Déclaration de M. Emmanuel Macron, président de la République, sur l'œuvre humanitaire Akamasoa fondée par Père Pedro Opeka à Madagascar, à Tananarive le 24 avril 2025.

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Circonstance : Déplacement à Madagascar ; Visite de l'œuvre humanitaire Akamasoa fondée par Père Pedro Opeka

Texte intégral

Comment vous voulez que je parle après ça ? Ce n'est pas possible.

Mon père,
Mesdames, Messieurs les ministres,
Mesdames, Messieurs,

D'abord, merci parce que vous nous avez fait le plus beau des cadeaux, le plus beau des cadeaux. Vous voyez, dans quelques instants, on va partir avec mon épouse, avec la délégation, et on partira avec vos visages, vos danses, vos chants, dans le cœur et dans la tête, et au fond des yeux. Ils ne nous quitteront plus jamais. Ça, je vous promets.

Je voulais vous remercier énormément pour cela, énormément. Parce que je sais que vous y avez mis beaucoup de cœur.

Je n'ai pas tellement de long discours à faire, mon père, mais je voulais simplement que les enfants qui sont là, les adultes aussi, et chacun prennent conscience de ce que vous avez fait, vous, et avec vous, ceux qui vous accompagnent.

Imaginez, en 1989. Alors, pour vous, vous n'étiez pas nés du tout, du tout. Pour quelques-uns ici, vous étiez nés et jeunes. Ici, c'était une décharge, et il y avait des fumées qui montaient, et c'était un endroit qu'on ne voulait pas voir. Et vous vous êtes rendu compte de ça, et avec quelques-uns, mon père, vous avez décidé de tout changer.

Alors, vous avez nettoyé, vous avez planté les arbres, toute cette forêt qu'il y a autour de nous, et un à un, vous avez construit ces bâtiments, ces maisons, avec tous ceux qui vous ont fait confiance, vous vous êtes occupés de ces enfants, et vous avez créé cette ville, cette communauté, cette magie qu'est Akamasoa.

Aujourd'hui, ce sont plus de 20 000 enfants qui sont scolarisés, ce sont plus de 5.000 logements, ce sont des milliers d'emplois et ce sont des vies qui changent grâce à cela. Je voudrais que vous ayez ça en tête, vous, chacune et chacun. Vous êtes là parce qu'il y a eu quelque chose d'unique.

C'est un alliage qui n'arrive pas souvent, c'est la bonté avec la volonté. C'est ça le Père Pédro et tous ceux qui l'ont suivi. C'est ça Akamasoa.

Vous savez, dans le monde où on vit, il y a des gens qui ont de la bonté. Parfois, ils ont la bonté en mots, et c'est déjà très important, ils la portent, mais ils n'ont pas toujours la volonté de changer les choses. La bonté sans volonté, c'est déjà très important. Ce sont des sentiments où on fait le bien avec sa famille, ses plus proches, mais ça ne suffit pas à changer le monde.

Puis, il y a beaucoup de gens qui ont de la volonté. Quand on fait de la politique, quand on fait de l'entreprise, ils font des choses, ils construisent, mais ils n'ont pas toujours la bonté avec. Alors, ils font des choses, mais parfois pour eux-mêmes ou pour trop peu, mais ils ne changent pas le monde non plus.

Mais le mariage de la bonté et de la volonté, et ce qu'a fait le père, avec toute la communauté d'Akamasoa, ça, c'est unique. C'est la bonté et la volonté ensemble. Ça, ça change le monde. Alors pour ça, mon père, merci infiniment.

Alors lui, c'est un père, donc il montre le ciel. Moi, je suis le président d'une République, qu'on dit laïque. Mais dans la République française, avec sa liberté, son égalité, sa fraternité, il y a tellement de choses qui ressemblent à l'universalisme chrétien, et donc, on aura chacun nos interprétations. Mais je sais une chose, c'est qu'à la fin, la racine est la même.

Je finirai là-dessus, c'est la confiance en vous, c'est-à-dire en la dignité de chaque être humain. Vous savez, le plus beau cadeau, je pense, pour le Père et toute la communauté, mais pour nous, en vous voyant, c'est chacun de vos sourires, parce que chacune et chacun d'entre vous est nécessaire, comme disait un autre pape, mais surtout parce que chacune et chacun, vous est unique.

Je vous regardais, il n'y a pas un sourire qui se ressemble, il n'y avait pas une danse qui se ressemblait, et vous étiez une harmonie parfaite. N'oubliez jamais ça, chacune et chacun d'entre vous est unique.

C'est parce que vos maîtres vous regardent comme ça qu'ils vous font grandir. Et, à votre tour, vous aurez ça à porter. Ce que vous avez à apporter à votre pays, à vos enfants demain, à notre planète, c'est unique. En vous regardant, je me disais, ce sont des milliers d'enfants uniques, mais qui bâtissent une harmonie.

Dans ces temps devenus fous, où nous nous débattons, vous êtes la plus belle armée du monde. Vous êtes une armée de paix, de fraternité, de bonté, de sourire. Cette armée-là, elle est inarrêtable.

Alors, nous, on va essayer de continuer de se battre pour arrêter les armées folles de ceux qui veulent conquérir des bouts de terre, qui veulent semer la misère. On va essayer de se battre pour réduire un peu les inégalités qui sont déjà tellement grandes. On va essayer de se battre pour rendre notre terre plus vivable, pour le climat, la biodiversité, pour essayer de vous céder la meilleure planète possible. En disant ça, j'ai déjà conscience qu'on ne sera pas au rendez-vous que nous devrions avoir. Mais je vous promets qu'on mettra toutes nos forces pour que vous puissiez faire mieux que nous, parce que vous ferez mieux que nous, j'en suis sûr.

C'est pour ça qu'en étant là, devant vous, aux côtés du Père, de tous ceux qui vous élèvent, Ça nous donne beaucoup de force. Ça nous dit qu'on n'a jamais le droit de nous arrêter parce que vous êtes là et parce que vous, vous avez le droit de vivre dans un monde qui est un peu meilleur que celui qu'on connaît aujourd'hui.

Alors n'oubliez jamais que la bonté et la volonté ensemble, personne ne les arrête. N'oubliez jamais que chacune et chacun d'entre vous est unique. N'oubliez jamais que vous avez de grandes choses à faire, vous toutes et tous, les enfants malgaches, parce que vous êtes cette armée inarrêtable de la fraternité et de la bonté.

Merci pour la leçon immense que vous nous avez donnée aujourd'hui.

Mon père, je voulais vous dire simplement qu'on continuera de vous accompagner, qu'à l'occasion de cette visite d'État, la République française cédera 100.000 euros à Akamasoa pour continuer son œuvre, et que ça n'est qu'une étape, et qu'aujourd'hui, et demain, nous serons là, parce que ce que vous faites est la plus belle chose au monde.

Soyez fiers, et nous, nous sommes extrêmement fiers et heureux d'être là.

Vive Madagascar ! Vive la France, vive l'amitié entre nous, et vive Akamasoa ! Merci, mon père.