Article de M. Jean-Marie Le Pen, président du Front national, dans "Français d'abord" de la première quinzaine de novembre 1997, sur la mise en cause de François Léotard dans l'affaire Yann Piat et la sortie de son livre "Pour l'honneur", intitulé "L'honneur perdu de François Léotard".

Prononcé le 1er novembre 1997

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Média : Français d'abord

Texte intégral

On connaissait « l’honneur perdu d’un capitaine », de Pierre Schoendoerffer, « l’Honneur perdu de Katbarina Blum », de Volker Scblöndorff, « l’Honneur des Prizzi » de John Huston, on attend à présent qu’un cinéaste talentueux leur emboîte le pas en réalisant un mauvais polar sur le thème « l’Honneur enlisé d’un politicien varois ».

Le scénario est tout prêt, il est signé François Léotard. Il s’appelle en toute simplicité : « Pour l’honneur ». Anonyme ou rédigé par un quidam, l’opuscule aurait pu s’intituler « traité de morale civique » ou « de l’injustice en politique ». Non, l’homme du Mur de Fréjus a cette fois passé le « mur de çon », si cher au Canard Enchaîné, l’homme du Mur de Fréjus a trouvé là son Mur des lamentations.

À la vérité, quand on connaît l’auteur, on hésite entre l’exaspération et le fou rire. Le ton enflammé, les rodomontades, les imprécations, tout cela fait que l’ouvrage en question aurait pu être signé Furax. Il est en fait signé Tartuffe. Signé Léotard, il est aussi vide que grotesque. Une litanie de plates remarques sur la perte du sens civique, sur l’ordi de valeurs, sur un pouvoir politique et judiciaire qui part à vau-l’eau, toutes les choses que François Léotard et ses compères ont contribué à détruire, constituent certes des thèmes sympathiques. Si l’on y  ajoute l’invocation des Mânes de Péguy, Anouilh et Beaumarchais, l’ouvrage a tout du plaidoyer de l’honnête homme. Sauf qu’il s’agit de François Léotard, et que François Léotard n’est pas un honnête homme. Les innombrables casseroles qui tintinnabulent allègrement à des basques en portent témoignage… À la lecture de « Pour l’honneur », bien des remarques s’imposent mais deux viennent immédiatement à l’esprit.

Tout d’abord, ce livre n’apporte rien sur le fond. Les innombrables vices de procédures qui ont entaché les enquêtes sur la mort de Yann Piat et sur l’assassinat, maquillé en suicide des frères Saincené, existent bel et bien. Or, à ce que je sache, jusqu’à ce que les deux journalistes de Canard relancent la polémique, ni M. Léotard ni M. Gaudin ne s’en sont publiquement inquiétés, alors qu’ils étaient concernés au premier chef.

Le diffamateur diffamé…

Derrière les anecdotes truculentes, à mi-chemin entre le San Antonio de Frédéric Dard et le SAS de Gérard de Villiers, dont on peut légitimement mettre en doute la véracité. Il existe de larges zones d’ombre qui rendent de nombreuses réflexions hautement vraisemblables. Car qui contestera qu’une large partie de notre belle région de Provence-Alpes-Côte d’Azur, et le Var en particulier, baignent dans un climat étrangement glauque, pourri et malsain ? Qui ne s’interroge légitimement sur les innombrables morts politiques dans laquelle s’ébroue régulièrement la Ve République ? Qui ne se pose des questions sur l’étrange aveuglement des enquêteurs et la stupéfiante paralysie de la justice sur toutes ces affaires ? Il est vrai que M. Léotard et ses amis, modemes Torquemada, n’admettent pas le droit au doute, pas plus en matière historique qu’en ce qui les concerne…

Deuxième remarque : Jean-Michel Verne et André Rougeot, les deux Routelabille du Canard Enchaîné, ne sont pas d’abominables « fachos », mais des compagnons de route du Parti communiste. Or, curieusement, à qui François Léotard réserve-t-il ses flèches et son ire, sinon au Front national, le seul qui ne soit absolument pour rien dans ces douloureuses affaires ? C’est là la démarche propre à tout politicien englué dans des affaires. Souvenez-vous de Tapie ? Cette obstination à pourfendre le Front national et ses dirigeants prend, chez François Léotard, des allures tout à la fois paranoïaques et inquisitoriales. Je m’attendais, dans trop y croire cependant, à une certaine repentance de sa part à notre endroit, puisque tel est aujourd’hui la mode. Dans la grande confiance que j’ai en la nature humaine, j’espérais que François Léotard diffamé comprendrait les souffrances que nous avions endurées fort injustement, qu’il se souviendrait des innombrables campagnes de haine, de mensonges et de calomnies menées à notre encore, depuis le « détail »  jusqu’à Mantes en passant par Carpentras. Que nenni ! Lui qui a diffamé sans relâche le Front national avec ses amis Mouillot, Noir, Carignon, j’en passe et des pires, s’acharne encore et toujours sur le Front national. On connaissait l’arroseur arrosé, voici maintenant le diffamateur diffamé ! On comprendra que nous n’en soyons guère émus. Que le vertueux déclaré fasse dans le virtuel patenté ne nous étonne guère. Les larmes de crocodiles, François Léotard connaît. Il est vrai qu’il séjourne dans le marigot depuis déjà fort longtemps…

Honneur et Patrie

Nous vivons une époque où les mots subissent d’étranges transformations, pour ne pas dire de sordides manipulations. Il est vrai que dans le microcosme politico-économique, détournements de mots riment souvent avec détournements de fonds. La conception que le déserteur François Léotard a l’honneur n’est décidément pas la mienne. Pour ma part, je m’en tiens à la devise des marins que furent mon père et mon grand-père, « Honneur et Patrie », ou à celle de mes camarades légionnaires-parachutistes en Indochine et en Algérie, « Honneur et Fidélité ». C’est sur les actes, et on sur les mots que je juge les hommes.