Communiqué des pays de la CEE, en date du 14 janvier 1991, sur la crise du Golfe persique et l'intervention militaire de l'URSS dans les pays baltes.

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Circonstance : Réunion ministérielle extraordinaire de coopération politique à Bruxelles le 14 janvier 1991

Média : Bulletin d'information du ministère des affaires étrangères - Bulletin d'information du ministère des affaires étrangères

Texte intégral

A) Déclaration sur la crise du Golfe.
- A la suite d'une entrevue entre le Président du Conseil et le secrétaire général des Nations unies, les ministres des affaires étrangères de la Communauté européenne ont pris connaissance de la substance des entretiens de M. Perez de Cuellar avec le Président et le ministre des affaires étrangères d'Irak.
- Ils notent que le secrétaire général fera ce soir même rapport sur sa mission au Conseil de Sécurité des Nations unies. Il appartiendra à ce dernier d'en évaluer les résultats.
- Pour ce qui les concerne, la Communauté et ses Etats membres ont depuis le début de la crise du Golfe soutenu, sans réserve aucune, l'application intégrale et sans condition des résolutions pertinentes du Conseil de Sécurité.
- Ils n'ont pas ménagé leurs efforts pour explorer toutes les voies d'une solution pacifique conforme à ces mêmes résolutions. Dans cet esprit, la Communauté européenne avait marqué sa disponibilité à rencontrer en Troika ministérielle le ministre irakien des affaires étrangères, M. Tarek Aziz, dans la capitale de la Présidence d'abord, à Alger ensuite.
- A travers la déclaration de la Présidence du 4 janvier 1991, les Douze avaient clairement indiqué qu'en cas d'application intégrale et inconditionnelle des Résolutions du Conseil de Sécurité, l'Irak devrait recevoir la garantie qu'il ne ferait pas l'objet d'une intervention militaire.
- Dans la même déclaration, la Communauté et ses Etats membres avaient également clairement confirmé leur engagement à contribuer activement au règlement des autres problèmes de la région et à y établir une situation de sécurité, de stabilité et de développement, dès lors que la crise du Golfe serait résolue.
A l'occasion du Conseil européen de Rome du 15 décembre 1990, la Communauté européenne et ses Etats membres avaient indiqué qu'ils demeuraient pleinement en faveur de la convocation d'une Conférence internationale de Paix sur le Proche-Orient, au moment approprié.
- Force est, malheureusement, de constater que la disponibilité ainsi manifestée à contribuer à une solution pacifique de la crise ouvrant la voie à un règlement équitable de tous les autres problèmes de la région n'a rencontré, jusqu'ici, aucune réponse des autorités irakiennes.
- Devant le refus persistant de ces dernières d'appliquer les Résolutions du Conseil de Sécurité et en l'absence de tout signe en ce sens, la Communauté européenne et ses Etats membres regrettent de constater que les conditions pour une nouvelle initiative européenne ne sont pas réunies pour l'heure.
- L'invitation à M. Tarek Aziz pour un contact avec la Troïka ministérielle reste toutefois sur la table.
- La Communauté européenne et ses Etats membres sont conscients d'avoir fait tout ce qui était possible pour trouver une issue pacifique à la crise. Ils demeurent déterminés à explorer toutes les possibilités pour sauvegarder la paix dans le respect de la légalité internationale. Dans ce cadre, ils demandent aux pays et organisations arabes de continuer à déployer tous les efforts pour que les autorités irakiennes comprennent qu'il est de l'intérêt de l'Irak, comme de l'ensemble du monde arabe, de se conformer aux résolutions du Conseil de Sécurité.
- Les ministres ont chargé la Présidence de rester en contact étroit avec toutes les parties concernées.
- Les ministres et leurs directeurs politiques resteront en consultation constante dans les jours qui viennent pour suivre l'évolution de la crise et prendre toutes les décisions qui s'imposent.
B) Déclaration sur les pays Baltes.
- La Communauté et ses Etats membres sont persuadés que le recours à la force tel qu'il est intervenu en Lituanie est inacceptable. Ils déplorent vivement les victimes innocentes de cette répression. une solution ne peut être trouvée que par le biais d'un dialogue entre les autorités soviétiques et les représentants élus des peuples baltes, en vue de satisfaire aux aspirations légitimes de ces peuples.
- Ils adressent aux autorités soviétiques un appel urgent pour qu'elles s'abstiennent du recours à la force, reprennent la voie du dialogue et mettent fin à l'intervention militaire.
- La Communauté et ses Etats membres ont été parmi les premiers à soutenir le processus démocratique entamé en Union soviétique. La perestroika représente pour la Communauté et ses Etats membres un signe d'espoir et ils souhaitent très sincèrement qu'il en demeure ainsi.
- Le processus de la CSCE, de l'Acte final d'Helsinki à la Charte de Paris, a comme idées directrices que le Gouvernement démocratique est basé sur la volonté du peuple et que l'usage de la force constitue parmi les trente-quatre Etats participants de la CSCE un moyen inacceptable de solution de différends. L'architecture de la nouvelle Europe ne peut être fondée que sur les principes de l'Etat de droit.
- La Communauté et ses Etats membres ne sous-estiment pas les difficultés de la situation en URSS. C'est aussi pour aider l'URSS à les surmonter qu'ils ont exprimé de façon concrète leur disponibilité à étendre et renforcer la coopération entre la Communauté européenne et l'Union soviétique.
- Un développement de cette coopération ne peut toutefois trouver son fondement que dans des valeurs et des objectifs partagés en commun. C'est pourquoi la Communauté et ses Etats membres insistent pour que la situation qui prévaut actuellement en Lituanie ne se prolonge en aucune façon et ne s'étende aux autres pays baltes. A défaut, ils devraient conclure à la nécessité de réagir par des mesures appropriées et d'arrêter la mise en oeuvre de la coopération entre la Communauté européenne et l'URSS.
- Compte tenu de l'importance pour l'URSS et pour l'Europe des enjeux en présence, la Communauté et ses Etats membres lancent un appel au Président Gorbatchev pour qu'il fasse tout ce qui est en son pouvoir afin de préserver les espoirs suscités par la Charte de Paris pour une nouvelle Europe libre et démocratique.