Texte intégral
Le Figaro : Vous avez déclaré que vous ne prendriez position pour personne. Mais quelles sont les qualités requises pour être le futur président du RPR ?
Jean-Louis Debré : Il doit être un homme de dialogue, disponible pour se rendre chaque semaine dans nos départements, pour écouter et surtout entendre nos militants, et prendre le temps nécessaire pour cela. Il doit sortir du microcosme parisien. Un homme de dialogue aussi avec nos partenaires de l'opposition. Car l'union, qui ne veut pas dire l'uniformisation ou le renoncement à ses convictions, est nécessaire. C'est ensemble que nous retrouverons les faveurs des Français.
Il doit être un homme de rassemblement. Nous, les militants, nous en avons assez des querelles de chefs, des ambitions et des stratégies personnelles. Notre prochain président ne doit pas être le représentant d'un clan, d'une tendance, d'un groupe, d'un courant. Il devra représenter l'ensemble des militants. Ce sera sa force et sa légitimité. Il amoindrirait son autorité s'il persistait à n'être que l'incarnation de rivalités personnelles ou s'il cherchait à se démarquer du Président de la République.
Le Figaro : Le futur président du RPR doit donc tout mettre en oeuvre pour que Jacques Chirac soit réélu en 2002…
Jean-Louis Debré : Si Jacques Chirac décide de se représenter, le RPR le soutiendra. Toute autre stratégie serait politiquement suicidaire.
Le Figaro : Y a-t-il, parmi les nombreux candidats en lice, un candidat de l'Élysée ?
Jean-Louis Debré : Non, il n'y a pas de candidat officiel. Nous avons voulu la démocratie comme loi régissant la vie de notre mouvement, il faut en accepter toutes les conséquences. La première, c'est la liberté de candidature, donc leur multiplicité, mais aussi le débat sans restriction entre les candidats et les militants. Dans la période de turbulences que nous traversons, faisons preuve de tolérance. La seconde, à mes yeux essentielle, c'est qu'après le verdict des urnes, nous devrons tous nous retrouver derrière celui qui a été élu.
Le Figaro : Quel type de comportement devra adopter le futur président du RPR en cette période de cohabitation ?
Jean-Louis Debré : Il devra être un homme de convictions et animer une équipe déterminée à lutter contre la politique voulue par Lionel Jospin. La deuxième loi sur les 35 heures, le budget, la loi de financement de la Sécurité sociale sont autant d'occasions privilégiées pour marquer sa qualité d'opposant. Il devra dénoncer la méthode Jospin fondée sur l'hypocrisie, les faux-semblants, l'attentisme et la manipulation de l'opinion.
Le Figaro : Quelles relations devra-t-il entretenir avec le RPF de Charles Pasqua ?
Jean-Louis Debré : Le futur président du RPR devra être un homme d'équipe, capable de faire émerger de vrais talents et de tendre la main à ceux qui se sont écartés de notre mouvement politique. Personnellement, je ne prendrai jamais la responsabilité de rompre avec des hommes et des femmes qui ont lutté à nos côtés.
J'insiste sur le fait qu'il ne peut plus y avoir d'exercice solitaire du pouvoir. Le monde évolue très vite, les comportements aussi. Ne restons pas figés dans un immobilisme idéologique certes confortable, mais politiquement stérile. Soyons de véritables gaullistes. Le gaullisme n'est pas une idéologie, c'est une capacité.
Le Figaro : Le RPR peut-il élire un président qui a voté « non » à Maastricht ?
Jean-Louis Debré : L'important, c'est l'avenir. C'est de croire en une certaine conception de l'Europe.
Le Figaro : Élire une femme à la présidence du RPR ne serait-il pas un signal fort de modernisation de votre mouvement ?
Jean-Louis Debré : La modernisation, c'est d'abord un comportement, une capacité à régler les problèmes de notre temps. Ce n'est pas un problème d'homme ou de femme.
Le Figaro : Quel peut être le degré d'autonomie du RPR vis-à-vis de l'Élysée ?
Jean-Louis Debré : Le RPR est totalement libre de s'organiser comme il l'entend, d'entamer une réflexion sur les problèmes de société, de sélectionner des candidats aux législatives. Mais il doit soutenir l'action du chef de l'État, qui n'intervient pas dans la vie des partis.