Texte intégral
J.-P. Elkabbach La Vème République est en train de se remettre presque à l'endroit. Il y a trois mois, qui l'eût dit, qui l'eût prédit, qui l'eût cru ? J. Chirac, Président réélu, doté d'une majorité parlementaire absolue, élue pour le servir et apparemment pour réformer à sa manière la France. J.-L. Debré, c'est une responsabilité formidable devant l'Histoire...
J.-L. Debré : - "Oui, c'est une responsabilité importante et cette responsabilité nous impose une attitude. Et cette attitude est à la fois marquée par le sérieux mais aussi par la modestie. Car, comme vous venez de le dire, qui, il y a six mois ou un an, aurait pu prévoir ce qui s'est passé ? C'est cela le suffrage universel. Mais forts de cette légitimité, nous devons avoir un comportement à l'Assemblée nationale qui soit empreint de tolérance, de détermination à agir, car nous avons pris un engagement devant les électeurs : c'est de faire en sorte que les promesses électorales de J. Chirac soient respectées et [le] soient rapidement par le gouvernement Raffarin. Par conséquent, nous devons soutenir ce gouvernement et être vigilants dans la tenue de ces promesses."
L'UMP, c'est 367 élus. D'origine RPR : 227 ; d'origine UDF : 85 ; d'origine DL : 60. C'est-à-dire que l'UDF et DL font à peine la moitié du RPR. Cela veut dire aussi que cette nouvelle création, l'UMP, a tout submergé et dynamisé...
J.-L. Debré : - "Ce qui m'intéresse, c'est l'avenir. Ce n'est pas de regarder le passé, de savoir qu'où viennent untel et untel. Ce qui m'importe, c'est de construire l'avenir avec l'ensemble de la majorité UMP."
Dans moins de deux heures, J.-P. Raffarin va remettre, selon l'usage, sa démission au président de la République, qui le chargera de nommer le gouvernement Raffarin n°2. Est-ce que vous avez envie d'en faire partie ou est-ce que ce qui vous tente, c'est par exemple de présider le groupe UMP, puisque monsieur Barrot pourrait aller au ministère de l'Industrie... Qu'est-ce qui vous tente ?
J.-L. Debré : - "C'est de servir cette majorité et les électrices et les électeurs de l'Eure, le mieux possible."
Où ?
J.-L. Debré : - "Là où je serai le meilleur."
On vous dit en campagne pour la présidence de l'Assemblée nationale. Et le président de l'Assemblée nationale, c'est le quatrième personnage de l'Etat...
J.-L. Debré : - "Vous avez remarqué que tant que les élections n'étaient pas terminées, je n'ai jamais parlé de cela, puisque je considère qu'il fallait s'engager derrière les candidats. Maintenant, c'est fait et vous voulez savoir quels sont mes souhaits. Je souhaite et je vais faire acte de candidature à la présidence de l'Assemblée nationale. J'ai écrit ce matin à chaque député de l'UMP pour leur dire quelles sont les raisons et la finalité politique de ma candidature à l'Assemblée nationale, à la présidence."
Vous ne vouliez pas de l'UMP, vous défendiez feu le RPR. Vous avez changé...
J.-L. Debré : - "Ce n'est pas exact, puisque depuis cinq ans, je suis président du groupe RPR, j'ai défendu ce groupe et tout le monde reconnaît qu'il a bien fonctionné. Je suis avec Douste-Blazy et avec J.-F. Mattei, le responsable des ateliers de l'alternance qui ont permis à cette opposition, au départ, de retrouver ses structures et de réfléchir ensemble. Je suis pour l'unité et pour le rassemblement derrière J. Chirac et derrière J.-P. Raffarin. L'UMP existe, il faut qu'elle soit consolidée, mais le rôle du président de l'Assemblée nationale, c'est à la fois vis-à-vis de la majorité mais aussi vis-à-vis de l'opposition."
Vous avez écrit aux nouveaux députés. Apparemment, E. Balladur en fait autant, puisqu'il a confirmé dès l'aube et dans Le Figaro sa candidature déterminée pour le Perchoir. Vous êtes deux...
J.-L. Debré : - "Oui, très bien, et il y aura des primaires au sein de l'UMP pour déterminer quel est le candidat. N'attendez de moi aucune critique à l'égard d'un autre concurrent, je préfère vous le dire."
Je constate que pour la première fois, vous dites que vous êtes candidat à la présidence de l'Assemblée nationale...
J.-L. Debré : - "Oui, parce que j'ai voulu, moi, attendre que les élections soient terminées."
L'élection se fera à partir de primaires le 25. Est-ce que vous dites que votre victoire serait aussi celle du président de la République ?
J.-L. Debré : - "Non. Je veux être un élément important pour faire fonctionner l'Assemblée nationale. On est revenus aujourd'hui aux fondements mêmes de la Vème République, où il y avait une concordance entre la majorité parlementaire et la majorité présidentielle. Et nous avons reçu un message des Français : "Faites en sorte d'être cohérents. On vous a soutenus pour donner une majorité à J. Chirac et au Gouvernement. Faites en sorte que cette majorité puisse durer". Enfin, deuxième message des Français : "Il y a une opposition. Nous sommes un pays démocratique et il faut que l'Assemblée nationale soit le siège où cette opposition puisse s'exprimer."
Quelles recommandations, quelles suggestions, faites-vous à la nouvelle minorité que représente F. Hollande ?
J.-L. Debré : - "Je n'ai jamais donné de conseils à qui que ce soit. Ce n'est pas ma nature. Je souhaite qu'avec le Parti socialiste, au sein de l'Assemblée nationale, nous puissions travailler pour que les Français sachent quels sont les projets des uns, quelles sont les propositions des autres et qu'il y ait un débat serein et démocratique. Ce qu'il faut probablement, c'est modifier un peu les règles de fonctionnement de l'Assemblée nationale pour que l'opposition se fasse entendre. Pourquoi ? Parce que l'ampleur de la victoire de la droite ne doit pas nous inciter à mépriser l'opposition, mais au contraire, à lui donner une place, probablement supérieure à son nombre, pour qu'elle puisse être entendue."
C'est bon d'être candidat, parce qu'il y a une musique qui, peut-être, change...
J.-L. Debré : - "Ce n'est pas la musique qui change ! Ce sont les réflexes des vieux parlementaires ou des parlementaires qui croient au rôle du Parlement."
L'Elysée ne vous a pas dissuadé d'y aller ?
J.-L. Debré : - "Ne me demandez pas qui m'a dissuadé ou qui m'a incité à y aller. C'est une décision personnelle, une réflexion personnelle. Je suis un parlementaire. J'ai été réélu pour la cinquième fois, j'ai présidé un groupe. Et je n'ai besoin de personne."
F. Hollande, quelles suggestions faites-vous à J.-L Debré qui est maintenant le symbole de 370, 400 députés d'une majorité nouvelle et forte ?
F. Hollande : - "Je n'ai pas de conseils à donner. Nous avons perdu les élections. Nous ne sommes pas en position d'agir ou même de donner des pistes de réflexion à la majorité. Mais, je peux leur dire: "Méfiez-vous de votre nombre !" Faites attention à ce résultat qui est lui-même paradoxal ! Vous n'avez fait que 19.5 % des voix à l'élection présidentielle au premier tour, il y a 40 % d'abstention aux législatives de ce second tour. Et il faut que les Français ne soient pas déçus, ne soient pas blessés, et reprennent confiance dans la politique. Nous y contribuerons à notre place, c'est le devoir de la gauche, parce qu'elle est dans l'opposition, parce qu'elle est la gauche et parce qu'elle doit incarner l'avenir. Mais je pense que ce qui peut faire finalement le plus de mal, c'est qu'une droite qui se croit forte devienne ce qu'elle a été dans le passé, c'est-à-dire hégémonique, autoritaire et quelquefois oublieuse même de ses engagements."
Soyez fair-play ce matin, parce qu'ils ont gagné...
F. Hollande : - "Je le suis."
Ce matin, F. Hollande vous avez le choix : reprendre le flambeau et reconstruire, vous battre, etc... ou démissionner de la tête du PS. Qu'est-ce que vous faites ?
F. Hollande : - "Je ne me suis pas posé cette question, je dois le dire. Mais, vous pouvez m'y inciter. J'ai repris le Parti socialiste après une terrible épreuve : le premier tour de l'élection présidentielle. J'en étais le Premier secrétaire, mais il a fallu que je conduise, avec d'autres, la campagne. Nous essuyons une défaite qui est, à mon avis, honorable, parce qu'elle est en logique avec le résultat du premier tour. Elle est néanmoins sévère compte tenu de l'amplification que procure le mode de scrutin majoritaire et elle doit nous conduire à une réflexion intense. Et ce que je veux ici vous dire, c'est que nous avons sans doute cinq ans - cela pourra paraître beaucoup - pour nous reconstruire..."
Le temps passe plus lentement, généralement, dans l'opposition qu'au Gouvernement...
F. Hollande : - "Il ne faut pas en perdre, jamais, de temps. Le temps est la matière première de la vie et donc il faudra que le Parti socialiste - la gauche toute entière - fasse dans les prochains mois, l'effort nécessaire pour revenir sur les causes mêmes de ce qui s'est produit, sur ce qu'est la société française, ce qu'elle attend, sur sa rupture avec la politique - j'évoquais 40 % d'abstention -, et sur ses attentes à l'égard de ceux qui ont vocation à la représenter."
J. Lang dit qu'il faut une métamorphose du Parti socialiste.
F. Hollande : - "Je crois qu'il faut toujours renaître de ses cendres et J. Lang est un phénix qui est à nul autre pareil !"
Qu'est-ce que vous pensez de ce qui est arrivé à J.-P Chevènement ? Et, au passage, dans la bataille, vous avez perdu une centaine de soldats et d'officiers gradés et titrés : Forni, M. Aubry, Moscovici, C. Tasca... Cela a à la fois du sens et cela fait quelque chose, je suppose.
F. Hollande : - "Alors, d'abord, sur tous ceux qui ont perdu - et ils sont nombreux, puisque nous avons perdu plus de 140 sièges -, il y a des talents qui doivent être absolument utilisés. On peut faire de la politique sans être à l'Assemblée nationale - beaucoup sont maires ou élus locaux - et je souhaite vraiment les associer à ce travail de construction du Parti socialiste. Par ailleurs, sur J.-P. Chevènement, je crois que la leçon est très simple : c'est que lorsqu'on s'échappe de son camp, de sa famille, il est très difficile ensuite, d'obtenir le rassemblement. J'en suis à la fois peiné parce que cela a eu des conséquences dans toute la région Franche-Comté - pas simplement pour J.-P. Chevènement -, mais j'en suis aussi affligé pour J.-P. Chevènement avec lequel j'ai des liens d'amitié, même si j'ai de grands reproches à lui faire, notamment par rapport non pas à sa candidature, il avait le droit, mais par rapport à son discours dans la campagne présidentielle. Quand on renvoie gauche et droite, il est normal que la gauche ne soit pas là pour venir à votre secours."
La majorité à gauche à Paris : 12 députés sur 21, c'est quoi ? C'est une exception française ?
F. Hollande : - "D'abord, c'est un très beau succès, c'est vrai. Après, il y a une municipale qui pouvait être un acte de circonstance, compte tenu de ce qu'était la droite à Paris. Il y a eu, avec B. Delanoë, un [travail] considérable qui a été mené depuis un an et qui est récompensé. Et c'est vrai qu'à Paris, non seulement nous maintenons notre influence, mais nous gagnons davantage de sièges, notamment avec une alliance avec les Verts qui a été parfaitement efficace à Paris."
La nouvelle majorité, disait la gauche, va "passer du virtuel au réel". Et vous, vous allez passer du réel au virtuel ?
F. Hollande : - "Non, on est tous dans la réalité, à nos places respectives. La droite parce qu'elle est majoritaire, va gouverner. Elle a désormais tous les pouvoirs, elle aura toutes les responsabilités, c'est la loi de la démocratie. Et l'opposition n'est pas là pour attendre l'échec de la majorité. Elle est là pour proposer, réfléchir, fournir une alternative au pays..."
D'autant plus que J.-P. Raffarin a plu. Il a plu aux Français...
F. Hollande : - "Maintenant, il va peut-être connaître une autre pluie, la pluie des responsabilités."
J.-L. Debré : - "Il n'a jamais fuit la pluie des responsabilités !"
F. Hollande : - "Nous le verrons bien."
Non, pas de débat ! F. Hollande, comment allez-vous choisir votre président de groupe demain ?
F. Hollande : - "Démocratiquement."
C'est-à-dire ?
F. Hollande : - "On va d'abord en discuter, on va y réfléchir..."
Vous faites des primaires ou pas ?
F. Hollande : - "Nous n'en sommes pas là et nous essaierons de trouver la meilleure solution pour les socialistes. Mais c'est vrai que nous n'avons pas beaucoup de place à nous partager - et heureusement. Finalement, je ne m'en plains pas."
(Source :premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 18 juin 2002)
J.-L. Debré : - "Oui, c'est une responsabilité importante et cette responsabilité nous impose une attitude. Et cette attitude est à la fois marquée par le sérieux mais aussi par la modestie. Car, comme vous venez de le dire, qui, il y a six mois ou un an, aurait pu prévoir ce qui s'est passé ? C'est cela le suffrage universel. Mais forts de cette légitimité, nous devons avoir un comportement à l'Assemblée nationale qui soit empreint de tolérance, de détermination à agir, car nous avons pris un engagement devant les électeurs : c'est de faire en sorte que les promesses électorales de J. Chirac soient respectées et [le] soient rapidement par le gouvernement Raffarin. Par conséquent, nous devons soutenir ce gouvernement et être vigilants dans la tenue de ces promesses."
L'UMP, c'est 367 élus. D'origine RPR : 227 ; d'origine UDF : 85 ; d'origine DL : 60. C'est-à-dire que l'UDF et DL font à peine la moitié du RPR. Cela veut dire aussi que cette nouvelle création, l'UMP, a tout submergé et dynamisé...
J.-L. Debré : - "Ce qui m'intéresse, c'est l'avenir. Ce n'est pas de regarder le passé, de savoir qu'où viennent untel et untel. Ce qui m'importe, c'est de construire l'avenir avec l'ensemble de la majorité UMP."
Dans moins de deux heures, J.-P. Raffarin va remettre, selon l'usage, sa démission au président de la République, qui le chargera de nommer le gouvernement Raffarin n°2. Est-ce que vous avez envie d'en faire partie ou est-ce que ce qui vous tente, c'est par exemple de présider le groupe UMP, puisque monsieur Barrot pourrait aller au ministère de l'Industrie... Qu'est-ce qui vous tente ?
J.-L. Debré : - "C'est de servir cette majorité et les électrices et les électeurs de l'Eure, le mieux possible."
Où ?
J.-L. Debré : - "Là où je serai le meilleur."
On vous dit en campagne pour la présidence de l'Assemblée nationale. Et le président de l'Assemblée nationale, c'est le quatrième personnage de l'Etat...
J.-L. Debré : - "Vous avez remarqué que tant que les élections n'étaient pas terminées, je n'ai jamais parlé de cela, puisque je considère qu'il fallait s'engager derrière les candidats. Maintenant, c'est fait et vous voulez savoir quels sont mes souhaits. Je souhaite et je vais faire acte de candidature à la présidence de l'Assemblée nationale. J'ai écrit ce matin à chaque député de l'UMP pour leur dire quelles sont les raisons et la finalité politique de ma candidature à l'Assemblée nationale, à la présidence."
Vous ne vouliez pas de l'UMP, vous défendiez feu le RPR. Vous avez changé...
J.-L. Debré : - "Ce n'est pas exact, puisque depuis cinq ans, je suis président du groupe RPR, j'ai défendu ce groupe et tout le monde reconnaît qu'il a bien fonctionné. Je suis avec Douste-Blazy et avec J.-F. Mattei, le responsable des ateliers de l'alternance qui ont permis à cette opposition, au départ, de retrouver ses structures et de réfléchir ensemble. Je suis pour l'unité et pour le rassemblement derrière J. Chirac et derrière J.-P. Raffarin. L'UMP existe, il faut qu'elle soit consolidée, mais le rôle du président de l'Assemblée nationale, c'est à la fois vis-à-vis de la majorité mais aussi vis-à-vis de l'opposition."
Vous avez écrit aux nouveaux députés. Apparemment, E. Balladur en fait autant, puisqu'il a confirmé dès l'aube et dans Le Figaro sa candidature déterminée pour le Perchoir. Vous êtes deux...
J.-L. Debré : - "Oui, très bien, et il y aura des primaires au sein de l'UMP pour déterminer quel est le candidat. N'attendez de moi aucune critique à l'égard d'un autre concurrent, je préfère vous le dire."
Je constate que pour la première fois, vous dites que vous êtes candidat à la présidence de l'Assemblée nationale...
J.-L. Debré : - "Oui, parce que j'ai voulu, moi, attendre que les élections soient terminées."
L'élection se fera à partir de primaires le 25. Est-ce que vous dites que votre victoire serait aussi celle du président de la République ?
J.-L. Debré : - "Non. Je veux être un élément important pour faire fonctionner l'Assemblée nationale. On est revenus aujourd'hui aux fondements mêmes de la Vème République, où il y avait une concordance entre la majorité parlementaire et la majorité présidentielle. Et nous avons reçu un message des Français : "Faites en sorte d'être cohérents. On vous a soutenus pour donner une majorité à J. Chirac et au Gouvernement. Faites en sorte que cette majorité puisse durer". Enfin, deuxième message des Français : "Il y a une opposition. Nous sommes un pays démocratique et il faut que l'Assemblée nationale soit le siège où cette opposition puisse s'exprimer."
Quelles recommandations, quelles suggestions, faites-vous à la nouvelle minorité que représente F. Hollande ?
J.-L. Debré : - "Je n'ai jamais donné de conseils à qui que ce soit. Ce n'est pas ma nature. Je souhaite qu'avec le Parti socialiste, au sein de l'Assemblée nationale, nous puissions travailler pour que les Français sachent quels sont les projets des uns, quelles sont les propositions des autres et qu'il y ait un débat serein et démocratique. Ce qu'il faut probablement, c'est modifier un peu les règles de fonctionnement de l'Assemblée nationale pour que l'opposition se fasse entendre. Pourquoi ? Parce que l'ampleur de la victoire de la droite ne doit pas nous inciter à mépriser l'opposition, mais au contraire, à lui donner une place, probablement supérieure à son nombre, pour qu'elle puisse être entendue."
C'est bon d'être candidat, parce qu'il y a une musique qui, peut-être, change...
J.-L. Debré : - "Ce n'est pas la musique qui change ! Ce sont les réflexes des vieux parlementaires ou des parlementaires qui croient au rôle du Parlement."
L'Elysée ne vous a pas dissuadé d'y aller ?
J.-L. Debré : - "Ne me demandez pas qui m'a dissuadé ou qui m'a incité à y aller. C'est une décision personnelle, une réflexion personnelle. Je suis un parlementaire. J'ai été réélu pour la cinquième fois, j'ai présidé un groupe. Et je n'ai besoin de personne."
F. Hollande, quelles suggestions faites-vous à J.-L Debré qui est maintenant le symbole de 370, 400 députés d'une majorité nouvelle et forte ?
F. Hollande : - "Je n'ai pas de conseils à donner. Nous avons perdu les élections. Nous ne sommes pas en position d'agir ou même de donner des pistes de réflexion à la majorité. Mais, je peux leur dire: "Méfiez-vous de votre nombre !" Faites attention à ce résultat qui est lui-même paradoxal ! Vous n'avez fait que 19.5 % des voix à l'élection présidentielle au premier tour, il y a 40 % d'abstention aux législatives de ce second tour. Et il faut que les Français ne soient pas déçus, ne soient pas blessés, et reprennent confiance dans la politique. Nous y contribuerons à notre place, c'est le devoir de la gauche, parce qu'elle est dans l'opposition, parce qu'elle est la gauche et parce qu'elle doit incarner l'avenir. Mais je pense que ce qui peut faire finalement le plus de mal, c'est qu'une droite qui se croit forte devienne ce qu'elle a été dans le passé, c'est-à-dire hégémonique, autoritaire et quelquefois oublieuse même de ses engagements."
Soyez fair-play ce matin, parce qu'ils ont gagné...
F. Hollande : - "Je le suis."
Ce matin, F. Hollande vous avez le choix : reprendre le flambeau et reconstruire, vous battre, etc... ou démissionner de la tête du PS. Qu'est-ce que vous faites ?
F. Hollande : - "Je ne me suis pas posé cette question, je dois le dire. Mais, vous pouvez m'y inciter. J'ai repris le Parti socialiste après une terrible épreuve : le premier tour de l'élection présidentielle. J'en étais le Premier secrétaire, mais il a fallu que je conduise, avec d'autres, la campagne. Nous essuyons une défaite qui est, à mon avis, honorable, parce qu'elle est en logique avec le résultat du premier tour. Elle est néanmoins sévère compte tenu de l'amplification que procure le mode de scrutin majoritaire et elle doit nous conduire à une réflexion intense. Et ce que je veux ici vous dire, c'est que nous avons sans doute cinq ans - cela pourra paraître beaucoup - pour nous reconstruire..."
Le temps passe plus lentement, généralement, dans l'opposition qu'au Gouvernement...
F. Hollande : - "Il ne faut pas en perdre, jamais, de temps. Le temps est la matière première de la vie et donc il faudra que le Parti socialiste - la gauche toute entière - fasse dans les prochains mois, l'effort nécessaire pour revenir sur les causes mêmes de ce qui s'est produit, sur ce qu'est la société française, ce qu'elle attend, sur sa rupture avec la politique - j'évoquais 40 % d'abstention -, et sur ses attentes à l'égard de ceux qui ont vocation à la représenter."
J. Lang dit qu'il faut une métamorphose du Parti socialiste.
F. Hollande : - "Je crois qu'il faut toujours renaître de ses cendres et J. Lang est un phénix qui est à nul autre pareil !"
Qu'est-ce que vous pensez de ce qui est arrivé à J.-P Chevènement ? Et, au passage, dans la bataille, vous avez perdu une centaine de soldats et d'officiers gradés et titrés : Forni, M. Aubry, Moscovici, C. Tasca... Cela a à la fois du sens et cela fait quelque chose, je suppose.
F. Hollande : - "Alors, d'abord, sur tous ceux qui ont perdu - et ils sont nombreux, puisque nous avons perdu plus de 140 sièges -, il y a des talents qui doivent être absolument utilisés. On peut faire de la politique sans être à l'Assemblée nationale - beaucoup sont maires ou élus locaux - et je souhaite vraiment les associer à ce travail de construction du Parti socialiste. Par ailleurs, sur J.-P. Chevènement, je crois que la leçon est très simple : c'est que lorsqu'on s'échappe de son camp, de sa famille, il est très difficile ensuite, d'obtenir le rassemblement. J'en suis à la fois peiné parce que cela a eu des conséquences dans toute la région Franche-Comté - pas simplement pour J.-P. Chevènement -, mais j'en suis aussi affligé pour J.-P. Chevènement avec lequel j'ai des liens d'amitié, même si j'ai de grands reproches à lui faire, notamment par rapport non pas à sa candidature, il avait le droit, mais par rapport à son discours dans la campagne présidentielle. Quand on renvoie gauche et droite, il est normal que la gauche ne soit pas là pour venir à votre secours."
La majorité à gauche à Paris : 12 députés sur 21, c'est quoi ? C'est une exception française ?
F. Hollande : - "D'abord, c'est un très beau succès, c'est vrai. Après, il y a une municipale qui pouvait être un acte de circonstance, compte tenu de ce qu'était la droite à Paris. Il y a eu, avec B. Delanoë, un [travail] considérable qui a été mené depuis un an et qui est récompensé. Et c'est vrai qu'à Paris, non seulement nous maintenons notre influence, mais nous gagnons davantage de sièges, notamment avec une alliance avec les Verts qui a été parfaitement efficace à Paris."
La nouvelle majorité, disait la gauche, va "passer du virtuel au réel". Et vous, vous allez passer du réel au virtuel ?
F. Hollande : - "Non, on est tous dans la réalité, à nos places respectives. La droite parce qu'elle est majoritaire, va gouverner. Elle a désormais tous les pouvoirs, elle aura toutes les responsabilités, c'est la loi de la démocratie. Et l'opposition n'est pas là pour attendre l'échec de la majorité. Elle est là pour proposer, réfléchir, fournir une alternative au pays..."
D'autant plus que J.-P. Raffarin a plu. Il a plu aux Français...
F. Hollande : - "Maintenant, il va peut-être connaître une autre pluie, la pluie des responsabilités."
J.-L. Debré : - "Il n'a jamais fuit la pluie des responsabilités !"
F. Hollande : - "Nous le verrons bien."
Non, pas de débat ! F. Hollande, comment allez-vous choisir votre président de groupe demain ?
F. Hollande : - "Démocratiquement."
C'est-à-dire ?
F. Hollande : - "On va d'abord en discuter, on va y réfléchir..."
Vous faites des primaires ou pas ?
F. Hollande : - "Nous n'en sommes pas là et nous essaierons de trouver la meilleure solution pour les socialistes. Mais c'est vrai que nous n'avons pas beaucoup de place à nous partager - et heureusement. Finalement, je ne m'en plains pas."
(Source :premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 18 juin 2002)