Interviews de M. Philippe de Villiers, président du Mouvement pour la France, dans "Le Figaro" du 8 juin 1996 (intitulée "battre la gauche") et à France 3 le 9 juin, sur les consignes de son mouvement en vue des élections législatives de 1998.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Réunion du conseil national du Mouvement pour la France à Paris le 8 juin 1996

Média : Emission Forum RMC Le Figaro - France 3 - Le Figaro - Télévision

Texte intégral

Le Figaro - 8 juin 1996

Le Figaro : On vous sent plus solidaire de la majorité. D’où vient ce changement de cap ?

Philippe de Villiers : Il n’y a pas eu de changement de cap. Je constate que beaucoup de Français sont aujourd’hui désappointés, que la majorité gouvernementale est en décalage par rapport à la majorité silencieuse de tous ceux qui ont voté pour Jacques Chirac en 1995, et donc qui s’opposent au socialisme. Selon un sondage publié par votre journal, 40 % des électeurs de droite ne se reconnaissent pas dans le RPR ou dans l’UDF. Ce que prépare le MPF, c’est une structure d’accueil pour ces Français de sensibilité majoritaire, qui ne comprennent plus rien au grand cafouillage gouvernemental.

Le Figaro : Pourtant, vous revendiquez le fait d’appartenir à la majorité présidentielle…

Philippe de Villiers : Le MPF réfléchit à des alliances possibles et souhaite multiplier les contacts au sein de la majorité ? Nous partageons, par exemple, les mêmes idées que Charles Pasqua sur l’Europe, les mêmes idées qu’Alain Madelin sur la nécessaire libération de l’initiative en France. Le MPF n’a aucune volonté de s’opposer systématiquement au programme. Mais il veut proposer une majorité alternative. Car le gouvernement actuel est en train d’échouer, dans la mesure où il ne rompt pas avec le socialisme.

Le Figaro : Dans quels domaines ?

Philippe de Villiers : Je reproche au gouvernement d’avoir souvent des intentions de droite, et une politique de gauche. Prenez le rapport Fauroux sur la liberté de l’école, le rapport Sauvalgo sur l’immigration, le rapport Léonard-de-Courson sur les gaspillages… Tous comportaient de très bonnes propositions, mais on ne les applique pas. Quant à la réforme fiscale annoncée par le Premier ministre, elle est à l’image de ce marketing politique qui consiste à faire durer les problèmes plutôt que de les résoudre. En résumé, Alain Juppé propose de rendre aux Français, en cinq ans, les impôts qu’il leur a pris en un an, l’année dernière !

Le Figaro : Quelle sera votre stratégie pour les législatives ?

Philippe de Villiers : Le MPF présentera des candidats, en primaires avec ceux de l’UDF et du RPR, dans un maximum de circonscription. Mais notre stratégie est très claire : au premier tour, les électeurs feront le choix de leurs idées, et au second tour, nous les inviterons à faire battre la gauche. Nous ne nous trompons pas d’adversaire. Cela dit, nous continuerons à faire pression sur le gouvernement, dans les deux ans qui nous séparent des élections législatives, pour que les valeurs de droite soient mieux défendues.

 

France 3 - dimanche 9 juin 1996

France 3 : M. Blondel a déclaré : A. Juppé nous a leurrés ?

P. de Villiers : Ma réaction consiste à dire : l’impôt tue l’impôt. C’est-à-dire qu’à partir du moment où il y a eu 130 milliards d’impositions supplémentaires, quand vous faites une ponction fiscale sur un corps social déjà affaibli, vous lui ôtez de la vigueur. La vraie réforme à faire, c’est l’initiative, la responsabilité, la concurrence des caisses, plutôt que de mettre en cause les principes de la médecine libérale.

France 3 : L’affaire de la vache folle, votre réaction ?

P. de Villiers : Tout d’abord, le président de la commission de Bruxelles m’étonne, parce que quand même lui qui a fait décider par la commission la levée de l’embargo, alors que la seule manière de lutter quand il y a un problème de santé publique, c’est la fermeture des frontières. Donc, je pense qu’il y a eu un cafouillage, incontestablement.

France 3 : Votre réaction par rapport à l’attitude du gouvernement français !

P. de Villiers : Le gouvernement français doit tout de suite avoir une position nette et claire pour protéger les consommateurs et les éleveurs – je vous parle au nom d’un département qui est le premier producteur de viande bovine – il faut fermer les frontières, de telle manière qu’il n’y ait pas de doutes, et que l’on soit sûr de garantir la santé publique, et la production bovine qui est très importante en France. Il ne faut pas que les producteurs deviennent des victimes.

France 3 : Votre mouvement a réuni son conseil national. Vous avez dit que vous étiez le porte-parole de la majorité silencieuse. Qu’est-ce que cela veut dire ? Vous êtes dans la majorité ?

P. de Villiers : Je suis issu de la majorité, mais je fais partie de la majorité silencieuse, de tous les Français qui ne sont pas satisfaits, qui voient bien que les choses ne s’arrangent pas, et qui, en même temps, ne veulent surtout pas le retour des socialistes.

France 3 : Les législatives s’approchent. Vous allez entrer dans l’union réclamée par A. Juppé ?

P. de Villiers : Ma stratégie c’est, au premier tour, on met des candidats – le premier tour, c’est une primaire – pour le choix du renouveau, pour un autre choix, par exemple faire baisser les impôts, une politique familiale, l’immigration zéro, on pourrait continuer : tout ce qu’il n’a pas été fait, tout ce qui n’est pas fait par le gouvernement actuel. Au second tour, on ne se trompe pas d’adversaire, on fait voter pour battre les socialistes.