Texte intégral
(Interview à des médias à Grenade le 28 février 2002) :
Q - Monsieur le Ministre, que pensez-vous de l'initiative saoudienne sur le conflit israélo-palestinien ?
R - L'initiative saoudienne du Prince Abdallah est très importante mais ne permet pas, à elle seule, de relancer la négociation aujourd'hui. Pour cela, il faudrait qu'un gouvernement israélien accepte de rouvrir des négociations afin de chercher une solution politique, parallèlement à l'action qui est menée contre l'insécurité et le terrorisme. Le gouvernement israélien n'accepte pas cette démarche parallèle pour le moment, puisqu'il parle toujours de la sécurité avant toute recherche d'une solution politique. On sait que les Européens ont discuté ces idées cette semaine, de manière à redonner une consistance, une existence à la recherche de cette solution politique.
Cette initiative saoudienne est très importante, parce que dans le passé un certain nombre de négociations de paix ont échoué : du côté israélien, on n'était jamais sûr de ce que serait l'attitude arabe dans l'hypothèse d'un accord de paix ; du côté palestinien, quand il y a eu par exemple les négociations de Camp David et Taba, tout a été paralysé sur la question de Jérusalem, le monde arabe, ou plutôt le monde musulman, ne reconnaissant pas de légitimité palestinienne pour trancher la question de Jérusalem. Il y avait donc une incertitude, une hypothèque.
Par cette très remarquable et très courageuse déclaration, le Prince Abdallah lève cette hypothèque, surtout s'il est suivi par l'ensemble du monde arabe. Ce n'est pas très important immédiatement, à court terme, pour aujourd'hui, - cela ne déclenche malheureusement pas la négociation - mais c'est très important pour la réussite du futur processus de paix quand il aura été relancé.
Q - Il y a eu ce matin un attentat de l'ETA à Bilbao. Est-ce qu'il y aura des changements dans la politique à l'égard du terrorisme ?
R - Il ne faut pas qu'il y ait de changement parce que, contre le terrorisme, il y a une politique de coopération pleine et entière avec les autorités espagnoles. Il ne faut pas la changer, il faut la poursuivre avec persévérance, énergie et détermination.
Q - Quels sujets avez-vous abordé ce matin avec les Etats arabes du Golfe ? Qu'avez-vous négocié avec eux sur la Palestine, sur l'Iraq ?
R - Ce n'est pas une instance de négociations. La rencontre entre, d'une part, les pays arabes, membres du Conseil de Coopération des Etats arabes du Golfe et, d'autre part, les pays de l'Union européenne, ce sont des séances dans lesquelles nous mettons en commun des évaluations, des informations. Nous disons en commun ce que nous pensons sur l'Iraq et sur l'Iran. Dans l'autre sens, nous informons nos partenaires arabes de ce qui se passe en Europe ; par exemple, la mise en place de l'euro, la Convention sur l'avenir de l'Europe. C'est une information mutuelle pour que ces deux groupes se comprennent bien et mieux. Mais il ne s'agit pas de négocier.
Sur la question palestino-israélienne, il s'agit pour les Européens de s'informer de leurs positions. Il était intéressant pour nous de savoir si tous les pays arabes présents soutiennent l'initiative saoudienne. J'ai l'impression que tous ces pays la soutiennent. Il y a un sommet arabe à Beyrouth dans quelques jours, il est très important pour nous que tous les autres pays arabes soutiennent également l'initiative saoudienne ; de même que nos partenaires arabes peuvent nous interroger sur les positions des pays européens sur ce sujet. Nous n'allons pas négocier entre nous, ce n'est pas un problème entre les Etats arabes du Golfe et les Européens. C'est un problème israélo-palestinien, pas une négociation.
Q - Et sur l'Iraq, quelle a été la teneur des discussions ?
R - Ce n'était pas non plus une négociation mais un échange d'informations. Cela n'a pas apporté d'éléments nouveaux, parce que nous sommes tous d'accord sur le fait que l'Iraq et le président Saddam Hussein doivent enfin appliquer les résolutions du Conseil de sécurité. Ils doivent accepter le retour des inspecteurs de l'ONU, sans contraintes, et les laisser travailler librement.
Q - Avez-vous parlé d'une action américaine contre l'Iraq ?
R - Non, parce que nous considérons qu'à ce stade c'est une pure hypothèse, une pure spéculation. Cette spéculation disparaîtrait si l'Iraq acceptait le retour des inspecteurs des Nations unies, ce qu'il aurait dû faire depuis longtemps. Là, il s'agit d'un problème entre l'Iraq et le Conseil de sécurité unanime. C'est toute la communauté internationale qui s'exprime à travers cette affaire.
Q - Est-ce que vous croyez que l'initiative saoudienne est vraiment une initiative ou juste des idées qui peuvent aboutir à quelque chose ?
R - Je pense qu'on peut parler d'initiative dans la mesure où cela modifie les chances d'aboutissement du futur processus de paix. L'Arabie saoudite seule ne peut pas prendre une initiative qui relance la négociation parce que c'est une négociation israélo-palestinienne. Il doit y avoir un gouvernement israélien qui soit d'accord pour rouvrir les négociations. L'Arabie saoudite ne peut pas le décider à sa place.
Par contre, l'Arabie a pris une initiative qui modifie l'attitude du monde arabe par rapport à la conclusion future. Quand le processus de paix aura été relancé, - ce qui arrivera un jour ou l'autre parce qu'il n'y a pas d'autre solution, aussi bien du côté israélien que du côté palestinien - cette nouvelle attitude arabe, grâce à l'Arabie saoudite, augmentera formidablement les chances d'aboutissement du processus de paix.
Q - Les Quinze soutiennent cette initiative ?
R - Oui, les quinze européens ont applaudi à cette initiative.
Q - Vous avez dit "J'ai l'impression que les pays arabes du Golfe soutiennent cette initiative" : avez-vous décelé quelques réserves ?
R - Non. Simplement, je n'ai pas demandé à chacun d'entre eux. Je voudrais être sûr qu'il y a un soutien arabe large, y compris lors du prochain Sommet arabe de Beyrouth.
Q - Vous vous attendez à une initiative politique arabe après le Sommet de Beyrouth ?
R - C'est déjà une initiative saoudienne. Si c'est une initiative de l'ensemble du monde arabe annonçant une nouvelle position du monde arabe, c'est encore mieux.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 4 mars 2002)
(Interview à Dubaï TV à Paris le 1er mars 2002) :
Q - Les Etats arabes du Golfe s'attendaient à une grande avancée au niveau de l'accord de libre échange après la réunion de Grenade. Est-ce que l'on peut parler d'avancée à ce sujet-là ?
R - Oui, je pense qu'on peut parler d'avancée. La réunion de Grenade se voulait davantage politique ; sur le plan économique, les accords de libre échange se négocient entre la Commission européenne, qui représente les Etats membres et les membres du Conseil de coopération. Dans le cas précis, c'est un accord qui se négocie depuis très longtemps, mais je crois que depuis un peu plus d'un an, nous sommes entrés dans la phase décisive.
Ce qui était surtout intéressant lors de la réunion de Grenade, c'était l'évaluation politique de la situation dans le Golfe et au Proche-Orient. Je crois que cette réunion a non seulement permis de faire avancer la compréhension, mais aussi la coopération et la convergence entre les pays de l'Union européenne et les pays du Conseil de coopération.
Q - L'initiative du Prince Abdallah a suscité pas mal de réactions positives malgré les réserves de certains pro-palestiniens notamment, surtout par rapport à la situation des réfugiés. Peut-on parler des chances de réussite de cette initiative ? Est-ce qu'elles pourraient devenir européennes après le Sommet de Beyrouth,
par exemple ?
R - Je crois qu'il faut préciser les choses. L'initiative saoudienne est très importante parce qu'elle lève une hypothèque par rapport au processus de paix. Plusieurs fois dans le passé, les processus de paix ont achoppé parce que les dirigeants israéliens disaient qu'ils n'étaient pas sûrs de l'attitude du monde arabe par rapport à Israël, après un éventuel accord de paix. A partir de l'initiative saoudienne du Prince Abdallah, les choses sont claires. C'est une démarche courageuse, constructive, féconde, que nous avons tout de suite saluée positivement. Quand le processus de paix aura été relancé, je crois qu'il aura davantage de chances de réussir grâce à l'Arabie saoudite.
Mais pour relancer le processus de paix, il faut que la négociation recommence entre les Palestiniens et les Israéliens. Cela fait maintenant un certain temps que les Européens appellent le gouvernement israélien à mettre autant d'énergie dans la recherche d'une solution politique - c'est à dire à rouvrir des négociations avec l'Autorité palestinienne - qu'ils en mettent à lutter contre le terrorisme. Ces deux choses doivent être menées conjointement.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 4 mars 2002)
Q - Monsieur le Ministre, que pensez-vous de l'initiative saoudienne sur le conflit israélo-palestinien ?
R - L'initiative saoudienne du Prince Abdallah est très importante mais ne permet pas, à elle seule, de relancer la négociation aujourd'hui. Pour cela, il faudrait qu'un gouvernement israélien accepte de rouvrir des négociations afin de chercher une solution politique, parallèlement à l'action qui est menée contre l'insécurité et le terrorisme. Le gouvernement israélien n'accepte pas cette démarche parallèle pour le moment, puisqu'il parle toujours de la sécurité avant toute recherche d'une solution politique. On sait que les Européens ont discuté ces idées cette semaine, de manière à redonner une consistance, une existence à la recherche de cette solution politique.
Cette initiative saoudienne est très importante, parce que dans le passé un certain nombre de négociations de paix ont échoué : du côté israélien, on n'était jamais sûr de ce que serait l'attitude arabe dans l'hypothèse d'un accord de paix ; du côté palestinien, quand il y a eu par exemple les négociations de Camp David et Taba, tout a été paralysé sur la question de Jérusalem, le monde arabe, ou plutôt le monde musulman, ne reconnaissant pas de légitimité palestinienne pour trancher la question de Jérusalem. Il y avait donc une incertitude, une hypothèque.
Par cette très remarquable et très courageuse déclaration, le Prince Abdallah lève cette hypothèque, surtout s'il est suivi par l'ensemble du monde arabe. Ce n'est pas très important immédiatement, à court terme, pour aujourd'hui, - cela ne déclenche malheureusement pas la négociation - mais c'est très important pour la réussite du futur processus de paix quand il aura été relancé.
Q - Il y a eu ce matin un attentat de l'ETA à Bilbao. Est-ce qu'il y aura des changements dans la politique à l'égard du terrorisme ?
R - Il ne faut pas qu'il y ait de changement parce que, contre le terrorisme, il y a une politique de coopération pleine et entière avec les autorités espagnoles. Il ne faut pas la changer, il faut la poursuivre avec persévérance, énergie et détermination.
Q - Quels sujets avez-vous abordé ce matin avec les Etats arabes du Golfe ? Qu'avez-vous négocié avec eux sur la Palestine, sur l'Iraq ?
R - Ce n'est pas une instance de négociations. La rencontre entre, d'une part, les pays arabes, membres du Conseil de Coopération des Etats arabes du Golfe et, d'autre part, les pays de l'Union européenne, ce sont des séances dans lesquelles nous mettons en commun des évaluations, des informations. Nous disons en commun ce que nous pensons sur l'Iraq et sur l'Iran. Dans l'autre sens, nous informons nos partenaires arabes de ce qui se passe en Europe ; par exemple, la mise en place de l'euro, la Convention sur l'avenir de l'Europe. C'est une information mutuelle pour que ces deux groupes se comprennent bien et mieux. Mais il ne s'agit pas de négocier.
Sur la question palestino-israélienne, il s'agit pour les Européens de s'informer de leurs positions. Il était intéressant pour nous de savoir si tous les pays arabes présents soutiennent l'initiative saoudienne. J'ai l'impression que tous ces pays la soutiennent. Il y a un sommet arabe à Beyrouth dans quelques jours, il est très important pour nous que tous les autres pays arabes soutiennent également l'initiative saoudienne ; de même que nos partenaires arabes peuvent nous interroger sur les positions des pays européens sur ce sujet. Nous n'allons pas négocier entre nous, ce n'est pas un problème entre les Etats arabes du Golfe et les Européens. C'est un problème israélo-palestinien, pas une négociation.
Q - Et sur l'Iraq, quelle a été la teneur des discussions ?
R - Ce n'était pas non plus une négociation mais un échange d'informations. Cela n'a pas apporté d'éléments nouveaux, parce que nous sommes tous d'accord sur le fait que l'Iraq et le président Saddam Hussein doivent enfin appliquer les résolutions du Conseil de sécurité. Ils doivent accepter le retour des inspecteurs de l'ONU, sans contraintes, et les laisser travailler librement.
Q - Avez-vous parlé d'une action américaine contre l'Iraq ?
R - Non, parce que nous considérons qu'à ce stade c'est une pure hypothèse, une pure spéculation. Cette spéculation disparaîtrait si l'Iraq acceptait le retour des inspecteurs des Nations unies, ce qu'il aurait dû faire depuis longtemps. Là, il s'agit d'un problème entre l'Iraq et le Conseil de sécurité unanime. C'est toute la communauté internationale qui s'exprime à travers cette affaire.
Q - Est-ce que vous croyez que l'initiative saoudienne est vraiment une initiative ou juste des idées qui peuvent aboutir à quelque chose ?
R - Je pense qu'on peut parler d'initiative dans la mesure où cela modifie les chances d'aboutissement du futur processus de paix. L'Arabie saoudite seule ne peut pas prendre une initiative qui relance la négociation parce que c'est une négociation israélo-palestinienne. Il doit y avoir un gouvernement israélien qui soit d'accord pour rouvrir les négociations. L'Arabie saoudite ne peut pas le décider à sa place.
Par contre, l'Arabie a pris une initiative qui modifie l'attitude du monde arabe par rapport à la conclusion future. Quand le processus de paix aura été relancé, - ce qui arrivera un jour ou l'autre parce qu'il n'y a pas d'autre solution, aussi bien du côté israélien que du côté palestinien - cette nouvelle attitude arabe, grâce à l'Arabie saoudite, augmentera formidablement les chances d'aboutissement du processus de paix.
Q - Les Quinze soutiennent cette initiative ?
R - Oui, les quinze européens ont applaudi à cette initiative.
Q - Vous avez dit "J'ai l'impression que les pays arabes du Golfe soutiennent cette initiative" : avez-vous décelé quelques réserves ?
R - Non. Simplement, je n'ai pas demandé à chacun d'entre eux. Je voudrais être sûr qu'il y a un soutien arabe large, y compris lors du prochain Sommet arabe de Beyrouth.
Q - Vous vous attendez à une initiative politique arabe après le Sommet de Beyrouth ?
R - C'est déjà une initiative saoudienne. Si c'est une initiative de l'ensemble du monde arabe annonçant une nouvelle position du monde arabe, c'est encore mieux.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 4 mars 2002)
(Interview à Dubaï TV à Paris le 1er mars 2002) :
Q - Les Etats arabes du Golfe s'attendaient à une grande avancée au niveau de l'accord de libre échange après la réunion de Grenade. Est-ce que l'on peut parler d'avancée à ce sujet-là ?
R - Oui, je pense qu'on peut parler d'avancée. La réunion de Grenade se voulait davantage politique ; sur le plan économique, les accords de libre échange se négocient entre la Commission européenne, qui représente les Etats membres et les membres du Conseil de coopération. Dans le cas précis, c'est un accord qui se négocie depuis très longtemps, mais je crois que depuis un peu plus d'un an, nous sommes entrés dans la phase décisive.
Ce qui était surtout intéressant lors de la réunion de Grenade, c'était l'évaluation politique de la situation dans le Golfe et au Proche-Orient. Je crois que cette réunion a non seulement permis de faire avancer la compréhension, mais aussi la coopération et la convergence entre les pays de l'Union européenne et les pays du Conseil de coopération.
Q - L'initiative du Prince Abdallah a suscité pas mal de réactions positives malgré les réserves de certains pro-palestiniens notamment, surtout par rapport à la situation des réfugiés. Peut-on parler des chances de réussite de cette initiative ? Est-ce qu'elles pourraient devenir européennes après le Sommet de Beyrouth,
par exemple ?
R - Je crois qu'il faut préciser les choses. L'initiative saoudienne est très importante parce qu'elle lève une hypothèque par rapport au processus de paix. Plusieurs fois dans le passé, les processus de paix ont achoppé parce que les dirigeants israéliens disaient qu'ils n'étaient pas sûrs de l'attitude du monde arabe par rapport à Israël, après un éventuel accord de paix. A partir de l'initiative saoudienne du Prince Abdallah, les choses sont claires. C'est une démarche courageuse, constructive, féconde, que nous avons tout de suite saluée positivement. Quand le processus de paix aura été relancé, je crois qu'il aura davantage de chances de réussir grâce à l'Arabie saoudite.
Mais pour relancer le processus de paix, il faut que la négociation recommence entre les Palestiniens et les Israéliens. Cela fait maintenant un certain temps que les Européens appellent le gouvernement israélien à mettre autant d'énergie dans la recherche d'une solution politique - c'est à dire à rouvrir des négociations avec l'Autorité palestinienne - qu'ils en mettent à lutter contre le terrorisme. Ces deux choses doivent être menées conjointement.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 4 mars 2002)