Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs,
Je tiens tout d'abord à remercier chaleureusement le Japon, et plus particulièrement Son Excellence Monsieur le Ministre de l'Economie et de l'Industrie, pour l'hospitalité si accueillante qu'il nous réserve, dans la fidélité à la tradition de ce grand pays, à l'occasion de ce 8ème Forum sur l'énergie.
Cette troisième session, aussi bien par son objet que par sa méthode, est particulièrement opportune :
D'une part, elle place au coeur même de nos débats, en les associant sur un plan d'égalité, les trois exigences majeures et interactives de la politique énergétique que nos gouvernements respectifs doivent parvenir à concilier, chacun dans son propre pays : la sécurité énergétique, la protection de l'environnement, la croissance économique.
D'autre part, elle est de nature à renforcer une prise de conscience collective, devenue incontournable à l'échelle du monde : si importants que soient les efforts de chaque pays, l'échelon le plus pertinent pour répondre à ces exigences et pour développer le dialogue producteurs-consommateurs, ne peut être que celui de la planète prise dans son ensemble, en raison de l'interdépendance croissante de tous les pays sur les grandes questions qui sont vitales pour eux et pour l'avenir commun de l'humanité.
C'est la raison pour laquelle je forme le voeu au nom de la France, que ce Forum manifeste une volonté commune de notre part : celle de réfléchir dans un esprit de solidarité universelle aux moyens de réduire les disparités, pour que chaque pays puisse, à tout le moins, disposer de l'énergie qui est vitale pour son développement économique, sans crainte de la pénurie et sans dégrader l'environnement qui sera laissé aux générations futures.
***
Conscient de ces grandes interrogations, le nouveau gouvernement que je représente et qui a été constitué à l'issue de la réélection du Président CHIRAC, en mai dernier, a décidé d'engager à la fin de la présente année un grand débat national sur l'énergie. Ceci afin que les citoyens soient associés aux choix essentiels de la politique énergétique à venir. Vous ne serez pas surpris que les trois thèmes principaux qui seront mis sur la table du dialogue soient très proches de ceux de notre Forum : la sécurité d'approvisionnement, l'énergie et le développement durable, l'énergie et la croissance économique.
1 - La sécurité énergétique
Pour sa part, la France a toujours placé la sécurité d'approvisionnement en tête de ses priorités, et elle a investi en conséquence. Elle s'approvisionne aujourd'hui nationalement à hauteur de la moitié des 269 millions de tonnes équivalent pétrole (TEP) qu'elle consomme chaque année.
Ce résultat est principalement lié au fait que la France est devenue le premier producteur européen d'énergie nucléaire et d'énergies renouvelables, hydro-électriques pour l'essentiel. Aujourd'hui, plus de 75% de l'énergie électrique est d'origine nucléaire.
Complémentairement au fort attachement de la France à l'énergie nucléaire, je tiens à dire que la France respecte les autres filières énergétiques, qu'il s'agisse d'énergies fossiles ou d'énergies renouvelables. Nous plaidons même pour un plus grand " oecuménisme " énergétique. Selon nous, les énergies fossiles (pétrole, gaz naturel et charbon) doivent être avant tout utilisées là où elles sont particulièrerement efficaces et quasi-irremplaçables au vu des techniques et des coûts d'aujourd'hui. Cela revient à utiliser d'abord le pétrole pour le transport et la chimie, le gaz naturel pour les usages thermiques industriels ou domestiques et le charbon propre pour la production d'électricité en complément du nucléaire et de l'hydraulique.
2- Energie et développement durable
Entre la production et la consommation, une notion nouvelle s'est imposée au cours des dernières années : celle du développement durable. La France y souscrit.
A l'échelle mondiale, la France est résolument engagée dans la lutte contre l'effet de serre. De nombreux efforts ont déjà été accomplis, puisque la France se situe en 7ème meilleure position des 30 pays de l'OCDE, pour les rejets de carbone dans l'atmosphère, avec seulement une moyenne de 1,7 tonne par habitant. Mais nous entendons ne pas en rester là, et nos plus grandes entreprises ont notamment décidé de s'engager volontairement dans le mécanisme des permis d'émission que prévoit le Protocole.
A cet égard, la France se réjouit de la mise en oeuvre prochaine du Protocole de Kyoto, compte tenu des récentes annonces de ratification.
Naturellement, le développement énergétique durable ne peut et ne doit se concevoir dans une perspective uniquement nationale, pour ne pas dire égoïste. Lors de sommet de Johannesburg, le Président Jacques CHIRAC a fermement souligné l'engagement de la France : elle se mobilisera pour réduire la fracture Nord-Sud, afin d'aider les pays du Sud, et en particulier ceux qui sont les moins avancés, à se développer enfin, et de façon durable. Dans le domaine plus précis de l'énergie, la France entend contribuer pleinement à atteindre l'objectif que la communauté internationale s'est fixé, à savoir de réduire par deux d'ici à 2015, le nombre d'hommes et de femmes qui n'ont pas accès à l'énergie nécessaire aux besoins vitaux. Les partenariats entre les Etats, les ONG et les entreprises privées sont une voie d'efficacité dans laquelle la France s'engagera résolument.
3 - Energie et croissance économique.
Je voudrais clore mon intervention sur le troisième volet, celui du rapport entre énergie et croissance économique.
L'énergie est un déterminant important de la croissance. En France, par exemple, la facture énergétique s'est élevée à 23 milliards d'euros, en 2001, soit 1,6% du PIB. Deux ans plus tôt, en 1999, elle n'était que de 0,9%. Ce quasi doublement de la ponction sur la richesse nationale, est lourd de conséquences sur le développement économique et sur l'emploi.
Le caractère erratique de l'évolution de cette facture est très dommageable pour les agents économiques. La méfiance à l'égard de perspectives sur lesquelles ils n'ont aucune prise, conduit les entreprises et les ménages à différer des décisions sur des projets d'investissement et à réduire leurs charges, en particulier au détriment d'autres biens et services.
Nous devons rechercher ensemble les moyens, qui soient compatibles avec les lois naturelles du marché, de contenir la volatilité excessive des prix de l'énergie, qui n'est bonne pour personne. La France attache donc de l'importance, dans l'intérêt des producteurs autant que dans celui des consommateurs, à des prix stables et raisonnables.
A ce propos, vous ne serez pas surpris que je propose de réfléchir à une diversification croissante des monnaies de facturation des énergies, pour éviter d'ajouter à la volatilité des prix du pétrole, la volatilité des changes. Pour nous, Européens de la zone Euro, l'utilisation de références dans notre monnaie est souhaitable, et serait bénéfique pour tous, afin de ne pas faire dépendre d'une seule monnaie, gérée unilatéralement, la fixation des prix de l'énergie.
Naturellement ces considérations n'épuisent pas le débat. J'en suis consciente. Mais elles expriment la volonté de la France et sa position sur l'imbrication des intérêts, et pour dire plus, sur la solidarité, entre pays producteurs et pays consommateurs, dès lors que l'on regarde l'avenir à moyen ou long terme, ce qui est, par essence, de notre commune responsabilité de ministres.
Je vous remercie.
(Source http://www.minefi.gouv.fr, le 4 octobre 2002)
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs,
Je tiens tout d'abord à remercier chaleureusement le Japon, et plus particulièrement Son Excellence Monsieur le Ministre de l'Economie et de l'Industrie, pour l'hospitalité si accueillante qu'il nous réserve, dans la fidélité à la tradition de ce grand pays, à l'occasion de ce 8ème Forum sur l'énergie.
Cette troisième session, aussi bien par son objet que par sa méthode, est particulièrement opportune :
D'une part, elle place au coeur même de nos débats, en les associant sur un plan d'égalité, les trois exigences majeures et interactives de la politique énergétique que nos gouvernements respectifs doivent parvenir à concilier, chacun dans son propre pays : la sécurité énergétique, la protection de l'environnement, la croissance économique.
D'autre part, elle est de nature à renforcer une prise de conscience collective, devenue incontournable à l'échelle du monde : si importants que soient les efforts de chaque pays, l'échelon le plus pertinent pour répondre à ces exigences et pour développer le dialogue producteurs-consommateurs, ne peut être que celui de la planète prise dans son ensemble, en raison de l'interdépendance croissante de tous les pays sur les grandes questions qui sont vitales pour eux et pour l'avenir commun de l'humanité.
C'est la raison pour laquelle je forme le voeu au nom de la France, que ce Forum manifeste une volonté commune de notre part : celle de réfléchir dans un esprit de solidarité universelle aux moyens de réduire les disparités, pour que chaque pays puisse, à tout le moins, disposer de l'énergie qui est vitale pour son développement économique, sans crainte de la pénurie et sans dégrader l'environnement qui sera laissé aux générations futures.
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Conscient de ces grandes interrogations, le nouveau gouvernement que je représente et qui a été constitué à l'issue de la réélection du Président CHIRAC, en mai dernier, a décidé d'engager à la fin de la présente année un grand débat national sur l'énergie. Ceci afin que les citoyens soient associés aux choix essentiels de la politique énergétique à venir. Vous ne serez pas surpris que les trois thèmes principaux qui seront mis sur la table du dialogue soient très proches de ceux de notre Forum : la sécurité d'approvisionnement, l'énergie et le développement durable, l'énergie et la croissance économique.
1 - La sécurité énergétique
Pour sa part, la France a toujours placé la sécurité d'approvisionnement en tête de ses priorités, et elle a investi en conséquence. Elle s'approvisionne aujourd'hui nationalement à hauteur de la moitié des 269 millions de tonnes équivalent pétrole (TEP) qu'elle consomme chaque année.
Ce résultat est principalement lié au fait que la France est devenue le premier producteur européen d'énergie nucléaire et d'énergies renouvelables, hydro-électriques pour l'essentiel. Aujourd'hui, plus de 75% de l'énergie électrique est d'origine nucléaire.
Complémentairement au fort attachement de la France à l'énergie nucléaire, je tiens à dire que la France respecte les autres filières énergétiques, qu'il s'agisse d'énergies fossiles ou d'énergies renouvelables. Nous plaidons même pour un plus grand " oecuménisme " énergétique. Selon nous, les énergies fossiles (pétrole, gaz naturel et charbon) doivent être avant tout utilisées là où elles sont particulièrerement efficaces et quasi-irremplaçables au vu des techniques et des coûts d'aujourd'hui. Cela revient à utiliser d'abord le pétrole pour le transport et la chimie, le gaz naturel pour les usages thermiques industriels ou domestiques et le charbon propre pour la production d'électricité en complément du nucléaire et de l'hydraulique.
2- Energie et développement durable
Entre la production et la consommation, une notion nouvelle s'est imposée au cours des dernières années : celle du développement durable. La France y souscrit.
A l'échelle mondiale, la France est résolument engagée dans la lutte contre l'effet de serre. De nombreux efforts ont déjà été accomplis, puisque la France se situe en 7ème meilleure position des 30 pays de l'OCDE, pour les rejets de carbone dans l'atmosphère, avec seulement une moyenne de 1,7 tonne par habitant. Mais nous entendons ne pas en rester là, et nos plus grandes entreprises ont notamment décidé de s'engager volontairement dans le mécanisme des permis d'émission que prévoit le Protocole.
A cet égard, la France se réjouit de la mise en oeuvre prochaine du Protocole de Kyoto, compte tenu des récentes annonces de ratification.
Naturellement, le développement énergétique durable ne peut et ne doit se concevoir dans une perspective uniquement nationale, pour ne pas dire égoïste. Lors de sommet de Johannesburg, le Président Jacques CHIRAC a fermement souligné l'engagement de la France : elle se mobilisera pour réduire la fracture Nord-Sud, afin d'aider les pays du Sud, et en particulier ceux qui sont les moins avancés, à se développer enfin, et de façon durable. Dans le domaine plus précis de l'énergie, la France entend contribuer pleinement à atteindre l'objectif que la communauté internationale s'est fixé, à savoir de réduire par deux d'ici à 2015, le nombre d'hommes et de femmes qui n'ont pas accès à l'énergie nécessaire aux besoins vitaux. Les partenariats entre les Etats, les ONG et les entreprises privées sont une voie d'efficacité dans laquelle la France s'engagera résolument.
3 - Energie et croissance économique.
Je voudrais clore mon intervention sur le troisième volet, celui du rapport entre énergie et croissance économique.
L'énergie est un déterminant important de la croissance. En France, par exemple, la facture énergétique s'est élevée à 23 milliards d'euros, en 2001, soit 1,6% du PIB. Deux ans plus tôt, en 1999, elle n'était que de 0,9%. Ce quasi doublement de la ponction sur la richesse nationale, est lourd de conséquences sur le développement économique et sur l'emploi.
Le caractère erratique de l'évolution de cette facture est très dommageable pour les agents économiques. La méfiance à l'égard de perspectives sur lesquelles ils n'ont aucune prise, conduit les entreprises et les ménages à différer des décisions sur des projets d'investissement et à réduire leurs charges, en particulier au détriment d'autres biens et services.
Nous devons rechercher ensemble les moyens, qui soient compatibles avec les lois naturelles du marché, de contenir la volatilité excessive des prix de l'énergie, qui n'est bonne pour personne. La France attache donc de l'importance, dans l'intérêt des producteurs autant que dans celui des consommateurs, à des prix stables et raisonnables.
A ce propos, vous ne serez pas surpris que je propose de réfléchir à une diversification croissante des monnaies de facturation des énergies, pour éviter d'ajouter à la volatilité des prix du pétrole, la volatilité des changes. Pour nous, Européens de la zone Euro, l'utilisation de références dans notre monnaie est souhaitable, et serait bénéfique pour tous, afin de ne pas faire dépendre d'une seule monnaie, gérée unilatéralement, la fixation des prix de l'énergie.
Naturellement ces considérations n'épuisent pas le débat. J'en suis consciente. Mais elles expriment la volonté de la France et sa position sur l'imbrication des intérêts, et pour dire plus, sur la solidarité, entre pays producteurs et pays consommateurs, dès lors que l'on regarde l'avenir à moyen ou long terme, ce qui est, par essence, de notre commune responsabilité de ministres.
Je vous remercie.
(Source http://www.minefi.gouv.fr, le 4 octobre 2002)