Déclaration de M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, sur le coup d'Etat au Pakistan, à l'Assemblée nationale le 20 octobre 1999.

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Circonstance : Coup d'Etat militaire contre le gouvernement de M. Nawaz Sharif au Pakistan le 12 octobre 1999

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Monsieur le Député,

Ce qui s'est passé le 12 octobre est l'aboutissement d'un processus de dégradation continue, dans un pays où la situation économique est très mauvaise, où la situation politique est tout à fait instable ; un pays qui est de plus en plus critiqué par le monde entier à propos, notamment, de sa politique de soutien systématique aux Talibans. Et l'on sait à quel point le régime des Talibans en Afghanistan est proprement répugnant. D'autre part, c'est un régime dans lequel l'armée a toujours occupée une place considérable, même avant ce qui s'est passé le 12 octobre, et c'est elle, manifestement, qui avait engagé le Pakistan dans cette aventure tout à fait risquée et inconsidérée au Cachemire. A la suite de quoi, sous les pressions internationales, le gouvernement avait dû reculer, ce qui a ouvert une phase aiguë de conflits entre le gouvernement et son armée. Le Premier ministre, M. Sharif a essayé de sortir de ce drame en destituant le chef d'Etat-major des armées et c'est celui-ci qui l'a renversé, en quelque sorte pour éviter d'être destitué.
Compte tenu de la situation du Pakistan, de l'environnement - je parle de l'Afghanistan, de l'Inde -, de tout cela, nous ne pouvons naturellement pas avoir de doutes sur l'objectif, il faut faire rétablir les institutions, la démocratie, des élections correctes, comme l'ont été celles qui avaient amenées au pouvoir M. Sharif. La condamnation internationale a été unanime, et les principes qui nous animent sont parfaitement clairs. En ce qui concerne l'impact de telle ou telle mesure et notamment de sanctions, il faut bien mesurer notre action car nous avons une expérience dans ce domaine qui montre que, dans de nombreux cas, nous atteignons le résultat inverse de l'effet recherché à travers ce type d'outil.
En conclusion, les pays occidentaux - les Etats-Unis d'un côté, l'Europe de l'autre, le Commonwealth par ailleurs, et d'autres pays ont suspendu, pour le moment toute aide nouvelle au Pakistan. Ils sont en train d'examiner la situation qui est relativement calme, mais ce n'est pas suffisant, bien sûr, par rapport au rétablissement nécessaire des institutions démocratiques et nous allons nous concerter pour voir quelles sont les mesures que nous allons arrêter dans les prochains jours. Nous voulons peser sur la situation dans le sens que je vous indique, sans porter atteinte à la situation d'une population qui est déjà en mauvaise posture et c'est un des principes généraux qui nous guide lorsqu'il faut recourir à des sanctions et que nous n'avons pas le choix.

(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 22 octobre 1999)