Texte intégral
Le congrès de la CDU vient de s'achever à Hanovre, Helmut Kohl a été réélu président, avec le score d'un véritable plébiscite, 96 %. Il est vrai que chacun, dans son parti, mesure la dynamique politique qui est celle du chancelier, la seule qui puisse faire gagner à la majorité sortante les prochaines élections, et l'importance de son rôle historique. Helmut Kohl rivalise désormais avec Bismark du point de vue de la durée de son leadership à la tête de l'Allemagne et avec les plus grands si l'on juge l'influence que ses décisions et sa politique auront eu sur l'avenir de son pays et de notre continent. L'homme qui a fait la réunification veut maintenant faire l'Europe. Il est devenu la figure emblématique de notre famille politique à l'échelle européenne. Il reste au chancelier allemand, et il nous reste, à répondre à deux questions de cette fin de siècle.
La première question est celle du sens et de la signification de l'aventure européenne. Nous sommes arrivés à un moment, en France, où l'idéal européen semble devenu le radeau de la méduse.
Tous ceux qui, hier, quand les temps étaient calmes, se disaient Européens, « Européens bien entendu », tous ceux-là ont sauté à la mer. De plus en plus nombreux, dans la majorité comme dans l'opposition, sont ceux qui par un biais ou un autre, proposent d'esquiver le rendez-vous européen. Il est temps, plus que temps, que ceux qui n'ont pas indiqué la volonté politique de la construction européenne se fassent entendre. Il est temps qu'ils cessent de laisser piétiner cette espérance et qu'ils relèvent le drapeau qui traîne dans la boue. Toutes les raisons qui font que nous étions Européens hier sont encore plus fortes aujourd'hui. La compétition économique est plus rude, la société plus fragile, l'emploi plus menacé. Sans Europe, face à ces menaces nous sommes désarmés. C'est en étant Européen que l'on est le plus patriote, le meilleur défenseur de l'emploi et de la protection sociale. Au demeurant à tous ceux qui nous disent qu'il faut faire l'Europe politique avant l'Europe économique et monétaire, rappelons sans malignité, que c'est bien ce que nous avions proposé, il y a quarante ans en proposant de commencer par la défense. On a commencé par l'économie. Si ce rendez-vous est manqué, le mal sera irrémédiable.
Le deuxième enjeu, c'est le projet de société. Il y a longtemps que les démocrates que nous sommes, en Allemagne comme en France, n'ont pas proposé un projet de société. Nous avons beaucoup réfléchi à la question. Le sujet reste d'actualité. Mais la question primordiale de la vie des hommes ensemble doit aujourd'hui être posée. Notre modèle est un besoin pour des milliards d'hommes. Il est temps de le reformuler, d'en être fiers et de le proposer à nos enfants et au monde.