À la découverte des politiques publiques : la politique de réduction des émissions de gaz à effet de serre

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Par : Aude Charrier - Département de lutte contre l'effet de serre (ministère de la transition écologique et solidaire)

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Quelle est la politique de la France en matière de lutte contre l'effet de serre ? Qu'est-ce que la stratégie bas carbone ? Quel est le scénario mis en place pour atteindre la neutralité carbone en 2050 ? Pourquoi la France est-elle en retard sur ses objectifs ?

Quelle est la stratégie de la France en matière de lutte contre l’effet de serre ?

La stratégie nationale bas carbone, c’est la feuille de route de la France pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre et parvenir d’ici à 2050 à la neutralité carbone au niveau national.
Alors, qu’est-ce que c’est la neutralité carbone ? C’est de réduire nos émissions de gaz à effet de serre pour parvenir à un équilibre avec les absorptions de carbone par le territoire. Donc, les absorptions par exemple par les forêts ou les prairies. Cette feuille de route, elle comprend cet objectif de long terme -la neutralité carbone-, une trajectoire pour y parvenir -un scénario- et puis des orientations de politiques publiques qui doivent être ensuite concrètement mises en œuvre dans tous les secteurs qui émettent des gaz à effet de serre. On parle du transport, du bâtiment, de la production d’énergie, de l’agriculture, de l’industrie, de la gestion des déchets et puis également pour améliorer, augmenter l’absorption de carbone, on doit travailler aussi sur l’artificialisation des sols, sur la gestion forestière, sur l’agriculture à nouveau.

On a travaillé à un scénario qui permet d’atteindre la neutralité carbone en 2050 et l’enseignement de ce scénario, c’est que pour parvenir à ce résultat, il faut, en 2050, avoir décarboné l’ensemble de l’énergie que nous produisons et que nous utilisons. Cela veut dire utiliser uniquement des sources qui n’émettent pas des gaz à effet de serre, la chaleur renouvelable, les énergies renouvelables, le nucléaire, le biogaz. C’est le premier constat. Le deuxième constat, c’est que, toujours pour parvenir à cet objectif, il faut réduire drastiquement notre consommation d’énergie dans tous les secteurs. Grosso modo, une réduction de consommation d’énergie divisée par 2 par rapport à aujourd’hui. Le troisième constat, c’est que, il y a aussi des émissions de gaz à effet de serre qui ne sont pas liées à l’usage, à la consommation d’énergie mais qui viennent de l’agriculture et puis liées aussi à des processus industriels. Ces émissions-là, on ne pourra pas les réduire complètement, on ne pourra pas arriver à des émissions nulles mais on doit les réduire le plus fortement possible. Et dans notre scénario, on arrive à une réduction à peu près de moitié de ces émissions.

Et puis, donc ces émissions incompressibles, résiduelles, en 2050, il faut qu’on soit en capacité de les compenser, et donc c’est le quatrième volet, d’augmenter les capacités du territoire à absorber du carbone. Comme je le disais : « qu’est-ce qui absorbe du carbone ? », c’est la forêt, ce sont les prairies, ce sont certains types de milieu naturel et de sol et puis on peut travailler à avoir des capacités de stockage et de captation du carbone qui ne soient pas naturelles plus technologiques. C’est aujourd’hui encore au stade de pilote mais la stratégie vise aussi à essayer de développer ces capacités-là.

Pourquoi la France n’atteint-elle pas ses objectifs ?

Alors aujourd’hui, on n’est effectivement pas sur la trajectoire qu’on avait imaginée en 2015. Cela s’explique en particulier pour des retards qui ont été pris sur deux grands secteurs qui sont responsables de beaucoup de nos émissions de gaz à effet de serre : le transport et le bâtiment. Dans le bâtiment, ce qu’on constate, c’est que les outils sont là, on sait à peu près les actions qui doivent être menées. Le grand levier, c’est la rénovation énergétique des bâtiments. Malheureusement, les rénovations énergétiques aujourd’hui, elles sont en nombre insuffisant et aussi en qualité. C’est-à-dire que les performances énergétiques, après rénovation énergétique, sont souvent insuffisantes. C’est le premier constat. Le deuxième volet sur lequel on a accumulé du retard, c’est le transport. A la fois, parce que les véhicules neufs qui sont maintenant mis sur le marché ont des performances qui ne sont pas si bonnes que cela, en tout cas moindres que ce que l’on avait imaginé en 2015. Parce qu’on a un report modal -le fait de passer d’un mode de transport comme la voiture individuelle vers un autre mode de transport- qui est insuffisant, qui est aussi moindre par rapport à ce qu’on avait imaginé.

La France peut-elle rattraper son retard ?

Alors, à court terme, malheureusement, on n’imagine pas qu’on puisse rattraper ce retard. En revanche, le fait qu’on soit en retard à court terme ne menace pas nos chances d’atteindre nos objectifs de moyen et de long termes. Donc, ce qu’il faut avoir en tête, c’est que les mesures qu’on prend maintenant, du fait d’une certaine inertie ne donnent pas tous les résultats immédiatement mais donnent aussi beaucoup des résultats à moyen terme donc on n’imagine pas pouvoir se remettre sur la trajectoire dès demain, malheureusement. En revanche, le gouvernement travaille à rattraper la trajectoire d’ici à quelques années et on estime que c’est possible.