Déclaration de M. Franck Borotra, ministre de l'industrie de la poste et des télécommunications, en réponse à une question sur la restructuration de la Direction des constructions navales à Brest, à l'Assemblée nationale le 1er février 1996.

Prononcé le 1er février 1996

Intervenant(s) : 
  • Franck Borotra - ministre de l'industrie de la poste et des télécommunications

Texte intégral

Direction des constructions navales

Q. : Ma question s'adressait à M. Charles Millon, ministre de la Défense, actuellement aux États-Unis où il accompagne le président de la République, mais elle concerne tout autant, si ce n'est plus, le ministre de l'Industrie. Depuis que je l'ai posée, le dossier a quelque peu évolué tant et si bien que je vais en modifier la formulation sans en changer la portée finale. Que s'est-il passé entre-temps ?

Nous savons maintenant que le rapport du Délégué général pour l'armement, M. Conze, sur l'évolution de la Direction des constructions navales sera présenté le 13 février, qu'il ne comportera pas des mesures précises, mais posera la problématique d'ensemble des constructions navales militaires en France.

Statut du personnel des arsenaux

À cet égard, je me permets d'appuyer les dires du ministre de la Défense concernant le maintien des statuts du personnel de la DCN. Je suis un ardent partisan de maintenir l'unicité de la DCN pour que cette entreprise conserve une taille critique aux niveaux européen et international. Je suis également favorable, même si ce n'est pas l'avis de certains syndicats, à l'évolution du statut de l'entreprise qui devrait, à mon sens, devenir une société nationale pour échapper ainsi aux contraintes du code des marchés publics et à la comptabilité publique, et pour pouvoir nouer des alliances sur le plan européen.

La taille de cette nouvelle entreprise DCN va largement dépendre des décisions qui seront prises dans la loi de programmation militaire. Actuellement, presque chaque semaine, se tiennent des conseils de défense au cours desquels le chef de l'État rend les grands arbitrages.

Second porte-avions à propulsion nucléaire

Je souhaite, comme député de Brest intéressé par les retombées industrielles, que le deuxième porte-avions nucléaire figure dans cette loi de programmation militaire, puisqu'un groupe aéronaval sans porte-avions n'a plus de crédibilité, et que la demande des états-majors pour la construction d'un troisième chaland de débarquement de type « Foudre » soit retenue.

Même si ces espérances sont confirmées, ce qui n'est, hélas ! pas certain, se pose le problème sur le site brestois de la déflation des effectifs qui, de 1985 à 1995, ont déjà baissé de 20 % pour s'établir aujourd'hui autour de 6 000 salariés auxquels il faut en ajouter environ 1 300 au titre de la sous-traitance.

Les constructions neuves vont, en tout état de cause, être affectées à un horizon plus ou moins lointain. Il s'agit donc pour les élus, pour l'ensemble des responsables et pour le Gouvernement de mettre en place un dispositif permettant, au-delà des industries de défense, d'imaginer les compensations.

Convention État-Bretagne

À cet égard, la semaine dernière, le conseil régional de Bretagne, sous l'impulsion de M. Yvon Bourges, ancien ministre de la Défense, a décidé la création d'un groupe de travail réunissant l'ensemble des forces vives de la région Bretagne, puisque le site de Lorient est également affecté, et a demandé au Premier ministre la nomination d'un commissaire interministériel à la reconversion industrielle à l'instar de ce qui a déjà été décidé pour les régions Rhône-Alpes et Aquitaine.

En outre, des compensations importantes vont être demandées, la région Bretagne étant prête, dans le cadre d'une convention avec l'État et d'autres partenaires, à apporter sa contribution à cet effort de diversification et de redéploiement. Nous pensons, monsieur le ministre, qu'il conviendra de réfléchir, pour le site de Brest, mais aussi pour le site de Lorient, à l'établissement de zones à fiscalité allégée.

Autant je partage les orientations de la politique du Gouvernement sur la relance de l'activité dans les grandes villes, dans les banlieues, autant il faut conserver présents à l'esprit les impératifs de l'aménagement du territoire. Dès lors que des zones éloignées souffrant de handicaps sont affectées, il faut mettre en place des leviers industriels importants. Telle est ma question monsieur le ministre. Vous vous doutez bien que tous les personnels concernés par ces évolutions prévisibles et difficiles attendent avec beaucoup d'inquiétude vos réponses.

R. : Je souhaite tout d'abord vous présenter les excuses de M. Charles Millon, ministre de la Défense, qui ne peut être des nôtres ce matin, car il accompagne le président de la République dans son déplacement aux États-Unis d'Amérique. Je vais donc vous faire connaître les éléments de réponse qu'il m'a communiqués.

Au préalable, je voudrais rendre hommage à la persévérance avec laquelle vous défendez la construction navale militaire. Ce n'est pas la première fois que vous intervenez sur ce sujet et je sais l'importante qu'il a à vos yeux, et l'action que vous menez dans ce sens. En outre, vous avez livré, au travers de votre question, un certain nombre d'éléments de réflexion, voire de propositions, émanant en particulier du Conseil régional de Bretagne, concernant l'évolution de la situation dans ce secteur. Je les porterai bien entendu à la connaissance de M. le ministre, car ils doivent faire partie de la réflexion qu'il a engagée.

Méthode ministérielle :

Voici maintenant la réponse qu'il m'a chargé de vous transmettre. M. le ministre de la Défense a mis en place une méthode qu'il a déjà eu l'occasion d'exposer :

Phase de clarification

La première est une phase de clarification. Il s'agit de porter un diagnostic précis sur la situation, afin de disposer de tous les éléments nécessaires à l'analyse. Pour ce qui concerne la Direction des constructions navales, cette première phase de clarification a été confiée à un groupe de travail présidé par le Délégué général pour l'armement, M. Conze.

Cette première phase prend en compte les éléments tels que ceux que vous évoquez, dans votre question, monsieur le député, mais vous comprendrez qu'elle ne donne pas lieu à des communications intermédiaires, parce qu'il y aurait danger à déformer, par un diagnostic partiel, le diagnostic final ;

Phase de concertation

La première phase de clarification, s'achèvera le jour même où la deuxième phase, de concertation, commencera – vous l'avez dit tout à l'heure – c'est-à-dire le 13 février. Dans la même journée, en effet, ce rapport sera présenté à l'ensemble des personnes intéressées. Il s'agit du ministre de la Défense en premier lieu, bien entendu, des élus concernés par les sites de la DCN, des directeurs d'établissements de la DCN et des représentants du personnel suivi.

Accompagnement économique et social

Vous évoquez également, monsieur le député, les conséquences économiques et sociales de la baisse d'activité de la DCN à Brest. Comme le ministre de la Défense a eu l'occasion également de vous le dire, il est en train de constituer « une boite à outils » destinée à rassembler l'ensemble des mesures d'accompagnement économique et social des restructurations de la défense.

Celles-ci sont en cours d'élaboration, et seront naturellement présentées le moment venu devant votre assemblée. Et je ne doute pas que les mesures proposées par la région puissent venir les enrichir.