Texte intégral
C'est pour moi un grand honneur et une joie de m'associer, avec vous tous, au lancement de la Fête de la Science en Rhône-Alpes.
J'ai déjà pu mesurer, il y a peu, lors de ma présence à Grenoble à l'occasion des 13èmes Rencontres régionales de la Recherche, l'extraordinaire vitalité de la recherche rhônalpine.
Je me réjouis de l'occasion qui m'est donnée, en ce jour d'ouverture de la Fête de la science, de partager avec vous le sens que je souhaite voir porté par cette manifestation dans le cadre plus large de la diffusion de la culture scientifique.
La Fête de la Science constitue depuis 11 ans une occasion unique de rencontres et d'échanges sur un mode à la fois studieux et joyeux entre la communauté scientifique et le grand public. Moment privilégié de découvertes en tous genres, source de vocations, lieu de partage, c'est aussi le dispositif phare d'une mission d'envergure, la diffusion et l'appropriation par l'ensemble de la société d'une authentique culture scientifique.
Les objectifs de la Fête de la Science sont maintenant bien connus :
Permettre la diffusion auprès du grand public d'une information fiable sur la science et ses développements technologiques en faisant parler les chercheurs eux-mêmes de leur travail et de leurs découvertes ; la relation est ici évidemment à double sens : elle met en jeu d'un côté le goût de la transmission chez les chercheurs, goût qu'il me semble important de soutenir, d'évaluer et de reconnaître et, de l'autre, la curiosité du grand public et en particulier des plus jeunes ;
Susciter chez les jeunes des vocations pour les carrières scientifiques, éveiller en eux l'esprit d'entreprendre, diffuser une culture de l'innovation et de la créativité.
Depuis un siècle, un fossé nouveau s'est créé entre des champs de la culture précédemment contigus, entre la philosophie et les sciences, entre l'esthétique et l'astrophysique, entre les lettres et les maths, entre les sciences de la vie et les arts. Cette dichotomie est à mes yeux une des causes que l'on peut identifier au déclin du goût pour les sciences. La frontière entre esprit de finesse et esprit de géométrie est le fruit d'une construction culturelle et sociale ; à ce titre, elle n'est pas définitive. Et c'est en la confirmant que l'on risque de priver les sciences de leur culture et d'affaiblir les arts et les lettres en les séparant de leurs fondements rationnels.
Ne minimisons pas le goût de l'effort, de la difficulté, de la nouveauté et le sens inné de la prise de risque. Les jeunes sont avides de sensations fortes, parfois jusqu'à l'excès et en dehors des salles de classes. Pourquoi ne pas leur faire percevoir que ces sensations fortes existent aussi dans des sujets qui leur apparaissent lointains au premier abord en leur faisant rencontrer des chercheurs et inventeurs passionnés ? Pourquoi ne pas chercher à réconcilier science et création, à montrer que l'inventivité s'exprime autant dans les sciences que dans les arts, que la prise de risque n'est pas moins présente dans les métiers scientifiques que dans les métiers financiers ? Redonnons aux jeunes conscience, comme vous le faites ici au travers des manifestations que vous organisez, qu'avec une formation d'ingénieur on peut se mettre au service de l'innovation, de la créativité.
Les jeunes sont avides d'identification dans une période où leur identité se construit. Ils aiment les icônes, les modèles. Il s'agit alors de mettre sur le devant de la scène ces héros de la science et de rendre les jeunes fiers des succès scientifiques comme ils sont fiers des exploits sportifs.
J'aimerais également évoquer avec vous un sujet qui me tient à coeur. Il me semble important, à l'heure où la science et ses développements technologiques est l'objet d'un curieux mélange de fascination et de soupçon, à l'heure où les découvertes scientifiques et les progrès technologiques suscitent autant d'interrogations qu'ils offrent de réponses, d'articuler étroitement enjeux éthiques et scientifiques. C'est ce que j'appelle favoriser, à côté de la culture de la science, l'émergence d'un sens de la science.
Bien évidemment, la dimension régionale de cette manifestation me tient tout particulièrement à coeur. Elle offre la possibilité, dans le domaine de la diffusion de la culture scientifique, d'un partage d'expériences fécond et permet de réaliser ces expérimentations régionales appelées, selon le voeu du Premier Ministre, à jouer un rôle déterminant dans le franchissement d'une nouvelle étape de la décentralisation.
La particularité d'une manifestation comme la Fête de la Science est, en effet, de permettre à l'ensemble des acteurs territoriaux d'inscrire dans leurs agendas et leurs financements la culture scientifique et de favoriser durablement sa diffusion. De telles initiatives, lorsqu'elles sont relayées avec cet élan et cette qualité témoignent à l'échelle nationale de ce que peut apporter à l'ensemble de la société la mobilisation conjointe de l'ensemble des acteurs. C'est ainsi que nous pourrons oeuvrer à rapprocher la science des citoyens, à proposer aux jeunes et aux moins jeunes un socle commun de culture scientifique qui leur permette de s'approprier les grands enjeux contemporains de nos sociétés, qu'il s'agisse des débats éthiques ou de la perspective du développement durable. A ce titre, l'exposition que nous nous apprêtons à visiter est tout à fait exemplaire : le thème choisi par les organisateurs : " Biodiversité au coeur de l'humanité " ne nous inscrit-il pas justement au coeur de cette problématique de la transmission aux générations futures d'un trésor qu'il s'agit non seulement de mieux connaître, mais aussi de mieux préserver ?
Je me réjouis donc profondément que cette thématique, prioritaire à mes yeux, ait pu être retenue et je félicite chaleureusement les organisateurs et acteurs territoriaux pour cette initiative que je tiens ici à saluer. Nous sommes rassemblés cet après-midi en un lieu qui ressemble fort au poumon de Lyon : ce parc de la Tête d'Or représente pour les habitants de Lyon un lieu-symbole, puisqu'il est à la fois le grand espace vert qui procure aux Lyonnais la respiration nécessaire, un lieu de jeux et de loisirs pour les enfants et les adolescents, un jardin botanique et un parc zoologique réputé ce qui fait que ce Parc de la Tête d'Or est aussi un lieu tourné vers la science.
La région lyonnaise est un des acteurs majeurs de la Fête de la Science à l'échelle régionale, comme en témoigne la diversité des festivités qui y sont proposées pendant cette semaine ; bien plus, Lyon et sa région constituent des forces de proposition : Le modèle fructueux des cafés des sciences y a été adapté avec succès aux élèves du secondaire. Des cafétérias de lycées deviennent ainsi des lieux de discussion des grands problèmes scientifiques. Lancée de manière expérimentale en Rhône-Alpes en 1999, la formule a connu un succès croissant grâce au soutien du ministère et de la région. Pendant la saison 2002-2003, 17 cafés seront ainsi impliqués sur des thèmes variés. Le dialogue informel et convivial avec les chercheurs tout comme le suivi pédagogique permettent de rapprocher utilement les jeunes du monde de la recherche scientifique. C'est à mes yeux le préalable à une démarche citoyenne bien comprise. Une telle initiative mérite sans conteste un essaimage national dont les modalités sont actuellement en cours d'étude, en concertation avec les différents acteurs concernés.
De même, l'initiative Ebulliscience, salle de découvertes scientifiques installée à Vaulx-en Velin, a acquis un rayonnement qui dépasse les frontières lyonnaises. Les expériences proposées aux familles, aux jeunes et aux enfants permettent, avec l'aide des animateurs scientifiques, d'associations de bénévoles, de retraités soucieux de transmettre leur passion aux plus jeunes, avec l'appui scientifique du CNRS, de l'Université ou de membres de l'Académie des Sciences ou encore du prix Nobel Robert Charpak. Servant la diffusion de la culture scientifique auprès des jeunes, dans une perspective qui transcende l'écart entre les générations, cette belle initiative, présente tout au long de l'année à Vaulx-en-Velin mérite qu'on la salue.
Je souhaite également que cette édition nous permette de préparer celle de l'année prochaine que j'aimerais voir plus ouverte encore à une dimension européenne qui me semble, aujourd'hui plus que jamais, primordiale. Vous savez que la France a été investie de la responsabilité de conduire les actions relatives aux semaines de la science européenne du plan d'action " Science et Société " du 6ème PCRD. Je souhaite partager avec vous le sentiment que la construction de l'espace européen de la recherche, à travers notamment l'harmonisation des politiques nationales de promotion de la culture scientifique, constitue pour tous, et particulièrement pour les plus jeunes, une chance inouïe qu'il nous faut saisir avec audace. Je salue à cet égard les initiatives qui seront menées dès cette année en coopération avec les pays frontaliers, en particulier dans la région Rhône-Alpes.
J'aimerais pour conclure et puisque cette Fête de la Science voit fleurir emblèmes et devises partager avec vous une devise qui me paraît particulièrement appropriée : il s'agit de l'appel lancé par Kant à l'époque des Lumières: " Ose savoir ! "
Madame la Présidente,
Monsieur le Président,
Monsieur le Maire,
Messieurs les députés,
Mesdames, Messieurs,
Voici les quelques réflexions que je souhaitais partager avec vous à l'occasion de cette visite. Je vous renouvelle mes félicitations pour le dynamisme qui est le vôtre et j'adresse à l'ensemble des acteurs tous mes voeux de succès pour la fête de la science en région Rhône-Alpes.
Je vous remercie de votre attention.
(Source http://www.recherche.gouv.fr, le 16 octobre 2002)