Déclarations de M. Hervé de Charette, ministre des affaires étrangères, en réponse à des questions sur la situation en Albanie et le voyage du président Chirac en Amérique latine, à l'Assemblée nationale le 18 mars 1997.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Texte intégral

Je voudrais d'abord vous rassurer : la réforme de l'OTAN ne se fera pas sans la France et l'établissement des relations entre l'Alliance atlantique et la Russie ne se fait pas sans la France. Ne paraissez pas par avance sous-estimer les capacités et la détermination de la diplomatie française dans des affaires aussi importantes que celles qui concernent la sécurité de notre pays.

Maintenant, j'en viens à l'Albanie. Je suis de votre avis, Monsieur le Député : 350 millions d'habitants somme toute assez riches de l'Union européenne peuvent venir en aide à 3 millions d'habitants somme très pauvres d'une petite partie de l'Europe du Sud. Là-dessus, il n'y a pas de doutes. Et d'ailleurs, je suis allé samedi à la réunion des ministres des Affaires étrangères qui se tenait à Apeldoorn en Hollande avec un plan français qui pour l'essentiel a été retenu par les Européens. Ce plan comprend les éléments suivants :
- d'abord apporter l'aide humanitaire dont la population a besoin - ensuite, apporter avec le concours du FMI et de la Banque mondiale, l'aide dont ce pays a besoin pour son redressement économique et financier

- enfin, apporter à ce pays le soutien et le concours dont il a besoin pour reconstituer ses structures administratives et politiques.

Tout cela a été adopté ainsi que, sur ma proposition, le projet de désigner un administrateur général européen qui aura pour mission de conduire cette action. La présidence européenne a envoyé une mission d'évaluation qui reviendra dans les 24 heures et qui mettra sur la table l'ensemble des besoins et des moyens nécessaires. J'ai proposé qu'une force de stabilisation et de sécurisation pourrait être ajoutée à ce plan, de façon à contribuer à la stabilisation du pays.

Mais, Monsieur le Député, en toute sincérité, je dois vous dire qu'il y a deux choses que je ne ferais pas. D'abord, ce n'est pas des troupes européennes qui iront rechercher les armes dans les villes et les villages d'Albanie. Ce sont les forces de sécurité albanaises qui le feront, quitte à ce que nous les aidions à se reconstituer. Sinon il y faudrait des dizaines de milliers de soldats européens et franchement je crois que ce n'est pas le bon ordre des choses. La deuxième chose que je ne ferais pas, c'est de faire payer par le contribuable français l'échec des systèmes d'épargne albanais. Nous sommes prêts à les aider à reconstituer un système économique et financier stable et solide mais je crois qu'il y a des choses que nous n'avons pas à faire. Je dois rappeler que ce pays a reçu 1,5 milliard d'écus en 5 ans d'aide européenne et, comme vous avez pu malheureusement le constater, l'usage qui en a été fait n'était sans doute pas tout à fait à la hauteur des besoins.

Autrement dit, nous n'avons pas à rougir de ce que nous avons fait et nous n'avons pas à penser que nous ne faisons pas assez. L'Europe est décidée à le faire. Elle sera l'amie fraternelle de l'Albanie dès lors que les dirigeants et le peuple albanais sont, comme je le crois aujourd'hui, décidés à reprendre le bon chemin.

(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 10 octobre 2001)