Communiqué commun de la présidence de la République et des services du Premier ministre, en date du 11 janvier 1994, sur la dévaluation du franc CFA et du franc comorien.

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Circonstance : Annonce d'une dévaluation de 50 % du franc CFA et de 25 % du franc comorien à compter du 12 janvier 1994, à l'issue d'un sommet des 14 Etats africains de la zone franc à Dakar les 10 et 11 janvier

Texte intégral

Les chefs d'Etat et de gouvernement des pays africains membres de la zone franc ont décidé de modifier la parité des francs CFA et celle du franc comorien par rapport au franc français. La France a donné son accord à cette décision qui vise à rétablir les conditions d'une croissance économique durable en permettant la reprise des financements internationaux. Cette décision consolidera les efforts de redressement dans lesquels se sont déjà engagés beaucoup de pays de la zone franc.
- Au premier rang de la communauté financière internationale, la France ne manquera pas de marquer sa solidarité avec ses partenaires. A cet effet, elle suivra avec attention et participera à la mise en oeuvre des mesures d'accompagnement nécessaires, particulièrement celles destinées à soutenir les populations les plus défavorisées.
- La France accentuera, pour sa part, son effort en faveur du développement économique et social. Des mesures nouvelles d'annulation et d'allégement de la dette ont également été décidées dans la continuité de l'action menée par le président de la République, M. François Mitterrand, dans ce domaine. Ces différentes mesures témoignent de l'attachement résolu et tangible de la France à la zone franc et aux liens privilégiés qu'elle entretient avec ses partenaires.|N|N|N|N|Texte Intégral15216|QUELLES QUE SOIENT LES JUSTIFICATIONS DES DECISIONS ENTRINEES PAR L'AUGMENTATION DU PRIX DU PETROLE, LE GOUVERNEMENT DOIT ETRE CONSCIENT DU PROFOND IMPACT QU'ELLES VONT AVOIR SUR L'OPINION PUBLIQUE, QUI DOIT SUPPORTER DANS LES REALITES DE SA VIE DE TOUS LES JOURS LES CONSEQUENCES D'EVENEMENTS SUR LESQUELS ELLE SE SENT SANS POUVOIR.
- C'EST POURQUOI UN INTENSE EFFORT D'EXPLICATION, ET DE JUSTES COMPENSATIONS SOCIALES SONT NECESSAIRES.
- LE GOUVERNEMENT DOIT MONTRER QU'IL A RAISON, NON CONTRE LES FRANCAIS, MAIS AVEC LES FRANCAIS.|N|N|N|N|Texte Intégral 15217|Sire,
Messieurs les Chefs d'Etat et de Gouvernement,
Chers Amis,
Je suis heureux de vous accueillir pour cette réunion de Chefs d'Etat et de Gouvernement ayant le français en partage. Organisée alors que la communauté internationale cherche les voies du développement durable, elle confirme que la francophonie est tournée vers l'action et vers l'avenir.
Si nous savons démontrer un engagement pionnier, nous formerons une communauté écoutée dans le monde. De même que la ratification rapide par nos pays du traité instituant la Cour Pénale Internationale a accéléré son entrée en vigueur, de même, notre détermination à faire vivre les Principes de Rio nous vaudra d'être respectés. C'est ainsi que, dans un monde menacé d'uniformisation, nous affirmerons la valeur de la diversité, par l'exemple plutôt que sur un mode défensif.
Les francophones ne sont pas, par nature, plus vertueux que les autres, mais nous avons, ensemble, plusieurs atouts dans cette bataille.
Nous formons une communauté où sont représentés tous les continents, la plupart des grands espaces culturels mondiaux et tous les niveaux de développement. Pourtant, notre nombre et notre langue commune nous permettent de travailler ensemble, de former une sorte d'échantillon représentatif du monde contemporain. Utilisons cette caractéristique pour nous porter volontaires sur des projets pilotes, pour investir ensemble les lieux où se prépare l'avenir.
Deuxième atout, notre diversité. Mettons-là à profit pour faire vivre un authentique dialogue des cultures. Car c'est de la confrontation de nos réponses aux interrogations fondamentales sur l'Homme et sur sa place dans le monde que nous trouverons les solutions aux impasses actuelles. Je souhaite que nous réfléchissions à Beyrouth, pendant notre Sommet, aux moyens de faire mieux vivre le dialogue entre nos cultures. Sous l'impulsion de notre Secrétaire Général, à qui je rends un amical et chaleureux hommage, nous avons posé les jalons d'un tel dialogue. Reste à lui donner corps.
Enfin, notre langue commune est porteuse de valeurs particulièrement nécessaires pour aborder le défi du développement durable. De quoi s'agit-il en effet ?
Il s'agit de faire en sorte que l'économie soit soumise à une loi supérieure imposant le respect de l'Homme, de l'homme d'aujourd'hui et de l'homme de demain, et donc de la nature. C'est l'éthique : une notion au coeur de l'humanisme dont les francophones se veulent porteurs.
Il s'agit ensuite de faire en sorte que la richesse du monde soit mieux répartie. C'est la solidarité : un mot-clé en français.
Je voudrais vous rappeler, à vous qui êtes des amis, des partenaires privilégiés, les décisions prises par la France dans cet esprit.
Dans le domaine du commerce, nous avons fixé à Doha des orientations qui vont permettre aux pays en développement de mieux accéder aux marchés : démantèlement de toutes les protections contre les productions en provenance des pays les moins avancés ; programmes d'assistance technique pour aider les nouveaux exportateurs à accéder aux marchés ; engagement général à lancer une négociation sur la réduction des subventions à l'exportation ; volonté aussi de supprimer les entraves à l'accès des pays pauvres à des médicaments à bas prix. La France et l'Union européenne sont déterminées à se battre pour que ces engagements soient respectés.
Pour l'aide publique au développement, j'ai décidé à Monterrey la relance de l'effort de la France, dans le cadre de l'engagement européen de Barcelone. Nous augmenterons de moitié notre APD au cours des cinq prochaines années, pour atteindre alors 0,5 % de notre PIB, première étape vers les 0,7 % dans dix ans.
Naturellement, je souhaite que les pays francophones soient les premiers bénéficiaires de cette augmentation, qui prendra plusieurs formes. Je citerai en particulier :
- La poursuite des annulations de dette au profit des pays les plus pauvres. Il est heureux que nous ayons atteint maintenant la phase où les annulations sont effectives.
- Un nouveau régime pour les pays à revenu intermédiaire très endettés. La France proposera que leur dette puisse être partiellement allégée en contrepartie d'efforts de réduction de la pauvreté, en particulier pour l'éducation et la santé, et d'investissements dans les domaines cruciaux du développement durable, tels que l'eau ou l'énergie.
Pour favoriser enfin ces partenariats public/privé indispensables à la réalisation des grandes infrastructures du développement, j'ai décidé, avec Tony BLAIR, le lancement d'une initiative pour faciliter la mobilisation des fonds privés dans les pays pauvres. Elle convaincra les entreprises réticentes à s'engager dans des programmes d'envergure. Cette proposition sera présentée à nos partenaires de l'Union européenne et du G8.
- Naturellement, nous devrons veiller, à Beyrouth, à ce que les budgets de nos opérateurs augmentent.
Pour conclure cette introduction je voudrais vous faire deux propositions.
Au cours des dernières années, nous avons progressé dans l'organisation d'une concertation politique de qualité en vue de la préparation des grands rendez-vous mondiaux. Nos ministres, qui se sont réunis hier, ont d'ailleurs adopté une déclaration commune. Nous pourrions aller plus loin.
Première proposition : à Beyrouth, nous pourrions décider de consacrer le Sommet de Ouagadougou, où nous invite notre ami le Président Blaise Compaoré, au thème du développement durable et à l'application du Plan d'action de Johannesburg.
Deuxième proposition : pour concrétiser cette décision, nous demanderions à l'OIF et ses opérateurs de mettre au point un dispositif facilitant l'accès de nos membres aux financements multilatéraux. Je vous le rappelle : qu'il s'agisse du FED ou de MEDA, les deux-tiers à peine des sommes engagées par l'Union européenne sont consommés. Il en va de même pour les grands fonds mondiaux tels que l'AID ou le Fonds pour l'Environnement. Et les projets francophones ne reçoivent pas assez d'attention de la part du Fonds mondial pour la santé, de l'Alliance pour la vaccination ou de la Facilité spéciale pour l'éducation.
Comme nous sommes en train de le faire pour le NEPAD, nous devons donc mieux nous organiser pour profiter de ces fonds et démontrer à la communauté internationale l'exemplarité francophone.
Je vous remercie et suis heureux d'ouvrir notre débat.|N|N|N|N|Texte Intégral 15218|Monsieur le Président, cher Vaclav HAVEL, chère Dagmar,
Monsieur le Président, il me revient ce soir une belle et redoutable mission : celle de vous dire en notre nom à tous notre admiration profonde et notre gratitude. Oui, un grand merci à vous. A vous et à Dagmar qui nous recevez avec tant de gentillesse. Merci de si bien nous accueillir pour ce Sommet de l'élargissement. Un moment d'histoire où -comme dans quelques semaines à Copenhague- l'Europe se retrouve enfin pour petit à petit ne plus faire qu'une, un moment aussi où l'Europe et l'Amérique du nord affirment leurs valeurs communes et le caractère indivisible de leur sécurité.
Cher Vaclav,
De votre vie si intense, l'histoire retiendra d'abord cette lumière que vous avez entretenue aux heures les plus sombres qu'a traversées votre pays.
La lumière de l'écrivain, la lumière du dramaturge qui, à la force de sa plume, armé de son seul courage et de sa foi en l'homme et en la vérité, a porté l'espérance des opprimés, des interdits de la démocratie. La lumière, souriante, humble, douce mais forte de l'homme de fer, qui, dans la profondeur des geôles, dans l'abîme du totalitarisme, n'a jamais faibli. La vérité vaincra", disiez-vous. Et en effet, elle a vaincu. Nous en témoignons tous ce soir.
Cette lumière, quel autre message nous livre-t-elle ? Que nous disent les années interminables d'engagement et de résistance ? Que nous confiiez-vous depuis vos prisons et qui résonne encore dans les murs de ce Château ?
La force du rêve d'abord. Le rêve, pour donner un sens à l'existence et au mouvement des choses. Le rêve, pour tenir contre vents et marées. Le rêve qui, aimez-vous à dire, donne "à chaque vie sa nécessaire particule de transcendance", qui permet d'aller au-delà des horizons visibles, de tenter de percer le mystère, de chercher le sens de la vie ailleurs que dans la course effrénée aux biens matériels". Cher Vaclav, la leçon vaut pour les hommes et pour les nations.
Le XXe siècle a été celui des totalitarismes. Il a vu deux guerres mondiales, l'Holocauste, cinquante années de peur absolue. En même temps, il nous a laissé en héritage une exigence qu'ont incarnée quelques hommes et quelques femmes. Des rêveurs ? Sans doute.
Des rêveurs, Winston CHURCHILL et le général de GAULLE, qui ne désespérèrent jamais de la victoire finale. Un rêveur, Konrad ADENAUER, qui au plus profond de la nuit nazie ne renonça jamais à son idéal de démocratie. Des rêveurs, les pères de l'Europe, qui, par-dessus les ruines encore fumantes, ont tendu la main à l'adversaire d'hier. Un rêveur, George MARSHALL, qui allait changer le cours de l'histoire de l'Europe et du monde. Un rêveur, GANDHI, qui a mobilisé et emmené les masses humaines au formidable mot d'ordre de la non-violence. Un rêveur, Nelson MANDELA, qui, de son sinistre rocher de Robben Island, a fait plier le racisme et triompher la dignité. Un rêveur, Andreï SAKHAROV, couvert d'honneurs, et qui a renoncé à tout pour mener, au prix de la liberté et finalement de sa vie, le combat des Droits de l'Homme. Je pense aussi à Rigoberta MENCHU, la petite fille des Mayas, à AUNG SAN SUU KYI, si frêle et si forte, et à son combat pour une Birmanie démocratique.
Oui, voilà ce que nous dit aussi le siècle terrible qui s'est achevé, voilà ce que nous disent les hommes qui, comme vous, cher Vaclav HAVEL, n'ont jamais douté ni baissé les bras : ce sont les rêveurs obstinés, les humanistes fous, rebelles à la fatalité, à la force brutale et à l'ordre immuable des choses, qui donnent ses lettres de noblesse à l'histoire.
"HAVEL na Hrad !", criait-on dans les rues de Prague, il y a tout juste treize ans. "HAVEL au Château !". Si vous me permettez cette réflexion personnelle, cher Vaclav, dans le cynisme ambiant, on se plaît à penser que les rêves ne tiennent pas l'épreuve du pouvoir et de la réalité, qu'ils ne résistent pas à l'érosion du temps. Or les treize années où vous avez conduit le destin de votre nation montrent bien que le rêve garde la même force, la même intensité.
Oui, l'on avait ici soif de liberté, de démocratie, d'indépendance, de paix. L'Europe et l'Alliance atlantique incarnaient tout cela. Oui, l'entrée dans l'Alliance et dans l'Union européenne fut ardemment désirée et vécue avec joie et soulagement, parce c'est la page des heures terribles qui se tourne définitivement.
De tout cela, dont vous fûtes l'apôtre et l'artisan, nous souhaitions, cher Vaclav, vous rendre hommage. Saluer aussi l'homme de dialogue et de paix qui, à peine porté au pouvoir, s'est attaché à cicatriser, entre voisins, les plaies du passé. Saluer l'Européen qui a tant obtenu pour son peuple et l'ensemble des pays d'Europe centrale et orientale : la dissolution, ici même, du Pacte de Varsovie, l'adhésion, hier, à l'Alliance atlantique et, demain, l'adhésion à l'Union européenne.
Nous voulons saluer ici l'homme de plume, l'homme de réflexion, l'homme d'Etat, le roi-philosophe selon l'idéal platonicien, avec cette fraîcheur d'esprit, cette lucidité émerveillée, cette inquiétude optimiste et élégante, qui vous confèrent, sans que vous l'ayez jamais recherché, une exceptionnelle autorité, un rayonnement immense. Et lorsque vous apparaissez, tout naturellement, vos paroles atteignent, à un degré rare, cette ampleur, cette profondeur, cette vision que chacun s'accorde à vous reconnaître.
Au moment où vous allez vous retirer, heureux de ce qui fut accompli mais taraudé aussi, je le sais, par un sentiment d'inachevé -ainsi sont les sages-, nous voulions vous dire notre affection. Vous adresser, à Dagmar et à vous-même, nos voeux ardents de bonheur et de santé à l'aube d'une vie nouvelle pleine déjà, je le sais, de mille projets. Et vous remettre, cher Vaclav, au nom de tous les chefs d'Etat et de gouvernement de l'Alliance atlantique et en témoignage de notre attachement, ces deux traités, le Traité de l'Atlantique nord et le Traité d'adhésion de la République tchèque à l'Alliance atlantique ; Traité qui vous doit tant et qui symbolise pour l'avenir la communauté de destin et la volonté de paix des peuples représentés ici.
Monsieur le Président, cher Vaclav, il me revient ce soir cette belle mission, cette redoutable mission que j'évoquais en commençant et je souhaite l'accomplir ici, naturellement au nom de tous, mais aussi avec mon coeur.