulle intention de me perdre dans les détails. Je me concentrerai bien évidemment sur l'essentiel. Mais qu'on le sache bien ; je ne me sens aucune vocation pour inaugurer les chrysanthèmes...
Mes chers Compagnons,
Ne sous-estimons pas les difficultés qui nous attendent. Nous vivrons encore d'autres déceptions, d'autres frustrations. Nous connaîtrons encore d'autres moments de découragement.
Il faut donc nous y préparer...
On nous attaquera. On tournera nos efforts en dérision. On guettera nos divisions, pour mieux les mettre en exergue...
Vous vous montrerez pourtant impavides.
Impavides parce que résolus.
Impavides parce que vous croyez, parce que vous croyez vraiment dans la démocratie et dans la politique, parce que vous refusez le fatalisme, ce fatalisme qui porte en germe tous les renoncements.
Ce soir, Jacques Chirac doit savoir que notre mouvement ne décide de se réconcilier, de se rénover, de s'ouvrir, enfin, que pour mieux le servir.
Car servir le Président de la République, c'est servir la France.
Ma seule vocation est de vous aider dans cette entreprise.
Je sais l'étendue de mes devoirs.
Et à l'heure de les assumer, j'ai trois pensées.
Une pensée pour les militants d'Aix-en-Provence qui, il y a trente-deux ans, m'ont accueilli dans leurs rangs et aux côtés desquels, encore étudiant, j'ai connu mes tout premiers combats.
Une pensée pour les militants de la 1re circonscription des Vosges, qui m'ont soutenu sans relâche depuis vingt ans et qui, aujourd'hui encore, m'auront entouré de leur affection.
Une pensée, enfin, pour Jean-Louis Debré, qui a organisé ces assises, pour celles et ceux qui l'ont assisté, pour chacune et chacun d'entre vous qui y participez, et pour tous ceux que vous représentez, dans chacun de nos cantons, dans chacune de nos sections professionnelles ou d'entreprise, dans chacune de nos circonscriptions, dans chacun de nos départements, de métropole et d'outre-mer, dans chacun de nos territoires ou collectivités, dans chacune de nos délégations, dans chacune de nos sections de Français de l'étranger...
Mes chers Compagnons,
Je vous ai dit que nous devions écrire une nouvelle page de notre histoire.
Eh bien, celle page, dès maintenant, écrivons-la ensemble !
La Lettre de la Nation Magazine - 11 juillet 1997
Un mouvement réconcilié, rénové, ouvert
En ouvrant ensemble, au lendemain de nos assises extraordinaires, une nouvelle page dans l’histoire de notre mouvement, nous devons mesurer l’importance cruciale de la tâche qui nous attend. Car ce n'est pas le seul avenir du gaullisme qu'il s'agit d'assurer et de construire. Aujourd’hui, les Français doutent profondément de notre démocratie, de nos institutions et du destin collectif de la Nation. C'est la première leçon des dernières élections, et du lent processus qui les a précédées. Et c'est pourquoi notre première ambition doit être de rendre tout son sens à la grandeur de l'engagement politique en nous fondant sur la modernité de la démarche gaulliste.
Avant toute chose, il s'agit de prendre nos marques et de considérer nos repères. Le premier, le plus essentiel, est le soutien que nous devons au Président de la République, dans la fidélité aux principes de 1995. Qu’on sache bien que nous sommes plus que jamais attachés à la France que Jacques Chirac a su incarner lors de l'élection présidentielle. Une France qui renoue avec la croissance, mais qui soit en même temps plus solidaire. Une France capable de porter, pour elle-même et pour les autres, un véritable projet social, un modèle qui lui soit propre en réponse aux défis de la mondialisation.
C'est à nous qu'il revient d'aider le Président de la République à donner corps aux perspectives qu’il a ouvertes. En redonnant toute sa force à cette ambition, en l’expliquant aux Français, en les mobilisant en conséquence, nous trouverons les voies du renouveau pour une vraie alternance.
Nous n’y parviendrons qu’en bâtissant ensemble un mouvement réconcilié, rénové, ouvert. La réconciliation dans le respect de nos différences est le premier de nos devoirs. Nos assises nous ont permis d’en prendre la mesure. N’oublions jamais que nous sommes un rassemblement et non un parti, que notre dessein est la recherche permanente de l’intérêt général au-delà des clivages partisans : cette méthode qui est au cœur du gaullisme, nous devons d’abord l’appliquer à nous-mêmes.
Une fois réconcilié, notre mouvement pourra se rénover pour s’ouvrir à tous ceux qui partagent notre conviction que la Nation demeure le cadre privilégié, irremplaçable, de la démocratie et de la solidarité. Ceux qui croient que la France doit s’adapter au monde nouveau non pour s’y dénaturer mais au contraire pour maîtriser les choses. Ceux qui croient que la France doit jouer un rôle moteur en Europe, une Europe capable d’incarner un véritable modèle de société pour peser sur les affaires du monde.
Voilà la tâche qui attend chacun d'entre nous. Le Mouvement doit en débattre et en débattre en toute liberté. Débattre de notre projet pour la France. Débattre aussi pour être prêts, dans quelques mois, à tenir de nouvelles assises, des assises ouvertes, qui nous permettront d'arbitrer entre les diverses formes d'organisation pour rénover le Mouvement.
La décision finale, c’est à vous qu’elle appartiendra. Elle sera la traduction fidèle des souhaits et des messages que l’ensemble de nos adhérents adresseront à ceux qui dirigent le Mouvement. Dans l’intervalle, une équipe de transition conduira notre Rassemblement.
À l’écoute constante des militants, des cadres et des élus, je serai un président à plein temps, se consacrant à l’essentiel : servir, à vos côtés, le renouveau du gaullisme. Ainsi, c’est bien à un nouveau défi que je vous invite : écrire ensemble une nouvelle page de l’histoire de notre mouvement.