Texte intégral
Dans moins de quinze jours, les samedi 25 et dimanche 26 janvier 2003, le pôle républicain qui s'est constitué à partir du Mouvement des Citoyens et des comités de soutien à ma candidature, tiendra son Congrès à Saint-Pol sur Mer dans le Nord.
Ce Congrès est attendu. 4048 adhérents ont acquitté leur cotisation pour pouvoir participer à ses travaux, surmontant la déception qu'ont créée les élections du printemps. Beaucoup d'autres attendent son résultat pour se déterminer. L'enjeu est simple : y a-t-il place en France pour un courant républicain structuré, disponible pour une refondation républicaine de la gauche, dont il constitue au demeurant la condition, mais affirmant une vocation de rassemblement pour jeter les bases d'une alternative républicaine et citoyenne, dans notre pays d'abord, mais aussi en Europe et dans le monde ?
Pour ma part je n'ai pas signé de motion mais j'incline à penser que l'écho rencontré par ma candidature -plus d'un million et demi de voix le 21 avril- crée un espace pour l'émergence et l'organisation de cette sensibilité républicaine et citoyenne, dont l'expression est essentielle pour donner à notre pays le projet et le cap clairs dont il a besoin.
Même si la fin de la cohabitation peut donner le sentiment d'un pouvoir plus résolu -et on l'a vu cet automne au Conseil de Sécurité de l'ONU- tout indique cependant que la France hésite. Les propos ambigus du Chef de l'Etat, à l'occasion des différentes cérémonies des vux, sur la situation au Moyen-Orient indiquent pour le moins un certain manque de volonté. Tout va dépendre maintenant du rapport de M. Blix au Conseil de Sécurité. Rarement un homme aura eu une telle responsabilité et on peut imaginer les énormes pressions auxquelles il va être soumis. Ne désespérons pas de son courage.
La France, quant à elle, ne peut pas se retrancher, pour définir sa position, derrière le Conseil de Sécurité de l'ONU, où elle dispose d'un siège permanent et du droit de veto. Elle doit parler par elle-même et utiliser son droit de veto si les Etats-Unis devaient présenter une deuxième résolution au Conseil de Sécurité, autorisant la guerre. Elle ne doit pas laisser instrumenter l'ONU qui l'a été constamment depuis novembre 1990 par la volonté des Etats-Unis de mettre la main sur les richesses pétrolières du Moyen-Orient et d'en remodeler la carte. Il importe aujourd'hui que la France fasse connaître les grandes lignes d'une politique alternative non seulement en Irak mais aussi pour trouver une issue de raison au conflit israélo-palestinien. C'est là la responsabilité principale du chef de l'Etat qui, dans l'intérêt même de la France, ne doit pas laisser gaspiller le capital de sympathie que la position prise à l'ONU par notre diplomatie lui a valu. Plus que jamais notre pays a donc besoin de savoir où il va.
I - La politique du gouvernement Raffarin .
Dans l'ordre intérieur, l'arbre ne doit pas cacher la forêt. Sans doute des mesures globalement positives ont été prises en matière de sécurité ou même d'unification des SMIC. Sans doute le retournement de la conjoncture constitue, il faut le dire, un handicap considérable pour l'action du gouvernement. Mais tout cela ne doit pas occulter le fait essentiel : le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin inscrit clairement son action dans une vision néolibérale : allègement des impôts pour les plus favorisés, réduction des services publics, de plus en plus ouverts à la concurrence, privatisation des entreprises publiques, pollution du dossier des retraites par un projet d'ouverture du capital d'EDF, projet bâclé de décentralisation ouvrant la voie à une Europe des régions, d'essence fédérale, complaisance affichée pour les ethnorégionalismes, abaissement de l'Etat devant les indépendantistes corses, et surtout incapacité à desserrer vraiment les contraintes de Maastricht pour organiser la relance de l'économie : la Banque Centrale Européenne tarde à abaisser le loyer de l'argent, laisse s'apprécier le cours de l'euro et se dégrader la compétitivité européenne, tandis que même M. Prodi convient de la " stupidité " du pacte de stabilité budgétaire. Bref, la récession est là et le gouvernement montre son impuissance à concevoir une politique alternative, faute d'oser proposer une remise en cause de l'architecture monétaire et économique arrêtée par le traité de Maastricht.
La Convention présidée par M. Giscard d'Estaing, mitonne une Constitution européenne d'essence fédérale avec extension du vote à la majorité qualifiée. En acceptant ce traité dit " constitutionnel ", véritable monstre juridique, la France, réduite à moins de 10 % des voix, serait marginalisée, comme l'a noté justement Hubert Védrine, sur tous les grands sujets : politique agricole commune, politique extérieure, indépendance de notre dissuasion, exception culturelle, place du français en Europe, etc.
La révision constitutionnelle autorisant les référendums régionaux va elle-même être soustraite au référendum pour être adoptée en catimini par un Congrès réuni à Versailles, contrairement à l'engagement pris par Jacques Chirac dans son discours de Rouen. Quelle dérobade ! Ainsi le gouvernement, conscient de sa faiblesse dans le pays et du caractère artificiel de sa majorité, prétend se maintenir par l'astuce et non par la confiance du Peuple.
II - Pour autant rien ne serait plus erroné que d'attendre du parti socialiste, prisonnier des mêmes postulats libéraux et de la même idéologie inféodée que l'UMP, qu'il propose par lui-même une véritable alternative.
Le parti socialiste n'a pas fait le bilan réel de ce qu'a été la gauche plurielle. Il n'en offre qu'un bilan en trompe-l'oeil : Le reflux du chômage de 1998 à 2001, comme déjà de 1988 à 1990, a reflété pour l'essentiel la courbe ascendante du cycle économique. Le PS s'est en fait rallié depuis longtemps à la mondialisation libérale et à sa logique, se bornant à la décorer de quelques mesures sociétales et sociales ou se voulant telles. Il y a longtemps -depuis 1983- qu'il a tourné le dos au monde du travail pour devenir progressivement un simple parti de gestion, un " parti de système ". Il faut croire le porte-parole du PS, Vincent Peillon, quand celui-ci, au jour de sa démission, déclare que " Le PS n'a ni projet ni vision d'avenir ". François Hollande, en présentant ses voeux aux Corréziens, a d'ailleurs repris la même expression pour expliquer l'échec du 21 avril. On approche enfin de la vérité.
La gauche plurielle avait révélé ses limites bien avant le 21 avril. Le MDC avait fait, en 1997, le pari audacieux de peser sur son orientation pour qu'elle prenne en compte les besoins des couches populaires. Nous n'avons pas eu le rapport de forces suffisant. Pour autant, le MDC a toujours refusé de s'inscrire dans la logique social-libérale, en votant contre le traité d'Amsterdam, contre la loi sur les régulations économiques et contre la loi sur la modernisation sociale. A partir de 1999, il a été de plus en plus clair que le gouvernement s'écartait du projet de refondation républicaine affirmé en juin 1997 : angélisme en matière de sécurité, méconnaissance des aspirations et des besoins des couches populaires, incapacité à réagir devant la multiplication des licenciements boursiers et des plans sociaux, accélération des privatisations, abandon de la politique industrielle au profit de la soi-disant " régulation ", drainage de l'épargne française vers des placements ou des acquisitions hasardeuses à l'étranger, complaisance à l'égard des ethno-régionalismes et retournement de la politique en Corse, etc.
Le PS n'a pas encore été capable aujourd'hui de faire une autocritique d'ensemble de la période 1997-2002. Nous n'avons pas à nous perdre en vains regrets. Il faut laisser le temps faire son uvre et nous préparer pour ce qui nous concerne à une longue marche afin de reconstruire quelque chose de plus exigeant que la gauche plurielle.
III - L'enjeu du Congrès de Saint-Pol sur Mer.
Le Congrès de Saint-Pol sur Mer est un pari sur la démocratie et sur la conscience des enjeux chez nos militants. C'est un Congrès ouvert : trois motions sont soumises aux suffrages des militants : la première " Continuer Vincennes " a pour premier signataire Jean-Yves Autexier, la seconde " Transcender Vincennes " Jean-Christophe Bonté, la troisième " L'Autre Chemin " François Morvan. Je ne suis signataire d'aucune de ces trois motions. Il appartient donc aux militants de trouver eux-mêmes les voies d'une synthèse ambitieuse.
Pour ma part, je ne suis candidat à aucun poste de responsabilité, mais je tiens à dire que deux formulations me paraissent devoir être toutes deux écartées : la première, c'est " ni droite ni gauche ", expression que je n'ai jamais employée et que j'ai même réfutée dans le cours de ma campagne. La seconde c'est " l'ancrage à gauche ". Dans l'état actuel de ce qu'on appelle la gauche, cela ne veut rien dire pour une grande partie de l'électorat populaire. Bien sûr par mon combat historique je suis enraciné à gauche. En me plaçant du point de vue de la République et de ses valeurs, j'ai défini, pendant la campagne présidentielle, sur la plupart des sujets -la mondialisation, les services publics, la revalorisation du travail, des positions- qui, si on se place du point de vue de l'intérêt des couches populaires pour définir la gauche, étaient incomparablement " plus à gauche " que celles du parti socialiste. Nous devons être tout simplement " le parti de l'alternative ".
Je souhaite que la formation qui naîtra ce 26 janvier affirme à la foi sa disponibilité pour une refondation républicaine de la gauche et sa vocation à rassembler largement.
Les trois motions font des réalités de la mondialisation et de nos tâches des analyses identiques ou en tout cas complémentaires. Dès lors que nous sommes d'accord sur le contenu, je souhaite que les militants ne s'obnubilent pas sur la couleur de l'emballage. La question du " positionnement ", largement factice et utilisée par nos adversaires, ne doit pas occulter l'essentiel.
La seule vraie question est celle de la reconquête de l'électorat populaire, déçu à a fois par la droite et par la gauche établies. Celui-ci ne doit pas être laissé en déshérence, à la merci des démagogues et particulièrement de l'extrême droite. Pour entamer cette oeuvre, toute de pédagogie, et maintenir ouvert un recours républicain à la politique du pareil au même, rien ne serait plus contre-productif que de renier ce que nous sommes et ce que nous avons fait.
1. Il est vain de penser que les catégories de gauche et de droite inscrites dans deux siècles d'histoire vont disparaître, à moins de déclarer clos, comme François Furet, le cycle de la Révolution française. Mais tel n'a jamais été et n'est pas notre sentiment.
Qu'ai-je dit à Vincennes ? ceci que je rappelle : " La gauche et la droite continueront d'exister à l'avenir, sous des formes et avec des contenus différents " (page 48 de la brochure). Encore une fois, je n'ai jamais employé l'expression " ni droite ni gauche ". Je l'ai même clairement réfutée dans mon discours du 19 janvier 2002 au CNIT, à la Défense.
2. Mais de la même manière, il serait absurde de penser que nous pouvons réussir à relever la France en nous appuyant seulement sur ce qu'on appelle aujourd'hui " la gauche ", compte tenu de ce qu'elle est devenue depuis vingt ans. Non ! On peut relever la gauche bien sûr, mais à partir de la France. Il faut pour cela s'adresser au peuple tout entier. Dans la même phrase du discours de Vincennes que je citais tout à l'heure, j'ajoutais : " mais il y a une chose qui est au-dessus de la droite, au-dessus de la gauche, c'est la République ! ". Certains critiquent ce concept parce qu'il serait difficile à faire comprendre. Il est vrai que l'intérêt général est toujours exigeant mais ce n'est pas une raison pour renoncer à cette ambition éthique, qui fonde la légitimité de tout ce que nous avons fait ensemble.
Nous devons donc être capables de surmonter le double sectarisme hérité d'une longue histoire : celui d'une certaine droite qui voit dans la gauche une forme d'impiété, une insulte à l'ordre, qu'il soit divin, ou tout simplement naturel, bref un péché ; et de même le sectarisme d'une certaine gauche qui croit discerner automatiquement dans l'attachement à certaines réalités existantes, la marque hideuse de la réaction quand ce n'est pas du fascisme. Il me semble que le point de vue républicain est plus nuancé : il y a des choses qu'il faut changer : lutter résolument contre les injustices ou contre la globalisation financière, maintenir ou développer un secteur hors marché, et puis il y a des choses qui méritent d'être conservées : la nation, l'Ecole, la famille, même si naturellement nous pouvons nous faire de ces institutions des idées différentes ou évolutives.
La citoyenneté ne va pas sans la responsabilité. Or nous savons que toute société est fondée sur l'existence de certaines limites ou de certaines exigences qu'il faut faire respecter. Nous sommes des républicains. Nous ne sommes pas des démagogues.
IV - Forger l'outil de la reconquête.
La bataille est d'abord une bataille d'idées. Notre force est d'abord dans la clarté de nos analyses, dans la claire définition du système que nous combattons, dans la force méconnue de l'idée républicaine. Voilà notre tâche : être collectivement le grand instituteur républicain dont la France a besoin pour affronter l'avenir et se tenir droit. Nous ne pouvons faire l'impasse sur ce travail de fond : Ensemencer l'avenir, tel est le rôle que nous devons nous fixer. Pour cela il faut une idéologie aiguisée, une Ecole de formation de haut niveau formant des cadres capables de " penser mondial " et d'incarner la modernité de l'idée républicaine au XXIème siècle.
Un parti ce sont aussi des axes de mobilisation et des campagnes, qu'il nous appartiendra de définir en vue de créer les conditions d'une alternative citoyenne et républicaine.
Il faudra surtout compter pour nous affirmer avec les courants politiques porteurs dans l'opinion : l'aspiration à la paix, à la démocratie et à la justice, et plus encore l'exigence de citoyenneté.
Nos concitoyens, dans la durée, reconnaîtront en nous leurs défenseurs les plus conséquents.
(Source http://pole-republicain.org, le 16 janvier 2003)
Ce Congrès est attendu. 4048 adhérents ont acquitté leur cotisation pour pouvoir participer à ses travaux, surmontant la déception qu'ont créée les élections du printemps. Beaucoup d'autres attendent son résultat pour se déterminer. L'enjeu est simple : y a-t-il place en France pour un courant républicain structuré, disponible pour une refondation républicaine de la gauche, dont il constitue au demeurant la condition, mais affirmant une vocation de rassemblement pour jeter les bases d'une alternative républicaine et citoyenne, dans notre pays d'abord, mais aussi en Europe et dans le monde ?
Pour ma part je n'ai pas signé de motion mais j'incline à penser que l'écho rencontré par ma candidature -plus d'un million et demi de voix le 21 avril- crée un espace pour l'émergence et l'organisation de cette sensibilité républicaine et citoyenne, dont l'expression est essentielle pour donner à notre pays le projet et le cap clairs dont il a besoin.
Même si la fin de la cohabitation peut donner le sentiment d'un pouvoir plus résolu -et on l'a vu cet automne au Conseil de Sécurité de l'ONU- tout indique cependant que la France hésite. Les propos ambigus du Chef de l'Etat, à l'occasion des différentes cérémonies des vux, sur la situation au Moyen-Orient indiquent pour le moins un certain manque de volonté. Tout va dépendre maintenant du rapport de M. Blix au Conseil de Sécurité. Rarement un homme aura eu une telle responsabilité et on peut imaginer les énormes pressions auxquelles il va être soumis. Ne désespérons pas de son courage.
La France, quant à elle, ne peut pas se retrancher, pour définir sa position, derrière le Conseil de Sécurité de l'ONU, où elle dispose d'un siège permanent et du droit de veto. Elle doit parler par elle-même et utiliser son droit de veto si les Etats-Unis devaient présenter une deuxième résolution au Conseil de Sécurité, autorisant la guerre. Elle ne doit pas laisser instrumenter l'ONU qui l'a été constamment depuis novembre 1990 par la volonté des Etats-Unis de mettre la main sur les richesses pétrolières du Moyen-Orient et d'en remodeler la carte. Il importe aujourd'hui que la France fasse connaître les grandes lignes d'une politique alternative non seulement en Irak mais aussi pour trouver une issue de raison au conflit israélo-palestinien. C'est là la responsabilité principale du chef de l'Etat qui, dans l'intérêt même de la France, ne doit pas laisser gaspiller le capital de sympathie que la position prise à l'ONU par notre diplomatie lui a valu. Plus que jamais notre pays a donc besoin de savoir où il va.
I - La politique du gouvernement Raffarin .
Dans l'ordre intérieur, l'arbre ne doit pas cacher la forêt. Sans doute des mesures globalement positives ont été prises en matière de sécurité ou même d'unification des SMIC. Sans doute le retournement de la conjoncture constitue, il faut le dire, un handicap considérable pour l'action du gouvernement. Mais tout cela ne doit pas occulter le fait essentiel : le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin inscrit clairement son action dans une vision néolibérale : allègement des impôts pour les plus favorisés, réduction des services publics, de plus en plus ouverts à la concurrence, privatisation des entreprises publiques, pollution du dossier des retraites par un projet d'ouverture du capital d'EDF, projet bâclé de décentralisation ouvrant la voie à une Europe des régions, d'essence fédérale, complaisance affichée pour les ethnorégionalismes, abaissement de l'Etat devant les indépendantistes corses, et surtout incapacité à desserrer vraiment les contraintes de Maastricht pour organiser la relance de l'économie : la Banque Centrale Européenne tarde à abaisser le loyer de l'argent, laisse s'apprécier le cours de l'euro et se dégrader la compétitivité européenne, tandis que même M. Prodi convient de la " stupidité " du pacte de stabilité budgétaire. Bref, la récession est là et le gouvernement montre son impuissance à concevoir une politique alternative, faute d'oser proposer une remise en cause de l'architecture monétaire et économique arrêtée par le traité de Maastricht.
La Convention présidée par M. Giscard d'Estaing, mitonne une Constitution européenne d'essence fédérale avec extension du vote à la majorité qualifiée. En acceptant ce traité dit " constitutionnel ", véritable monstre juridique, la France, réduite à moins de 10 % des voix, serait marginalisée, comme l'a noté justement Hubert Védrine, sur tous les grands sujets : politique agricole commune, politique extérieure, indépendance de notre dissuasion, exception culturelle, place du français en Europe, etc.
La révision constitutionnelle autorisant les référendums régionaux va elle-même être soustraite au référendum pour être adoptée en catimini par un Congrès réuni à Versailles, contrairement à l'engagement pris par Jacques Chirac dans son discours de Rouen. Quelle dérobade ! Ainsi le gouvernement, conscient de sa faiblesse dans le pays et du caractère artificiel de sa majorité, prétend se maintenir par l'astuce et non par la confiance du Peuple.
II - Pour autant rien ne serait plus erroné que d'attendre du parti socialiste, prisonnier des mêmes postulats libéraux et de la même idéologie inféodée que l'UMP, qu'il propose par lui-même une véritable alternative.
Le parti socialiste n'a pas fait le bilan réel de ce qu'a été la gauche plurielle. Il n'en offre qu'un bilan en trompe-l'oeil : Le reflux du chômage de 1998 à 2001, comme déjà de 1988 à 1990, a reflété pour l'essentiel la courbe ascendante du cycle économique. Le PS s'est en fait rallié depuis longtemps à la mondialisation libérale et à sa logique, se bornant à la décorer de quelques mesures sociétales et sociales ou se voulant telles. Il y a longtemps -depuis 1983- qu'il a tourné le dos au monde du travail pour devenir progressivement un simple parti de gestion, un " parti de système ". Il faut croire le porte-parole du PS, Vincent Peillon, quand celui-ci, au jour de sa démission, déclare que " Le PS n'a ni projet ni vision d'avenir ". François Hollande, en présentant ses voeux aux Corréziens, a d'ailleurs repris la même expression pour expliquer l'échec du 21 avril. On approche enfin de la vérité.
La gauche plurielle avait révélé ses limites bien avant le 21 avril. Le MDC avait fait, en 1997, le pari audacieux de peser sur son orientation pour qu'elle prenne en compte les besoins des couches populaires. Nous n'avons pas eu le rapport de forces suffisant. Pour autant, le MDC a toujours refusé de s'inscrire dans la logique social-libérale, en votant contre le traité d'Amsterdam, contre la loi sur les régulations économiques et contre la loi sur la modernisation sociale. A partir de 1999, il a été de plus en plus clair que le gouvernement s'écartait du projet de refondation républicaine affirmé en juin 1997 : angélisme en matière de sécurité, méconnaissance des aspirations et des besoins des couches populaires, incapacité à réagir devant la multiplication des licenciements boursiers et des plans sociaux, accélération des privatisations, abandon de la politique industrielle au profit de la soi-disant " régulation ", drainage de l'épargne française vers des placements ou des acquisitions hasardeuses à l'étranger, complaisance à l'égard des ethno-régionalismes et retournement de la politique en Corse, etc.
Le PS n'a pas encore été capable aujourd'hui de faire une autocritique d'ensemble de la période 1997-2002. Nous n'avons pas à nous perdre en vains regrets. Il faut laisser le temps faire son uvre et nous préparer pour ce qui nous concerne à une longue marche afin de reconstruire quelque chose de plus exigeant que la gauche plurielle.
III - L'enjeu du Congrès de Saint-Pol sur Mer.
Le Congrès de Saint-Pol sur Mer est un pari sur la démocratie et sur la conscience des enjeux chez nos militants. C'est un Congrès ouvert : trois motions sont soumises aux suffrages des militants : la première " Continuer Vincennes " a pour premier signataire Jean-Yves Autexier, la seconde " Transcender Vincennes " Jean-Christophe Bonté, la troisième " L'Autre Chemin " François Morvan. Je ne suis signataire d'aucune de ces trois motions. Il appartient donc aux militants de trouver eux-mêmes les voies d'une synthèse ambitieuse.
Pour ma part, je ne suis candidat à aucun poste de responsabilité, mais je tiens à dire que deux formulations me paraissent devoir être toutes deux écartées : la première, c'est " ni droite ni gauche ", expression que je n'ai jamais employée et que j'ai même réfutée dans le cours de ma campagne. La seconde c'est " l'ancrage à gauche ". Dans l'état actuel de ce qu'on appelle la gauche, cela ne veut rien dire pour une grande partie de l'électorat populaire. Bien sûr par mon combat historique je suis enraciné à gauche. En me plaçant du point de vue de la République et de ses valeurs, j'ai défini, pendant la campagne présidentielle, sur la plupart des sujets -la mondialisation, les services publics, la revalorisation du travail, des positions- qui, si on se place du point de vue de l'intérêt des couches populaires pour définir la gauche, étaient incomparablement " plus à gauche " que celles du parti socialiste. Nous devons être tout simplement " le parti de l'alternative ".
Je souhaite que la formation qui naîtra ce 26 janvier affirme à la foi sa disponibilité pour une refondation républicaine de la gauche et sa vocation à rassembler largement.
Les trois motions font des réalités de la mondialisation et de nos tâches des analyses identiques ou en tout cas complémentaires. Dès lors que nous sommes d'accord sur le contenu, je souhaite que les militants ne s'obnubilent pas sur la couleur de l'emballage. La question du " positionnement ", largement factice et utilisée par nos adversaires, ne doit pas occulter l'essentiel.
La seule vraie question est celle de la reconquête de l'électorat populaire, déçu à a fois par la droite et par la gauche établies. Celui-ci ne doit pas être laissé en déshérence, à la merci des démagogues et particulièrement de l'extrême droite. Pour entamer cette oeuvre, toute de pédagogie, et maintenir ouvert un recours républicain à la politique du pareil au même, rien ne serait plus contre-productif que de renier ce que nous sommes et ce que nous avons fait.
1. Il est vain de penser que les catégories de gauche et de droite inscrites dans deux siècles d'histoire vont disparaître, à moins de déclarer clos, comme François Furet, le cycle de la Révolution française. Mais tel n'a jamais été et n'est pas notre sentiment.
Qu'ai-je dit à Vincennes ? ceci que je rappelle : " La gauche et la droite continueront d'exister à l'avenir, sous des formes et avec des contenus différents " (page 48 de la brochure). Encore une fois, je n'ai jamais employé l'expression " ni droite ni gauche ". Je l'ai même clairement réfutée dans mon discours du 19 janvier 2002 au CNIT, à la Défense.
2. Mais de la même manière, il serait absurde de penser que nous pouvons réussir à relever la France en nous appuyant seulement sur ce qu'on appelle aujourd'hui " la gauche ", compte tenu de ce qu'elle est devenue depuis vingt ans. Non ! On peut relever la gauche bien sûr, mais à partir de la France. Il faut pour cela s'adresser au peuple tout entier. Dans la même phrase du discours de Vincennes que je citais tout à l'heure, j'ajoutais : " mais il y a une chose qui est au-dessus de la droite, au-dessus de la gauche, c'est la République ! ". Certains critiquent ce concept parce qu'il serait difficile à faire comprendre. Il est vrai que l'intérêt général est toujours exigeant mais ce n'est pas une raison pour renoncer à cette ambition éthique, qui fonde la légitimité de tout ce que nous avons fait ensemble.
Nous devons donc être capables de surmonter le double sectarisme hérité d'une longue histoire : celui d'une certaine droite qui voit dans la gauche une forme d'impiété, une insulte à l'ordre, qu'il soit divin, ou tout simplement naturel, bref un péché ; et de même le sectarisme d'une certaine gauche qui croit discerner automatiquement dans l'attachement à certaines réalités existantes, la marque hideuse de la réaction quand ce n'est pas du fascisme. Il me semble que le point de vue républicain est plus nuancé : il y a des choses qu'il faut changer : lutter résolument contre les injustices ou contre la globalisation financière, maintenir ou développer un secteur hors marché, et puis il y a des choses qui méritent d'être conservées : la nation, l'Ecole, la famille, même si naturellement nous pouvons nous faire de ces institutions des idées différentes ou évolutives.
La citoyenneté ne va pas sans la responsabilité. Or nous savons que toute société est fondée sur l'existence de certaines limites ou de certaines exigences qu'il faut faire respecter. Nous sommes des républicains. Nous ne sommes pas des démagogues.
IV - Forger l'outil de la reconquête.
La bataille est d'abord une bataille d'idées. Notre force est d'abord dans la clarté de nos analyses, dans la claire définition du système que nous combattons, dans la force méconnue de l'idée républicaine. Voilà notre tâche : être collectivement le grand instituteur républicain dont la France a besoin pour affronter l'avenir et se tenir droit. Nous ne pouvons faire l'impasse sur ce travail de fond : Ensemencer l'avenir, tel est le rôle que nous devons nous fixer. Pour cela il faut une idéologie aiguisée, une Ecole de formation de haut niveau formant des cadres capables de " penser mondial " et d'incarner la modernité de l'idée républicaine au XXIème siècle.
Un parti ce sont aussi des axes de mobilisation et des campagnes, qu'il nous appartiendra de définir en vue de créer les conditions d'une alternative citoyenne et républicaine.
Il faudra surtout compter pour nous affirmer avec les courants politiques porteurs dans l'opinion : l'aspiration à la paix, à la démocratie et à la justice, et plus encore l'exigence de citoyenneté.
Nos concitoyens, dans la durée, reconnaîtront en nous leurs défenseurs les plus conséquents.
(Source http://pole-republicain.org, le 16 janvier 2003)