Déclaration de M. Emmanuel Macron, président de la République, sur les relations entre le France et l'Égypte en matière universitaire, au Caire le 7 avril 2025.

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Circonstance : Déplacement en Égypte du 6 au 8 avril 2025 ; clôture des Assises de l'enseignement supérieur le 7 avril

Texte intégral

Messieurs les ministres, 
Monsieur le président de l'université, 
Monsieur le secrétaire général du conseil suprême des universités, 
Monsieur le président de France Universités, 
Mesdames, messieurs les présidentes et présidents, 
Mesdames, messieurs les chercheuses, chercheurs, enseignants, étudiantes et étudiants,


D'abord, merci beaucoup de l'immense honneur qui nous est fait d'être parmi vous dans cette institution et du caractère, au fond, très singulier de ce moment. Quand on vient en Égypte parler à sa jeunesse, c'est venir parler dans une des plus vieilles civilisations du monde à un des pays les plus jeunes au monde. Et c'est le merveilleux paradoxe de l'Égypte aujourd'hui, c'est que vous avez tout à la fois, en effet, une civilisation de laquelle Champollion disait : "L'Europe doit le principe de toute sa connaissance à l'Égypte" et qu'en même temps, un Égyptien sur deux a moins de 25 ans, ce qui est un trésor et ce qui montre l'importance d'investir sur ce capital humain, ce que vous êtes toutes et tous en train de faire.

Alors, je voulais vous dire d'abord ma confiance et ma gratitude à l'égard de celles et ceux qui font vivre la relation universitaire, qu'il s'agisse de l'enseignement, de la recherche et de ce qui a été annoncé aujourd'hui, et de ce que vous portez et ce que vos histoires ont pu nous dire. Et puis, je vais essayer de répondre à la question à votre question. Ensuite, vous dire, en effet, que notre partenariat est ancien, qu'il a souvent reposé sur l'archéologie, le patrimoine, mais aussi des filières de recherche, et que, quand on regarde aujourd'hui l'Égypte, elle est impressionnante par sa qualité académique, qui en fait l'une des places fortes de la recherche de l'enseignement dans la région. La qualité aussi et la vitalité de son innovation la place comme un des principaux écosystèmes d'innovation au monde parmi les 20 premiers. A coup sûr le premier du continent africain et du Moyen-Orient. Et qu'il s'agisse d'énergie, de pharmacie, de tourisme, d'informatique, d'agriculture, j'aurais du mal à citer toutes les filières, votre nation se place à l'avant-garde de la qualité de ses formations, ce qui fait que nous avons su, à travers le temps, nouer des relations. L'École de droit de la Sorbonne au Caire est fière d'avoir ce partenariat avec cette université.

Et puis, nous avons en effet, monsieur le ministre l'a rappelé, une cinquantaine de diplômes communs déjà consolidés, 42 protocoles parachevés qui permettent de consolider 70 programmes. On a, vous en êtes l'incarnation, à peu près 3 000 étudiants qui viennent à un moment poursuivre leurs études en France, ce qui est une augmentation très importante ces dernières années. On a fait plus 22% d'augmentation pour les étudiants égyptiens accueillis en France, ce qui est une force, une chance. Et je veux, chère Anna, reprendre ce que vous nous avez proposé : chiche, allons-y !

Je souhaite qu'on puisse vous accompagner dans les idées que vous avez portées pour vous permettre d'avancer. Et ça va nous permettre, avec Campus France qui est là à nos côtés, de faire encore mieux, d'accueillir encore mieux, et pour tout ce programme d'accompagnement des étudiants, de faire encore davantage.

Alors ce partenariat avait été marqué par un tournant il y a un peu plus de 20 ans avec l'UFE, qui nous réunit aussi. Et il faut bien dire que pendant plusieurs années, ce projet a tâtonné. Et avec le président Sissi, en 2019, on a voulu lui donner une nouvelle orientation. Je voulais vraiment dire ma gratitude à l'égard de notre ambassadeur, monsieur le président du conseil, de toutes les équipes, de vous, cher président, de nos architectes qui nous ont présenté le magnifique projet qui est en train d'être parachevé, et de toutes les équipes éducatives et de recherche. Car notre université, maintenant, va prendre un nouveau tournant.

L'UFE est d'ores et déjà maintenant revenue sur une trajectoire magnifique qui va nous permettre d'arriver, dans quelques années à peine, monsieur le ministre, nous en sommes convaincus, je le sais, aux 7 000 étudiants que nous visons, dans un campus magnifique avec, une architecture à l'avant-garde à la fois du beau et du durable. Cela va nous permettre d'avoir, des étudiants égyptiens, mais également de tout le continent parce que c'est votre ambition, qui seront formés dans ce partenariat et cette Université française d'Égypte. Et je veux vous dire la très grande fierté de voir cette maquette tout à l'heure, mais de savoir que dans quelques mois, pour le 1er tronçon, ce sera une réalité pleine et entière, et que d'ici à deux ans, deux ans et demi, ce sera une réalité pour l'ensemble de ce site. Et donc, dans quelques années à peine, ces 7 000 étudiants seront là.

C'est une vraie révolution et je veux remercier l'ensemble des universités qui ont été présentes aujourd'hui pour signer ces partenariats et pour ainsi accompagner ce magnifique projet de notre université française d'Égypte, qui sera cette tête de pont, mais la tête de pont d'un partenariat qui est, au fond, beaucoup plus large et qui veut regrouper les organismes de recherche français. Je salue toutes les présidentes et présidents qui sont là dans mes délégations, CNRS, IRD, CIRAD et tant d'autres, l'Inserm, le CNES et beaucoup d'autres organismes de recherche sont impliqués dans les projets, et remercier toutes les universités qui sont là et saluer le consortium aussi d'établissements français, coordonné par l'université de Cergy Paris Université, qui contribue plus largement à, justement, l'offre de formation de l'établissement ainsi élargi.

Alors, au-delà de l'UFE, de ces partenariats signés aujourd'hui, la France veut continuer d'être aussi un partenaire de confiance pour l'Égypte. Nous avons la chance, depuis beaucoup d'années, d'être là avec nos écoles françaises, notre réseau, avec aussi tout le partenariat que nous nouons avec le réseau, le tissu des écoles françaises, justement, d'Orient, et nous continuons de les accompagner. Et j'ai croisé tout au long de ce déplacement beaucoup d'entre vous qui aviez appris dans ces écoles, quel que soit le réseau.

Je dis souvent que c'est notre carte du tendre, et c'est d'ailleurs le visage magnifique d'une laïcité à la française que vous, Égyptiennes et Égyptiens, connaissez bien. C'est-à-dire qu'on peut avoir appris dans le réseau des écoles publiques françaises, mais chez les sœurs ou chez les frères, ici ou ailleurs, on a appris une langue qui nous unit et qui nous a appris l'universel. Et on les a appris même si on était d'une autre religion. Ici, dans ce pays où la fierté du président, et il me le disait encore hier, est que quand on ouvre une mosquée, de pouvoir ouvrir une synagogue et une église, et de le faire dans un pays qui porte ce goût de l'universel, cet amour de toutes les religions et cette conviction qu'elles peuvent vivre ensemble. C'est ça, l'universel.

Alors, je voulais d'abord vous dire qu'on va continuer de soutenir nos écoles françaises, la langue française à travers toutes ces écoles, pour que les sœurs, les frères, les enseignants, dans tous nos tissus publics, quel que soit leur statut, continuent d'apprendre à des jeunes enfants en Égypte et plus largement dans toute la région le Français. Ensuite, j'ai dit au président que, dans les réformes qu'il voulait faire, nous voulons être un partenaire et que le Français continue d'être au cœur du baccalauréat égyptien, et même si ce n'était plus dans la maquette, parfois comme on dit chez nous, je crois, que ce soit une option qui donne plein de crédits, et donc qu'il y ait beaucoup d'incitation pour les jeunes Égyptiennes et Égyptiens à apprendre le français.

Ensuite, je lui ai dit qu'on voulait continuer d'aller plus loin et il a des grandes ambitions pour sa jeunesse, il a raison. Et donc nous voulons, au-delà de l'UFE, au-delà des partenariats signés aujourd'hui, être des partenaires de confiance pour vos universités. En faisant quoi ? En aidant à former les enseignants, à le faire d'ailleurs pour les enseignants en langue française du cycle primaire et secondaire, mais pour les universités aussi. Ensuite, en continuant à avoir des doubles diplômes et en donnant davantage de moyens à nos universités qui ont déjà signé aujourd'hui et qui sont vos partenaires, mais en contractant d'autres partenariats encore pour qu'il y ait plus de doubles diplômes. Enfin, en aidant à financer ces projets, ce que fait déjà l'Agence française de développement, mais en mobilisant aussi le secteur privé, vous l'avez très bien dit. Et beaucoup sont là qui sont prêts à le faire. Capgemini qui croit dans la jeunesse, par exemple, égyptienne, qui va venir ici embaucher des jeunes ingénieurs, des développeurs, va être un partenaire, j'en suis sûr, aussi, pour aider à former, elle l'est déjà. Et donc, on va aussi mobiliser nos universités pour faire des programmes communs et être, en quelque sorte, des partenaires de ce formidable développement que veut le président Sissi pour votre université.

Puis, on va le faire également avec toute la francophonie. Parce que pourquoi j'ai cet amour de la langue en partage ? C'est parce que dans votre pays, malgré toutes les idées reçues, c'est là qu'on continue de former et d'avoir le plus de locuteurs en langue française dans toute la région. Et c'est un trésor. Et en effet, cette richesse qu'il y a aujourd'hui autour de la francophonie, c'est presque 3,5 millions de locuteurs français, ce qui fait de vous le plus grand pays francophone de la région. C'est un trésor sur lequel on veut s'appuyer. Et donc ces partenariats, on va aussi les renforcer avec la francophonie, l'Université Senghor à Alexandrie, les 23 universités et institutions membres de l'agence universitaire de la francophonie, et permettre à l'Organisation internationale de la Francophonie, l'Égypte et la France, d'être aux avant-gardes de ce projet, de se dire : on a ici un trésor, on a un pays où les moins de 25 ans, c'est près de 60 millions d'habitants. C'est fou. Et donc, on veut développer pleinement la francophonie ici. Et donc, je reviendrai en France et j'irai à Villers-Cotterêts. Je vous invite tous à venir visiter Villers-Cotterêts, où nous avons le lieu où, en France, notre langue est devenue la langue administrative qui a unifié le pays par une décision de François 1?? au XVIe siècle. C'est le lieu qui a vu naître Alexandre Dumas, qui vous a tous fait rêver, que vous l'ayez lu en français ou pas, et qui est maintenant l'épicentre de la francophonie parce qu'on y a fait la Cité internationale de la langue française et un des lieux où on va permettre de former les maîtres en langue française. Donc nous allons, avec la francophonie aussi, être au cœur de ce projet.

Et le cœur de ma présence aujourd'hui, c'était ça, c'était vous dire ma confiance dans l'université, les grands programmes de recherche, égyptiennes et égyptiens, notre volonté, notre confiance avec le président Sissi d'ouvrir ce nouveau cap pour l'Université française d'Égypte, mais plus largement cette ambition que je veux porter avec vous pour ces programmes de recherche, d'enseignement, cette jeunesse et la langue française dans ce projet.

Maintenant, ça, c'était mon discours à l'origine, mais ça allait me poser une autre question, c'est quel est mon avenir ? Et qu'est-ce que vous voyez pour moi ? Alors, ça ouvre évidemment un continent, mais au fond, le faire ici, dans cette université, et essayer de vous répondre à vous, c'est m'adresser plus largement à toute cette jeunesse qui est une chance pour votre pays, pour le continent et pour nous tous, parce que c'est notre avenir.  

Ma première réponse sera de vous dire, je n'ai aucune réponse ou aucun conseil sérieux à vous donner, parce que ce sera à vous de l'écrire, votre avenir.  Mais ma conviction profonde, c'est que notre responsabilité à nous, plus âgés que vous, c'est de vous donner toutes les chances pour pouvoir, à chaque instant de votre vie, vous poser librement cette question et choisir votre avenir. C'est d'être sûr que par le savoir, par l'apprentissage, par ce que vous pourrez conduire, cette réponse ne sera jamais dictée par d'autres, que vous aurez toujours le luxe de poser à quelqu'un, qu'est-ce que je dois faire ? Quels conseils me donnez-vous ? Parce que ça voudra déjà dire que vous êtes en situation d'être autonome, c'est-à-dire de pouvoir choisir vous-même, sur la base de conseils qu'on vous aura donnés, votre chemin à venir. Et c'est ça la responsabilité qui est la nôtre. Au fond, rien d'autre, pas de vous dicter le chemin, mais de vous mettre en situation de pouvoir choisir cet avenir et de le choisir vous-même, ce qui est stricto sensu la définition de l'autonomie.

Alors, je dirais, la première esquisse de réponse que je pourrais faire c'est d'étudier, d'apprendre pour pouvoir inventer, innover, comme vous avez commencé à le faire. Parce que ma conviction, c'est que vous serez dans un monde où vous pourrez choisir l'avenir, si vous n'avez pas simplement à consommer, à vous voir imposer des innovations qui seront faites ailleurs. Et notre défi, à nous, Européens, Africains, c'est de pouvoir être des lieux d'excellence, d'enseignement et de recherche, où on va continuer d'innover pour inventer notre avenir, pour le façonner, le faire avec nos valeurs, avec l'excellence de nos talents, mais ne pas avoir un avenir qui sera dicté par d'autres. C'est la clé. Et donc oui, étudiez, apprenez, inventez, innovez pour être à l'avant-garde de l'esprit humain, parce que c'est ce qui vous permettra de dessiner le monde dans lequel vous vivrez. Ne soyez pas des consommateurs de ce monde. Ne vous laissez pas dicter à ce monde. Ce n'est pas un avenir de consommer les innovations qui sont faites en Chine ou aux États-Unis. C'est un avenir de faire ces innovations, de les inventer au Caire ou à Paris. Ensuite, voyagez, apprenez, soyez ces ménages nomades dont parlait Andrée Chedid entre nos deux rives, mais n'oubliez jamais où vous habitez, n'oubliez jamais d'où vous venez. Je vous dis ça parce que vous qui êtes cette jeunesse, nos générations ont fait de terribles erreurs. On a pensé, beaucoup ont pensé, que pour réussir, il fallait voyager et oublier d'où on venait, qu'il fallait forcément aller ailleurs et qu'au fond, il y a une forme d'élite mondialisée qui s'est installée là et qui a parfois oublié qu'on ne réussissait jamais tout seul.

Je vous le dis pour vous qui commencez déjà à être un succès reconnu par vos pères. Le seul succès qui compte, c'est celui qui permet à votre pays, à vos voisins de vivre mieux. Et vous arrivez à un moment du monde qui fait peur, j'en ai conscience, qui est en pleine bascule. La région fait peur, le monde fait peur. Les certitudes sur lesquelles tout s'appuyait depuis tant de décennies sont en train d'être bousculées. N'ayez pas peur de cela, vous avez inventé un monde à venir. Mais le monde auquel moi, j'ai appartenu, c'était un monde où on a voulu nous faire croire que c'était la fin de l'histoire, la fin du tragique, et qu'il n'y avait plus de frontières, ce n'est pas vrai. Et les élites dans ce monde-là avaient considéré qu'en quelque sorte, le plus de frontières, c'était pour elles, parce que les gens les plus modestes continuaient à avoir des frontières. Ils n'avaient pas beaucoup bougé, ils ne voyageaient pas beaucoup plus, et ils n'avaient pas toujours le juste retour de ce monde mondialisé. Et donc, vous avez à inventer un monde qui doit continuer à avoir une discussion internationale pour le meilleur, mais qui doit penser le juste retour pour les endroits où nous vivons, pour que les équilibres soient maintenus, pour que la justice se tienne, et les universités sont faites pour cela.

Et je le dis avec beaucoup d'humilité, je suis là dans la plus vieille université de votre pays, l'une des plus vieilles des continents, et dans un monde où l'innovation semble tout bousculer chaque jour. Regardez la vieille Europe, regardez mon pays, regardez tous les pays d'Europe. Je suis frappé, j'ai fait tous les pays de l'Union européenne. Quand vous allez dans un de ces pays, quel est l'endroit le plus ancien ? Ce n'est pas une usine, ce n'est pas un lieu de présidence de la République, un lieu de Premier ministre, ni même un Parlement. C'est une université. Les universités sont les lieux les plus anciens qui existent, XI?, XII?, XIII? siècle, parce que ce sont ces lieux où l'universel, par le savoir, a essayé d'être conçu à un moment, qui a permis le progrès de tous dans une société. Chérissez ces lieux. Ne vivez pas dans un monde sans lieux, atopique, dans un monde en quelque sorte qui deviendrait liquide. Chérissez ces lieux de savoir où l'universel se pense par le savoir, par la coopération des esprits, mais au service justement de chacun. Aimez les universités, faites-les grandir. Elles sont plus que jamais à la mode parce qu'elles sont ces lieux les plus anciens qui nous ont permis de penser l'universel.

Et regardez, regardez le paradoxe de ces gens qui nous ont inventé la mondialisation, les réseaux sociaux, et qui, dans le même temps, dans ces mêmes réseaux sociaux, véhiculent des discours de peur, des discours de haine, des discours de fermeture des frontières. C'est eux qui sont paradoxaux, pas nous. Et donc, il faut aimer un monde où les idées circulent librement, il faut aimer un monde où on n'a pas le droit d'interdire le savoir, il faut aimer un monde où on n'a pas le droit de dire à un chercheur « tu n'as pas le droit de chercher sur cela, tu n'as pas le droit d'utiliser ce mot dans ton programme de recherche », où la recherche doit rester libre, académique, indépendante parce que c'est le seul moyen de faire avancer l'esprit humain.

Chérissez ces lieux et donc, pour votre génération, sortez des réseaux sociaux, allez dans les universités, apprenez, inventez, soyez libres par le savoir, l'esprit critique, par la compréhension de l'autre plutôt que par l'invective, et alors vous ferez avancer votre génération et notre monde. Parce que qu'est-ce qui me fait peur pour vous, les plus jeunes, et pour nous tous ? C'est que nous sommes entrés dans un monde où il y a une forme d'inversion des valeurs, et où, là où, dans les démocraties les plus grandes, on devait d'habitude guider, on regarde vers l'arrière. Qu'est-ce qui fait que nous nous trouvons là aujourd'hui, que nous pouvons inventer, qu'on peut parler d'intelligence artificielle, de technologies vertes, qu'on peut parler des innovations qui vont changer la santé ou que sais-je ? C'est parce qu'il y a cette sédimentation des savoirs à travers le temps que les meilleurs esprits ont appris, consolidés, et qui permet à d'autres d'innover aujourd'hui et qui, par l'alliance des intelligences, des femmes et des hommes et du capital, permet à l'humanité d'avancer.

Mais tout ça repose sur quoi ? Une connaissance libre, une recherche libre, un accès libre de chacune et chacun pour que, d'où qu'on vienne, on puisse accéder à ce savoir et donner le meilleur pour le bien de tous, la construction d'un esprit critique pour chacun qui permet d'être libre, qui permet de regarder le monde qui est devant nous en essayant de le comprendre, en le critiquant, qui permet d'apprendre peut-être de croire ou de ne pas croire, mais de ne jamais être l'otage d'une idéologie, et qui permet, ce faisant aussi, de bâtir un rapport à la vérité qui seul nous permet de vivre en société.

Et nous entrons dans un monde largement construit par ceux qui étaient supposés donner exemple, qui est quoi depuis quelques années ? Le complotisme. Ce virus est-il un virus ? Ce vaccin est-il un vaccin ? Ou ceci ou cela et toutes les idées les plus folles. En quelque sorte, la fin d'un rapport à la vérité factuelle, scientifique, qui est en quelque sorte la fin d'un rapport au savoir, la fin même de la possibilité d'un savoir, les mêmes aujourd'hui, sont en train de fermer ce savoir en cassant des programmes de recherche, en empêchant des chercheurs de voyager, en construisant en quelque sorte une réalité postmoderne, mais même pas une réalité, une inversion des valeurs qui consiste à dire " je ne crois pas dans ta recherche, donc je t'interdis de la poursuivre, parce qu'elle ne sert pas en quelque sorte mes intérêts. " Mais la recherche, l'université ne sert pas des intérêts, si ce n'est l'intérêt général, c'est-à-dire la possibilité d'apprendre, de savoir, et un savoir qui est au service de l'humanité tout entière et qui peut-être fera émerger ici un talent qui gagnera beaucoup, peut-être là un autre talent qui ne gagnera rien et qui sera plus grand encore, mais elle fera progresser l'humanité tout entière.

Et donc, je vous le dis pour vous toutes et tous, résistez, innovez et inventez, apprenez, apprenez, apprenez. Ne respectez qu'une autorité, celle de vos maîtres, car cette autorité repose sur quelque chose. Ils ont lu plus de livres que vous, et c'est la seule autorité qui compte. Apprenez l'esprit critique et accumulez les savoirs pour être véritablement libre, libre de choisir. Inventez et doutez, doutez chaque jour, mais construisez un rapport solide à la vérité, le seul qui vous permettra d'avancer et de mettre un pied devant l'autre. Construisez la seule culture qui vaille, celle du respect ; respect des textes, respect des faits, respect des autres. Et essayez d'inventer ce monde que nous avons, pour l'instant, échoué à bâtir, un monde ouvert où les talents et les idées peuvent librement circuler, et où les plus talentueux essaient de bâtir pour l'intérêt général ou pour que chacun, chez eux, vive un peu mieux.

C'est l'avenir que je vous souhaite et rien d'autre.

Merci pour votre attention.

Et vive l'amitié entre l'Égypte et la France, et vive la jeunesse de nos deux pays, celle dans laquelle nous devons remettre notre espoir, et celle qui ne doit céder à aucune tyrannie du moment, à aucun impérium d'où qu'il vienne ! L'avenir, c'est vous !