Texte intégral
F. Laborde : Revoilà les sondages, ces sondages qui s'étaient beaucoup trompés d'ailleurs avant le premier tour et qui, avant le deuxième tour, donnent cette fois des fourchettes, avec J. Chirac entre 74 et 80 %, et pour J.-M. Le Pen entre 19 et 25 %. Quelle réflexion vous inspire ces chiffres ?
- "Je n'apporte aucun crédit aux sondages aujourd'hui, d'abord parce qu'on a été quelque peu vaccinés et ensuite parce que la situation me paraît troublée. Il faut donc être très prudent et ne surtout pas démotiver, démobiliser les électeurs par des scores qui seraient très importants et qui pourraient conduire les uns et les autres à finalement rester chez eux. Il est très important que tous les républicains aillent voter le 5 mai. Je comprends le besoin de manifestation, je comprends le besoin d'expression mais, dans la démocratie, voter c'est parler, parler c'est voter, c'est dans l'urne que se construit la République. Faisons donc très attention à ne pas laisser penser que le résultat est déjà connu d'avance, on a vu les erreurs que pouvaient faire les sondages dimanche dernier. C'est donc quelque chose de très important, restons motivés autour des valeurs de la République pour un vote massif le 5 mai."
Cela ouvre aussi la porte à beaucoup de rumeurs. Ce week-end circulaient des chiffres disant que selon certaines sources qu'on attribue aux Renseignements généraux - tout cela est évidemment dit au conditionnel, car il ne s'agit que d'une rumeur -, J.-M. Le Pen pourrait atteindre jusqu'à près de 40 % des intentions de vote.
- "Je ne crois pas à ces rumeurs, mais il faut faire très attention : je le dis à tous ceux qui nous écoutent ce matin, en fait, statistiquement, mathématiquement, un vote d'abstention fait monter en pourcentage, en valeur relative Le Pen, avec le même nombre de voix."
C'est-à-dire que quand on ne va pas voter, J.-M. Le Pen gagne une voix...
- "Voilà. Quand on s'abstient, on fait monter le score de M. Le Pen, l'abstention est un vote Le Pen, il faut donc être très vigilant, il faut se motiver les uns et les autres autour des valeurs de la République pour voter pour J. Chirac. C'est très important, je le dis avec sincérité aujourd'hui et avec gravité : le temps n'est plus aux règlements de compte entre les Républicains. Aujourd'hui, il faut se rassembler, tous ceux qui croient à nos valeurs, tous ceux qui préfèrent une société d'amour à une société de haine, tous ceux qui veulent rassembler plutôt que diviser, tous ceux qui sont pour la cohésion sociale contre la division partisane, il faut que tous ceux-là se rassemblent pour voter le 5 mai pour la République et pour J. Chirac."
Dans ce rassemblement, on voit bien que J. Chirac essaie évidemment de convaincre ceux qui ont pu voter pour L. Jospin au premier tour, dont certains disent déjà qu'ils vont voter pour lui. Mais est-ce qu'il n'essaie pas aussi de convaincre un certain nombre de gens qui ont pu voter pour J.-M. Le Pen ? La question concerne notamment la présence, au meeting de Lyon, de C. Millon, de J. Blanc et de J.-P. Soisson, dont on sait qu'ils avaient été élus dans leur temps avec des voix du Front national. Est-ce que cela peut troubler, est-ce que c'est un signal ?
- "Absolument pas, ce sont des parlementaires qui sont dans notre vie politique nationale déjà depuis un certain temps et qui se sont déjà exprimés depuis 98 sur tous ces sujets. Ce qui compte aujourd'hui, c'est de bien montrer que la voie politique proposée par M. Le Pen est une voie de repli, une voie d'isolement, une voie de division, une voie de tension ; rien de bon ne peut sortir des divisions. On ne construit pas un pays sur des divisions. Les Françaises et les Français, notamment ceux qui ont eu un vote protestataires, qu'est-ce qu'ils demandent ? Ils demandent de l'autorité. Et si on veut que la République ait de l'autorité, il ne faut pas la diviser, on ne construit pas de l'autorité sur des divisions, on construit de l'autorité sur de la cohésion. Si on veut un pouvoir politique fort, il faut de l'unité."
J'entends bien, mais vous ne m'avez pas répondu, c'est pour ça qu'il me semble important d'y revenir... Encore une fois, le rassemblement va jusqu'à évidemment tenter de faire venir les électeurs du Front national...
- "Il s'agit de répondre à des problèmes concrets, je ne crois pas qu'il y ait aujourd'hui un électorat qui soit identifié, au sens partisan du mot, Front national. Les gens qui ont voté pour J.-M. Le Pen ne sont pas adhérents au Front national, ce sont des protestataires, ce sont des gens exaspérés... C'est pour cela qu'on dit aux petites entreprises et aux artisans que si on nous coupe de l'Europe, on va perdre du travail, aux agriculteurs qu'ils vont perdre du revenu..."
Les agriculteurs le savent, parce qu'ils vivent en grande partie grâce aux subventions européennes...
- "Mais c'est vrai pour les artisans, c'est vrai pour les PME, c'est vrai pour toute cette économie aujourd'hui nationale qui est en fait branchée sur l'économie du monde. Et donc, nous avons besoin de l'ouverture. Alors, bien sûr, il faut défendre notre intérêt national et bien sûr il faut soutenir davantage en allégeant les charges, en faisant en sorte que notre économie soit plus mobile, plus vivante et que nos forces vives puissent mieux respirer. C'est vrai qu'il va falloir baisser les impôts pour que cette force de travail soit plus dynamique et qu'elle ne soit pas freinée par la bureaucratie. Tout cela, c'est le programme de J. Chirac. Mais il est très important de voir que cela ne peut se faire que dans une politique qui intègre par exemple l'Europe et non pas le repli sur soi."
Donc, d'un côté, une dynamique économique qu'il faut soutenir et de l'autre, une politique de fermeté face aux sentiments d'insécurité dont les Français nous ont beaucoup parlé ?
- "Je ne pense pas que la politique de M. Le Pen soit une politique de fermeté : c'est une politique de fermeture. La vraie politique de fermeté est celle qui rassemble le pays et, au nom de cette autorité républicaine, qui fait respecter l'Etat, qui fait respecter la République. Au fond, qu'est-ce qui s'est passé pendant un grand nombre d'années ? Là, tout le monde est responsable, n'accusons pas les uns ou les autres : on a laissé la République devenir impuissante. Il faut une République avec un Etat fort, un Etat qui ne cherche pas à tout faire - ce n'est pas la peine que l'Etat soit dans l'exploitation agricole, chez l'artisan, avec toutes ces paperasses comme il est aujourd'hui... On a besoin de l'Etat pour la justice, pour la police, pour la sécurité, un Etat moins dispersé, plus concentré, mais plus fort. Et le reste, avec les partenaires sociaux... Fermeté républicaine, autorité républicaine mais aussi cohésion et dialogue social."
On a le sentiment que le discours de J.-M. Le Pen s'est durci depuis qu'il a été sélectionné pour le deuxième tour, avec des attaques vis-à-vis de J. Chirac ou tout simplement son programme qui se fait plus âpre...
- "Au fond, le discours de M. Le Pen est particulièrement dur, c'est un discours d'essence violente. Pendant la campagne, il cherche à cacher un peu cette violence, cette tension de son discours et donc, de temps en temps, on voit apparaître les vieux réflexes qui ressortent. Mais il est évident qu'il y a eu toute une manuvre de campagne pour essayer de présenter le message de M. Le Pen comme un message apaisant. On voit bien qu'au fond, c'est un message violent et, notamment pour les jeunes, c'est quelque chose d'insupportable. C'est pour ça que cette unité nationale autour de la République avec J. Chirac est un message très important."
F. Bayrou a annoncé qu'il appelé tous les membres de l'UDF à voter massivement pour J. Chirac, démontré que plus qu'un autre encore, il appartenait à la majorité présidentielle future peut-être, mais pour autant, il ne veut pas que son parti disparaisse dans l'UMP ?
- "Il a tort sur ce sujet. Il faut qu'on se rassemble. Les Français nous demandent de l'efficacité ; comment pouvons-nous être efficaces au pouvoir quand nous sommes divisés ? J'ai été ministre avec trois groupes parlementaires, un groupe UDF, un groupe DL, un groupe RPR : il faut convaincre l'un et puis, il y a des surenchères entre les uns et les autres, finalement on passe plus de temps à négocier avec ses partenaires qu'à convaincre ou à combattre ses adversaires ! Donc, c'est vraiment très important aujourd'hui d'être unis pour agir. Naturellement, tout le monde me dit que si on a plusieurs vitrines, on aura plus de clients encore, mais il ne s'agit pas seulement d'ajouter des clientèles électorales ?"
Il vaut mieux une grande surface que plusieurs petits commerces ?
- "Il faut surtout de la cohésion pour agir, il faut de l'unité, il faut une capacité de rassemblement, pour être efficace. Les Français demandent à la République, à la puissance publique, de l'efficacité."
(Source :Premier ministre, Service d'information du gouvernement, le 30 avril 2002)
- "Je n'apporte aucun crédit aux sondages aujourd'hui, d'abord parce qu'on a été quelque peu vaccinés et ensuite parce que la situation me paraît troublée. Il faut donc être très prudent et ne surtout pas démotiver, démobiliser les électeurs par des scores qui seraient très importants et qui pourraient conduire les uns et les autres à finalement rester chez eux. Il est très important que tous les républicains aillent voter le 5 mai. Je comprends le besoin de manifestation, je comprends le besoin d'expression mais, dans la démocratie, voter c'est parler, parler c'est voter, c'est dans l'urne que se construit la République. Faisons donc très attention à ne pas laisser penser que le résultat est déjà connu d'avance, on a vu les erreurs que pouvaient faire les sondages dimanche dernier. C'est donc quelque chose de très important, restons motivés autour des valeurs de la République pour un vote massif le 5 mai."
Cela ouvre aussi la porte à beaucoup de rumeurs. Ce week-end circulaient des chiffres disant que selon certaines sources qu'on attribue aux Renseignements généraux - tout cela est évidemment dit au conditionnel, car il ne s'agit que d'une rumeur -, J.-M. Le Pen pourrait atteindre jusqu'à près de 40 % des intentions de vote.
- "Je ne crois pas à ces rumeurs, mais il faut faire très attention : je le dis à tous ceux qui nous écoutent ce matin, en fait, statistiquement, mathématiquement, un vote d'abstention fait monter en pourcentage, en valeur relative Le Pen, avec le même nombre de voix."
C'est-à-dire que quand on ne va pas voter, J.-M. Le Pen gagne une voix...
- "Voilà. Quand on s'abstient, on fait monter le score de M. Le Pen, l'abstention est un vote Le Pen, il faut donc être très vigilant, il faut se motiver les uns et les autres autour des valeurs de la République pour voter pour J. Chirac. C'est très important, je le dis avec sincérité aujourd'hui et avec gravité : le temps n'est plus aux règlements de compte entre les Républicains. Aujourd'hui, il faut se rassembler, tous ceux qui croient à nos valeurs, tous ceux qui préfèrent une société d'amour à une société de haine, tous ceux qui veulent rassembler plutôt que diviser, tous ceux qui sont pour la cohésion sociale contre la division partisane, il faut que tous ceux-là se rassemblent pour voter le 5 mai pour la République et pour J. Chirac."
Dans ce rassemblement, on voit bien que J. Chirac essaie évidemment de convaincre ceux qui ont pu voter pour L. Jospin au premier tour, dont certains disent déjà qu'ils vont voter pour lui. Mais est-ce qu'il n'essaie pas aussi de convaincre un certain nombre de gens qui ont pu voter pour J.-M. Le Pen ? La question concerne notamment la présence, au meeting de Lyon, de C. Millon, de J. Blanc et de J.-P. Soisson, dont on sait qu'ils avaient été élus dans leur temps avec des voix du Front national. Est-ce que cela peut troubler, est-ce que c'est un signal ?
- "Absolument pas, ce sont des parlementaires qui sont dans notre vie politique nationale déjà depuis un certain temps et qui se sont déjà exprimés depuis 98 sur tous ces sujets. Ce qui compte aujourd'hui, c'est de bien montrer que la voie politique proposée par M. Le Pen est une voie de repli, une voie d'isolement, une voie de division, une voie de tension ; rien de bon ne peut sortir des divisions. On ne construit pas un pays sur des divisions. Les Françaises et les Français, notamment ceux qui ont eu un vote protestataires, qu'est-ce qu'ils demandent ? Ils demandent de l'autorité. Et si on veut que la République ait de l'autorité, il ne faut pas la diviser, on ne construit pas de l'autorité sur des divisions, on construit de l'autorité sur de la cohésion. Si on veut un pouvoir politique fort, il faut de l'unité."
J'entends bien, mais vous ne m'avez pas répondu, c'est pour ça qu'il me semble important d'y revenir... Encore une fois, le rassemblement va jusqu'à évidemment tenter de faire venir les électeurs du Front national...
- "Il s'agit de répondre à des problèmes concrets, je ne crois pas qu'il y ait aujourd'hui un électorat qui soit identifié, au sens partisan du mot, Front national. Les gens qui ont voté pour J.-M. Le Pen ne sont pas adhérents au Front national, ce sont des protestataires, ce sont des gens exaspérés... C'est pour cela qu'on dit aux petites entreprises et aux artisans que si on nous coupe de l'Europe, on va perdre du travail, aux agriculteurs qu'ils vont perdre du revenu..."
Les agriculteurs le savent, parce qu'ils vivent en grande partie grâce aux subventions européennes...
- "Mais c'est vrai pour les artisans, c'est vrai pour les PME, c'est vrai pour toute cette économie aujourd'hui nationale qui est en fait branchée sur l'économie du monde. Et donc, nous avons besoin de l'ouverture. Alors, bien sûr, il faut défendre notre intérêt national et bien sûr il faut soutenir davantage en allégeant les charges, en faisant en sorte que notre économie soit plus mobile, plus vivante et que nos forces vives puissent mieux respirer. C'est vrai qu'il va falloir baisser les impôts pour que cette force de travail soit plus dynamique et qu'elle ne soit pas freinée par la bureaucratie. Tout cela, c'est le programme de J. Chirac. Mais il est très important de voir que cela ne peut se faire que dans une politique qui intègre par exemple l'Europe et non pas le repli sur soi."
Donc, d'un côté, une dynamique économique qu'il faut soutenir et de l'autre, une politique de fermeté face aux sentiments d'insécurité dont les Français nous ont beaucoup parlé ?
- "Je ne pense pas que la politique de M. Le Pen soit une politique de fermeté : c'est une politique de fermeture. La vraie politique de fermeté est celle qui rassemble le pays et, au nom de cette autorité républicaine, qui fait respecter l'Etat, qui fait respecter la République. Au fond, qu'est-ce qui s'est passé pendant un grand nombre d'années ? Là, tout le monde est responsable, n'accusons pas les uns ou les autres : on a laissé la République devenir impuissante. Il faut une République avec un Etat fort, un Etat qui ne cherche pas à tout faire - ce n'est pas la peine que l'Etat soit dans l'exploitation agricole, chez l'artisan, avec toutes ces paperasses comme il est aujourd'hui... On a besoin de l'Etat pour la justice, pour la police, pour la sécurité, un Etat moins dispersé, plus concentré, mais plus fort. Et le reste, avec les partenaires sociaux... Fermeté républicaine, autorité républicaine mais aussi cohésion et dialogue social."
On a le sentiment que le discours de J.-M. Le Pen s'est durci depuis qu'il a été sélectionné pour le deuxième tour, avec des attaques vis-à-vis de J. Chirac ou tout simplement son programme qui se fait plus âpre...
- "Au fond, le discours de M. Le Pen est particulièrement dur, c'est un discours d'essence violente. Pendant la campagne, il cherche à cacher un peu cette violence, cette tension de son discours et donc, de temps en temps, on voit apparaître les vieux réflexes qui ressortent. Mais il est évident qu'il y a eu toute une manuvre de campagne pour essayer de présenter le message de M. Le Pen comme un message apaisant. On voit bien qu'au fond, c'est un message violent et, notamment pour les jeunes, c'est quelque chose d'insupportable. C'est pour ça que cette unité nationale autour de la République avec J. Chirac est un message très important."
F. Bayrou a annoncé qu'il appelé tous les membres de l'UDF à voter massivement pour J. Chirac, démontré que plus qu'un autre encore, il appartenait à la majorité présidentielle future peut-être, mais pour autant, il ne veut pas que son parti disparaisse dans l'UMP ?
- "Il a tort sur ce sujet. Il faut qu'on se rassemble. Les Français nous demandent de l'efficacité ; comment pouvons-nous être efficaces au pouvoir quand nous sommes divisés ? J'ai été ministre avec trois groupes parlementaires, un groupe UDF, un groupe DL, un groupe RPR : il faut convaincre l'un et puis, il y a des surenchères entre les uns et les autres, finalement on passe plus de temps à négocier avec ses partenaires qu'à convaincre ou à combattre ses adversaires ! Donc, c'est vraiment très important aujourd'hui d'être unis pour agir. Naturellement, tout le monde me dit que si on a plusieurs vitrines, on aura plus de clients encore, mais il ne s'agit pas seulement d'ajouter des clientèles électorales ?"
Il vaut mieux une grande surface que plusieurs petits commerces ?
- "Il faut surtout de la cohésion pour agir, il faut de l'unité, il faut une capacité de rassemblement, pour être efficace. Les Français demandent à la République, à la puissance publique, de l'efficacité."
(Source :Premier ministre, Service d'information du gouvernement, le 30 avril 2002)