Texte intégral
Q – Votre mouvement est, dit-on, ruiné…
Bruno Mégret (MN). – Ruiné, il ne l'est pas politiquement. Mais c'est vrai que, sur le plan financier, nous traversons une mauvaise passe. Voici les chiffres. Notre campagne nous a coûté environ 12 millions de francs. A quoi il faut ajouter 8 millions pour les bulletins de vote et les professions de foi. Soit, en tout, 20 millions. Nous avions collecté 13 millions de francs. Manque donc, aujourd'hui, 7 millions puisque l'Etat ne verse d'argent qu'à ceux qui, lors des européennes, ont franchi la barre des 5 %. Nous avons donc lancé une grande souscription auprès de nos électeurs, sympathisants et adhérents. Si 25 000 de nos électeurs adressent chacun au Mouvement national (MN) 300 F, nous sommes sortis du tunnel…
Q – Vous, que devenez-vous ?
– Pour exercer mon mandat de député européen, j'étais détaché par mon corps d'origine, les Ponts et Chaussées. Automatiquement, je vais donc être réintégré dans cette administration.
Q – A quoi attribuez-vous votre échec ?
– D'abord, à l'abstention massive, supérieure à la moyenne nationale, de l'électorat de l'ancien FN. 60 % de cet électorat a refusé de choisir entre Le Pen et moi, car nous n'avons pas eu le temps de lui expliquer les vraies causes de la scission. Second motif : l'émergence du couple Pasqua-Villiers à la suite de « l'explosion en vol » de Séguin. La concurrence majeure, du coup, n'était plus Le Pen-Mégret, mais Pasqua-Sarkozy. Enfin, nous avons payé le parti pris éhonté de « l'établissement socialiste en faveur de Le Pen.
Q – Vos amis ont-ils aujourd'hui compris ce qui vous sépare de Jean-Marie Le Pen ?
– Il est clair que nous devons exister maintenant indépendamment du FN résiduel.
Q – Avez-vous envie de dialoguer à… votre gauche ?
– Je ne suis fermé au dialogue avec personne. Mais, pour l'instant, notre priorité, c'est d'asseoir le Mouvement national. Concrètement, cela signifie être massivement présent lors des municipales de 2001.
Q – Avec des espoirs de victoire ?
– Oui. Nous comptons, au-delà de Vitrolles-en-Provence et de Marignane, conquérir de nouvelles villes, notamment dans les environs de Toulon et de Nice, ainsi qu'en Alsace, où nous avons fait récemment de gros scores. Je mènerai, moi, la bataille de Marseille.
Q – Quels sont vos rapports avec Jean-Marie Le Pen ?
– Inexistants. De toute façon, il est engagé, de façon irréversible, dans un processus de régression groupusculaire.
Q – VGE vient d'inviter Jacques Chirac à en finir avec une cohabitation « prolongée et consensuelle » et à provoquer, dès l'an prochain, une présidentielle…
– La cohabitation, surtout telle que la pratique M. Chirac, est détestable. M. Giscard d'Estaing a raison de proposer d'en finir par l'organisation d'une présidentielle anticipée.
Q – Il est rare de vous voir donner un « coup de chapeau » à Giscard !
– Je ne partage pas beaucoup d'options de M. Giscard d'Estaing, mais je ne nie pas qu'il ait souvent une bonne analyse politique.
Q – Surtout quand il s'en prend à Jacques Chirac ?
– En matière de chiraquisme, depuis vingt-cinq ans, Giscard est fondé à s'exprimer : c'est, par excellence, l'expert ès chiraquisme.
Q – L'avenir de l'opposition, c'est quoi selon vous ?
– La recomposition reste à faire. Mais, tôt ou tard, cela crève les yeux, on verra surgir des décombres une social-démocratie de droite, qu'incarne François Bayrou, et une droite nationale puissante, dont rêvent 30 % au moins des Français. Le temps joue en notre faveur. Nous serons demain la seule force organisée et durable à se trouver au bon endroit au bon moment.