Article de M. Pierre Pasquini, ministre délégué aux anciens combattants et victimes de guerre, dans "Le Figaro" du 4 avril 1997, sur les grèves sans préavis des personnels du transport aérien français, intitulé "Grèves : l'intolérable".

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Pierre Pasquini - ministre délégué aux anciens combattants et victimes de guerre

Circonstance : Grève surprise du personnel au sol de l'ex Air-Inter à Orly le 1er avril 1997, entrainant l'annulation de tous les vols

Média : Emission Forum RMC Le Figaro - Le Figaro

Texte intégral

Minable : c’est l’adjectif qui vient à l’esprit lorsque l’on considère que des milliers de gens qui s’apprêtaient le cœur joyeux, à bénéficier des fêtes de Pâques et à passer quelques jours de congé loin de la morosité dans laquelle certains se complaisent à les tenir, se sont retrouvés bloqués dans les aéroports avec familles, animaux et bagages. Le choix de la date n’était à l’évidence pas innocent, puisque c’est le 1er avril qu’Air France intégrait Air Inter et les fêtes de Pâques ont toujours constitué une période sensible. Il est estimé depuis longtemps que le moment est valable dans un contentieux employé-employeur.

Le Français est tolérant. Il admet que certains salariés puissent, lorsqu’ils sont menacés, se préoccuper de leur situation. Mais, pousse-t-il la tolérance jusqu’à accepter que ce soit lui qu’on pénalise, alors que c’est lui qui fait précisément vivre les salariés en question ?

Rien ne permettait à ceux-ci de prendre en otage les clients des Compagnies d’aviation et, peut-on ajouter, de les maltraiter. L’indécence a été poussée jusqu’à ne fournir aucun renseignement et à laisser, pendant des heures, d’éventuels vacanciers sans la moindre nouvelle. On rapporte même que, pour mieux se débarrasser d’une trop grande approche des comptoirs, une alerte à la bombe fut imaginée, qui en permis l’évacuation.

Le mécontentement éventuellement légitime de quelques-uns gagne-t-il à faire naître le mécontentement des autres ? Gagne-t-il à les pénaliser indûment, au point d’arrêter un service public ? Ceux-là qui l’ont fait devraient se méfier. La loi a protégé le travail en inscrivant le droit de grève dans la Constitution. Mais le droit de grève est limité par des textes qui le réglementent et l’un d’eux a exigé la nécessité d’un préavis. En ce dernier samedi de Pâques, c’est donc la loi elle-même qui a été bafouée par ceux-là même qui l’ont vu créée à leur profit, et au détriment de ceux qui les font vivre. Ils devraient prendre garde ; la tolérance a ses limites.

Désormais, la libre concurrence existe sur tous les réseaux aériens. Il n’est pas impossible qu’un jour, une compagnie étrangère trouve le moyen de mieux assurer les transports sur certaines lignes de notre réseau national. Souvenez-vous de ce qu’il advint au paquebot France : ceux qui en vivaient ont réussi à lui donner la mort.

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