Déclaration de M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie, sur l'industrie comme lieu d'innovation technologique, de création de richesses et d'emplois et sur les opportunités qu'elle peut offrir aux jeunes travaillant dans ce secteur économique, Paris, le 18 juin 1999.

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Circonstance : Les journées de l'industrie, à Paris, le 18 juin 1999

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs,
Autant le dire d'emblée : les " journées de l'industrie " ne sont pas les " journées du patrimoine " ! Certes, nous avons un patrimoine industriel. Sans doute, nos sites industriels sont-ils aussi des lieux de mémoire. Les " journées de l'industrie " ne commémorent pas cependant ce que le présent doit au passé : elles célèbrent le futur qui se construit au présent. Aux jeunes ici rassemblés, comme au public nombreux auquel s'ouvrent cette semaine plus de 500 entreprises industrielles, j'adresse ce message : l'industrie n'est pas une activité en voie de disparition ; elle est l'avenir en cours de préparation ! La santé, l'espace, l'environnement, les nouvelles technologies de l'information et de la communication : l'industrie est loin d'être ringarde ; elle est même d'avant-garde ! Notez que 62% des personnes interrogées en ont une image positive. De plus, 75% conseillent aux jeunes d'accepter un emploi dans l'industrie.
Analyser des besoins, concevoir des produits, organiser leur fabrication, transformer la matière puis chercher des débouchés : l'industrie, c'est cela - variété des métiers et diversité des secteurs d'activité ! L'esprit d'entreprise, la prise calculée de risque économique, la volonté de sortir des sentiers battus et d'aller résolument de l'avant : oui, l'industrie, c'est bien cela - l'initiative faite profession ! L'initiative - je me réjouis de le dire aujourd'hui aux plus jeunes - : notre société doit cultiver cette vertu. A une époque où le temps s'accélère au rythme des innovations, dans une économie qui s'est ouverte à l'Europe et au monde, il n'est plus de situations, en effet, qui soient définitivement acquises.
A la différence de vos parents et - plus sûrement - de vos grands-parents, vous ne connaîtrez pas, vous le savez, de carrière professionnelle linéaire. Vous êtes, vous serez appelé, bon gré mal gré, à changer de métier plusieurs fois dans votre vie. Est-ce un bien ou un mal ?... Nous pourrions en débattre... En tout cas, c'est un fait !... Si l'industrie, lieu d'innovation par excellence, est au centre des mutations de notre économie, elle continue d'offrir des emplois dans des conditions satisfaisantes. A cet égard, je souhaite rendre public le travail réalisé par l'un de mes services, le S.E.S.S.I., chargé des études et des statistiques industrielles. De ce travail, il ressort que l'industrie offre aux jeunes des emplois plus qualifiés que ceux proposés par les autres secteurs : plus qualifiés, mais aussi plus stables et mieux rémunérés. En moyenne 72.000 francs nets par an, pour les moins de 25 ans employés dans l'industrie, alors que ce montant est de 69.000 francs tous secteurs d'activité confondus ! L'écart entre le salaire des jeunes et le salaire moyen est plus faible dans l'industrie que dans l'ensemble de l'économie. Il est vrai que les besoins de l'industrie en recrutement de jeunes restent importants et sont même croissants. Du fait notamment de l'allongement des études, le nombre des jeunes de moins de 25 ans employés dans l'industrie diminue. En 1998, ils étaient, vous étiez 225.000, 225.000 seulement, soit 5,6% de l'effectif industriel total. La France est l'un des pays européens, qui emploie la plus faible proportion de jeunes dans l'industrie, cette particularité pouvant cependant s'estomper d'une branche professionnelle à l'autre. Cette faiblesse relative, j'y suis résolu : avec les industriels, il nous faut essayer de l'enrayer. Les uns et les autres, n'oublions pas que plus des deux tiers des moins de 24 ans demandent davantage d'informations sur les métiers offerts par l'industrie !
La reprise de l'activité économique depuis deux ans, le retour d'une croissance élevée, la baisse rapide du chômage, sous l'action de Dominique Strauss-Kahn, reposent - pour beaucoup - sur l'industrie. L'industrie, entendue au sens large, c'est plus de 36% des emplois, 41% du produit intérieur brut et, au delà, c'est ce qui structure et qui dynamise tout le tissu économique. L'explosion des emplois de service, rapportés à ceux de l'industrie manufacturière, ne vient pas contredire ce constat. Elle est le reflet des mutations industrielles, qui incorporent de plus en plus de compétences, de matière grise, de ce qu'on appelle les " investissements immatériels ", et qui diffusent leurs méthodes et leurs technologies dans tous les secteurs d'activité. Industrie et services à l'industrie : cette transformation montre qu'il est de moins en moins pertinent de prétendre distinguer entre secteur secondaire et secteur tertiaire...
L'industrie est le lieu de toutes les innovations. L'entreprise moderne n'est plus seulement, comme au dix-neuvième siècle, une entreprise qui a des coûts de production inférieurs à ceux de ses concurrentes. C'est une entreprise qui allie innovation et anticipation, qualité et réactivité. L'industrie - le cinéma l'illustre -, ce n'est plus " Germinal " - sauf exception -, et c'est - bien souvent déjà - " 2001, l'Odyssée de l'espace " !... L'industrie est devenue plus qualitative, la valeur résidant de plus en plus dans l'immatériel, l'intelligence, l'imagination, le service rendu et la capacité à mobiliser les bonnes compétences - là où il faut, quand il le faut. Elle est moins commandée par l'objet produit, et davantage par le service exigé par le client, le consommateur délaissant désormais les standards pour acheter au plus près de sa personnalité.
Vos enseignants vous ont appris que l'économie est stimulée périodiquement par la diffusion d'innovations : la machine à vapeur, l'électricité, le moteur à explosion, l'informatique. Votre génération est celle des nouvelles technologies : vous êtes, en quelque sorte, une " génération techno ". Quand je dis " techno ", vous pensez sans doute à la musique : pardonnez-moi de penser, pour ma part, à l'industrie !.. Dans les domaines de la santé, des transports, de l'énergie, des matériaux, de l'environnement, de l'organisation, du bâtiment et des infrastructures, de l'information et de la communication, de la mesure, de la production et de l'instrumentation, le développement industriel s'appuie sur plus de 100 technologies clefs. Nous vivons aujourd'hui - et demain, plus encore, vous vivrez vous-mêmes - un véritable moment de notre histoire économique : l'avènement simultané, dans tous les secteurs d'activités, d'une génération de technologies innovantes. Et ces technologies, elles sont le produit de l'industrie !
Des fibres optiques aux images de synthèse, des capteurs intelligents au prototypage rapide, des matériaux composites aux composants électroniques, ou du traitement des déchets à la cartographie des génomes : dans l'industrie, les technologies de demain font déjà les emplois d'aujourd'hui ! Tous ces termes ne vous sont pas, ou pas encore, très familiers. Retenez toutefois de cette énumération que les nouvelles technologies, produites par l'industrie, offrent de nouveaux emplois. Internet, parmi 100 autres, est l'une de ces technologies ! Je dis bien : une parmi 100 !
L'emploi, la création d'emplois, une croissance plus forte, une croissance plus riche en emplois plus qualifiés : c'est là le souci premier du Ministre en charge de l'Industrie que je suis ; et c'est bien là la préoccupation première du gouvernement de Lionel Jospin tout entier. Le souci, la préoccupation, mais aussi le succès !... L'industrie crée des emplois, des emplois stables, innovants, à forte utilité sociale, notamment dans la santé et dans l'environnement. Je suis convaincu que, ni " cols bleus ", ni " cols blancs " - ce sont là encore de vieux schémas, rendus caducs par le " high-tech " ! -, vous pouvez vous épanouir dans les nombreux métiers et les différentes carrières que l'industrie vous propose.
Dans la plupart des cas, si j'omets les stages et les emplois d'été, le monde du travail vous est encore largement inconnu. Ces journées visent à mieux vous faire connaître et apprécier le monde de l'industrie, les hommes et les femmes de l'industrie, les méthodes, les savoir-faire, les projets et les perspectives de l'industrie. Cette table ronde est intitulée " L'industrie dans la vie : le citoyen et l'industrie ". Pour contribuer au débat, je dirais volontiers que l'industrie sera encore mieux appréciée par nos concitoyens - et d'abord par vous, les jeunes ! -, si elle se montre précisément... encore plus citoyenne ! Si elle est innovation technologique, en effet, l'industrie doit aussi faire preuve d'innovation sociale. C'est tout l'enjeu des négociations en cours sur l'aménagement-réduction du temps de travail : ce qu'on appelle les " 35 heures "... L'innovation technologique et l'innovation sociale sont les deux faces d'une même médaille : la médaille d'or de l'entreprise industrielle moderne !
Monsieur le Président,
Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs,
Aux plus jeunes d'entre-vous, j'adresse ce message mobilisateur - formulé avec humour - : engagez-vous ! Managers, techniciens ou ingénieurs, chercheurs, commerciaux ou entrepreneurs : l'industrie vous propose une grande variété de métiers dans les secteurs les plus divers. 46% des personnes interrogées prévoient une hausse de l'emploi dans l'industrie dans les trois ou quatre prochaines années. Si vous êtes animés d'une volonté de concevoir, de transformer, d'anticiper et - j'ajouterai - d'entreprendre, l'industrie comblera vos attentes. L'industrie, c'est l'innovation, notamment technologique ! Les nouvelles technologies recèlent de véritables gisements d'emplois. Il me semble que l'utilité sociale de ces emplois, et que leur impact futur - parfois déjà sensible - sur nos vies quotidiennes, les rendent particulièrement attrayants. Oui, l'industrie, c'est l'avenir, l'avenir qui se construit au présent. Mais, plus encore, l'industrie, ce peut être aussi le progrès.
(source http://www.industrie.gouv.fr, le 24 juin 1999)