Texte intégral
Georges Marchais a consacré son discours, comme il le fait depuis le lancement de la campagne électorale des communistes, à exposer les trois raisons principales de voter communiste en 1986.
D'abord, « se donner les moyens d'être plus et mieux défendus ». Le secrétaire général du PCF a insisté, de ce point de vue sur « l'offensive 0sans précédent » que mènent actuellement les forces du capital. « Les grands fortunés et les grands patrons, a-t-il montré, pensent que la situation peut leur permettre de marquer des points décisifs. Ils pensent qu'il leur est possible de liquider les conquêtes sociales et démocratiques essentielles que leur ont imposées depuis des décennies les luttes de notre peuple. »
Résister à cette offensive est une nécessité de chaque jour. Ce sera aussi un moyen efficace de le faire en votant communiste.
La seconde raison de ce vote sera d'« affirmer son exigence d'une autre politique ». La troisième, d'« utiliser le seul moyen possible pour empêcher la droite de revenir au pouvoir et de coopérer avec le Parti socialiste afin de poursuivre et d'aggraver la politique d'austérité ».
Sur ce point, Georges Marchais a fait remarquer :
« On nous dit parfois : « Il faut être réaliste. Le Parti socialiste et la droite se sont déjà mis d'accord sur ce qui se passera après les élections. Que voulez-vous faire contre ça ? Vos propositions ne sont pas crédibles. Si on veut voter utile contre la droite, il faut voter socialiste... »
Il y a deux réponses à cette objection.
D'abord, il faut s'entendre sur ce que c'est le réalisme, la crédibilité d'une politique. Vous avez connu hier celle de la droite. Vous connaissez celle du Parti socialiste. L'un après l'autre, ils ont aggravé dramatiquement toutes les difficultés. Et ils proposent maintenant, seuls ou ensemble, de continuer dans la même voie. C'est cela, le réalisme ? Que la poursuite de cette politique puisse surmonter la crise qu'elle a elle-même créée, c'est crédible ? Bien sûr que non. Ce qui est réalisable, c'est de faire autrement. C'est de prendre les problèmes tels qu'ils sont, et de définir à partir de là les propositions nouvelles, sérieuses pour leur apporter des solutions.
Tout dépend de votre intervention
Ces problèmes, tout le monde les connaît. C'est le chômage, la baisse du pouvoir d'achat, l'échec scolaire, et bien d'autres, malheureusement. Comment peut-on espérer une seule seconde résoudre ces problèmes si on continue comme aujourd'hui ? Comment peut-on redresser notre économie et créer des emplois si on ne fait pas de la croissance en France ? Comment, peut-on financer cet effort si on n'empêche pas l'argent de s'envoler dans les placements, les spéculations et les sorties de capitaux ? Comment peut-on lutter contre les inégalités sociales si on n'augmente pas le pouvoir d'achat des petits et moyens salaires et si on ne fait pas payer les grandes fortunes et les plus hauts revenus ? Comment peut-on moderniser la France si on ne donne pas une formation de qualité à tous les enfants, quel que soit leur milieu social, et si on ne permet pas à tous les travailleurs qui le souhaitent de se former et d'acquérir une meilleure qualification ? Si on veut être réaliste, il n'y a pas le choix. Il faut faire une autre politique. C'est ce que nous proposons.
L'exemple de 1936, 1945, 1968
Cela dit, nous ne sommes pas des démagogues. Nous n'allons pas voir les gens, dans cette campagne électorale, en leur disant : « Voilà nos propositions. Votez pour nous, laissez-nous faire, et tout s'arrangera. » Car l'enseignement fondamental, capital, de ce qui se passe depuis 1981, c'est précisément que, pour obtenir le changement auquel elles aspirent, les forces populaires ne doivent s'en remettre à personne. Si elles ne se rassemblent pas, si elles pèsent pas de tout leur poids, alors, les reniements succèdent toujours aux promesses, les plus grands espoirs se transforment toujours en déception. Oui, tout dépend de votre intervention, du rassemblement de notre peuple dans l'action.
Ce rôle moteur du mouvement populaire, nous ne l'inventons pas. Toute l'histoire de notre pays l'a mis en lumière. Qu'est-ce qui a permis les grandes avancées de 1936 ? C'est le rassemblement dans l'action des forces populaires. Qu'est-ce qui a permis la Libération de notre pays en 1945 ? et les importantes réformes qui l'ont suivi ? C'est le rassemblement dans l'action de tout notre peuple. Qu'est-ce qui a permis de nouveaux progrès en 1968 ? C'est le rassemblement dans l'action des travailleurs manuels et intellectuels, de la jeunesse. Il n'y a pas une seule conquête sociale ou démocratique qui n'ait pas coïncidé avec des temps forts de l'action, du rassemblement des forces populaires.
Et aujourd'hui, quelle est la condition pour que le mouvement populaire puisse faire face victorieusement à la tâche qui lui est imposée : résister à la crise, surmonter les difficultés du pays, faire échec au déchaînement des forces du capital que j'ai évoqué tout à l'heure ? La condition est toujours la même : il se faut rassembler et agir. Voilà comment le problème se pose, et continuera à se poser.
Et le Parti communiste dans tout cela ? Eh ! bien, le Parti communiste, il fait tout pour favoriser ce rassemblement dans l'action. Ce parti, il n'a pas d'autre raison d'être que de vous défendre, de vous aider à intervenir, de favoriser votre rassemblement. Pour cela, il est prêt à coopérer avec toutes et tous, sans aucun a priori ni restriction. Dès lors, voter pour ce parti, lui donner davantage de forces en 1986, c'est vous donner la garantie que, cette fois, vos aspirations, vos revendications, votre volonté d'une autre politique auront une chance de s'imposer.
Le vrai choix de mars prochain
Jusqu'où peut-on aller dans cette voie avec ces élections de 1986 ? La réponse est simple : aussi loin que notre peuple en décidera. Nous, nous sommes prêts à apporter la preuve de l'efficacité de la politique nouvelle que nous proposons. S'il s'agit d'avancer réellement dans la solution des problèmes du pays, c'est-à-dire, soyons clairs, de faire une politique n'ayant rien à voir avec celle que mène aujourd'hui le Parti socialiste, nous sommes disponibles pour coopérer avec tous, jusqu'au gouvernement.
Evidemment, il ne s'agit pas de recommencer ce qui s'est fait avec le programme commun. Cette manière de faire, l'expérience l'a montré, a conduit notre peuple à l'impasse. Il n'est pas question que nous y revenions. Et puis, il ne faut se faire aucune illusion. Tout le monde a entendu Fabius, à la télévision, expliquer à Chirac qu'il n'est pas question pour le Parti socialiste d'accepter que les communistes participent au gouvernement s'ils n'acceptent pas la politique actuelle. Cela, évidemment, c'est totalement exclu.
Le seul moyen d'ouvrir une autre perspective en 1986, c'est donc que l'exigence d'une politique nouvelle soit portée par un puissant mouvement populaire. Et elle ne pourra s'exprimer que d'une seule façon : par le vote communiste.
Il reste un peu plus de quatre mois. Bien sûr, tout va être fait pour tenter de brouiller les pistes, de falsifier l'enjeu du scrutin. La droite va se déchaîner. Et le Parti socialiste va s'appuyer sur ce fait pour vous dire et vous répéter : « Regardez comme la droite est dangereuse ! Le Parti socialiste, c'est tout de même un moindre mal... »
Ne vous laissez pas prendre. Il n'est pas vrai que le seul choix de 1986 soit : ou bien le Parti socialiste, ou bien la droite. Le vrai choix de 1986, c'est : ou bien continuer la politique d'austérité avec le Parti socialiste, la droite ou les deux ensembles ; ou bien se défendre contre cette politique, lui résister plus efficacement, en choisir une autre. Non, la politique du Parti socialiste n'est pas « un moindre mal ». Ce n'est pas un moindre mal d'aggraver, comme elle le fait, toutes les difficultés qui nous assaillent. Ce n'est pas un moindre mal d'ouvrir, comme elle le fait, une voie royale au retour de la droite. Ce n'est pas un moindre mal de créer, comme elle le fait, les conditions du retour à la coopération détestable entre la droite et le Parti socialiste.
Le seul vote utile, le seul vote efficace pour ouvrir une perspective nouvelle, c'est bien le vote communiste. »