Déclaration de M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat chargé des anciens combattants, sur la coopération entre Sao Tomé et Principe et la France, la coopération de Sao Tomé et Principe avec le reste de l'Afrique, l'aide internationale et française à Sao Tomé, son ouverture à la francophonie et les perspectives de développement en matière de pétrole et de tourisme.

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Circonstance : Dîner offert par M. Hubert Védrine en l'honneur de M. Miguel Trovoada, président de Sao-Tome-et-Principe, le 12 mai 2000

Texte intégral

Monsieur le Président de la République démocratique de Sao Tomé-et-Principe,
Madame,
Messieurs les Ministres
Mesdames, Messieurs,
C'est un grand honneur et un grand bonheur aussi pour la France d'accueillir le président de la République démocratique de Sao Tomé-et-Principe en visite officielle dans notre pays.
Mais si c'est un grand bonheur de vous recevoir ainsi en visite officielle - à l'invitation du président de la République et du gouvernement français - c'est aussi un "paradoxe", car ce n'est pas du tout votre première visite en France, loin de là.
En effet Sao Tomé-et-Principe et la France se connaissent bien. Je dois en effet rappeler que c'est dès 1976, un an après votre accession à l'indépendance, que nos deux pays ont conclu un accord de coopération, juste après le Portugal. Depuis lors, nous avons beaucoup travaillé ensemble, surtout depuis la fin des années 80, lorsque Sao Tomé-et-Principe s'est ouvert au multipartisme et à la démocratie. C'est pourquoi un mot, je crois, résume parfaitement le sens et la portée de votre visite officielle aujourd'hui : l'amitié.
J'ajouterai que, pour les autorités françaises, votre visite vient à point nommé : elle permet de survoler le chemin parcouru ensemble - et donc de constater la profondeur et la diversité de cette amitié et de la coopération que nos deux pays ont nouées - et de tracer des pistes pour l'avenir, compte tenu de nos souhaits et de nos capacités réciproques.
Je comprends d'ailleurs, par nos premières conversations de ce soir, que vos entretiens à Paris, notamment avec M. le président de la République, depuis deux jours, ont été marqués du sceau de l'amitié et de l'impulsion, aussi bien en ce qui concerne vos entretiens avec les pouvoirs publics que ceux avec nombre de responsables du secteur privé.
Permettez-moi, Monsieur le Président, de préciser sans doute trop brièvement, pourquoi la France et Sao Tomé-et-Principe ont toutes les raisons de faire fructifier encore, à l'avenir, cette amitié dont je rappelais l'ancienneté.
Nous avons observé que le gouvernement santoméen, sous la direction du Premier ministre M. Guilherme Posser da Costa, s'était fixé trois objectifs prioritaires :
1- Le rétablissement de l'autorité de l'Etat. Et nous savons, après les années de parti unique que votre pays a connues, combien l'établissement d'un Etat de droit, moderne et efficace, est difficile et délicat.
Dans cet esprit, la France a observé avec respect le déroulement de vos élections législatives, il y a deux ans, et ne doute pas que les importantes échéances électorales - présidentielles - qui seront celles de votre pays l'an prochain, ne donnent, une fois encore, un exemple supplémentaire à l'Afrique, et donc au monde, du respect du droit.
2 - La stabilité macro-économique. Nous savons, là aussi, toutes les difficultés, en particulier avec un cacao - votre seul produit d'exportation - dont les prix sont au plus bas. Nous apprécions d'autant plus les efforts entrepris et réalisés. Je suis heureux de saluer le "Programme de croissance économique et de réduction de la pauvreté" que votre pays vient de conclure avec le FMI pour 3 ans, de 2000 à 2002, et qui va permettre, dès lundi prochain l5 mai à Paris, un passage en "Club de Paris" pour l'examen de votre dette bilatérale.
Au moment où votre pays s'engage dans un difficile programme d'ajustement, il faut donc souhaiter que l'examen de votre dette en Club de Paris soit le plus favorable possible, soyez sûrs que la France s y emploiera.
3 - Le troisième grand axe de votre gouvernement est la lutte contre la pauvreté : éducation, formation professionnelle, jeunesse, culture, sport, santé, habitation, promotion de la femme. Nous savons que, malgré votre volonté d'aller de l'avant, d'agir dans ces secteurs-clés pour le développement de vos citoyens, vos moyens sont comptés et que vous attendez donc beaucoup de la coopération internationale.
Les évolutions récentes et positives de votre pays vont permettre, dans quelque temps, la tenue d'une "table ronde des bailleurs de fonds" sous l'égide du PNUD (le Programme des Nations unies pour le Développement). Dans notre esprit, celle-ci devrait permettre de renforcer la cohérence des apports à votre pays et viser à une meilleure appropriation de l'aide extérieure par les Santoméens eux-mêmes.
La France - comme vos entretiens à Paris, Monsieur le Président, vous l'auront certainement montré - approuve pleinement ces trois grandes orientations que votre pays s'est, souverainement, choisies. Et c'est pourquoi elle a décidé, cette année encore, de poursuivre une importante coopération avec Sao Tomé-et-Principe.
Notre ministre délégué à la Coopération, M. Charles Josselin (qui a regretté beaucoup de n'être pas avec vous maintenant, en raison d'engagements en Asie), a ainsi mis en programmation, pour cette année, plus de 14 millions de francs : soit plus de 10 millions de francs pour la coopération culturelle, technique et d'aide au développement et 3,5 millions de francs au titre de "fonds de solidarité prioritaire".
Vous savez que notre aide cherche depuis longtemps à avoir un caractère structurel et s'inscrit dans la durée. Elle s'adapte à vos évolutions et prenant en compte l'intervention d'autres partenaires au développement, elle tend à se recentrer. Elle met l'accent sur les secteurs éducatifs et culturels, sur le renforcement des capacités de l'Etat et sur l'appui au secteur productif avec l'Agence française de développement, très active, vous le savez, dans votre pays, en particulier dans le domaine des infrastructures et du développement rural.
Nous connaissons, par ailleurs, votre souhait d'être mieux pris en compte dans la sousrégion d'Afrique centrale, à laquelle vous appartenez géographiquement. La France - au coeur de la construction européenne - ne peut qu'approuver une telle démarche, qu'elle appuie partout en Afrique, sur le principe tout simple que l'union fait la force.
C'est pourquoi la France est favorable à tout ce qui peut réduire votre important isolement, à 300 kilomètres au large des côtes du Gabon. Ainsi elle appuie votre volonté d'ouverture déterminée à la Francophonie, avec tout ce que l'adhésion à la Francophonie institutionnelle peut apporter à votre pays.
Car, comme l'a si bien dit son secrétaire général, M. Boutros Boutros-Ghali : "De même que la démocratie interne appelle le multipartisme, la démocratie internationale appelle le multilinguisme".
L'ambition de Sao Tomé-et-Principe de s'ouvrir davantage à la Francophonie - au-delà des élites de votre pays qui sont déjà très souvent d'excellents francophones - s'inscrit, il faut le souligner, dans le cadre d'une région, avec le Nigeria anglophone et la Guinée équatoriale hispanophone, qui suit la même évolution.
Mais là, Monsieur le Président, une précision s'impose, afin d'éviter des malentendus qui, nous le savons, se produisent parfois : l'appui que nous apportons à l'ouverture de Sao Tomé-et-Principe à la Francophonie ne signifie en aucun cas -ni dans notre esprit, ni dans nos intentions, ni dans nos actions - une quelconque volonté d'éloigner tant soit peu votre pays de la lusophonie à laquelle il appartient tout naturellement. Nous-mêmes, en France, incitons suffisamment nos jeunes à s'ouvrir à d'autres langues, à d'autres cultures, pour estimer qu'il n'y a, en ces domaines, aucune frilosité à avoir. Les plus hautes autorités françaises et portugaises s'en sont expliquées et partagent la même approche, sur ce chapitre, depuis longtemps.
Toujours au plan régional et en ce qui touche les questions de sécurité, la France n'a pu que se féliciter de voir Sao Tomé-et-Principe devenir membre du COPAX, ce Conseil de paix en Afrique centrale récemment créé.
De même - et vous comprendrez, Monsieur le Président, que le Secrétaire d'Etat à la Défense que je suis y a été particulièrement sensible - les autorités françaises ont été très favorablement impressionnées par le dynamisme et l'esprit d'équipe remarquable dont ont fait preuve les troupes de Sao Tomé-et-Principe qui ont participé, au Gabon en janvier dernier, à l'exercice appelé "Gabon 2000". C'était un exercice avec troupes, le premier du genre en Afrique centrale, de renforcement des capacités africaines de maintien de la paix, organisé conjointement par le Gabon et la France, avec la participation d'une dizaine de pays de la région et aussi, parmi les pays extérieurs, le Portugal.
J'évoquais la lusophonie, puis la sécurité : vous l'aurez compris, Monsieur le Président, le souhait de la France, pour épauler, renforcer, le développement de Sao Tomé-et-Principe, est donc de travailler davantage encore en harmonie, en concertation, avec vos principaux partenaires, au premier rang desquels, bien sûr, puisque nous appartenons à la même famille : le Portugal et l'Union européenne, mais aussi les autres bailleurs multilatéraux.
J'ai réservé pour la fin deux sujets qui peuvent être - nous le souhaitons tous - porteurs d'avenir pour Sao Tomé-et-Principe et qui ont été évoqués, j'en suis convaincu, pendant votre séjour à Paris : le pétrole et le tourisme. Les Santoméens souhaitent que l'on trouve du pétrole autour des îles de Sao Tomé et de Principe, dans votre "zone économique exclusive". Ils souhaitent aussi que se développe, plus que ce n'est déjà le cas, une forte industrie touristique, ce que les autorités françaises ne peuvent qu'approuver, compte tenu de vos très belles potentialités naturelles.
La France, vous le savez, n'a de conseils à donner à personne, mais elle peut, par les constats qu'elle fait ici et là sur ces deux thèmes, faire part à ses amis de ses observations, de son sentiment. Le pétrole, s'il y en a, tant mieux, mais l'expérience montre que c'est une manne parfois délicate à gérer : on le voit souvent, pas seulement en Afrique. Quant au tourisme c'est, je le disais exprès, une "industrie" : il faut travailler, se battre, s'investir soi-même beaucoup pour la créer, la bâtir et qu'elle fonctionne dans la durée. Ce n'est pas quelque chose qui arrive tout seul. Et la France souhaite aussi que ces deux secteurs - pétrole et tourisme - contribuent à conforter les efforts entrepris par votre pays en matière de redressement économique et financier, qu'ils en fortifient l'assise, en relation avec vos voisins.
La France souhaite ainsi vivement que votre voyage officiel soit un plein succès, mais je comprends que c'est déjà largement le cas. Elle souhaite vous redire l'amitié ancienne et forte qu'elle porte à votre personne, à Mme Maria Helena Trovoada, à votre gouvernement et au peuple santoméen tout entier.
En exprimant le souhait que cette amitié s'approfondisse et se renforce encore à l'avenir, je vous invite à lever vos verres à la santé :
- du Président Miguel Trovoada,
- de Mme Maria Helena Trovoada,
- de la délégation qui les accompagne
- et du peuple de Sao Tomé-et-Principe.
Vive l'amitié entre Sao Tomé-et-Principe et la France.
Je vous remercie./.

(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 17 mai 2000)