Texte intégral
Good morning, ladies and gentlemen. Thank you for being here. I'm happy to be in Nigeria. I will speak in English? No, I will speak in French. It's such a beautiful language, I'm sure you will like to hear the music, anyway.
Mesdames et Messieurs, merci de votre intérêt. Je voulais vous dire d'abord que je suis extrêmement heureuse et même fière d'être à Abuja, au Nigeria, pour ma première visite officielle en tant que ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Nigeria, qui est un pays cher à la France, en particulier depuis que la démocratie y est revenue. Je suis venue rencontrer les nouvelles autorités, elles-mêmes issues d'un processus démocratique - I'm making a few additions there : it's all about democracy and the value of democracy - et, au-delà de cette rencontre, réaffirmer par cette visite notre souhait, notre volonté de renforcer encore notre coopération bilatérale dans tous les domaines, ou dans le plus grand nombre de domaines possibles.
Dans le domaine économique, pour commencer par lui, puisque le Nigeria est une grande puissance économique, nous sommes sur une trajectoire extrêmement positive, une trajectoire ascendante. Nous pensons que nous pouvons aller plus loin encore, nous le pouvons et nous le souhaitons. Le Nigeria, qu'on a coutume de qualifier de "géant de l'Afrique", est la première économie du continent. You don't need me to know that. You must know that it's also for France the first commercial partner in subsaharian Africa. Le Nigeria est le premier partenaire commercial de la France en Afrique subsaharienne. Mais nous progressons, les investissements directs français au Nigeria ont doublé en dix ans. C'est une belle progression. Et nous avons aujourd'hui près de 100 entreprises françaises qui sont déjà présentes, et qui sont présentes pas seulement pour promouvoir la France par la vente de produits français, mais aussi pour investir dans l'économie du pays, créer des emplois. D'ores et déjà, les entreprises françaises au Nigeria, c'est 10.000 emplois directs, mais aussi beaucoup d'emplois indirects. Ce sont aussi des usines, des exploitations agricoles, des centres de formation professionnelle. J'y reviendrai, parce que nous avons fait un pas aujourd'hui. Notre objectif pour les prochaines années est de multiplier, démultiplier encore nos investissements au Nigeria, mais aussi, si vous le voulez bien, les investissements des entreprises Nigérianes en France.
Au-delà des entreprises, le gouvernement français investit aussi directement au Nigeria, à travers tous les financements de notre Agence française de développement. Depuis 2010, nous avons mobilisé presque 3 milliards d'euros pour soutenir l'émergence du Nigeria. L'Agence française de développement mène d'ores et déjà des projets dans 26 des 36 Etats du Nigeria. Et nous finançons des infrastructures : des routes en milieu rural, des marchés agricoles, des transports ; l'importance des infrastructures de transport, toujours, pour le développement, est capitale. Nous finançons aussi des actions dans la distribution de l'eau, par exemple. Mais également, nous investissons pour aider un grand nombre de petites et moyennes entreprises et d'incubateurs locaux de start-ups. De plus en plus, nous investissons aujourd'hui dans la formation professionnelle des jeunes. Je crois que c'est une très bonne chose et que nous devrons faire plus encore à l'avenir.
Voilà pour l'économie. Avec un développement aujourd'hui à la charnière entre l'économique et le culturel, nous voulons faire un effort important, un effort spécifique, un effort dédié pour soutenir encore plus l'un des joyaux du Nigeria que sont les industries culturelles et créatives dans ce pays. Nous allons poursuivre et faire plus. Je sais qu'elles sont - vous en êtes légitimement fiers - mondialement connues. Cela n'est pas seulement une force économique pour le pays, mais elles rayonnent pour le Nigeria et dans le monde entier. Elles ont encore, c'est évident, un immense potentiel à développer. Nous aidons les créateurs, les entrepreneurs, dans le domaine de l'animation, du jeu vidéo, de la musique, de la mode ou du design à franchir un pas, franchir un cap et accéder encore mieux aux marchés internationaux. C'est ainsi que ce matin - je crois que certains d'entre vous étaient là - nous avons pu signer un accord d'investissement de l'Agence française de développement de 100 millions d'euros pour participer au programme qui s'appelle i-DICE et qui soutient de jeunes entrepreneurs Nigérians dans le secteur des industries numériques et des industries créatives. Donc on fournit des investissements, on fournit aussi une expertise, de la visibilité dans notre réseau culturel français au Nigeria, qui est fort, vous le savez, il y a dix Alliances françaises ici et un Institut culturel français à Abuja, Madame l'Ambassadrice.
Au-delà de l'économie, du culturel. Je veux aussi parler du Nigeria comme puissance régionale et mondiale. Le Nigeria est devenu un acteur majeur pour gérer ce qu'on appelle les grands défis globaux : le climat, la réforme de la gouvernance mondiale et les questions de paix et de sécurité. Sur ce sujet aussi, nous voulons renforcer notre dialogue avec votre pays, renforcer la coordination entre nos pays. Je me suis entretenue ce matin avec mon homologue, mon collègue ministre des affaires étrangères, M. Tuggar. Je l'avais vu à Paris, il y a juste une semaine, donc c'était un plaisir de le revoir chez lui, et nous avons l'un et l'autre réaffirmé notre volonté de renforcer notre coopération bilatérale en matière économique, commerciale, culturelle, humanitaire et, d'une façon générale, pour le développement. Nous avons aussi échangé longuement sur les défis qui se présentent à l'Afrique de l'Ouest : l'extension de la menace terroriste puisque, hélas, l'insécurité progresse dans nombre de pays, la dégradation aussi de la situation humanitaire, la multiplication, hélas, des coups d'Etat dans trop de pays. J'ai bien sûr réaffirmé le soutien de la France, le soutien fort et clair de la France aux efforts menés par le Nigeria, aux efforts menés par la CEDEAO également pour défendre à la fois la sécurité et la démocratie dans la région. Vous savez que vont de pair la bonne gouvernance, la sécurité, la démocratie et le développement économique.
Sur le Niger en particulier, qui est un sujet de préoccupation commun, j'ai dit au ministre Tuggar que la France soutenait depuis le début - et soutenait résolument - les efforts faits par le Nigeria, en présidence de la CEDEAO, désormais par la présidence du président Tinubu, et d'une façon générale, les efforts de la CEDEAO, pour la libération du président Bazoum et de sa famille, et pour le retour à l'ordre constitutionnel dans ce pays.
J'ai eu tout à l'heure le grand honneur d'être reçu par le président Tinubu. Cela nous a permis de faire le point de la coopération bilatérale, mais aussi d'évoquer ces grands enjeux mondiaux et les principales crises régionales. J'ai remercié le Président de sa participation au mois de juin, à la fin du mois de juin dernier, au Sommet de Paris pour un nouveau pacte financier mondial, puisqu'il nous avait fait l'honneur de venir, et sa participation avait été remarquée. Plus généralement, j'ai salué le rôle indispensable du Nigeria dans la gouvernance mondiale. Vous avez bien sûr entendu plus que moi les aspirations du Nigeria à un changement, à une modernisation de la gouvernance mondiale et aussi ses aspirations à être présent un jour dans le cadre du G20, prochaine aspiration de ce pays, après la reconnaissance du rôle de l'Union africaine par sa participation pleine et entière au G20.
J'ai aussi pu informer le président Tinubu d'une bonne nouvelle qui est que, en réponse à la demande qui avait été présentée par le ministre fédéral Nigérian de la justice, et en accord avec les autorités américaines puisqu'elles étaient également concernées, la France va pouvoir retourner au Nigeria la partie des biens mal acquis, de ce qu'on appelle les biens mal acquis, dont la population Nigériane avait été spoliée par l'ancien président, le général Abacha, et sa famille. Une partie des fonds spoliés était en France, avait fait l'objet d'un gel depuis 2021. Nous avons pu finaliser les procédures judiciaires. Tout est désormais achevé et nous pouvons rendre au Nigeria, retourner à la population Nigériane les 150 millions de dollars à peu près qui étaient gelés en France, et donc les restituer maintenant au bénéfice de la population. Comment nous allons le faire ? Nous allons le faire par des échanges avec le gouvernement Nigérian, par des dons, de façon à regarder quels sont les projets qui sont ceux qui correspondent aux priorités du gouvernement Nigérian, pour évidemment le bénéfice des populations. Je dis et je redis qu'il s'agira de dons, puisque cet argent avait été spolié au peuple Nigérian. Il est donc naturel que nous le lui rendions.
Dans l'après-midi, et j'en ai presque terminé, je me suis rendue au siège de la CEDEAO, dont j'ai rencontré le président de la Commission, M. Touray. J'avais pu le voir, il y a quelques semaines, dans le cadre d'une réunion européenne à laquelle il était invité. Nous avons échangé sur les grands défis qui se présentent au continent en général et à l'Afrique de l'Ouest et au Sahel en particulier. Mais, au-delà, nous avons pu faire aussi le point sur tout le soutien financier, technique, pratique que la France, comme d'autres pays, s'honore d'apporter à la CEDEAO, notamment sur le plan agricole. Voilà pour ma journée.
Je précise que je terminerai non pas par le meilleur mais par une activité qui me fait particulièrement plaisir, qui est après cette conférence de presse, de pouvoir rencontrer plusieurs de nos partenaires Nigérians dans les secteurs que je citais tout à l'heure des industries culturelles et créatives, donc animation, jeu vidéo - don't count on me for e-sport - mode, design, tout ce qui fait maintenant un tissu économique particulièrement riche, mais ce qui est aussi un secteur de coopération désormais entre nos deux pays. Certains de ceux que nous verrons, tout à l'heure, à votre résidence, Madame l'Ambassadrice, étaient présents à Paris, il y a quelques jours à peine et ont participé, - ils étaient, je crois, une vingtaine ou une trentaine - au grand forum qu'on a appelé Création Africa, premier forum consacré aux industries culturelles et créatives africaines. Nous étions là, nous avons été, je dois dire, impressionnés par le dynamisme qui se dégage de tous ces créateurs. Et donc je me réjouis de pouvoir échanger avec eux sur les résultats de cette initiative qui avait été voulue, lancée et maintenant réalisée par le Président de la République, qui était là aussi à Création Africa - je crois que c'était le 6 octobre, puis après, les journées ont été ouvertes au public le 7 et le 8. Beaucoup de monde, un grand succès et un bel hommage à la créativité de l'Afrique et en particulier à celle du Nigeria.
Je me réjouis d'avoir pu vous expliquer pourquoi et comment nous étions ici, et ce que nous avions à coeur de faire dans nos projets futurs avec ce pays et pour, je l'espère, longtemps.
Maintenant je suis à votre disposition, si vous avez des questions. Shall you have any question, I'm all yours for a short while. Thank you so much, Madame et Madame.
(...)
R - Votre première question avait pas mal de sous-questions à la première, qui concernait le processus électoral au Nigeria. Je ne suis pas bien placée pour répondre : je ne suis ni électrice au Nigeria, ni la Cour suprême de votre pays. Je crois que le processus a été désormais achevé et qu'il nous montre que les Nigérians ont réaffirmé leur attachement au système démocratique. Ensuite, vous m'interrogiez sur ce que j'avais présenté brièvement dans mon introduction, qui étaient les domaines de coopération dans lesquels nous agissons déjà aujourd'hui et les domaines futurs. Nous avons déjà une relation qui est forte sur le plan économique, avec, je le disais, une centaine d'entreprises ici, qui créent des emplois, qui génèrent 10.000 emplois directs et beaucoup plus d'emplois indirects. Mais nous voulons aller plus loin. Nous avons doublé nos investissements en dix ans et nous continuons de les augmenter pour investir de nouveaux secteurs. Je crois que c'est cela qu'il est important de décrire. Les secteurs traditionnels qui sont les infrastructures, les transports, le monde rural et l'économie dans des zones qui ont besoin d'aide pour être développées, mais aussi, de plus en plus, la formation et de la jeunesse, y compris les start-ups mais pas seulement.
Now, your second question was about the return to Nigeria of those 150 million dollars. Again, I speak in French and you get the translation. Sorry for that. It's a beautiful language, I repeat. Cela ne dépend pas de nous, Madame, ce n'est pas la France qui décide ce qui va être fait de ces 150 millions. Pourquoi ? Parce que c'est le résultat de l'accord qui a été conclu entre les autorités Nigérianes et la famille de l'ancien président Abacha. Donc ces 150 millions retourneront bien à la population, sur des projets, par des dons, sur des projets qui vont être, conformément à cet accord, établis d'un commun accord entre nous et le gouvernement du Nigeria.
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R - No, let's be technical for a short while. We're not going to distribute dollars, dropped from an airplane on you. So when a foreign country - namely France - gives back or invest, it can be grants or loans, it is either way. I'm happy to confirm that it will be grants, of course, because this is the money of the Nigerian people going back to the Nigerian people. Unless you want to insist and have a loan. But I'm most willing to give it in grants.
(...)
R - On va essayer de regrouper les différentes thématiques de vos questions. D'abord un point d'histoire, Madame, la présence des forces françaises au Niger ces dernières années n'était pas liée au passé que nous avons eu en commun, colonial, mais liée à une demande des autorités légitimes démocratiques du Niger d'avoir de notre part un appui dans la lutte antiterroriste. Nous étions présents pour une mission précise qui était, à la demande des autorités légitimes du Niger, d'aider ces autorités dans leur lutte contre les groupes armés terroristes. Je précise même que nous le faisions sous commandement des forces armées nigériennes. Dès lors qu'il y a eu un coup d'Etat, et un coup d'Etat mené, faut-il le rappeler, par celui-là même qui était censé protéger le président démocratiquement élu par le peuple du Niger, nous n'envisageons pas de poursuivre une coopération avec les autorités putschistes, que nous ne reconnaissons pas, que la communauté internationale ne reconnaît pas, et qui doivent rendre le pouvoir et permettre à ce pays de retrouver l'ordre constitutionnel qu'il n'aurait pas dû quitter.
Se pose ensuite la question, vous l'avez dit très justement, de ce qu'il advient de la lutte contre les groupes armés terroristes. Ce que vous voyez, malheureusement, c'est qu'au Niger comme ailleurs - et comme ailleurs, je pourrais dire, comme au Mali, comme au Burkina Faso -, lorsque les putschistes s'installent, l'insécurité progresse et des civils meurent tous les jours, des soldats aussi d'ailleurs et c'est regrettable. L'insécurité progresse. Nous avons dû prendre la décision de partir du Niger. D'autres que nous peut-être mèneront cette lutte contre les groupes armés terroristes. Il est regrettable que, si j'en juge par ce qui se passe sur le terrain, ce soit les groupes armés terroristes qui soient désormais à l'initiative, qui marquent des points. Il y a eu plus de morts au Niger depuis deux mois ou trois mois que le président Bazoum est retenu prisonnier que sous toute sa présidence. Voilà un bilan qui est terrible pour la junte.
(...)
R - Monsieur, vous avez posé plusieurs questions. Si je dois répondre rapidement, je crois qu'il faut vraiment insister sur le fait que l'Afrique est diverse, vaste et diverse, et que le Sahel ne représente pas toute l'Afrique, qu'il y a beaucoup de situations différentes et plus positives, au-delà du Sahel qui malheureusement vit trop de crises. Et même beaucoup de situations positives, puisque de très grandes parties du continent africain se développent. D'autres, hélas, ne le font pas, du fait d'une très mauvaise gouvernance, et en particulier de coups d'Etat. De même, nos relations avec la très grande majorité des pays africains se développent positivement. Nos investissements sont en croissance, nos échanges aussi. Le nombre d'étudiants africains qui sont accueillis en France est lui-même en très forte augmentation, nous en avons plus de 90.000 aujourd'hui, 92.000, si je ne me trompe pas. Ce matin même, je le disais à mon homologue, M. Tuggar, que la France serait très heureuse d'accueillir encore plus d'étudiants du Nigeria en France.
(...)
R - Now, two quick answers on your two last questions. I wouldn't trade off France for Russia, if I were you. That's my first answer. And then you asked me if we will continue to support the development of Africa and the emergent countries. The answer is yes. That's a short enough answer. We are there, we are present, we are more and more present every single day, with the exceptions of those countries where we have to cut relationships, considering what they do to their people.
(...)
R - Alors, rapidement, parce que on va aller voir vos créateurs, là. Les putschistes avaient, sans raison d'ailleurs, demandé le départ de l'ambassadeur de France au Niger et nous avons considéré, le Président de la République, moi-même et tout un chacun en France, que nous n'avions pas à obéir à des injonctions d'un pouvoir illégitime composé de gens qui avaient fait un coup d'Etat irrégulier. En revanche, nous avons pris, à peu près un mois plus tard, la décision de rappeler notre ambassadeur à Paris, ce qui est différent que d'obéir à une injonction, et l'ambassade reste ouverte. Donc l'ambassade de France au Niger reste ouverte. Ensuite, sur la CEDEAO, en général, vous avez raison, je n'avais pas répondu, depuis le début, nous sommes aux côtés des Africains, c'est d'abord leurs affaires. Nous soutenons les efforts de la CEDEAO pour obtenir la libération du président Bazoum, le retour de l'ordre constitutionnel et, espérons-le, un meilleur avenir pour le Niger, comme il le faudrait.
Thank you all. I will be very happy to have a last session, my short visit with the brilliant creative Africa.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 7 novembre 2023