Texte intégral
Europe 1 : Est-ce que cette fusion entre Air France et Air Inter vous semble la dernière chance pour la ou les compagnies ?
A.-M. Idrac : Il faut bien voir ce dont il s'agit. Il s'agit d'avoir en France des ailes françaises, parce que les Français y sont attachés. Ça fait partie de la tradition, de la culture, des atouts de la France pour faire face à la compétition européenne et internationale qui est extrêmement forte et qui se fait sur un marché en développement, donc un marché sur lequel on peut trouver de la force et des créations d'emploi. C'est la première idée : sauver des ailes françaises, les muscler comme je le dis assez souvent. Et la deuxième idée, c'est de valoriser le potentiel que représente pour la France d'avoir des métiers, des compétences à la fois à Air France et à Air Inter. D'où ce projet de fusion que M. Blanc nous a proposé et qui nous paraît effectivement être la bonne formule.
Europe 1 : Il s'agit bien de sauver la compagnie ?
A.-M. Idrac : Oui, il s'agit tout à fait de la sauver. En ce qui concerne Air France, c'est en bonne voie, grâce aux efforts de C. Blanc et de l'ensemble du personnel. En ce qui concerne Air Inter, ce n'est pas le cas puisqu'Air Inter est en difficulté très très grave. Il faut savoir que dans un an, Air Inter sera en concurrence directe avec d'autres compagnies européennes sur le territoire national. Donc, il s'agit bien effectivement d'assurer cette survie. Et puis au-delà, d'assurer la puissance d'Air France et donc de la France sur le plan aérien dans le monde.
Europe 1 : Quand vous voyez le personnel d'Air Inter ne pas déclencher une grève immédiatement après ce projet de fusion, avez-vous le sentiment que c'est déjà une première victoire à la fois de M. Blanc et du gouvernement ?
A.-M. Idrac : Je crois que pour une affaire comme celle-là comme dans bien d'autres d'ailleurs, il faut beaucoup de lucidité, prendre les choses à temps et c'est ce que nous faisons sur la proposition de C. Blanc et il faut aussi beaucoup de concertation, c'est ce qui est prévu. C'est après toutes ces concertations que l'on aura les détails de ce projet de mise en œuvre de la fusion.
Europe 1 : C'est un projet qui comporte des risques sociaux importants ?
A.-M. Idrac : J'en vois surtout si on laissait tomber, c'est-à-dire si on n'avait pas d'ambition et si on laissait Air Inter à l'abandon, soumis à la concurrence des entreprises privées ou des entreprises européennes. C'est là qu'il y aurait des risques sociaux sérieux. Là, je crois qu'il y a plutôt des chances au contraire de succès et de développement pour l'ensemble du groupe.
Europe 1 : Et si un mouvement social se déclenchait dans deux, trois jours la semaine prochaine, est-ce que le gouvernement serait pris à soutenir C. Blanc et à faire face ?
A.-M. Idrac : Le gouvernement soutient tout à fait C. Blanc. A. Juppé, B. Pons, moi-même avons eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises et nous sommes tout à fait à J'écoute des propositions de mise en œuvre qu'il va nous faire après le processus de concertation qu'il a lui-même organisé avec son personnel.
Europe 1 : L'un des nœuds de ce conflit, ce sont les pilotes d'Air Inter qui ne veulent pas voir leurs salaires revus à la baisse, alignés sur ceux d'Air France. Vous comprenez leur attitude ou pas ?
A.-M. Idrac : Je comprends bien que ce soit toujours difficile pour tout le monde de faire des efforts bien entendu. Mais là, il s'agit de faire ce que l'on veut Et ce que nous voulons tous, l'objectif du gouvernement, tel qu'il l'a fixé à C. Blanc et qu'il réussit très bien, c'est de sauver les ailes françaises. Alors, les questions de salaire, d'organisation, de temps de travail etc., relèvent de la responsabilité du chef d'entreprise et pas de la responsabilité du gouvernement. Mais je suis sûre qu'avec un bon travail de négociation, de concertation, en se mettant tous autour des tables qui conviennent, c'est-à-dire à l'intérieur de l'entreprise, tout ceci ne pourra que progresser.
Europe 1 : Le PDG de la SNCF est dans le bureau du juge actuellement. Il pourrait être mis en examen dans l'affaire Elf-Bidermann, est-ce qu'il peut rester PDG s'il est mis en examen ?
A.-M. Idrac : S'il est mis en examen, il est, comme chaque citoyen mis en examen, présumé innocent.
Europe 1 : Quelle que suit la motivation de cette mise en examen ?
A.-M. Idrac : Il est présumé innocent comme chacun d'entre nous si nous étions mis en examen. Le Premier ministre l'a affirmé très clairement hier et c'est un, je crois, principe très fort et très protecteur des libertés individuelles dans notre pays.
Europe 1 : La jurisprudence qui est utilisée pour les ministres n'est pas applicable aux présidents des grandes sociétés nationales ?
A.-M. Idrac : La présomption d'innocence est quelque chose de très important et à l'heure qu'il est, ni vous ni moi savons ce que Mme E. Joly a décidé concernant M. Le Floc-Prigent.
Europe 1 : Pensez-vous que M. Le Floc-Prigent a mis la SNCF sur les bons rails ?
A.-M. Idrac : En ce qui concerne ses activités de président de la SNCF, je crois effectivement que sur le double plan de la concertation et de l'attention portée aux clients, il a été tout à fait positif dans les six mois qu'il a déjà rempli à la SNCF et nous avons donc pu travailler avec lui de manière très constructive sur le projet que le gouvernement, sur la proposition de B. Pons et de moi-même, a comme vous le savez proposé pour sauver la SNCF.