Texte intégral
RMC le 3 mars 1997 - Entretien du ministre des affaires étrangères, M. Hervé de Charrette
RMC : Tout le monde convient bien que l'Albanie doit faire face à des problèmes économiques pratiquement insurmontables. Ce pays pauvre, entièrement fermé à l’époque du communisme, s'est brutalement converti au libéralisme. L’économie est, aujourd'hui, complètement désorganisée et les mafias locales y ont leur part. Que peut faire l'Europe ?
Hervé de Charrette : Les Français sont très préoccupés, les Français, mais aussi sachez-le, tous les pays de l'Union européenne devant la gravité des événements qui surviennent en Albanie et qui peuvent laisser craindre le développement de troubles et de difficultés. C'est pourquoi nous appelons très solennellement l'ensemble des partis, l'ensemble des dirigeants d'Albanie, à faire preuve de modération et de sagesse pour trouver, ensemble, une solution à leurs problèmes.
RMC : Et en dehors de lancer un appel, que peut-on faire concrètement ?
Hervé de Charrette : La France et l'Union européenne vont se concerter dans les heures qui viennent. La présidence européenne envisage de se rendre sur place. Mais je le répète, pour résoudre les difficultés de l'Albanie, c'est d'abord aux Albanais d’éviter les crises, les tensions et les difficultés./.
Albanie, réponse du ministre délégué à la coopération, M. Jacques Godfrain, à une question d'actualité, à l'Assemblée nationale, le 4 mars 1997
Depuis le mois de janvier, la crise dite des "pyramides financières" n'a cessé de s'aggraver. La ruine de centaines de milliers d’épargnants a provoqué de véritables émeutes débouché sur une situation que l'on peut qualifier d'insurrectionnelle et provoqué la démission du gouvernement et la proclamation de l'état d'urgence.
C'est dire l'intensité de la crise qui affecte l'Albanie, et par voie de conséquence, les pays qui sont à son voisinage. La France et l'Union européenne, mobilisées depuis plusieurs semaines, ont pris la pleine mesure du problème.
À quoi tendent nos efforts ? Prioritairement, à assurer la sécurité de la centaine de ressortissants français présents en Albanie. Ceux dont la présence n'est pas indispensable ont été appelés, hier, à regagner la France. Notre ambassade à Tirana est en contact constant avec d'autres missions diplomatiques pour assurer, en liaison avec les autorités albanaises. la sécurité des ressortissants étrangers.
Le souci qu'a la France de favoriser une solution rapide et non violente de la crise l'a conduite à agir vigoureusement en faveur du dialogue politique. À nos yeux, ce dialogue devrait déboucher sur une nouvelle donne institutionnelle : c'est ainsi que le président Berisha, qui a été réélu hier, pourrait être amené à constituer un gouvernement d'union nationale et à procéder à des élections législatives anticipées. Seule l'instauration d'un climat de confiance entre les différents partis politiques permettra de répondre au désarroi de la population.
Plusieurs délégations internationales se sont rendues ces derniers jours à Tirana pour étudier, avec toutes les parties prenantes, la situation politique et financière et formuler des recommandations. L'Union européenne, qui tiendra des réunions d'urgence cette semaine, à d'ores et déjà proposé au gouvernement de Tirana diverses formes d'assistance technique. Les ambassadeurs de l'Union européenne ont réuni dès dimanche soir les présidents de tous les partis politiques.
La France est très attachée à l'avenir de ce pays européen, dont elle se sent proche par de nombreux souvenirs historiques et liens culturels. Elle prendra toute sa part dans les efforts engagés par la communauté internationale, et en particulier, l'Union européenne, pour aider l'Albanie à retrouver la voie de la stabilité et de l'assainissement financier.