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dans cette cérémonie chaleureuse. Certains pourront ici en témoigner, il n'est pas dans mes habitudes de traiter au pas de charge les manifestations auxquelles on me convie, et moins encore les occasions de retrouvailles amicales.
Je crois pouvoir alléguer, cependant, le succès de la semaine de la Francophonie qui, cette année, a dépassé toutes nos espérances. La contrepartie en est que, depuis hier matin, et pour quelques jours encore, je vais d'événement en événement pour exprimer toute ma gratitude à leurs organisateurs et aux efforts qu'ils ont déployés pour faire du 20 mars une véritable Fête de la Francophonie, à Paris, en province, et dans de très nombreux pays.
Il me semblait en effet important de venir témoigner ici de ma confiance et de mes encouragements à l'AUPELF-UREF et à son directeur général, le recteur Michel Guillou, dont la contribution à la coopération francophone est bien connue. Vous êtes venus ici en voisin, et je voudrais dire à ce propos tous mes remerciements à l'université Paris-Sorbonne, ainsi qu'à Madame le Recteur de l'Académie de Paris, Michèle Gendreau-Massaloux, d'avoir bien voulu accueillir dans ce salon prestigieux cette cérémonie.
Il y a tout lieu de s'en féliciter, je crois : le prix El Fasi mérite ce cadre, car il est l'expression d'un des côtés les plus dynamiques, les plus novateurs de la Francophonie. Nous pouvons tous en être fiers, et ceci pour deux raisons
:
- Tout d'abord, cette récompense intervient dans le domaine de la recherche. Il est bon de rappeler régulièrement -et cette manifestation en est un excellent moyen- que la Francophonie est un espace d'excellence scientifique. Le prix n'est attribué qu'à des candidats reconnus à l'échelle internationale, et qui publient en français.
- En second lieu, les travaux pris en considération ont un lien étroit avec le développement. On retrouve ce lien à la fois dans les matières concernées, qui sont alternativement la médecine tropicale, l'analyse économique rapportée au développement et l'agronomie végétale, et dans les critères retenus pour l'attribution du prix parmi lesquels figurent en bonne place, je crois, les résultats attendus des travaux pour les pays du Sud.
Rien ne pouvait mieux refléter cette dimension essentielle de la Francophonie que constitue la solidarité : une solidarité qui n'est pas seulement un mot d'ordre, mais une volonté quotidienne servie à travers les réseaux, les publications ou les bourses mises en oeuvre par les opérateurs de la francophonie.
Pour beaucoup de francophones, ceux dont le français est la langue maternelle, celui-ci n'a pas besoin de justification. Il est inscrit dans l'héritage familial ou national. Mais il ne faut jamais oublier que notre communauté s'étend bien au-delà de ce premier cercle, à des pays où le français n'est qu'une langue étrangère parmi d'autres, certes privilégiée, d'une manière ou d'une autre, mais en tout cas concurrencée, et parfois devancée. Il est donc indispensable, dans ces conditions, que notre langue manifeste qu'elle n'a rien perdu de son efficacité internationale, qu'elle ouvre des portes, qu'elle donne des perspectives : c'est en particulier vers ce public qu'il faut promouvoir le français comme langue des affaires, comme langue de la science, comme langue de la recherche. Le prix Mohammed El Fasi s'inscrit parfaitement dans cet objectif.
Je me tourne maintenant vers nos deux lauréats. Vous avez été présentés par le président du Haut Conseil de l'AUPELF-UREF et vous avez déjà pu -ou vous pourrez- résumer le sens de vos recherches. Je n'y reviens donc pas.
Je voudrais seulement vous dire ce qui m'a frappé dans le choix du jury. Vous, Monsieur Katerji, vous êtes né à Alep, en Syrie, dans un pays qui ne fait pas partie de la Francophonie institutionnelle, mais où notre langue demeure encore vivace. J'ai pu m'en rendre compte lorsque je me suis rendue très brièvement en Syrie, en 1995, dans le cadre d'une mission de l'Union européenne. C'est cependant en France que vous avez préparé votre thèse et que vous travaillez aujourd'hui, plus précisément à l'Institut national de la recherche agronomique.
La langue française vous a permis de mener à bien vos travaux et de les présenter dans le monde. Vous illustrez ainsi la souplesse des structures de la Francophonie qui, grâce aux organisations non-gouvernementales et aux associations qui jouent en son sein un rôle primordial, permettent à tout francophone, même lorsqu'il n'est pas originaire d'un Etat de notre communauté, de s'y exprimer et de trouver un écho à ses actions et à ses talents. C'est évidemment une direction dans laquelle nous devons persévérer. La Francophonie prend, vous le savez, une dimension de plus en plus politique, mais ceci ne doit aucunement constituer un obstacle pour tous les francophones -et ils sont nombreux- qui ne relèveraient pas d'un des 49 membres.
Monsieur Roose, vous êtes, vous, né en Belgique et c'est dans l'étude des sols que vous vous êtes illustré. Mais j'ai retenu par dessus tout que votre activité de scientifique vous avait conduit dans de très nombreux pays, en Afrique, en Amérique du Sud et au Moyen-Orient, où vous avez pu partager vos connaissances dans les universités et les écoles d'ingénieurs francophones. La langue française, loin de vous confiner dans un espace réduit, vous a ouvert sur un monde de chercheurs et de praticiens dont vous constituez la référence.
A tous les deux, vous reflétez ainsi la réelle modernité de la Francophonie, l'attrait que représente notre langue pour conduire à la connaissance, mais aussi sa capacité à la diffuser.
La communauté scientifique vous sait gré de vos travaux. Permettez-moi de vous remercier, pour ce qui me concerne, de la démonstration que vous apportez que la science et la recherche en français n'ont pas à douter de leur avenir. Je vous en félicite et je vous en remercie.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 10 octobre 2001)