Interview de Mme Michèle Alliot-Marie, présidente du RPR, à RTL le 1er février 2002, sur l'affaire des marchés publics de l'office HLM des Hauts-de-Seine et sur la campagne du RPR pour l'élection présidentielle.

Prononcé le 1er février 2002

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Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral

R. Elkrief Première question, avant d'évoquer le Conseil national du RPR et le projet du RPR pour cette campagne : elle concerne évidemment D. Schuller, ancien élu des Hauts-de-Seine, élu RPR qui affirme dans le Monde, hier soir, et à France 2 que, pendant des années, je cite, "les entreprises qui obtenaient des marchés publics de l'office HLM des Hauts-de-Seine ont versé des contributions au RPR national et à la fédération des Hauts-de-Seine". C'est-à-dire un financement occulte ?
- "C'est faux. Le RPR - je l'ai fait vérifier par mes services, parce qu'on ne sait jamais - n'a jamais reçu un centime de M. Schuller ou de ses systèmes de financement."
De la fédération HLM des Hauts-de-Seine ? Parce que ce système qui est décrit présente pas mal de similitudes avec un système qu'une autre personne avait décrit. Vous vous souvenez évidemment de la cassette de J.-M. Méry, qui parlait d'un système de financement des HLM de Paris et qui mettait en cause, à l'époque, la mairie de Paris. C'est pourquoi la question peut être posée et qu'elle est assez troublante ?
- "Je crois qu'on assiste depuis quelques jours à une recrudescence de la sortie d'une soi-disant information concernant d'ailleurs tout le monde. Je dirais qu'à la veille d'une campagne électorale, ce n'est sans doute pas innocent. J'espère que la vérité se fera. En ce qui me concerne, je ne suis pas policier, je ne suis pas procureur, je ne suis pas juge. Je sais bien que les socialistes se complaisent dans ce registre. Mais, comme vous le savez, je ne suis pas socialiste. Donc, je m'en remets en ce qui me concerne à la vérité. Je crois que tout le monde a à gagner avec la vérité."
Vous souhaitez que D. Schuller rentre rapidement et qu'il s'explique ?
- "Je souhaite effectivement que la justice puisse l'entendre et que l'on arrête ainsi un certain nombre de manipulations. Tout ce qui contribue à la vérité est pour moi une bonne chose et une nécessité. Tout ce qui est manipulation est détestable, surtout quand cela est fait pour troubler une campagne électorale."
Vous pensez qu'il y a une manipulation qui peut atteindre l'image du candidat J. Chirac ?
- "Je pense que les manipulations peuvent être multiples et qu'elles atteignent l'image de la politique."
En général ?
- "Elles atteignent l'image de la politique en général, absolument. Et ce n'est pas ma conception de la politique."
Est-ce que ce déchaînement des affaires conditionne la date d'entrée en campagne du Président Chirac qui deviendrait candidat ?
- "Ce sont des épiphénomènes de la politique. Je crois que la politique est quelque chose de plus important que cela. Il faut effectivement que les choses se passent sereinement. Le président de la République choisira le moment de sa déclaration. Ce que je constate aujourd'hui, c'est qu'on a déjà un Premier ministre qui est en campagne depuis si longtemps qu'il faut bien qu'il y ait quelqu'un pour garder la maison, surtout dans les échéances européennes actuelles."
La maison France, vous voulez dire ?
- "Absolument, garder la maison France, puisqu'il y a des échéances européennes importantes, avec notamment un sommet à Barcelone qui va parler notamment de tout le secteur énergétique. Je crois qu'il est bon effectivement qu'il puisse y avoir aussi de la sérénité, et pas simplement dans la campagne électorale, quand la France s'exprime."
Vous dites "sérénité", mais il semblerait qu'il y ait une certaine inquiétude sur la crédibilité justement de J. Chirac, peut-être touché par ces affaires, peut-être touché par certaines contradictions. Quand on entend P. Séguin qui revient dans la campagne et qui dit qu'il faudrait d'une certaine façon que le Président fasse une autocritique par rapport à la dissolution ratée de 1997, par rapport à des promesses faites et non tenues. Est-ce qu'il n'y a pas un doute dans les propres troupes de J. Chirac sur sa crédibilité ?
- "Je crois qu'il n'y a aucun doute. N'oubliez pas que J. Chirac, dans tous les sondages d'intentions de votes, est en tête. Il ne faudrait quand même pas l'oublier."
Apparemment, il y a une petite baisse...
- "Il est toujours en tête. En ce qui concerne la campagne, je dirais qu'il y a un lien direct qui s'établit entre le candidat et les Français. Bien entendu, ensuite, certains peuvent avoir chacun leur opinion sur la meilleure façon d'aborder tel ou tel aspect de la campagne. Encore une fois, c'est le candidat qui fait sa campagne."
Juste un petit mot sur ce qu'a dit P. Séguin : faut-il faire une autocritique sur cette dissolution ratée, sur les promesses de la fracture sociale qui n'ont pas été suivies après par de véritables applications ?
- "Je ne crois pas que ce soit à nous de dire ce qu'il faut faire. Il peut y avoir des conseils et cela dépend aussi de chaque appréciation. Je vais beaucoup sur le terrain chaque semaine et ce que je sens, c'est une grande volonté, aujourd'hui, chez les Français, d'avoir une rupture avec la politique socialiste qu'ils subissent depuis cinq ans et qui se manifeste par une insécurité croissante. Les chiffres de l'insécurité ont explosé et ce n'est pas une année ou un mois comme ça, c'est une courbe régulière. L'insécurité a augmenté de plus de 16 % depuis cinq ans, alors qu'elle avait baissé - je vous le ferais remarquer - notamment au cours des années 1995 à 1997 et même un petit peu avant. Nous constatons aussi, alors que nous avons eu cinq ans d'une croissance extraordinaire - la plus forte du siècle dans notre pays -, que le Gouvernement socialiste a laissé passer cette chance pour permettre à la France de se prémunir contre une croissance qui retomberait. Nous voyons depuis un an le chômage remonter, notamment au cours de ces dix derniers mois. C'est la première critique que j'entends de la part des Français que je rencontre toutes les semaines."
Mais précisément, sur le passé d'un candidat qui va se représenter devant les Français, est-ce qu'il y a quelque chose à faire ?
- "Sur son passé, le président de la République aura l'occasion de parler aux Français - il l'a déjà fait - et de dire un certain nombre de choses."
Sur le programme et sur votre projet : vous dites que les chiffres du chômage sont mauvais. Est-ce que vous avez des solutions miracles que vous allez développer concrètement pour les gens qui nous écoutent ? Est-ce que vous avez une ou deux mesures qui vont permettre de stabiliser ou en tout cas faire baisser le chômage ?
- "On a vu, avec les socialistes, ce que donnaient une ou deux mesures démagogiques annoncées comme ça. Je crois qu'il y a des séries de mesures à prendre qui doivent être des mesures sérieuses. Une des premières de ces mesures est de dire effectivement que si la croissance revient, il faudra que nous sachions mieux l'utiliser au bénéfice des Français que ce qu'en ont fait les socialistes. Avec cette croissance, nous avons plutôt fait moins bien que nos partenaires européens."
Vous critiquez implicitement la loi sur les 35 heures - même assez clairement. Vous allez l'abroger ?
- "Il s'agit de l'assouplir. Le grand problème est qu'aujourd'hui, les socialistes veulent dire : "On gèle une situation. Le travail est quelque chose de limité. Ensuite on le partage". Nous, nous disons qu'il faut aider le développement économique et que c'est ainsi qu'on aide la création d'emploi. Quand quelqu'un est licencié, c'est dramatique ; mais ce qui est encore pire, c'est quand cette personne n'a pas la possibilité, la perspective de retrouver un emploi. C'est ce que nous voulons faire. C'est-à-dire permettre à des gens, lorsqu'ils sont licenciés, parce qu'il y a une restructuration, que tout bouge et qu'il faut moderniser aussi certains secteurs pour faire face à la concurrence internationale, la personne licenciée doit avoir la certitude qu'elle retrouvera un emploi, parce que notre économie sera effectivement dynamique et créatrice d'emplois. C'est le coeur des différentes mesures que nous proposons pour permettre le développement économique, en nous appuyant surtout sur une croissance comme celle qu'on a eue et qu'on n'a pas su utiliser dans ce Gouvernement."
Il n'y a pas mal de programmes, pas mal de personnalités, pas mal de groupes - RPR, UEM, etc. - : cela va s'arranger ? On a l'impression d'un certain désordre...
- "Non, je crois que tout ce qui fait progresser l'union de tous ceux qui partagent les mêmes convictions est une bonne chose. Pour ma part, j'y ai travaillé depuis mon arrivée, pour faire l'union au sein du RPR et pour faire l'union au sein de l'opposition. Notre réunion, demain, où nous présentons le projet du RPR, est aussi dans cette perspective. Nous avons fait un gros travail, un bon travail qui est reconnu par tout le monde. Ce travail, nous allons le présenter et nous allons l'apporter au programme de l'Union."
(Source http://Sig.premier-ministre.gouv.fr, le 1e février 2002)